Ìíîãî ìîë÷èò â ìîåé ïàìÿòè íåæíîãî… Äåòñòâî îòêëèêíåòñÿ ãîëîñîì Áðåæíåâà… Ìèã… ìîë÷àëèâûé, òû ìîé, èñòóêàíèùå… Ïðîâîçãëàñèò,- äàðàõèå òàâàðèùùè… Ñòàíåò ñåêóíäîé, ìèíóòîþ, ãîäîì ëè… Ãðîõíåò êóðàíòàìè, âûñòóïèò ïîòîì è… ×åðåç ñàëþòû… Óðà òðîåêðàòíîå… ß ïîêà÷óñÿ äîðîãîé îáðàòíîþ. Ìÿ÷èêîì, ëåíòî÷êîé, êîòèêîì, ï¸ñèêîì… Êàëåéäîñêîïîì çàêðÓæèò êîë¸ñèêî,

Liaisons Interdites

Liaisons Interdites Victory Storm Est-ce qu'un amour qui d?fie la loi de deux familles s?par?es  par une haine ancestrale pourra survivre ? ”Liaisons interdites” est la r?interpr?tation de l'?uvre de Shakespeare ”Rom?o et Juliette”, dans une version au go?t du jour et une touche de suspense suppl?mentaire. Ginevra Rinaldi n'a jamais su ce qu'?tait la libert?. Ayant v?cu dans une prison dor?e, ?touffante et surcharg?e de r?gles ?dict?es par son p?re, elle  est habitu?e ? ob?ir et ? subir la sanction de sa famille pour tout manquement. Lorenzo Orlando a renonc? ? la succession de sa famille afin d'avoir la libert? de faire ce qui lui plaisait, m?me au risque de sa propre vie. Aujourd'hui, toutefois, c'est un homme respect? et il est propri?taire de l'?tablissement le plus prestigieux de Rockart City, le Bridge. D?cid?e ? rompre le carcan pr??tabli, Ginevra p?n?trera dans l'antre du loup. Que lui arrivera-t-il lorsqu'elle sera envo?t?e par  le regard p?n?trant de Lorenzo et d?couvrira qu'elle ne peut plus le fuir ? De combien de temps disposera Ginevra avant de finir dans les filets de Lorenzo ? Victory Storm Liaisons interdites Victory Storm Copyright ©2020 Victory Storm Editeur: Tektime Traducteur (ita --> fr): Jean-Luc Dollat Cover: https://stock.adobe.com | Projet graphique de Victory Storm Le Code de la propri?t? intellectuelle et artistique n’autorisant, aux termes des alin?as 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les « copies ou reproductions strictement r?serv?es ? l’usage priv? du copiste et non destin?es ? une utilisation collective » et, d’autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d’exemple et d’illustration, « toute repr?sentation ou reproduction int?grale, ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite » (alin?a 1er de l’article L. 122-4). Cette repr?sentation ou reproduction, par quelque proc?d? que ce soit, constituerait donc une contrefa?on sanctionn?e par les articles 425 et suivants du Code p?nal. LIAISONS INTERDITES Est-ce qu`un amour qui d?fie la loi de deux familles s?par?es par une haine ancestrale pourra survivre ? ”Liaisons interdites” est la r?interpr?tation de l`?uvre de Shakespeare ”Rom?o et Juliette”, dans une version au go?t du jour et une touche de suspense suppl?mentaire. Ginevra Rinaldi n`a jamais su ce qu`?tait la libert?. Ayant v?cu dans une prison dor?e, ?touffante et surcharg?e de r?gles ?dict?es par son p?re, elle est habitu?e ? ob?ir et ? subir la sanction de sa famille pour tout manquement. Lorenzo Orlando a renonc? ? la succession de sa famille afin d`avoir la libert? de faire ce qui lui plaisait, m?me au risque de sa propre vie. Aujourd`hui, toutefois, c`est un homme respect? et il est propri?taire de l`?tablissement le plus prestgieux de Rockart City, le Bridge. D?cid? ? rompre le carcan pr??tabli, Ginevra p?n?trera dans l`antre du loup. Que lui arrivera-t-il lorsqu`elle sera envo?t?e par le regard p?n?trant de Lorenzo et d?couvrira qu`elle ne peut plus le fuir ? De combien de temps disposera Ginevra avant de finir dans les filets de Lorenzo ? Exergue Deux familles, ?gales en noblesse, Dans la belle V?rone, o? nous pla?ons notre sc?ne, Sont entra?n?es par d'anciennes rancunes ? des rixes nouvelles O? le sang des citoyens souille les mains des citoyens. Des entrailles pr?destin?es de ces deux ennemies A pris naissance, sous des ?toiles contraires, un couple d'amoureux Dont la ruine n?faste et lamentable Doit ensevelir dans leur tombe l'animosit? de leurs parents. Les terribles p?rip?ties de leur fatal amour Et les effets de la rage obstin?e de ces familles, Que peut seule apaiser la mort de leurs enfants, Vont en deux heures ?tre expos?s sur notre sc?ne. Si vous daignez nous ?couter patiemment, Notre z?le s'efforcera de corriger notre insuffisance. ( Extrait de Rom?o et Juliette de William Shakespeare, traduction de Fran?ois-Victor Hugo) Chapitre 1 GINEVRA "Je ne sais pas, Maya. Il vaudrait peut-?tre mieux laisser tomber", murmurai-je en m’effor?ant de ma?triser l'angoisse qui m'envahissait. "Allez, Ginevra, laisse-toi aller pour une fois ! N'en as?tu pas assez de toujours devoir te soumettre aux r?gles de ta famille ? Tu ne me feras pas croire qu'une partie de toi?m?me ne d?sire pas sortir des sentiers battus pour s'amuser comme n’importe quelle fille de ton ?ge !", laissa ?chapper mon amie en r?lant. Bien s?r que je le voulais ! Mais ce n'?tait pas ?vident pour quelqu'un qui, comme moi, avait le sang italien des Rinaldi dans les veines. ?tre la fille d'un boss de la mafia signifiait mener une vie pr?d?termin?e, encadr?e par des r?gles et des limitations ?dict?es par un padre-padrone. Le fait d'?tre la plus jeune ne me donnait pas plus de libert? et toute erreur ou transgression ?tait s?v?rement sanctionn?e. C'?tait la raison pour laquelle j'avais appris assez t?t ? respecter les volont?s familiales. Je m'?tais toujours parfaitement comport?e mais, au cours des derni?res ann?es, depuis que je fr?quentais l'universit?, j'avais commenc? ? souffrir de cette rigidit? typique de mon p?re et de ce perfectionnisme maniacal de ma m?re. J'avais chang? depuis que j'avais ?t? confront?e avec une r?alit? aussi ample que celle de l'universit?, dont les ?tudiants n'?taient pas s?lectionn?s ni ?valu?s selon les m?mes crit?res que l'?cole catholique f?minine o? j'avais ?tudi? jusqu'alors. J'avais appris qu'il existait d'autres styles de vie et que, en l'absence de mon p?re du conseil de facult?, le fait que je f?sse une Rinaldi n'int?ressait absolument personne. Pour la premi?re fois de ma vie je m’?tais permise d'?tre moi?m?me et d'embrasser des id?aux que mon p?re abhorrait. Ces deux derni?res ann?es j'?tais devenue la brebis galeuse de la famille, celle qu'il fallait ?viter ou traiter comme une pauvre d?g?n?r?e ; la v?rit? ?tait que je ne m'?tais jamais sentie vivre pleinement jusqu'alors. Petit ? petit j'avais coup? tous ces liens qui m'ancraient dans la famille ; mais j'?tais encore loin de jouir pleinement de la libert? et de la facult? de faire ce qui me plaisait, comme prendre des d?cisions relatives ? mon avenir sentimental ou professionnel. Jusque l? je m'?tais content?e d'observer Maya, la fille du comptable du patrimoine des Rinaldi et ma seule amie tandis qu'elle transgressait all?grement les r?gles de sa famille, laquelle respectait ? la lettre les lois de mon p?re. J'enviais Maya ? chaque fois qu'elle m'appelait pour me demander de la couvrir pendant qu'elle fr?quentait des amis ? elle, non appr?ci?s par ses parents, ou qu’elle sortait avec un gar?on. J'avais toujours admir? sa cr?nerie vis???vis de sa famille dont elle d?fiait la volont?. Combien de fois aurais?je voulu l'accompagner, mais le poids de mon nom m'en avait toujours emp?ch?e. Cependant Maya avait raison : il ne m'?tait plus possible de continuer ainsi. Je venais de terminer ma premi?re ann?e ? l'universit? sans avoir ?prouv? l'ivresse d'une liaison, de la rencontre secr?te d'un gar?on ou d'une folle soir?e en vadrouille en compagnie de parfaits inconnus. "Ok, allons-y !" m'exclamai?je enthousiaste, la voix encore nimb?e d'appr?hension. "Tout ira bien, tu verras. Je l'ai fait plus d'une centaine de fois et je te garantis que je n'ai jamais eu de probl?me", me rassura Maya. "J'ai tout simplement peur que quelqu'un me reconnaisse et que mon p?re l'apprenne." "J'ai pris toutes les pr?cautions utiles. Regarde un peu", dit?elle en me tendant une perruque aux longs cheveux blonds ondul?s. Comprenant, je bl?mis :"Ce n'est pas vrai ! Tu plaisantes ?" "Ma ch?rie, tu es la fille du propri?taire de la moiti? de Rockart City. Tu ne peux pas sortir sans attirer l'attention." "Personne ne sait plus qui je suis. Cela fait deux ans que mon p?re ne m'inclut plus dans ses interviews et il ne m'invite m?me pas aux c?r?monies d’inauguration. Tout le monde pense qu’il n’a que deux enfants et pas trois. Mes apparitions ? ses c?t?s sont plus qu’?pisodiques depuis que je suis devenue v?g?tarienne et que j’ai commenc? ? parler des droits civiques." Maya gloussa :“Il ne t’a pas encore pardonn?e d’?tre devenue v?g?tarienne ?” “Non. Quand nous mangeons ensemble il fait d?poser un bifteck dans mon assiette que j’?loigne de moi ? chaque fois, ce qui l’?nerve au plus haut point. Maintenant je mange toujours en solitaire dans l’annexe o? j’ai ?t? rel?gu?e”, lui expliquai?je tristement. Il ?tait assez douloureux de se sentir rejet?e en permanence par sa famille. “Trop cool ! L? tu es toute seule et tu peux faire tout ce que tu veux !” “Si seulement c’?tait vrai ! Rappelle?toi qu’il y a des cam?ras de vid?o-surveillance diss?min?es un peu partout dans la maison. Je n’ai pas de vie priv?e et, souvent, je me demande si je r?ussirai jamais ? me d?tacher de la famille et ? vivre pleinement ma vie, trouver un travail et ?pouser l’homme que j’aime...” “C’est impossible tant que tu demeureras ? Rockart City. Une feuille ne peut pas bouger ? l’est de la Safe River sans que ton p?re en soit tenu au courant... Ton unique espoir est de partir loin, tr?s loin d’ici, l? o? ton p?re ne pourra pas parvenir car tu sais parfaitement qu’il ne te laissera jamais agir de ton propre chef. Il mettra tout en ?uvre pour t’emp?cher de travailler pour subvenir ? tes propres besoins, t’emp?chant de couper ce cordon ombilical qui t’encha?ne encore ? lui malgr? tes vingt-trois ans !” “Et ? coup s?r, il ne me laisserait jamais ?pouser qui je veux.” “Oublie tout cela, Ginevra ! Pense simplement ? toutes les relations amoureuses que tu as eues jusqu’? pr?sent.” “Je n’en ai eu qu’une seule, trois jours durant, pendant ma derni?re ann?e de high school.” “Daniel Spencer, n’est-ce pas ?” “Oui. ? peine ai?je pu ?changer un premier baiser avec lui avant d’apprendre que lui et toute sa famille avaient ?t? exil?s de Rockart City pour toujours.” “Tout ?a pour un baiser... Je n’ose m?me pas imaginer ce qui se serait pass? si tu avais couch? avec lui.” Je ris faiblement : “J’aurais atterri dans les oubliettes du ch?teau, comme un prisonnier de guerre”, m?me si j’?tais convaincue que je subirais le m?me sort. Je n’avais pas oubli? le coup de sang de mon p?re ni la gifle dont il m’avait gratifi?e lorsqu’il avait d?couvert le b?guin que j’?prouvais pour le fils de David Spencer, l’individu qui lui avait fait louper une affaire deux ans auparavant. Edoardo Rinaldi avait la rancune tenace. “Bah, cette fois je te promets qu’il n’arrivera rien et ton p?re n’en sera jamais inform?”, me rassura Maya, passant la perruque blonde sur mes cheveux ch?tains qui me descendaient sur les ?paules. Je me regardai dans le miroir. J’eus envie de rire parce que j’?tais m?connaissable avec cet eye-liner noir et ces cheveux qui m’arrivaient ? la taille. De plus, la robe que m’avait faite endosser Maya ?tait ? l’oppos? de mon style bon chic-bon genre habituel. Cette robe rouge sans ?paulettes et cette veste noire aux manches courtes me donnaient une aura de femme cosmopolite, entreprenante et transgressive, tout le contraire de ma personnalit?. Surprise, je m’exclamai : “Est-il possible que ton p?re ne remarque rien de tout ces achats ?” “Mon p?re n’est pas aussi circonspect que le tien mais il pointe toutes les d?penses effectu?es par carte de cr?dit. Quant ? ma m?re, elle passe ma garde-robe en revue une fois par mois si mon p?re se plaint du relev?.” “Ta m?re est comme la mienne. Comment se fait-il qu’on ne te reproche pas tous ces achats ?” “Ma m?re n’est pas au courant de ma double vie. J’ai un accord avec la vendeuse du magasin de fringues : elle me laisse emporter ces v?tements ? la maison pour les essayer pendant vingt?quatre heures ; je les lui ram?ne le lendemain, intacts, lorsque je vais acheter des habits plus conformes aux go?ts de ma m?re”, dit-elle, me d?voilant son stratag?me. Ce faisant elle me montra l’?tiquette encore attach?e ? la robe avant de la cacher dans le d?collet?, sous l’aisselle droite. “Tu es g?niale !” “Je sais mais souviens?toi de prendre bien soin de cette robe car demain je dois la rapporter en parfait ?tat au magasin.” “Promis, jur? !” “Bon, alors allons-y. L’employ?e de maison m’a laiss? les cl?s de la voiture qui sert ? faire les courses et, ainsi accoutr?es, nul ne nous reconna?tra lorsque nous nous dirigerons vers la sortie. Pas m?me le garde du corps qui t’a conduite ici et qui t’attend, gar? ? l’ext?rieur de la grille. “Je l’esp?re, autrement je suis morte.” “Par pr?caution laissons les t?l?phones portables ici pour ?viter que le signal GPS nous fasse pincer ; enfin nous n’emporterons dans nos sacs ? main que de l’argent liquide et le faux document d’identit? que je t’ai procur?. Ce soir, rappelle?toi que je ne m’appelle plus Maya Gerber mais Chelsea Faye ; quant ? toi tu n’es plus Ginevra Rinaldi mais Mia Madison, de Los Angeles.” “Tu as vraiment tout pr?vu, n’est-ce pas ?” Maya pouffa de rire. “Ginevra, apr?s cinq ann?es d’escapades secr?tes, je pourrais m?me m’?vader d’une prison”, dit?elle, ce qui d?tendit l’atmosph?re. Chapitre 2 GINEVRA Mon c?ur battait ? tout rompre. C’?tait la premi?re fois que je faisais quelque chose de dingue et j’?tais morte de trouille. Je suivis Maya en silence, malgr? mes hauts talons. Tout le monde ?tait parti se coucher et la maison ?tait d?serte. Nous sort?mes par la porte de derri?re et nous nous dirige?mes vers la voiture gar?e ? proximit? imm?diate, d’apr?s les ordres donn?s par mon amie. Nous mont?mes ? bord d’une vieille Toyota Corolla et, l’instant d’apr?s, nous d?marrions. Lorsque la voiture franchit la grille d’entr?e je me cachai afin de ne pas me faire remarquer des occupants du v?hicule gar? ? proximit?. C’?tait dans cette voiture qu’on m’avait amen?e ici et elle ne serait pas repartie sans moi. Je d?testais ce contr?le permanent de tous mes faits et gestes mais je ne savais pas comment me lib?rer de cette prison sans barreaux. Le fait d’?tre une Rinaldi ?tait ma croix et je la porterais jusqu’? ma mort. Je commen?ai ? me d?tendre lorsque nous emprunt?mes la voie rapide. Mais ? peine entrevis?je la Safe River que ma respiration s’arr?ta : c’?tait la premi?re fois que je la voyais r?ellement. Aussitot la peur p?n?tra toutes les cellules de mon corps. Je m’agitai nerveusement, voyant que mon amie franchissait le pont qui reliait les quartiers est et ouest de Rockart City : “Maya, o? allons-nous ?” “Nous nous rendons dans un endroit o? ta famille ne viendra jamais nous chercher.” “Es?tu devenue folle ?! Il est interdit aux Rinaldi de s’approcher du fleuve ! Si un membre de la famille Orlando d?couvre ma pr?sence dans cette partie de la ville, il me descend !”, m’?criai-je terroris?e. Je ha?ssais toutes les r?gles et limitations impos?es par mon p?re, sauf une : celle de ne pas traverser le fleuve. Je l’avais accept?e de mon plein gr?, promettant de ne jamais l’enfreindre si je ne souhaitais pas mourir pr?matur?ment. “Je suis parfaitement au courant. C’est la raison pour laquelle nous avons de faux documents d’identit?.” “Ceci ne me rassure pas beaucoup, Maya.” “Chelsea ! Rappelle-toi que je m’appelle Chelsea et toi Mia ! Ne te trompe pas ou nous sommes fichues !” Le voyage se poursuivit, moi enfonc?e dans le si?ge du passager, les battements de c?ur qui me martelaient les tempes, incapable de profiter du panorama de cette partie de la ville que je n’avais jamais vue. “Tout ira bien, tu verras”, me r?p?tait Maya alors que j’?tais pr?te ? m’enfuir ? l’instant?m?me pour revenir sur mes pas en jurant de ne jamais renouveler l’exp?rience. C’est ? peine si je me rendis compte que Maya venait de couper le contact ? proximit? d’une autre voiture gar?e sur le bas?c?t?, avec deux charmants gar?ons ? son bord. “Le conducteur s’appelle Lucky Molan. C’est celui qui m’a tourn? la t?te et dont je t’ai beaucoup parl? ces derniers temps. Je l’ai connu gr?ce au site Privatelessons.com. C’est lui qui me donne des cours particuliers d’?conomie via internet, en cachette de ma m?re qui me prend pour un g?nie. Cela fait deux ans que je me morfonds apr?s lui et ce n’est que maintenant, apr?s avoir d?croch? mon master, qu’il a consenti ? sortir avec moi. Toutefois, lorsqu’il a propos? une sortie en groupe avec son fr?re qui vient de rompre d’avec sa copine, je n’ai pas pu refuser.” “C’est la raison de ma pr?sence ici, pas vrai, pour occuper le petit fr?re pendant que toi tu te la coules douce avec l’amour de ta vie ?” “Je ne dirais pas les choses comme ?a mais... oui c’est vrai. Je t’en prie Gin... Mia, il est vital que tout se passe bien parce que je n’ai pas l’intention de m’arr?ter ? une seule sortie ? quatre.” “Il y quelque chose qui m’?chappe. Sait?il que tu es Maya Gerber ?” “Absolument pas. Tu sais que je ne tiens pas ? d?voiler ma v?ritable identit?. Je ne tiens pas ? ce que l’on sache que je prends des cours particuliers.” “Donc votre relation est bas?e sur le mensonge. Comment crois?tu qu’il soit possible de construire quelque chose de durable en agissant ainsi ?” “Pour l’instant je m’amuse, vu ? J’ai envie de sortir avec Lucky et peut??tre de coucher avec lui. Je n’ai pas dit que je vais l’?pouser !” “Je pense que ton p?re ne le permettrait pas.” “Lucky habite ? l’ouest du fleuve, donc c’est zone interdite. M?me si je ne m’appelle pas Rinaldi, Papa ne veut pas que je fr?quente ces quartiers.” “Si on tient compte de tout ce que ton p?re sait de ma famille et ce qu’il g?re pour elle, je pense que tu es autant en danger que moi par ici.” “C’est possible mais je m’en fiche ! Je suis trop jeune pour penser ? ces choses?l?.” “Ou trop stupide”, murmurai-je, ce ? quoi elle r?pondit par une grimace. En silence, comme si j’avais peur qu’on m’entend?t, je sortis de la voiture et me dirigeai avec Maya en direction des deux gar?ons. Ils ?taient tous les deux blonds aux yeux bleus. De la chaleureuse embrassade que Maya ?changea avec le plus grand et plus mince des deux, je devinai qu’il s’agissait de Lucky. L’autre s’approcha de moi : “Enchant?, je m’appelle Mike”, l’air d?prim? et d’une taille de quelques centim?tres sup?rieure ? la mienne. “Mia”, me pr?sentai-je, m’effor?ant d’?touffer un soupir, de crainte de r?v?ler mon nom v?ritable. Combien aurais?je voulu ?tre aussi souple et d?sinvolte que Maya ! “J’ai r?serv? au Bridge. Sachez que j’ai d? solliciter un ami pour la faveur d’obtenir un pass de cette bo?te. C’est un lieu tr?s exclusif, inapprochable pour nous autres simples mortels”, dit Lucky en rigolant et nous indiquant un ?difice ? quelques pas de nous. “?coutez, je pensais que nous aurions pu nous rendre au Lux... J’y suis d?j? all?e et j’ai bien aim? l’endroit”, intervint Maya dont la pointe d’anxi?t? dans la voix me pr?occupa. Ce n’?tait pas son genre d’avoir peur et la crainte resurgit en moi de plus belle. “Chelsea, l’occasion ne se repr?sentera pas et le pass n’est valable que ce soir. En outre c’est l’occasion d’entendre la fameuse pianiste Folkner”, l’interrompit Lucky. Je regardai Maya et lus une forte ind?cision dans ses yeux sombres, jusqu’? ce qu’elle acquies??t faiblement. “Tout ira bien”, me glissa?t?elle ? l’oreille, saisissant ma main avec trop de force pour qu’elle ne m’effray?t point. Je ne sais pas o? je trouvai le courage de placer un pied devant l’autre pour me diriger vers ce qui me semblait ?tre un nid de vip?res. Ce n’est qu’? deux pas de l’entr?e que, levant les yeux, je lus l’enseigne ; pour la eni?me fois ce soir, je sentis la terre s’affaisser sous mes pas : “ The Bridge. Orlando’s Night”. Comme s’il avait lu dans mes pens?es, Mike m’expliqua que cet ?tablissement appartenait ? la puissante famille italienne des Orlando, les premiers arriv?s ? Rockart City (m?me si certains soutenaient que les Rinaldi fussent les premiers install?s), qui avaient transform? cette vall?e d?sol?e en p?le d’attraction pour les migrants, donnant naissance ? ce qui ?tait l’une des villes historiques les plus prosp?res des ?tats-Unis. Cet ?tablissement avait ?t? la premi?re activit? commerciale au c?ur de Rockart City, ? l’ouest du fleuve. Mike me fournit quelques informations : “Apr?s le d?c?s du grand Giacomo Orlando, la gestion de l’?tablissement est pass?e aux mains de son petit?fils Lorenzo, la brebis galeuse de la famille. Il s’est chamaill? avec tous et a refus? de prendre la succession de son p?re Salvatore. Il a ?chapp? ? l’ire des Orlando parce qu’il ?tait l’a?n?, fils unique et le pr?f?r? de son grand?p?re : sur son lit de mort, ce dernier l’avait pri? de ne pas abandonner la ville et de poursuivre l’activit? de l’?tablissement, pierre angulaire de la famille Orlando. Par amour pour son grand?p?re, Lorenzo a accept? et a transform? cet ?tablissement en lieu le plus exclusif et prestigieux de Rockart City.” “Ce doit ?tre un type g?nial.” “Oui, et il n’a que vingt-neuf ans. Mais ne t’attends pas ? un chevalier dans une brillante armure ; c’est un requin comme tous les Orlando et il ne pardonne pas le moindre ?cart. Un seul faux?pas avec lui et on risque de faire une triste fin. Je me souviens d’une bagarre que deux types avaient d?clench? l’an dernier, bagarre qui avait entra?n? une intervention de la police. Eh bien, depuis ce jour on se demande bien la fin qu’on faite ces deux abrutis. Si la famille Orlando dirige tout le monde et tout ce qui bouge ? l’ouest de Rockart City, au Bridge l’unique loi en vigueur est celle de Lorenzo. Tout ce qui gravite autour de lui est archi?blind? et le rend inaccessible s’il n’y consent pas. La ville ?tait convaincue qu’en renon?ant ? l’h?ritage de la famille, il aurait perdu tout pouvoir ; et malgr? tout Lorenzo a d?montr? qu’il s’en sortait tr?s bien tout seul. Il dispose aujourd’hui d’un pouvoir comparable ? celui de sa famille, chose d’autant plus remarquable qu’il se l’est construit tout seul.” “Bof, le nom de sa famille l’aura aid?.” “? pr?sent, oui. Pas au moment o? il avait coup? les ponts avec sa famille. La moiti? des parents voulait sa t?te lorsqu’il les a envoy?s balader. Son grand?p?re, chef de tous les Orlando, l’aurait prot?g? mais, apr?s son d?c?s, Lorenzo s’est retrouv? tout seul.” “Il doit avoir un sacr? courage pour d?fier aussi ouvertement sa famille”, m’exclamai-je avec une pointe d’envie. Combien aurais?je voulu ?tre comme lui ou avoir un grand?p?re qui me sout?nt. Mais mes grands?parents ?taient tous morts ou retourn?s en Italie. Chapitre 3 GINEVRA Malgr? la tension, je fus p?n?tr?e de l’atmosph?re merveilleuse du Bridge quand je p?n?trai dans l’?tablissement. Ce night?club ?tait tr?s sobre, ?l?gant, raffin? ; les murs ?taient tapiss?s de bleu roi avec des arabesques florales dor?es qui refl?taient la chaude lumi?re issue des lustres en cristal. Les tables ?taient sombres, opaques, ? l’oppos? du plancher constitu? de marbre noir africain aux veines dor?es. La musique qu’interpr?tait la pianiste se r?pandait harmonieusement en ce lieu, m’incitant ? me d?tendre pour profiter pleinement de cette exp?rience inoubliable. Lucky et Mike nous install?rent ? une table entour?e de canap?s et de fauteuils de style r?tro recouverts de cuir noir. Le cadre ?tait un peu sombre mais, gr?ce ? l’?clairage et ? l’accueil qu’on percevait, il ?tait impossible de se sentir mal ? l’aise en ce lieu. Nous ?tions les bienvenus et trait?s avec des ?gards par un personnel affable, pr?t ? accourir au moindre appel, sans jamais ?tre envahissant ni indiscret. “O? m?ne cet escalier ?”, demandai?je ? Mike qui avait pris place ? c?t? de moi. “Je n’ai jamais mis les pieds ici mais on m’a expliqu? qu’au premier ?tage se trouvent des pi?ces priv?es et des chambres pour dormir. Il ne s’agit pas d’un hotel mais Lorenzo Orlando a voulu cr?er une section pour ceux qui auraient besoin de cuver leur vin ou pour d’autres qui seraient venus ici en galante compagnie. Au sous?sol se trouve une grande salle de r?ception et un billard. Je ne sais pas ce qui s’y passe mais certains disent que ces locaux seraient li?s au crime organis? sous l’?gide de la famille Orlando. Enfin au second et dernier ?tage se trouve vraisemblablement le logement du propri?taire.” “De cette fa?on il ne perd pas ses affaires de vue”, notai?je avec suspicion. “C’est un homme qui aime bien tout contr?ler.” “Je l’avais bien compris.” “M?me en ce moment il est pr?sent ici et nous tient tous ? l’?il.” “Depuis son appartement ?” “Non, de cet endroit”, me corrigea?t?il, indiquant d’un geste du menton un espace sur?lev? dans le fond de l’?tablissement. “Ne le regarde pas ! S’il te chope, il lui vient des soup?ons et il nous chasse !”, me reprocha Mike. Mais j’?tais trop curieuse. Je n’avais jamais rencontr? un Orlando de ma vie et j’?tais intrigu?e. Je sondai chacun des individus pr?sents ? cette table en position privil?gi?e, ? laquelle un petit escalier de six marches permettait d’acc?der. Il y avait trois hommes et cinq femmes. L’homme sur la gauche ?tait concentr? sur son portable et ne semblait accorder aucune attention ? la conversation que tenait l’individu ? sa droite lequel gesticulait en racontant quelque chose de dr?le qui faisait rire les femmes pr?sentes. Lequel parmi eux pouvait ?tre Lorenzo Orlando, me demandai?je. Celui qui ?tait concentr? sur son t?l?phone portable peut??tre ? Je d?pla?ai le regard sur la droite et mes yeux affront?rent ceux du troisi?me homme. Profond?ment g?n?e de m’?tre laiss?e surprendre ? le fixer, j’abaissai le regard et me tournai vers mes amis qui ?taient en train de commander une Menabrea. J’en commandai une ?galement, sans trop savoir ? quoi m’attendre. J’?tais encore sous le coup de l’?motion provoqu?e par ces yeux fix?s sur moi. Incapable de me contr?ler et de me concentrer sur la conversation autour de ma table, je dirigeai ? nouveau le regard vers cet homme. Je sursautai en notant qu’il me fixait toujours. J’allais encore d?tourner le regard mais quelque chose en moi me dicta de tenir bon et ne pas montrer mon embarras. De plus je voulais savoir ! C’?tait donc lui le fameux Lorenzo Orlando ? Je soutins son regard que je ne l?chai plus. Malgr? la lumi?re tamis?e je notai la couleur ambr?e de ses yeux. Une couleur pleine, jaune ocre avec des stries cuivr?es. Je n’avais jamais vu des yeux d’une semblable couleur et j’en ?tais souffl?e. Ils avaient quelque chose de magn?tique, de fascinant et de catalytique. C’est lui Lorenzo Orlando ! J’en suis s?re ! Je l’admirai, laissant mon regard se promener sur son visage carr?, sa peau bronz?e et sur la barbe non ras?e qui lui couvrait la m?choire. J’?tais surprise. Je m’attendais ? trouver un homme tir? ? quatre ?pingles, tr?s pos?, attentif ? donner une image parfaite de lui. Et au contraire... L’?bauche de barbe, les cheveux ch?tains en d?sordre, des yeux cern?s... tout ceci donnait plut?t l’impression d’un homme d’exp?rience auquel la vie n’avait pas fait de cadeau, qui avait d? cr?er son espace vital de lui?m?me. J’?tais fascin?e et enchant?e par cette image. Cependant Lorenzo Orlando ?tait tout sauf un homme qui se n?gligeait, un excentrique ou quelqu’un de peu attentif aux d?tails. Les choses paraissaient parfaites dans leur imperfection apparente et son complet sombre en soie faisait pendant ? une chemise noire ouverte ; une aura de pouvoir qui semblait transpirer de tous les pores de sa peau. Il ?tait ouvertement irr?sistible. La fa?on ma?tris?e de se tenir assis, sa mani?re de porter une boisson ? ses l?vres attirantes tout en me regardant, me troublaient et m’attiraient vers lui, telle une phal?ne vers la flamme. Dangereux et charmeur comme le d?mon. C’?tait l’opinion que je m’?tais faite de lui. J’?tais encore en train de le regarder, captiv?e, quand je vis qu’il portait un toast avec sa coupe de Manhattan dans ma direction. Mes joues s’enflamm?rent et son sourire s?ducteur me fit comprendre ? quel point ma g?ne ?tait perceptible. Je sombrai dans la honte et d?tournai aussit?t le regard. Mon trouble ?tait tel que je percevais les battements de c?ur sous ma bo?te cr?nienne. ? la seule pens?e d’avoir failli, ? deux reprises, me faire pincer pour avoir regard? un homme que je n’aurais jamais d? rencontrer, j’eus envie de m’enfuir ? toutes jambes. Ginevra, tu es en train de jouer avec le feu ! Je regardai la table o? un bock de bi?re ?tait pos? devant moi. La marque de la bi?re italienne Menabrea tr?nait sur le verre. Je fis la grimace. Je n’aimais pas la bi?re. ? la fin et dans l’incapacit? de faire quoi que ce soit, je me r?solus ? ?couter Mike qui avait commenc? ? me parler de son ex?petite amie avec laquelle il avait partag? quatre ann?es. Je fis semblant d’y accorder de l’int?r?t pendant un certain temps. Mon esprit, en r?alit?, retournait ? cet individu assis ? quelques m?tres de moi et vers ses yeux dor?s qui m’hypnotisaient. Malheureusement, apr?s un quart d’heure, l’ennui prit le dessus et, sans pouvoir l’?viter, mon regard revint vers Lorenzo Orlando. Je ne pouvais pas croire qu’un homme comme lui p?t faire du mal ? un Rinaldi. M?me si je percevais quelque chose de t?n?breux et un voile d’agressivit?, Lorenzo semblait ?tre une personne qui se ma?trisait et trop d?tendue pour faire du mal ? qui que ce soit. Comme s’il avait senti que je le regardais, il se retourna subitement vers moi. J’eus la souffle coup?e quand je per?us son regard dur et soup?onneux. Effectivement, Lorenzo ?tait un homme dangereux et je me sentis prise au pi?ge ? l’improviste. Je me tournai imm?diatement vers Mike, me promettant de ne plus lever les yeux vers Lorenzo. Chapitre 4 GINEVRA Bien que prestigieuse et de pur malt italien, je trouvais inconvenant de boire une bi?re, f?t-ce une Menabrea, dans un ?tablissement d’une telle classe. D’autant plus que je n’aimais pas la bi?re. Je choisis de passer commande d’un Bellini en me lib?rant de Mike par la m?me occasion, lequel m’abreuvait avec l’expos? minutieux de la rupture d’avec son ex- . Je me levai et me dirigeai vers le bar pour commander ma boisson favorite. Je m’installai sur un escabeau et attendis le barman qui accourut presque aussit?t pour me servir. Aimablement, je demandai : “Un Bellini, s’il vous pla?t.” Imm?diatement le serveur prit une p?che blanche dont il mixa la chair avant de la filtrer au travers d’une passoire ? mailles fines. J’?tais tellement sous le charme de ses gestes fluides et pr?cis et de la musique que jouait la pianiste Folkner ? c?t?, que je ne me rendis pas compte que quelqu’un s’?tait assis ? c?t? de moi. “Bonsoir”, murmura ? l’improviste une voix chaleureuse et profonde ? c?t? de moi, me faisant sursauter. Je me tournai vers la gauche et me retrouvai nez ? nez avec Lorenzo Orlando. En un instant ma gorge se dess?cha et mon c?ur se mit ? battre avec violence dans ma poitrine. Apr?s m’?tre faite surprendre ? trois reprises ? le regarder, j’avais fait mon possible pour distraire mon attention et oublier les dangers au devant desquels j’allais en fr?quentant ce lieu. Heureusement les explications de Mike m’avaient aid?e mais ? pr?sent je me sentais seule, sans d?fense et totalement vuln?rable devant une pr?sence aussi ?l?gante et mena?ante, que proche de moi. Je m’effor?ai de r?pondre ? son salut mais les syllabes me rest?rent coinc?es dans la gorge, me faisant litt?ralement suffoquer. J’avais l’impression de br?ler sous son regard d’ambre, pendant qu’il me regardait avec insistance attendant une r?ponse de ma part. Il ?tait incr?dule et perplexe devant mon silence. J’?tais tellement troubl?e que mon cerveau se mit en panne et je ne me rappelai plus de rien. La seule chose que me hurlait mon esprit ?tait de ne pas me d?couvrir en d?voilant ma v?ritable identit?. Je regardai dans la direction de Maya, pour chercher de l’aide, mais elle embrassait Lucky. Je tournai mon regard vers Lorenzo. Il me fixait toujours et je me sentis traqu?e encore davantage. J’?tais sur le point de m’?chapper et dispara?tre pour toujours lorsque le barman vint ? mon secours en m’apportant le Bellini. En essayant de contenir les tremblements provoqu?s par mon anxi?t?, je saisis le calice. En pivotant sur le tabouret afin de me lever mes genoux fr?l?rent les siens et je retins mon souffle. Je levai les yeux, esp?rant lire indiff?rence ou distraction dans son regard, mais je fus transperc?e par la noirceur de ses pupilles dilat?es. Dans son complet noir il ressemblait ? une panth?re pr?te ? attaquer sa proie. “Excusez?moi”, bredouillai?je, m’?cartant vivement pour rejoindre mon amie. J’allais faire un pas pour m’?loigner de celui qui annihilait mon sang-froid quand je sentis une prise, ? la fois ferme et d?licate, autour de mon bras. Effray?e, je m’arr?tai et vis la main bronz?e de Lorenzo sur ma peau claire. Angoiss?e, je g?mis. Quand un Orlando et un Rinaldi se rencontraient, cela se terminait toujours de la m?me fa?on : par la mort de l’un des deux. ? ce moment?l? je per?us avec certitude que j’?tais celle qui avait la plus faible probabilit? de survie. Je ne pouvais pas voir l’expression de mon visage mais elle dut ?tre suffisamment ?loquente pour que Lorenzo me l?ch?t. “Vous ne pouvez pas rester ici”, murmura?t?il tout pr?s de moi, tandis que sa main allong?e et soign?e s’?loignait de mon bras mince et ?prouv? par cette exp?rience surr?aliste. J’en restai bouche b?e. Comment Lorenzo Orlando avait?il d?couvert que j’appartenais ? la famille Rinaldi ? Je bredouillai : “Je... je...”, incapable de trouver une excuse plausible. “Je ne tol?re pas les freelances et en ce moment je n’ai pas l’intention d’embaucher de nouvelles entra?neuses”, m’avertit?il d’un ton s?v?re, me montrant d’un signe de t?te un groupe de femmes ?l?gantes et sexy qui flirtaient et bavardaient aimablement avec des clients. Entra?neuses ?! Lorenzo m’avait prise pour une call girl ! Regardant ma robe je m’aper?us qu’elle ?tait assez os?e ; mais je n’imaginais pas qu’on p?t me prendre pour une fille aux m?urs l?g?res. En outre je trouvais mesquin et digne d’un esprit ?troit de juger une femme sur ses habits. Relevant le menton et adoptant l’attitude la plus froiss?e et la plus hautaine possible, je m’approchai calmement de l’individu auquel j’aurais voulu flanquer des baffes. “Je ne suis pas une prostitu?e”, dis-je, vex?e, recouvant l’usage de ma voix suite ? la col?re subite qui parcourait mon corps en cet instant. “Elles non plus. Ce ne sont que des entra?neuses. Si elles offrent un suppl?ment de service ce n’est pas mon probl?me. L’essentiel est qu’elles le fassent en dehors d’ici”, r?pliqua?t?il, surpris par le ton fort peu am?ne de ma voix. Je r?pondis aigrement et sur un ton r?solu : “Tr?s bien, je rectifie : je ne suis pas une entra?neuse.” “Les apparences sont parfois trompeuses”, r?pondit?il, d?cid? ? avoir raison. Apparemment je n’?tais pas la seule ? me comporter avec une telle attitude vis???vis du personnel. Int?rieurement je souris : je sentais l’envie de combattre cette bataille et de remporter la victoire. Qui sait d’o? me venait ce courage subit apr?s avoir eu aussi peur... C’?tait peut??tre l’adr?naline qui me tendait comme un ressort. “Je vous en prie. Je vous pardonne. Je peux imaginer que quelqu’un qui vient d’?tre r?cemment lib?r? puisse avoir des moments de trouble et se m?prendre face ? des situations sans ?quivoque.” Il r?p?ta, perplexe : “Lib?r? ?”, avec une pointe de menace dans la voix. Il ?tait clair qu’il faisait un gros effort pour ne pas m’agresser. Je pris mon courage ? deux mains, gr?ce au sang?froid qu’il montrait sans c?der d’un pouce. Je connaissais cette forme d’orgueil et je savais ce qu’elle cachait. “Oui. Admettez?le : cela fait combien de temps que vous ?tes sorti ? Deux jours ? Une semaine ?” “Sorti de quoi ?”, demanda?t?il s?chement, faisant un effort notoire sur lui?m?me, bien que je ne doutais pas qu’il conn?t la r?ponse. “De prison, ?videmment. Je suis capable de reconna?tre quelqu’un qui sort de prison et qui a du mal ? se r?adapter aux r?gles de la vie en soci?t?.” De stupeur il ouvrit bri?vement la bouche : il n’?tait assur?ment pas habitu? ? ce qu’on lui parle ainsi. Mais il ?tait trop pos? pour jeter le masque d’homme parfait qu’il affichait en pr?sence des autres. “Qu’est?ce qui vous fait croire que je viens de sortir de prison ?”, siffla Lorenzo, les yeux r?tr?cis et serrant la m?choire. “Par votre apparence.” “Par mon apparence”, r?p?ta?t?il pos?ment, comme le calme avant la temp?te Je rench?ris : “Oui, bien s?r. Ces cheveux n’ont pas connu les ciseaux du coiffeur ni un peigne depuis belle lurette”, lui montrant sa chevelure savamment d?coiff?e, sans manquer d’?l?gance. “M?me cette ?bauche de barbe vous donne l’air d’avoir v?cu, un pass? dissip?... Sans parler des cernes sous vos yeux qui ne laissent pas pr?sager des nuits calmes ; ce qui est compr?hensible : je suppose qu’il est difficile de partager une cellule avec un ?tranger qui pourrait avoir de mauvaises intentions. Malheureusement il n’existe pas encore de l?gislation relativement aux abus sexuels entre d?tenus, donc vous avez toute ma compr?hension.” “Je crois que j’ai compris”, m’arr?ta?t?il, incapable d’?couter autre chose sortir de ma bouche. “Navr? de vous d?cevoir mais je n’ai jamais les pieds en prison.” “Les apparences sont parfois trompeuses”, m’exclamai?je avec une sourire diabolique et un haussement d’?paules en r?p?tant ses propres paroles. “ Touch?”, murmura?t?il avec un demi?sourire, comprenant mon intention de me venger d’avoir ?t? prise pour une entra?neuse. “Permettez?moi de vous offrir un verre”, offrit?il pour s’excuser alors que je m’appr?tais ? partir. Je le d?visageai et son expression du style ‘ ?a ne s’arr?tera pas l?’ m’alarma. Je le bloquai instantan?ment : “Je n’accepte pas de cadeau de la part d’inconnus”, et d?posai un billet sur le comptoir, amplement suffisant pour couvrir le co?t du Bellini tout en laissant un g?n?reux pourboire au barman. “J’?tais s?r que cela ne serait pas n?cessaire mais... soit, je me pr?sente : Lorenzo Orlando, propri?taire du Bridge”, dit?il me tendant la main. Je regardai cette main tentatrice et mon c?ur se mit ? battre la chamade. L’id?e de le toucher me laissait pr?sager de faire quelque chose d’interdit et punissable de la pire des mani?res. Ginevra, tu joues avec le feu ! Toute mon arrogance de l’instant d’avant m’abandonna, aussi rapidement qu’elle ?tait arriv?e. “Je vous jure que je ne mords pas”, murmura?t?il, notant mon h?sitation ? lui serrer la main. “Mia, o? ?tais?tu fourr?e ?”, intervint Maya, me faisant sursauter. Je ne l’avais pas vue s’approcher et je ne m’attendais pas ? son bras pass? autour de mes ?paules. Je le regardai bri?vement et compris qu’elle accourait ? mon secours. “Mia”, r?p?ta pensivement Lorenzo. “Oui, Mia Madison, et moi je suis Chelsea Faye. Enchant?e. Votre ?tablissement est superbe. F?licitations !”, s’interposa Maya, serrant la main de Lorenzo ? ma place et s’interposant entre nous deux, comme si elle prenait ma d?fense. “Je vous remercie”, lui r?pondit?t?il avec un sourire affect?, destin? ? dissimuler son irritation pour l’interruption. “Est?ce la premi?re fois que vous venez dans mon ?tablissement ?” “Oui. Nous sommes de passage ? Rockart City. Mince ! Il est tard et nous devons rentrer mais j’esp?re pouvoir revenir bient?t”, s’excusa Maya l’air enjou?. Elle ?tait la seule ? para?tre toujours naturelle et contente, m?me quand la situation ?tait tendue. “? bient?t alors”, r?pondit courtoisement Lorenzo, m’adressant un dernier regard avant de s’?loigner. J’esquissai un vague salut de la t?te. “Que diable s’est?il pass? ?”, l?cha Maya lorsque nous f?mes seules. “Rien”, r?pondis?je avec un filet de voix, incapable d’imaginer ce qui aurait pu se produire. “Quand je t’ai vue avec lui j’ai cru que j’allais devenir folle. Je t’ai entra?n?e ici pour que tu t’amuses, pas pour te faire descendre”, me dit?elle en proie ? une vive agitation, prenant le Bellini qu’elle descendit en quelques gorg?es pour calmer son excitation. “Courage, allons?y ! J’ai dit ? Lucky que tu as la permission de minuit et que tu dois ?tre de retour avant deux heures du matin”, et elle m’entra?na par le bras vers la sortie. Un r?ceptionniste surgit devant moi, tendant une carte noire qui portait l’inscription‘ The Bridge. Orlando’s Night’ en lettres dor?es : “Excusez?moi mademoiselle. Monsieur Orlando m’a demand? de vous remettre un pass de notre ?tablissement en cadeau pour s’excuser du quiproquo dont vous avez ?t? la victime. Monsieur Orlando a ses clients ? c?ur et tient ? ce qu’ils soient satisfaits. Ce pass vous offre un acc?s r?serv? et une consommation gratuite pour vous et vos invit?s.” “Ce n’est pas n?cessaire mais remerciez votre patron pour l’attention et dites?lui que j’ai d?j? oubli? notre malentendu”, r?pondis?je courtoisement et rougissant pour cette d?licate attention. Lorenzo Orlando, m’offrirais?tu un pass ou bien un aller simple pour l’enfer si tu savais que je suis la fille du boss Edoardo Rinaldi? “Je vous en prie”, supplia?t?il, surpris de mon refus. Il ne comprenait pas que ramener une telle carte ? la maison signifierait pour moi une probable condamnation ? mort par mon p?re. “Merci pour le pass !”, intervint Lucky, prenant la carte ? ma place. “Tu es folle Mia ? Sais?tu combien co?tent ces pass ?” “Tu veux te brouiller avec la famille Orlando ?”, rench?rit Mike. Je bredouillai, mal ? l’aise : “Non, je...” mais Maya me prit par le bras et m’entra?na vers le parking ? l’ext?rieur de l’?tablissement. “Rentrons ? la maison”, soupira Maya soulag?e, apr?s un rapide salut aux deux gar?ons. Nous mont?mes ? bord de la voiture. ? la travers?e du pont sur la Safe River, ? ma grande surprise, je notai que mon c?ur battait autant la chamade qu’? l’aller. C’?tait comme si, au cours de cette soir?e, quelque chose d’irr?sistible et d’extr?mement puissant m’?tait tomb? dessus. Chapitre 5 GINEVRA Je n’avais pas cess? de penser ? Lorenzo pendant toute la semaine. J’avais lu des livres, visit? des galeries d’art, particip? ? une r?union sur les droits civiques ; peine perdue, tout me semblait insignifiant et d?nu? de toute ?motion. Ce n’?tait qu’en repensant ? Lorenzo, ? ce que je lui avais dit, que je me sentais vivre et aux anges. C’?tait incroyable ! J’avais ?t? tent?e de solliciter Maya pour me ramener de l’autre c?t? du fleuve mais je ne voulais pas lui demander ouvertement. Au fond de moi j’?tais consciente du fait que mon action ?tait erron?e et que le danger encouru ?tait r?el. Mais c’?tait ce qui m’avait motiv?e ces derniers jours. Il suffisait que je ferme les yeux pour r?entendre la voix chaude, profonde et l?g?rement rauque de Lorenzo. Sans parler ?galement de ses cheveux ch?tains d?sordonn?s au milieu desquels me prenait l’envie d’y passer les doigts. Ou sa barbe de quelques jours. Je n’avais jamais touch? un homme, pas m?me mon p?re ni mon fr?re. Une part de moi?m?me aurait voulu lui caresser son visage pour percevoir ce qu’on ressent ? effleurer cette ?corce rugueuse et non ras?e de pr?s. Oh mon Dieu, le toucher... J’en avais le souffle court rien que d’y penser. l’id?e m’excitait et me terrorisait ? la fois. Toucher un Orlando ?tait interdit ! J’avais encore la sensation de la chaleur de sa main sur mon bras. Et j’aurais pay? cher pour ?prouver de nouveau cette sensation. Et ses yeux... Mon Dieu, Ginevra, calme?toi ! “Ginevra, tu veux te blesser ? Peut?on savoir ce qui te passe par la t?te ?”, s’exclama Maya en me tirant de mes pens?es. “? rien”, r?pondis-je pr?cipitamment tout en continuant ? couper les oignons. “Je ne te crois pas.” “J’?tais en train de penser ? quelque chose ? te cuisiner. J’esp?re que les p?tes ? la sauce seitan te plaisent”, r?pondis?je promptement. Je fis revenir l’oignon avec le c?leri et les carottes. “Je le d?couvrirai bient?t mais je te fais confiance. Tu es un vrai cordon bleu m?me si j’estime honteux que tes parents n’aient pas mis de domestique ou une aide quelconque ? ta disposition pour faire ce travail.” “Mon p?re a ?t? tr?s clair : tant que durera mon r?gime v?g?tarien et que j’aurai ces id?es en mati?re de droits civiques, je resterai rel?gu?e dans cette annexe et je devrai me d?brouiller seule. ? pr?sent je suis devenue une femme au foyer mod?le.” “Tu passes aussi l’aspirateur ?”, s’enquit Maya ?c?ur?e. “Oui, je fais la cuisine, le linge, le repassage et mon lit toute seule.” “Mince ! J’en serais bien incapable ! Ils te traitent comme une esclave !” “Ne dis pas de sottises. J’ai acquis mon ind?pendance et je ne fais rien de plus que ce que la majorit? des gens fait au quotidien. Tout le monde ne peut pas se permettre d’avoir du personnel qui le remplace en tout et pour tout, tu sais ?” “Et cette situation te convient ?” “Oui”, murmurai?je abattue. En r?alit? nettoyer ma maison ou cuisiner pour moi ne m’int?ressait pas. Ce qui me faisait le plus mal ?tait l’attitude de ma famille : ils ne voulaient plus de moi, ils n’acceptaient pas ma diff?rence, ils ne d?montraient aucun int?r?t ? mon ?gard. Les rares fois o? je me retrouvais en famille ?taient une souffrance parce qu’ils me coupaient la parole, ne me laissaient pas entamer un sujet de conversation et, pis encore, n?gligeaient de demander au cuistot de pr?parer de la nourriture ? part pour moi. Je me sentais souvent seule et, depuis trois ans, j’?tais exclue et trait?e sans aucun ?gard. Mon d?m?nagement dans cette annexe ?tait l’eni?me tentative pour m’isoler afin d’?viter que je fasse partie de la vie de la famille. M?me ma s?ur Rosa m’?vitait et, depuis son mariage, elle avait cess? de me t?l?phoner. Les relations avec mon fr?re Fernando n’avaient jamais ?t? chaleureuses et je n’avais jamais pu souffrir la distance qu’il avait instaur?e entre nous deux. En tant qu’a?n? il avait dix ans de plus que moi et ?tait l’h?ritier direct de l’empire de Papa ; pour ces raisons il se permettait de tyranniser tout le monde. “?coute, Lucky m’a appel?. Il a ton pass. Apparemment il a essay? de se rendre au Bridge avec ses copains mais on lui a dit que la carte ?tait nominative et qu’il ne pourrait y entrer sans toi. Il m’a demand? si cela nous plairait d’y retourner ce soir avec lui et l’un de ses amis qu’il voudrait te pr?senter. Il m’a montr? sa photo : c’est un joli gar?on ! Peut??tre en sortira?t?il quelque chose pour toi, qu’en dis?tu ?” Je repensai ? Lorenzo. Sans ?tre capable de l’admettre, j’avais follement envie de le revoir. Ma r?ponse laissa Maya abasourdie : “Ok !” “Tu parles s?rieusement ? Disons que ?a me fait plaisir mais j’?tais convaincue que tu ne voulais plus entendre parler du Bridge et des Orlando apr?s ce qui s’?tait pass? l??bas samedi dernier.” “J’ai besoin de changer d’air.” “Autrefois quand tu souhaitais changer d’air, tu me demandais l’autorisation d’aller en montagne dans le cottage de mon grand?p?re. Alors qu’? pr?sent tu me dis que tu veux retourner dans l’antre du loup. J’ai d? te contaminer avec ma manie de faire des choses hors normes.” “Cela se pourrait”, r?pondis?je en souriant, joyeuse. Chapitre 6 LORENZO Je ne pus retenir un petit sourire de satisfaction quand je vis Mia Madison franchir l’entr?e du Bridge. Je savais qu’elle avait refus? mon pass et que seule l’intervention d’un de ses amis l’avait sauv?e. Nul n’?tait assez fou pour offenser un Orlando en refusant son cadeau, m?me si Mia semblait indiff?rente ? mon nom de famille et ? ce qu’il repr?sentait ? Rockart City. Mon sourire s’?panouit lorsque je la vis ?ter sa veste l?g?re en lin blanc pour d?voiler une robe montante bleu clair, m?me si cette derni?re avait une large ?chancrure dans le dos. Son apparence chaste, soulign?e par un l?ger maquillage aux nuances p?les, ?tait une indication claire du fait qu’elle tenait ? ne pas ?tre prise pour une entra?neuse comme la fois derni?re. Pendant un bref instant son regard croisa le mien. Nous nous f?mes un bref signe de t?te en guise de salutation mais ses yeux rest?rent accroch?s aux miens une fraction de seconde de trop pour que je ne comprenne pas qu’elle avait pens? ? moi pendant la semaine qui venait de s’?couler, tout comme moi j’avais pens? ? elle. Il ?tait difficile de m’?ter de la t?te une femme qui m’avait ouvertement trait? de repris de justice et m’avait d?fi? si ouvertement, bien que je lui f?sse peur. Je promenai lentement mon regard sur elle, ? la recherche de cette femme transgressive et sans complexes, mais toute trace semblait en avoir disparu. Elle ?tait simple et tr?s belle. Ses yeux bleus l?g?rement teint?s de violet ressortaient gr?ce ? son fard ? paupi?res lilas et les l?vres charnues ? peine soulign?es d’un rouge ? l?vre rose. Par rapport ? la fois pr?c?dente, elle paraissait plus jeune. Je ne lui donnais gu?re plus de vingt-cinq ans et les mani?res gracieuses et raffin?es avec lesquelles elle se d?pla?ait, s’asseyait et portait le verre de Bellini ? ses l?vres... tout ceci avait quelque chose de sensuel et charmant ? la fois. J’avais compris qu’elle avait fait des ?tudes sup?rieures et n’?tait pas une vulgaire entra?neuse lorsque j’avais parl? avec elle et, ? pr?sent, la voyant dans sa merveilleuse simplicit?, je m’aper?us qu’elle ?tait bien plus que ce qu’elle ne laissait entrevoir. Toutefois sa timidit? et sa r?serve, lorsque le gar?on auquel elle parlait la touchait, me firent comprendre qu’il y avait quelque chose d’?trange en elle : c’?tait comme si le contact physique la d?rangeait... Elle avait ?t? tr?s r?serv?e avec moi mais j’avais lu la peur dans son regard ; alors qu’? pr?sent il s’agissait d’irritation et d’aversion, bien que dissimul?es derri?re des sourires affect?s et des gestes mesur?s, pas assez incisifs cependant pour que le gar?on garde ses mains ? leur place. J’appr?ciai ses efforts pour ma?triser sa nervosit? tout en gardant le masque d’une jeune fille distingu?e, m?me s’il ?tait clair par ailleurs qu’elle aurait voulu gifler son cavalier. Je jouis du spectacle depuis ma position sur?lev?e, me demandant combien de temps il lui faudrait avant de sortir de ses gonds. D’autre part son amie Chelsea semblait ne se rendre compte de rien, tant elle ?tait prise par les ?panchements avec le gar?on avec lequel elle sortait d?j? la semaine derni?re. ? un certain point le cavalier de Mia se mit ? jouer avec ses longs cheveux blonds. Apparemment ce geste la d?rangea au plus haut point car elle se leva d’un coup et, avec une excuse quelconque, se dirigea vers les toilettes. J’allais replonger le nez dans mon verre lorsque je vis le gar?on la suivre. Je connaissais bien ce sourire trop s?r de soi et je me doutais de la suite qu’allaient prendre les ?v?nements. En temps normal j’aurais fait appeler un serveur pour lui demander d’intervenir ; mais cette fois je sentis que mes mains me d?mangeaient et, si je d?couvrais ce que je craignais, je n’aurais pas h?sit? ? boxer le malchanceux. Je me dirigeai nonchalamment vers les toilettes des femmes. Porte close. Je frappai ? la porte et pour toute r?ponse j’entendis un cri, aussit?t ?touff?, et quelque chose qui tombait par terre. Je ne voulais pas provoquer un esclandre ni effrayer les clients ?tant donn? que la r?putation de mon ?tablissement ?tait bas?e sur la discr?tion ; donc j’?vitai d’enfoncer la porte ou de crier qu’on m’ouvr?t. J’appelai aussit?t Jacob, mon second, et me fis apporter les cl?s des toilettes. Je me pr?cipitai dans les toilettes pendant que Jacob refermait la porte derri?re nous. Mia ?tait au sol, une joue rougie, tandis que le gar?on avait la braguette ouverte et ?tait allong? sur elle, lui bloquant les poignets. Je balan?ai ce salaud au loin et me penchai vers Mia. Je lui ?cartai les cheveux du visage mais, ? peine mes doigts eurent?ils effleur? son visage qu’elle sursauta et s’?loigna du contact, terroris?e. Avec surprise je vis une m?che brune ?merger au niveau de sa tempe et je compris que ses blonds cheveux n’?taient qu’une perruque. “Mia, c’est moi, Lorenzo Orlando”, lui dis?je lentement en lui prenant les ?paules secou?es par les sanglots. “Viens, je vais t’aider ? te relever.” Elle fixa longuement ma main, comme s’il s’agissait de quelque chose d’interdit et de dangereux mais, ? la fin, elle accepta mon aide. Avec douceur je l’aidai ? se remettre debout ; ce faisant je m’aper?us qu’elle avait d? se fouler la cheville car elle bo?tait et la sangle de sa chaussure ?tait cass?e. Avant qu’elle ne s’effondr?t ? nouveau je la saisis dans mes bras pour l’emporter. Elle ?tait tellement d?sorient?e et effray?e de ce qui venait d’arriver qu’elle n’opposa aucune r?sistance et se blottit contre ma poitrine en tremblant. Entretemps Jacob s’?tait occup? du type. “Si je te revois dans mon ?tablissement je te brise en mille morceaux”, le mena?ai?je avant que Jacob ne l’expulse. Je sortis des toilettes et notai les regards curieux de certains clients. Seule l’amie de Mia semblait boulevers?e et se pr?cipita vers nous. “Mon Dieu... Que t’est?il arriv? ?” s’?cria?t?elle d?sesp?r?e en voyant le visage ?carlate de Mia. Celle?ci essaya de la rassurer : “Tout va bien” “?a ne va pas. Plus rien ne va... Mince, s’il t’arrive quelque chose, je suis morte !” Cette phrase m’inqui?ta parce que Chelsea semblait r?ellement y croire. J’aurais voulu creuser la question mais Sebastian, mon manager, s’approcha. “Trouve?moi les cl?s d’une chambre. La demoiselle s’est bless?e et a besoin de prendre un peu de repos”, lui demandai?je. “Toutes les chambres sont occup?es”, me dit?il d’un air soucieux. Je conclus, d?cid? : “Alors je l’am?nerai dans mon appartement.” “Non !” s’exclam?rent ? l’unisson Mia et Chelsea. “Ne vous inqui?tez pas. Il n’est pas dans mes habitudes de sauver une femme d’une tentative de viol pour en abuser ensuite. En attendant, Sebastian appelle un m?decin et la police, ainsi la cliente pourra porter plainte. “Non !” s’?cri?rent presque simultan?ment Mia et Chelsea. “Ce n’est pas n?cessaire... Je vais bien et il ne s’est rien pass?. Je crois qu’il vaut mieux tourner la page et oublier cet incident. De plus je ne tiens pas ? cr?er un scandale qui porterait atteinte ? la r?putation des Orlando”, se h?ta d’ajouter Mia, inqui?te. Je pressentais un sac de probl?mes d’apr?s la panique qui je lisais dans les yeux des jeunes femmes. “Entendu, comme il vous plaira”, d?cidai?je en me dirigeant vers le deuxi?me ?tage o? se trouvait mon appartement. Je transportai Mia dans la chambre des invit?s et la d?posai sur le lit. “Merci”, me remercia?t?elle timidement. J’en vins ? ce qui me pr?occupait : “Et maintenant, peux-tu me dire ce qui s’est pass? et ce que t’a fait ce gar?on ?” “J’?tais en train de me rafra?chir lorsqu’il est entr? dans les toilettes. Il a ferm? la porte. Je me suis f?ch?e et il a commenc? par me bousculer. J’ai perdu l’?quilibre ? cause des talons hauts et je suis tomb?e, me foulant la cheville droite. Je pensais qu’il m’aurait aid?e et se serait excus?... ? l’inverse il m’est tomb? dessus et ? commenc? ?... me toucher... ? me dire d’arr?ter de faire la sainte nitouche... j’ai essay? de le frapper mais il s’est d?fendu et m’a gifl?e... Je... Je...” “Et puis ?”, dis?je doucement, essayant de ma?triser la col?re qui m’envahissait. “Il a relev? ma jupe et a ouvert le rabat de ses pantalons... C’est ? ce moment?l? que tu as frapp? ? la porte en lui intimant d’ouvrir. J’ai essay? de crier mais il m’a mis la main sur la bouche. J’ai essay? de me lib?rer, sans y parvenir et, ? la fin, tu es entr?... Merci d’?tre intervenu”, bredouilla Mia, encore sous le choc. Je r?pondis avec d?tachement : “Je n’ai fait que mon devoir. Nul ne peut se permettre de faire certaines choses chez moi ni d’importuner mes clients”, m?me si, en r?alit?, j’?tais furieux au point de vouloir casser la figure ? ce fils de pute. “Lorenzo”, m’appela Sebastian. Sortant de la chambre avec mon manager, je me cong?diai des deux jeunes femmes : “Je vous laisse. Je reviens de suite” “Il y avait ceci dans les toilettes”, me dit Sebastian en me tendant la pochette de Mia. “Fais gaffe, Lorenzo. Je ne leur fais pas confiance.” “Moi non plus. Elles dissimulent quelque chose.” “Tu trouveras peut-?tre la r?ponse ? l’int?rieur”, me sugg?ra?t?il en ouvrant la pochette. Je tournai le dos aux filles afin qu’elle ne me voient pas car la porte ?tait ouverte. Je fouillai dans la pochette dont le contenu me surprit. Dedans se trouvaient ? peine deux cents dollars et la carte d’identit? de Mia Madison. Je scrutai le document. Faux ! J’?changeai un regard avec Sebastian qui acquies?a pour me faire comprendre qu’il constat? la m?me chose. “Quelle femme sort sans son t?l?phone portable ?, demanda?t?il d’un air inquisiteur. “Soit une personne qui ne veut pas ?tre localis?e, soit quelqu’un qui est trop pauvre pour s’en payer un.” “Je pencherais pour la premi?re hypoth?se ?tant donn? que sa robe provient d’un grand magasin.” “Je ne pense pas”, murmurai?je. “Que faisons?nous ?” “Je m’en occupe. Pour le moment appelle le nouveau qui fait la plonge, celui qu’on a embauch? le mois dernier. Il m’avait dit qu’il faisait des ?tudes de kin?sith?rapie. Fais?le monter afin qu’on sache si cette ch?re Mia Madison s’est r?ellement fait mal ou s’il ne s’agit que d’une mise en sc?ne. Et cherche des informations ? son sujet. L? dessus il est ?crit qu’elle vient de Los Angeles. Au moins, voyons si c’est v?ridique.” “J’ai des contacts l??bas.” “Utilise?les et ensuite rends?moi compte de ce que tu auras d?couvert.” “Et que fait?on de l’agresseur ?” Encore furieux, je tranchai : “Trouve qui c’est et puis d?molis?le : qu’il souhaite dispara?tre de la surface de la Terre et tout particuli?rement de Rockart City”. J’aurais fait n’importe quoi pour lui ruiner sa carri?re ou sa vie et seul l’exil le sauverait. “? tes ordres !” En toute h?te Sebastian partit se mettre ? l’?uvre. Je m’appr?tais ? retourner dans la chambre lorsque j’entendis Chelsea se f?cher contre Mia. “L?ve?toi je t’en supplie. Je veux bien te porter jusqu’? la maison si n?cessaire.” “Non. Je te l’ai d?j? expliqu?.” “Tu ne peux pas me faire ?a ! Je... je... Mince, il ne fallait surtout pas qu’une telle chose arrive. Tout est de ma faute !” “Ne dis pas de b?tises.” “Je n’aurais jamais d? te convaincre de m’accompagner.” “Tout va bien, Chelsea”, s’effor?a de l’apaiser son amie. “Cesse de dire que tout va bien !” hurla la jeune femme en pleine crise d’hyst?rie. Avant que les choses ne d?g?n?rent je p?n?trai dans la chambre. ? l’instant les deux femmes se turent. “Comment vas?tu Mia ?” lui demandai?je. “J’ai un peu mal ? la cheville mais ?a va. Je suis encore sous le choc de ce qui s’est pass?”, me r?pondit?t?elle, montrant sa cheville enfl?e. Le plongeur, Randy, arriva heureusement sur ces entrefaites. Je lui pr?sentai Mia qui se laissa manipuler, pendant que son amie prenait une serviette humide dans la salle de bains et la lui passait sur ses joues ?carlates. “Je ne suis pas m?decin et je ne suis qu’en avant?derni?re ann?e de kin?sith?rapie mais la cheville ne semble pas cass?e. Elle devrait d?gonfler avec de la glace et, apr?s deux jours de repos, tout devrait revenir ? la normale. ?videmment il vaudrait mieux faire une radio...” expliqua Randy. “Je suis s?re qu’avec un peu de glace tout va s’arranger pour le mieux”, le rassura Mia. Randy soigna rapidement Mia et je profitai de l’absence de Chelsea, occup?e avec Sebastian qui voulait conna?tre le nom de l’agresseur, pour rester en t?te???t?te avec elle. M’asseyant sur le rebord du lit, je lui demandai gentiment : “Est?ce que ?a va mieux ?” “Oui, merci. Je suis vraiment d?sol?e pour le d?rangement que je vous cr?e”, me r?pondit?elle, revenant ? un certain formalisme. Apparemment le choc ?tait pass? et elle avait retrouv? la ma?trise d’elle?m?me. “Nous pouvons nous tutoyer.” “Ok”, dit Mia sans enthousiasme dans un murmure ? peine perceptible. “Je t’ai rapport? ta pochette”, lui dis?je en posant l’objet sur le lit. “Merci.” “Veux?tu que je pr?vienne ta famille ?” “Non.” “Veux?tu que je te raccompagne chez toi ?” “Ce n’est pas n?cessaire mais si ma pr?sence t’importune, alors je m’en vais tout de suite.” “Tu es mon invit?e et tu peux rester aussi longtemps que tu voudras.” “J’ai simplement besoin de quelques minutes de repos”, murmura Mia, endolorie et ?puis?e, fermant les yeux. “Prends tout ton temps.” Je n’eus pas de r?ponse. Elle venait de s’endormir. Êîíåö îçíàêîìèòåëüíîãî ôðàãìåíòà. Òåêñò ïðåäîñòàâëåí ÎÎÎ «ËèòÐåñ». Ïðî÷èòàéòå ýòó êíèãó öåëèêîì, êóïèâ ïîëíóþ ëåãàëüíóþ âåðñèþ (https://www.litres.ru/pages/biblio_book/?art=63375853&lfrom=688855901) íà ËèòÐåñ. Áåçîïàñíî îïëàòèòü êíèãó ìîæíî áàíêîâñêîé êàðòîé Visa, MasterCard, Maestro, ñî ñ÷åòà ìîáèëüíîãî òåëåôîíà, ñ ïëàòåæíîãî òåðìèíàëà, â ñàëîíå ÌÒÑ èëè Ñâÿçíîé, ÷åðåç PayPal, WebMoney, ßíäåêñ.Äåíüãè, QIWI Êîøåëåê, áîíóñíûìè êàðòàìè èëè äðóãèì óäîáíûì Âàì ñïîñîáîì.
Íàø ëèòåðàòóðíûé æóðíàë Ëó÷øåå ìåñòî äëÿ ðàçìåùåíèÿ ñâîèõ ïðîèçâåäåíèé ìîëîäûìè àâòîðàìè, ïîýòàìè; äëÿ ðåàëèçàöèè ñâîèõ òâîð÷åñêèõ èäåé è äëÿ òîãî, ÷òîáû âàøè ïðîèçâåäåíèÿ ñòàëè ïîïóëÿðíûìè è ÷èòàåìûìè. Åñëè âû, íåèçâåñòíûé ñîâðåìåííûé ïîýò èëè çàèíòåðåñîâàííûé ÷èòàòåëü - Âàñ æä¸ò íàø ëèòåðàòóðíûé æóðíàë.