Íó âîò è òû øàãíóëà â ïóñòîòó,  "ðàçâåðçñòóþ" ïóãàþùóþ áåçäíó. Äûøàòü íåâìî÷ü è æèòü íåâìîãîòó. Èòîã æåñòîê - áîðîòüñÿ áåñïîëåçíî. Ïîñëåäíèé øàã, óäóøüå è èñïóã, Âíåçàïíûé øîê, æåëàíèå âåðíóòüñÿ. Íî âûáîð ñäåëàí - è çàìêíóëñÿ êðóã. Òâîé íîâûé ïóòü - çàñíóòü è íå ïðîñíóòüñÿ. Ëèöî Áîãèíè, ïîëóäåòñêèé âçãëÿ

Chevalier, H?ritier, Prince

Chevalier, H?ritier, Prince Morgan Rice De Couronnes et de Gloire #3 Morgan Rice a imagin? ce qui promet d'?tre une autre s?rie brillante et nous plonge dans une histoire de fantasy avec trolls et dragons, bravoure, honneur, courage, magie et foi en sa propre destin?e. Morgan Rice a de nouveau r?ussi ? produire un solide ensemble de personnages qui nous font les acclamer ? chaque page.. Recommand? pour la biblioth?que permanente de tous les lecteurs qui aiment les histoires de fantasy bien ?crites. Books and Movie Reviews, Roberto Mattos (pour Le R?veil des Dragons) CHEVALIER, H?RITIER, PRINCE est le tome n°3 de la s?rie ? succ?s de fantaisie ?pique de Morgan Rice DE COURONNES ET DE GLOIRE, qui commence par ESCLAVE, GUERRI?RE, REINE (le tome n°1) . Ceres, 17 ans, une belle fille pauvre de Delos, cit? de l'Empire, se retrouve seule en mer, d?rivant vers la mythique ?le Au-Del? du Brouillard et vers la m?re qu'elle n'a jamais rencontr?e. Elle est pr?te ? achever son entra?nement, ? finalement comprendre ses pouvoirs et ? devenir la guerri?re qu'elle ?tait cens?e ?tre. Mais sa m?re sera-t-elle l? pour l'accueillir ? Lui enseignera-t-elle tout ce qu'elle a besoin de savoir ? Et r?v?lera-t-elle la totalit? du secret de l'identit? de Ceres ?A Delos, Thanos, qui croit que Ceres est morte, se retrouve mari? ? Stephania et pris plus profond?ment dans les intrigues d'une cour ? laquelle il ne peut ?chapper et d'une famille qu'il d?teste. Il se retrouve aussi au milieu de la R?volution naissante, dont le point culminant est une attaque audacieuse du Stade. Thanos est celui qui peut arr?ter ou aider cette attaque et il devra choisir de mettre ou non sa propre vie en danger. Alors que le royaume s'effondre, que des ennemis apparaissent de tous c?t?s et que les tentatives de meurtre se multiplient ? la cour, Thanos n'arrive plus ? savoir ? qui il peut faire confiance. Il est pris dans un jeu de pions et de rois, de tra?tres et de reines, et, apr?s tout, ce sera peut-?tre au destin de Ceres de changer la donne. Cependant, apr?s une s?rie de malentendus tragiques, la romance qui semblait pr?destin?e pourrait leur glisser entre les doigts ? tous deux. CHEVALIER, H?RITIER, PRINCE est un conte ?pique qui parle d'amour tragique, de vengeance, de trahison, d'ambition et de destin?e. Rempli de personnages inoubliables et d'action haletante, il nous transporte dans un monde que nous n'oublierons jamais et nous fait ? nouveau aimer l'heroic fantasy. Une fantasy pleine d'action qui saura plaire aux amateurs des romans pr?c?dents de Morgan Rice et aux fans de livres tels que le cycle L'H?ritage par Christopher Paolini.. Les fans de fiction pour jeunes adultes d?voreront ce dernier ouvrage de Rice et en demanderont plus. – The Wanderer, A Literary Journal (pour Le R?veil des Dragons) Le tome n°4 de la s?rie DE COURONNES ET DE GLOIRE sortira bient?t ! CHEVALIER, H?RITIER, PRINCE (DE COURONNES ET DE GLOIRE : TOME N 3) MORGAN RICE Morgan Rice Morgan Rice est l'auteur de best-sellers n°1 de USA Today et l’auteur de la s?rie d’?pop?es fantastiques L’ANNEAU DU SORCIER, comprenant dix-sept tomes; de la s?rie ? succ?s SOUVENIRS D'UNE VAMPIRE, comprenant douze tomes; de la s?rie ? succ?s LA TRILOGIE DES RESCAP?S, thriller post-apocalyptique comprenant trois tomes; de la s?rie de fantaisie ?pique ROIS ET SORCIERS, comprenant six tomes; et de la nouvelle s?rie d’?pop?es fantastiques DE COURONNES ET DE GLOIRE. Les livres de Morgan sont disponibles en format audio et papier et ont ?t? traduits dans plus de 25 langues. Morgan adore recevoir de vos nouvelles, donc, n'h?sitez pas ? visiter www.morganricebooks.com (http://www.morganricebooks.com/) pour vous inscrire sur la liste de distribution, recevoir un livre gratuit, recevoir des cadeaux gratuits, t?l?charger l'appli gratuite, lire les derni?res nouvelles exclusives, vous connecter ? Facebook et ? Twitter, et rester en contact ! S?lection de Critiques pour Morgan Rice « Si vous pensiez qu'il n'y avait plus aucune raison de vivre apr?s la fin de la s?rie de L'ANNEAU DU SORCIER, vous aviez tort. Dans LE R?VEIL DES DRAGONS, Morgan Rice a imagin? ce qui promet d'?tre une autre s?rie brillante et nous plonge dans une histoire de fantasy avec trolls et dragons, bravoure, honneur, courage, magie et foi en sa propre destin?e. Morgan Rice a de nouveau r?ussi ? produire un solide ensemble de personnages qui nous font les acclamer ? chaque page .... Recommand? pour la biblioth?que permanente de tous les lecteurs qui aiment les histoires de fantasy bien ?crites ». --Books and Movie Reviews, Roberto Mattos (pour Le R?veil des Dragons) « Une fantasy pleine d'action qui saura plaire aux amateurs des romans pr?c?dents de Morgan Rice et aux fans de livres tels que le cycle L'H?ritage par Christopher Paolini .... Les fans de fiction pour jeunes adultes d?voreront ce dernier ouvrage de Rice et en demanderont plus. » —The Wanderer, A Literary Journal (pour Le R?veil des Dragons) « Une histoire du genre fantastique entra?nante qui m?le des ?l?ments de myst?re et de complot ? son intrigue. La Qu?te des H?ros raconte la naissance du courage et la r?alisation d’une raison d'?tre qui m?ne ? la croissance, la maturit? et l'excellence.... Pour ceux qui recherchent des aventures fantastiques substantielles, les protagonistes, les dispositifs et l'action constituent un ensemble vigoureux de rencontres qui se concentrent bien sur l'?volution de Thor d'un enfant r?veur ? un jeune adulte confront? ? d'insurmontables d?fis de survie .... Ce n'est que le d?but de ce qui promet d'?tre une s?rie pour jeune adulte ?pique. » —Midwest Book Review (D. Donovan, critique de livres ?lectroniques) « L'ANNEAU DU SORCIER a tous les ingr?dients pour un succ?s instantan? : intrigues, contre-intrigues, myst?res, vaillants chevaliers et des relations en plein ?panouissement pleines de c?urs bris?s, de tromperie et de trahison. Il retiendra votre attention pendant des heures et saura satisfaire tous les ?ges. Recommand? pour la biblioth?que permanente de tous les lecteurs de fantasy. » — Books and Movie Reviews, Roberto Mattos « Dans ce premier livre bourr? d'action de la s?rie de fantasy ?pique L'Anneau du Sorcier (qui contient actuellement 17 tomes), Rice pr?sente aux lecteurs Thorgrin « Thor » McL?od, 14 ans, dont le r?ve est de rejoindre la L?gion d'argent, des chevaliers d'?lite qui servent le roi .... L'?criture de Rice est solide et le pr?ambule intrigant. » — Publishers Weekly Livres par Morgan Rice LA VOIE DE L'ACIER SEULS LES BRAVES (Tome n°1) DE COURONNES ET DE GLOIRE ESCLAVE, GUERRI?RE, REINE (Tome n°1) CANAILLE, PRISONNI?RE, PRINCESSE (Tome n°2) CHEVALIER, H?RITIER, PRINCE (Tome n°3) REBELLE, PION, ROI (Tome n°4) ROIS ET SORCIERS LE R?VEIL DES DRAGONS (Tome n°1) LE R?VEIL DU VAILLANT (Tome n°2) LE POIDS DE L'HONNEUR (Tome n°3) UNE FORGE DE BRAVOURE (Tome n°4) UN ROYAUME D'OMBRES (Tome n°5) LA NUIT DES BRAVES (Tome n°6) L'ANNEAU DU SORCIER LA QU?TE DES H?ROS (Tome n°1) LA MARCHE DES ROIS (Tome n°2) LE DESTIN DES DRAGONS (Tome n°3) UN CRI D'HONNEUR (Tome n°4) UNE PROMESSE DE GLOIRE (Tome n°5) UNE VALEUREUSE CHARGE (Tome n°6) UN RITE D'?P?ES (Tome n°7) UNE CONCESSION D'ARMES (Tome n°8) UN CIEL DE CHARMES (Tome n°9) UNE MER DE BOUCLIERS (Tome n°10) LE R?GNE DE L'ACIER (Tome n°11) UNE TERRE DE FEU (Tome n°12) LE R?GNE DES REINES (Tome n°13) LE SERMENT DES FR?RES (Tome n°14) UN R?VE DE MORTELS (Tome n°15) UNE JOUTE DE CHEVALIERS (Tome n°16) LE DON DE LA BATAILLE (Tome n°17) TRILOGIE DES RESCAP?S AR?NE UN : ESCLAVAGISTES (Tome n°1) AR?NE DEUX (Tome n°2) AR?NE TROIS (Tome n°3) LES VAMPIRES D?CHUS AVANT L'AUBE (Tome n°1) SOUVENIRS D'UNE VAMPIRE TRANSFORM?E (Tome n°1) AIM?E (Tome n°2) TRAHIE (Tome n°3) PR?DESTIN?E (Tome n°4) D?SIR?E (Tome n°5) FIANC?E (Tome n°6) VOU?E (Tome n°7) TROUV?E (Tome n°8) REN?E (Tome n°9) ARDEMMENT D?SIR?E (Tome n°10) SOUMISE AU DESTIN (Tome n°11) OBSESSION (Tome n°12) ?coutez la s?rie L'ANNEAU DU SORCIER en format livre audio ! 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Si vous lisez ce livre sans l'avoir achet?, ou s'il n'a pas ?t? achet? pour votre seule utilisation personnelle, alors, veuillez le renvoyer et acheter votre exemplaire personnel. Merci de respecter le difficile travail de cet auteur. Il s'agit d'une ?uvre de fiction. Les noms, les personnages, les entreprises, les organisations, les lieux, les ?v?nements et les incidents sont le fruit de l'imagination de l'auteur ou sont utilis?s dans un but fictionnel. Toute ressemblance avec des personnes r?elles, vivantes ou mortes, n'est que pure co?ncidence. Image de couverture : Copyright Captblack76, en vertu d'une licence accord?e par Shutterstock.com. SOMMAIRE CHAPITRE PREMIER (#ube762f79-fc98-5a18-a3c7-faa872c798bc) CHAPITRE DEUX (#ue0fe3612-b2bf-56b7-923b-938cebdf52c7) CHAPITRE TROIS (#udef38b50-3a28-50e2-b9ea-07d8f843975d) CHAPITRE QUATRE (#u8b4cf92f-c9bf-5925-b916-c8de2b7d85a1) CHAPITRE CINQ (#ueaafa891-e377-57e2-b6f9-7e0e25c5a034) CHAPITRE SIX (#ua429c96e-0540-5f1f-9cb2-707ead4eb8f2) CHAPITRE SEPT (#u2ee78def-d88c-5817-a89b-e93d418048f5) CHAPITRE HUIT (#litres_trial_promo) CHAPITRE NEUF (#litres_trial_promo) CHAPITRE DIX (#litres_trial_promo) CHAPITRE ONZE (#litres_trial_promo) CHAPITRE DOUZE (#litres_trial_promo) CHAPITRE TREIZE (#litres_trial_promo) CHAPITRE QUATORZE (#litres_trial_promo) CHAPITRE QUINZE (#litres_trial_promo) CHAPITRE SEIZE (#litres_trial_promo) CHAPITRE DIX-SEPT (#litres_trial_promo) CHAPITRE DIX-HUIT (#litres_trial_promo) CHAPITRE DIX-NEUF (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT-ET-UN (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT-DEUX (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT-TROIS (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT-QUATRE (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT-CINQ (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT-SIX (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT-SEPT (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT-HUIT (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT-NEUF (#litres_trial_promo) CHAPITRE PREMIER M?me si tous les nobles de Delos ne l'avaient pas regard? fixement, Thanos se serait senti aussi nerveux qu'un jeune homme le jour de son mariage. Il se tenait ? c?t? de l'autel qui avait ?t? install? dans la salle de banquet la plus vaste du ch?teau et, d'une fa?on ou d'une autre, il arrivait ? se tenir parfaitement immobile, mais seulement parce que son entra?nement de soldat lui permettait de ne montrer aucune peur. Alors qu'il se tenait devant tous ces gens, il sentait son estomac se nouer sous la pression exerc?e par leur pr?sence. Thanos regardait autour de lui en attendant sa fianc?e. La salle de banquet d?bordait de soie blanche et ?tincelait de diamants : on aurait eu peine ? trouver une surface qui ne scintille pas. M?me les domestiques qui servaient les nobles portaient des v?tements qui auraient fait honte ? la plupart des marchands. En ce qui concernait les nobles eux-m?mes, ils ?taient aujourd'hui v?tus de soie et de velours, d?goulinaient d'or et d'argent et semblaient sortir du conte d'un barde. Thanos trouvait que c'?tait vraiment excessif, mais on ne lui avait pas vraiment demand? son avis. Les membres de la famille royale de Delos avaient eu droit ? la c?r?monie de mariage que le roi et la reine avaient d?cid? qu'ils devaient avoir et sa fianc?e aurait ?t? d??ue par la moindre imperfection. Il jeta un coup d'?il aux alentours et les vit : le Roi Claudius et la Reine Athena, assis ensemble sur des tr?nes sculpt?s en bois de fer et couverts de feuille d'or. Fi?rement assis, ils ?taient visiblement ravis que Thanos ait d?cid? d'accepter la fianc?e qu'ils avaient choisie pour lui. Le grand pr?tre, richement v?tu d'une robe dor?e qui refl?tait les rayons du soleil, se tenait ? c?t? de lui. Il semblait ?tre un homme affable et Thanos, qui se sentait plus seul que jamais, voulait lui parler en apart? et lui demander : Que faites-vous quand vous ne trouvez votre place nulle part ? Mais il ne pouvait pas faire ?a. Thanos n'?tait pas seulement angoiss? par le mariage. Il y avait aussi beaucoup d'autres choses. Il y avait le fait que, sur l'?le d'Haylon, les rebelles comptaient sur son aide pour lib?rer l'Empire. Cette pens?e renfor?a brusquement sa d?termination car il comptait absolument les aider quoi qu'il lui en co?te, et pourtant, il se tenait l?, dans cette salle, entour? par l'ennemi. Il y avait aussi le fait que Lucious ?tait pr?sent. Debout dans le coin, v?tu de pourpre royal et d'argent, il reluquait les serveuses en souriant d'un air satisfait. Thanos ?tait oblig? de se retenir d'aller le retrouver l? o? il ?tait et de l'?trangler de ses mains. Enfin, il y avait cette pens?e qui l'obs?dait : Ceres. Cette pens?e lui infligea une douleur subite qui lui donna l'impression, m?me maintenant, qu'elle allait lui crever la poitrine. Il avait encore peine ? croire qu'elle ait p?ri corps et biens sur un navire-prison pendant qu'il ?tait ? Haylon. Cette simple pens?e mena?ait de le ramener vers les t?n?bres qui l'avaient englouti quand il avait appris la nouvelle. Stephania l'avait tir? de cette d?pression. Elle avait ?t? le seul point lumineux dans cette nuit, la seule personne de Delos qui avait su lui apporter du bonheur alors qu'il voulait mettre fin ? sa vie, alors qu'il ne pouvait imaginer de vie sans Ceres. Ce n'?tait pas qu'il n'aimait pas Stephania : il l'aimait. Il avait appris ? l'aimer. Le probl?me ?tait plut?t qu'il ne pouvait pas se forcer ? oublier Ceres. C'?tait comme si les deux amours coexistaient encore dans son c?ur. Il ne comprenait pas tout ?a. Pourquoi avait-il fallu que Ceres n'entre dans sa vie que pour la quitter ? Pourquoi avait-il fallu que Stephania entre dans sa vie au moment o? elle l'avait fait ? Est-ce que Ceres ?tait, d'une fa?on ou d'une autre, venue ? lui pour le pr?parer ? accepter Stephania ? Ou est-ce que ces deux choses n'avaient aucun rapport l'une avec l'autre ? La musique commen?a. Thanos se tourna et son c?ur battit plus vite quand il vit Stephania arriver accompagn?e par la m?lodie de la lyre. Son c?ur battit encore plus vite quand tous les nobles se lev?rent pour l'accueillir et qu'elle avan?a accompagn?e par ses servantes qui jetaient des p?tales de rose et faisaient r?sonner des clochettes pour chasser toute la malchance qui aurait pu s'attarder en ces lieux. Sa robe ?tait d'un blanc pur et ?l?gant qui donnait l'impression que la salle enti?re avait ?t? con?ue pour l'accueillir. Elle portait une coiffe incrust?e de diamants sur ses cheveux dor?s, dans lesquels des fleurs avaient ?t? tress?es avec une gr?ce raffin?e. Le voile qui lui couvrait le visage chatoyait gr?ce aux fils d'argent et aux minuscules saphirs qui refl?taient la couleur de ses yeux. Thanos sentit ses peurs s'?vanouir. Il la regarda approcher, traverser la salle et avancer vers l'autel comme en glissant. Elle arriva devant lui et Thanos souleva le voile qui lui cachait les traits. Il eut le souffle coup?. Elle ?tait toujours charmante mais, aujourd'hui, elle avait l'air si parfaite que Thanos avait peine ? croire qu'elle existait vraiment. Il resta si longtemps ? l'observer qu'il entendit tout juste le pr?tre commencer la c?r?monie. “Les dieux nous ont donn? de nombreuses f?tes et c?r?monies qui nous ont permis de m?diter sur leur gloire”, psalmodia le grand pr?tre. “De ces c?r?monies, le mariage est le plus sacr?, car sans lui l'humanit? toucherait ? sa fin. Ce mariage-ci est particuli?rement glorieux car il unit deux des grands nobles de ce royaume. Pourtant, c'est aussi l'union d'un jeune homme et d'une jeune femme qui s'aiment d'amour tendre et dont le bonheur devrait trouver sa place dans tous nos c?urs.” Il s'interrompit pour que son public ait le temps de m?diter ses paroles. “Prince Thanos, voulez-vous avancer le bras pour ?tre ?ternellement uni ? cette femme ? Pour l'aimer et l'honorer jusqu'? ce que les dieux vous s?parent l'un de l'autre et pour que vos familles soient unies ?” Avant, il avait h?sit? mais, ? pr?sent, il n'h?sita plus. Il tendit le bras vers le grand pr?tre, la paume vers le haut. “Oui.” “Et vous, Dame Stephania”, poursuivit le grand pr?tre, “voulez-vous avancer le bras pour ?tre ?ternellement unie ? cet homme ? Pour l'aimer et l'honorer jusqu'? ce que les dieux vous s?parent l'un de l'autre et pour que vos familles soient unies ?” Le sourire de Stephania ?tait ce que Thanos avait vu de plus beau. Elle pla?a sa main dans la sienne. “Oui.” Le grand pr?tre leur entoura les bras d'un tissu blanc uni qui formait un lien tout aussi traditionnel qu'?l?gant. “Li?s par le mariage, vous ne formez plus qu'une chair, qu'une ?me, qu'une famille”, dit le grand pr?tre. “Puissiez-vous ?tre heureux ensemble et pour toujours. Vous pouvez vous embrasser.” Thanos n'avait pas besoin qu'on le lui r?p?te. Attach?s l'un ? l'autre comme ?a, c'?tait difficile ? faire mais c'?tait quand m?me un des petits amusements d'une c?r?monie de mariage et ils y arriv?rent. Thanos go?ta le contact des l?vres de Stephania contre les siennes, se fondit en elle et, au moins pour cet instant, il arriva ? oublier tous les autres soucis du monde et ? simplement ?tre l? avec elle. M?me ses pens?es de Ceres pass?rent au second plan, consum?es par le contact du corps de Stephania. ?videmment, il fallait que ce soit Lucious qui rompe la magie du moment. “Bon, je suis bien content que ce soit fini”, dit-il, impossible ? ne pas entendre dans le silence g?n?ral. “On peut commencer la f?te, maintenant ? J'ai soif !” *** La c?r?monie de mariage avait ?t? opulente mais le banquet qui suivit fut spectaculaire au point que Thanos se mit ? se demander combien il avait co?t?. On aurait dit qu'il avait englouti la moiti? des profits g?n?r?s lors des derniers raids et qu'on avait d?pens? sans compter. Il savait que c'?tait le roi et la reine qui payaient et que c'?tait leur fa?on de lui montrer qu'ils ?taient tr?s heureux que ce mariage ait lieu, mais combien de familles de la cit? ce type de repas aurait-il pu nourrir ? Il lui suffit de regarder autour de lui pour voir des acrobates et des danseurs, des musiciens et des jongleurs distraire des groupes de nobles. Les nobles dansaient ensemble en formant des cercles tourbillonnants pendant qu'on leur servait ? manger ce qui, pour Thanos, semblaient ?tre de petites montagnes de p?tisseries et de confiseries, d’hu?tres et de riches desserts. Il y avait ?videmment du vin, en telle quantit? que, ? mesure que les festivit?s se poursuivaient, les convives se d?cha?naient. Les danses s'acc?l?raient et les gens changeaient de partenaire presque trop vite pour que Thanos puisse suivre le mouvement. Le roi et la reine s'?taient d?j? retir?s et avaient quitt? la salle en compagnie de quelques-uns des nobles les plus ?g?s. Pour les f?tards, c'?tait comme un signal qui les autorisait ? se d?barrasser de leurs derni?res inhibitions. Stephania ?tait en train de virevolter dans le cadre d'une danse traditionnelle d'adieu o? la fianc?e dansait rapidement entre tous les jeunes hommes ?ligibles de la salle avant de repartir se blottir dans les bras de Thanos ? la fin de la danse. C'?tait pour la fianc?e une fa?on traditionnelle de montrer aux jeunes hommes qu'elle avait rejet?s qu'elle ?tait tr?s heureuse du choix qu'elle avait fait. Sur un plan plus informel, cela donnait l'occasion aux jeunes hommes de se mettre en valeur devant toutes les autres jeunes femmes nobles qui regardaient la sc?ne. A la grande surprise de Thanos, Lucious ne se joignit pas ? la danse. Il s'?tait presque attendu ? ce que le prince fasse quelque chose de stupide, comme essayer de voler un baiser ? Stephania. Cela dit, compar? ? la fois o? il avait essay? de faire assassiner Thanos, cela aurait ?t? relativement innocent. Au lieu de faire ?a, le prince s'avan?a d'un air arrogant pendant que la danse battait encore son plein et se fraya un chemin dans la foule avec une arrogance nonchalante tout en tenant une coupe en cristal remplie du vin le plus fin qui soit. Thanos le regarda et essaya de trouver une ressemblance quelconque entre eux deux. Ils ?taient tous deux enfants du roi mais Thanos ne pouvait imaginer ressembler ? Lucious de quelque fa?on que ce soit. “C'est un beau mariage”, lui dit Lucious. “Tout ce que je pr?f?re : de la bonne nourriture, un vin encore meilleur et plein de serveuses pour apr?s.” “Comporte-toi correctement, Lucious”, dit Thanos. “J'ai une meilleure id?e”, r?pliqua Lucious. “Et si on regardait ta ravissante fianc?e virevolter entre tant d'hommes ? Bien s?r, comme c'est Stephania, on pourrait peut-?tre parier sur ceux avec lesquels elle a couch?.” Thanos serra les poings. “Tu n'es venu que pour semer le d?sordre ? Si c'est le cas, tu peux sortir.” Lucious sourit encore plus. “Et ?a te donnerait quel air, d'essayer de chasser de ton mariage l'h?ritier du tr?ne ? ?a passerait assez mal.” “Surtout pour toi.” “N'oublie pas qui tu es, Thanos”, r?pliqua s?chement Lucious. “Oh, je sais qui je suis”, dit Thanos d'une voix mena?ante. “Nous le savons tous les deux, n'est-ce pas ?” Cela fit bri?vement r?agir Lucious. M?me si Thanos n'avait pas ?t? au courant, il en aurait eu la confirmation, ? pr?sent : Lucious connaissait le myst?re qui entourait la naissance de Thanos. Il savait qu'ils ?taient demi-fr?res. “Va te faire voir avec ton mariage”, dit Lucious. “Tu es jaloux, c'est tout”, r?pliqua Thanos. “Je sais que tu voulais Stephania et que maintenant c'est moi qui l'?pouse. C'est moi qui n'ai pas fui au Stade. C'est moi qui ai r?ellement combattu ? Haylon. Nous savons tous deux ce que je suis d'autre. Donc, qu'est-ce qui te reste, Lucious ? Tu n'es qu'un voyou contre lequel il faudrait prot?ger le peuple de Delos.” Thanos entendit Lucious serrer la main autour de sa coupe de cristal jusqu'? ce qu'elle craque et se brise. “Tu aimes prot?ger les castes inf?rieures, n'est-ce pas ?” dit Lucious. “Dans ce cas, ?coute ?a : pendant que tu pr?parais un mariage, j'ai ?cras? des villages et je vais continuer ? le faire. En fait, pendant que tu seras encore dans ta couche nuptiale demain matin, moi, je partirai faire la le?on ? un autre groupe de paysans. Et tu ne pourras rien y faire, qui que tu t'imagines ?tre.” A ce moment, Thanos eut envie de frapper Lucious. Il eut envie de le frapper sans arr?t jusqu'? ce qu'il ne reste plus de lui qu'une tache sanguinolente sur le sol en marbre. S'il ne le fit pas, ce fut uniquement gr?ce ? Stephania qui, sa danse termin?e, approcha et lui posa une main sur le bras. “Oh, Lucious, tu as renvers? ton vin”, dit-elle avec un sourire que Thanos aurait voulu ?tre capable d'imiter. “?a ne va pas du tout. Permets qu'un de mes domestiques t'en apporte d'autre.” “Je le ferai moi-m?me”, r?pondit Lucious de tr?s mauvaise gr?ce. “Ils m'ont donn? celui-ci et regarde le r?sultat.” Il s'?loigna ? grands pas et, si Thanos ne le suivit pas, ce fut uniquement gr?ce ? la pression de la main de Stephania sur son bras. “Laisse”, dit Stephania. “Si je t'ai dit qu'il y avait de meilleures fa?ons de s'y prendre, c'est que c'est vrai. Crois-moi.” “Il ne faut pas qu'il reste impuni apr?s tout ce qu'il a fait”, insista Thanos. “Il ne restera pas impuni. Cela dit, r?fl?chis !” dit-elle. “Avec qui pr?f?rerais-tu passer la soir?e ? Lucious ou moi ?” La question fit sourire Thanos. “Toi. Sans la moindre h?sitation.” Stephania l'embrassa. “Bonne r?ponse.” Thanos sentit sa main se glisser dans la sienne et le tirer vers les portes. Les autres nobles pr?sents au mariage les laiss?rent passer et certains rirent de ce qui allait suivre. Thanos suivit Stephania jusqu'? son propre appartement. Stephania ouvrit la porte et se dirigea vers sa chambre. L?, elle se tourna vers lui, lui jeta les bras autour du cou et l'embrassa passionn?ment. “Tu n'as pas de regrets ?” demanda Stephania en reculant. “Tu es heureux de m'avoir ?pous?e ?” “Je suis tr?s heureux”, lui assura Thanos. “Et toi ?” “Je n'ai jamais rien voulu d'autre”, dit Stephania. “Et tu sais ce que je veux, maintenant ?” “Quoi ?” Thanos la vit lever les bras vers le haut. Sa robe tomba en ondulant le long de son corps. “Toi.” *** Quand Thanos se r?veilla, les premiers rayons de soleil se r?pandaient par les fen?tres. A c?t? de lui, il sentit le chaud contact de la pr?sence de Stephania, qui l'enla?ait d'un bras en dormant blottie contre lui. Thanos sourit en sentant l'amour monter en lui. A cet instant, il ?tait plus heureux qu'il ne l'avait ?t? depuis longtemps. S'il n'avait pas entendu un tintement de harnais et des hennissements des chevaux, il aurait pu se blottir ? nouveau contre Stephania et se rendormir, ou la r?veiller d'un baiser. Cependant, il se leva et se dirigea vers la fen?tre. Il y arriva juste ? temps pour voir Lucious quitter le ch?teau, chevauchant ? la t?te d'un groupe de soldats. Des fanions volaient au vent comme s'il ?tait un quelconque chevalier errant en qu?te au lieu d'?tre un boucher se pr?parant ? attaquer un village sans d?fense. Thanos l'observa puis se retourna vers Stephania, qui dormait encore. Silencieusement, il commen?a ? s'habiller. Il ne pouvait pas rester inactif. Il ne le pouvait pas, m?me pas pour Stephania. Elle avait dit qu'il existait de meilleurs moyens de s'occuper de Lucious, mais quels ?taient-ils ? ?tre poli avec lui et lui offrir du vin ? Non, il fallait arr?ter Lucious d?s maintenant et il n'existait qu'un moyen de s'y prendre. En silence, en prenant soin de ne pas r?veiller Stephania, Thanos sortit discr?tement de la chambre. Quand il eut le champ libre, il courut vers les ?curies et cria ? un domestique de lui apporter son armure. Il ?tait temps de faire r?gner la justice. CHAPITRE DEUX D?s le moment o? Berin p?n?tra dans les tunnels, il ressentit l'excitation, l'?nergie f?brile palpable dans l'air. Suivant Anka et accompagn? par Sartes, il se fraya un chemin sous terre, passant devant des gardes qui hoch?rent respectueusement la t?te et devant des rebelles qui se h?taient dans toutes les directions. Il passa par la Porte du Gardien et sentit l'?volution qu'avait suivi la R?bellion. A pr?sent, les rebelles semblaient avoir une chance de s'en sortir. “Par ici”, dit Anka en faisant signe ? un guetteur. “Les autres nous attendent.” Ils parcoururent des couloirs de pierre nue qui avaient l'air d'avoir toujours exist?. Les Ruines de Delos, loin sous terre. Berin passa une main sur la pierre lisse en admirant ces ruines comme seul un forgeron pouvait le faire et s'?merveilla de leur long?vit? et des comp?tences de leurs constructeurs. Elles dataient peut-?tre m?me de l'?poque o? les Anciens vivaient encore, dans un pass? trop lointain pour que quiconque puisse s'en souvenir. Et cela le fit douloureusement penser ? la fille qu'il avait perdue. Ceres. Quand ils pass?rent devant une ouverture, Berin fut arrach? ? cette pens?e par le choc des marteaux sur le m?tal, par la chaleur soudaine des feux de forge. Il vit une dizaine d'hommes travailler dur pour tenter de produire des plastrons et des ?p?es courtes. Cela lui rappela son ancienne forge ainsi que l'?poque o? sa famille n'?tait pas encore en lambeaux. Sartes semblait fascin?, lui aussi. “Tu vas bien ?” demanda Berin. Sartes hocha la t?te. “Moi aussi, elle me manque”, r?pondit Berin en mettant une main sur l'?paule de son fils. Il savait qu'il pensait ? Ceres, qui passait toujours du temps ? la forge. “Elle nous manque ? tous”, ajouta Anka. L'espace d'un instant, ils rest?rent l? tous les trois. Berin savait qu'ils comprenaient tous ? quel point Ceres avait compt? pour eux. Il entendit soupirer Anka. “Tout ce que nous pouvons faire, c'est continuer ? nous battre”, ajouta-t-elle, “et continuer ? forger des armes. Nous avons besoin de vous, Berin.” Il essaya de se concentrer. “Font-ils tout ce que je leur ai dit ?” demanda-t-il. “Chauffent-ils assez le m?tal avant de le tremper ? Sinon, il ne durcira pas.” Anka sourit. “Vous pourrez le v?rifier vous-m?me apr?s la r?union.” Berin hocha la t?te. Au moins, il allait pouvoir ?tre de quelque utilit?. *** Sartes marchait ? c?t? de son p?re et suivait Anka alors qu'ils poursuivaient leur route au-del? de la forge et s'enfon?aient plus loin dans les tunnels. Il y avait plus de gens dans ces tunnels qu'il n'aurait pu le croire. Des hommes et des femmes rassemblaient des ravitaillements, s'entra?naient avec des armes, arpentaient les salles. Parmi eux, Sartes reconnut plusieurs ex-appel?s, maintenant arrach?s aux griffes de l'arm?e. Ils atteignirent finalement un espace caverneux d?cor? de socles en pierre qui avaient peut-?tre soutenu des statues dans le pass?. A la lumi?re vacillante des bougies, Sartes vit les chefs de la r?bellion qui les attendaient. Hannah, qui s'?tait oppos?e ? l'attaque, avait maintenant l'air aussi heureuse que si elle l'avait propos?e. Oreth, qui ?tait maintenant un des adjoints principaux d'Anka, appuyait son corps maigre contre le mur avec un sourire de contentement. Sartes rep?ra la grande silhouette de l'ex-docker Edrin ? la limite de la lumi?re des bougies alors que les bijoux de Yeralt brillaient dans cette m?me lumi?re et que le fils du marchand avait presque l'air hors de propos parmi les autres qui riaient et plaisantaient entre eux. Ils se turent quand Anka et les deux hommes approch?rent. A pr?sent, Sartes voyait la diff?rence. Avant, ils avaient presque ?cout? Anka ? contrec?ur. Maintenant que l'embuscade avait r?ussi, ils accueillaient l'arriv?e d'Anka avec respect. Sartes trouvait m?me qu'elle avait plus l'air d'un chef, marchait plus droit qu'avant, semblait avoir plus confiance en elle-m?me. “Anka, Anka, Anka !” commen?a Oreth. Les autres ne tard?rent pas ? l'imiter comme les rebelles l'avaient fait apr?s la bataille. Entendant le nom du chef des rebelles r?sonner dans la salle, Sartes se joignit ? eux. Il ne s'arr?ta que lorsqu'Anka demanda le silence d'un geste. “Nous nous sommes bien d?brouill?s”, dit Anka avec un sourire qui lui ?tait propre. Depuis la bataille, c'?tait une des premi?res fois que Sartes l'avait vue sourire. Juste apr?s, elle avait ?t? trop occup?e ? s'efforcer d'organiser le retrait de leurs morts et de leurs bless?s du cimeti?re en toute s?curit?. Elle avait le talent de s'occuper de tout dans le d?tail et ce talent avait fait prosp?rer la r?bellion. “Bien d?brouill?s ?” demanda Edrin. “On les a ?cras?s.” Sartes entendit l'homme frapper du poing contre sa paume pour mettre l'accent sur le fait. “Nous les avons d?truits”, convint Yeralt, “gr?ce ? tes qualit?s de commandant.” Anka secoua la t?te. “Nous les avons battus ensemble. Nous les avons battus parce que nous avons tous jou? notre r?le et parce que Sartes nous a apport? les plans.” Sartes se sentit pouss? en avant par son p?re. Il n'avait pas pr?vu ?a. “Anka a raison”, dit Oreth. “Nous devons des remerciements ? Sartes. Il nous a apport? les plans et c'est lui qui a persuad? les appel?s de ne pas se battre. C'est gr?ce ? lui que la r?bellion a grossi ses rangs.” “Cela dit, ce sont des appel?s ? moiti? entra?n?s”, dit Hannah, “pas de vrais soldats.” Sartes tourna la t?te vers elle. Elle s'?tait rapidement oppos?e ? ce qu'il intervienne tout court. Il ne l'aimait pas mais, dans la r?bellion, ce n'?tait pas l'essentiel. Ils faisaient tous partie d'une chose qui les d?passait. “Nous les avons battus”, dit Anka. “Nous avons remport? une bataille mais nous n'avons pas vaincu l'Empire. Nous avons encore beaucoup ? faire.” “Et ils ont encore beaucoup de soldats”, dit Yeralt. “Si la guerre se prolongeait, cela pourrait nous co?ter cher ? nous tous.” “Tu comptes tes sous, maintenant ?” r?pliqua Oreth. “Ce n'est pas un investissement. Tu ne peux pas voir les bilans avant de choisir ou non de t'impliquer.” Sartes entendit son agacement. Quand il avait rejoint les rebelles, il s'?tait attendu ? ce qu'ils forment une entit? vaste et unie qui ne penserait qu'? son besoin de renverser l'Empire. Il avait d?couvert que, de beaucoup de fa?ons, ils n'?taient que des ?tres humains avec leurs propres espoirs, r?ves, souhaits et besoins. Cela ne faisait que rendre plus impressionnant le fait qu'Anka ait trouv? le moyen de maintenir leur coh?sion apr?s la mort de Rexus. “C'est l'investissement le plus grand qui soit”, dit Yeralt. “Nous apportons tout ce que nous avons. Nous risquons notre vie en esp?rant que les choses vont s'am?liorer. Je cours autant de risques que vous autres en cas d'?chec.” “Nous n'?chouerons pas”, dit Edrin. “Nous les avons battus une fois. Nous les rebattrons. Nous savons o? et quand ils vont attaquer. Nous pourrons leur tendre un pi?ge ? chaque fois.” “Nous pourrons faire mieux que ?a”, dit Hannah. “Comme nous avons montr? ? ces gens que nous pouvions les battre, pourquoi ne pas aller leur reprendre des choses ?” “A quoi pensais-tu ?” demanda Anka. Sartes voyait qu'elle envisageait cette possibilit?. “A reprendre les villages un par un”, dit Hannah. “A nous d?barrasser des soldats de l'Empire qui s'y trouvent avant que Lucious ne puisse s'en approcher. Si nous montrons aux gens ce qu'ils peuvent faire, Lucious aura une mauvaise surprise quand ils se r?volteront contre lui.” “Et quand Lucious et ses hommes les tueront pour s'?tre r?volt?s ?” demanda Oreth. “Il se passera quoi ?” “Alors, ?a montrera simplement que c'est un monstre”, insista Hannah. “Ou les gens comprendront que nous ne pouvons pas les prot?ger.” Sartes regarda autour de lui, surpris qu'ils prennent cette id?e au s?rieux. “Nous pourrions stationner des soldats dans les villages pour qu'ils ne tombent pas aux mains de l'Empire”, proposa Yeralt. “Nous avons des appel?s de notre c?t?, maintenant.” “Ils ne tiendraient pas longtemps contre l'arm?e si elle venait les chercher”, r?pliqua Oreth. “Ils mourraient avec les villageois.” Sartes savait qu'il avait raison. Les appel?s n'avait pas b?n?fici? du m?me entra?nement que les soldats les plus forts de l'arm?e. Pire encore, ils avaient tellement souffert aux mains de l'arm?e que la plupart d'entre eux seraient probablement terrifi?s. Il vit Anka demander le silence. Cette fois-ci, il mit un peu plus longtemps ? venir. “Oreth a raison”, dit-elle. “?videmment, c'est lui que tu soutiens”, r?pliqua Hannah. “Je le soutiens parce qu'il a raison”, dit Anka. “Nous ne pouvons pas simplement entrer dans les villages, leur dire qu'ils sont libres et esp?rer que tout se passera bien. M?me avec les appel?s, nous n'avons pas assez de combattants. Si nous nous rassemblons ? un seul endroit, nous donnerons ? l'Empire l'occasion de nous ?craser. Si nous allons dans tous les villages, ils nous captureront l'un apr?s l'autre.” “Si on peut persuader assez de villages de se soulever et si je persuade mon p?re d'embaucher des mercenaires …” proposa Yeralt. Sartes remarqua qu'il ne finissait pas sa phrase. Le fils du marchand n'avait pas vraiment de r?ponse. “Alors quoi ?” demanda Anka. “Nous aurons assez de soldats ? Si c'?tait aussi simple, nous aurions renvers? l'Empire il y a des ann?es.” “Nous avons maintenant de meilleures armes gr?ce ? Berin”, souligna Edrin. “Nous connaissons leurs plans gr?ce ? Sartes. Nous avons l'avantage ! Dis-lui, Berin. Parle-lui des ?p?es que tu as forg?es.” Sartes se tourna vers son p?re, qui haussa les ?paules. “Il est vrai que j'ai fait de bonnes ?p?es et que les autres compagnons en ont fait beaucoup de passables. Il est vrai que certains d'entre vous vont maintenant avoir des armures, ce qui vaut toujours mieux que se faire faucher par l'ennemi. Cependant, ?coutez bien : ce n'est pas seulement une histoire d'?p?es. Ce qui compte le plus, c'est la main qui manie l'?p?e. Une arm?e, c'est comme une ?p?e. Vous pouvez la faire aussi grande que vous le voulez mais, si l'acier qui la constitue est de mauvaise qualit?, elle se brisera d?s que vous la testerez.” Si les autres avaient pass? plus de temps ? fabriquer des armes, ils auraient peut-?tre per?u tout le s?rieux que son p?re mettait dans ses paroles, mais Sartes voyait qu'ils n'?taient pas convaincus. “Que pouvons-nous faire d'autre ?” demanda Edrin. “Nous n’allons pas renoncer ? l'avantage que nous avons gagn? en restant inactifs et en attendant que ?a se passe. Je dis qu'il faut se mettre ? dresser une liste de villages ? lib?rer. A moins que vous n'ayez une meilleure id?e, Anka ?” “Moi, j'en ai une”, dit Sartes. Il s'exprimait d'une voix plus calme qu'il n'aurait cru. Il s'avan?a, le c?ur battant la chamade, surpris d'avoir pris la parole. Il n'?tait que trop conscient d'?tre bien plus jeune que tous les gens pr?sents en ce lieu. Il avait jou? son r?le dans la bataille, il avait m?me tu? un homme, mais il y avait encore en lui quelque chose qui lui disait qu'il n'aurait pas d? prendre la parole ? cette r?union. “Donc, c'est d'accord”, commen?a ? dire Hannah. “Nous —” “J'ai dit que j'avais une meilleure id?e”, dit Sartes et, cette fois, sa voix porta. Les autres se tourn?rent vers lui. “Laissez parler mon fils”, dit son p?re. “Vous avez dit vous-m?mes qu'il vous a aid? ? remporter une victoire. Peut-?tre pourra-t-il vous aider ? survivre, maintenant.” “Quelle est ton id?e, Sartes ?” demanda Anka. Ils le regardaient tous. Sartes se for?a ? ?lever la voix. Il pensa ? la fa?on dont Ceres aurait parl? mais aussi ? la confiance qu'Anka lui avait d?j? t?moign?e. “Nous ne pouvons pas aller aux villages”, dit Sartes. “C'est ce qu'ils veulent que nous fassions. De plus, nous ne pouvons plus nous fier aux cartes que j'ai apport?es parce que, m?me s'ils ne se sont pas encore rendus compte que nous connaissions leurs mouvements, ils ne tarderont pas ? le faire. Ils essaient de nous attirer ? d?couvert.” “Nous savons tout cela”, dit Yeralt. “Je croyais que tu avais dit que tu avais un plan.” Sartes ne se laissa pas impressionner. “Et s'il existait un moyen de frapper l'Empire l? o? ils ne s'y attendent pas et d'obtenir le soutien de combattants endurcis par-dessus le march? ? Et si on pouvait convaincre le peuple de se soulever avec une victoire symbolique qui d?passerait la simple protection d'un village ?” “A quoi pensais-tu ?” demanda Anka. “A lib?rer les seigneurs de guerre du Stade”, dit Sartes. Un long silence stup?fait s'ensuivit. Les autres le regard?rent fixement. Il vit le doute sur leur visage et comprit qu'il fallait qu'il continue ? argumenter. “R?fl?chissez”, dit-il. “Presque tous les seigneurs de guerre sont des esclaves. Les nobles les jettent dans l'ar?ne pour qu'ils y meurent comme des poup?es. La plupart d'entre eux seraient reconnaissants qu'on leur donne une chance de fuir et ils seraient meilleurs combattants que n'importe quel soldat.” “C'est absurde”, dit Hannah. “Attaquer le c?ur de la cit? comme ?a. Il y aurait des gardes partout.” “L'id?e me pla?t”, dit Anka. Les autres la regard?rent et Sartes ressentit une profonde gratitude pour son soutien. “Ils ne s'y attendraient pas”, ajouta-t-elle. Le silence se fit ? nouveau dans la salle. “Nous n'aurions pas besoin de mercenaires”, ajouta finalement Yeralt en se frottant le menton. “La population se soul?verait”, ajouta Edrin. “Il faudrait le faire pendant les Tueries”, fit remarquer Oreth. “Ainsi, tous les seigneurs de guerre seraient ? un seul endroit et le peuple assisterait ? notre intervention.” “Les prochaines Tueries n'auront lieu qu'au festival de la Lune Rouge”, dit son p?re. “C'est dans six semaines. En six semaines, je peux faire beaucoup d'armes.” Cette fois-ci, Hannah se tut, peut-?tre parce qu'elle sentait que la majorit? ?tait d'accord avec Sartes. “C'est d'accord, dans ce cas ?” demanda Anka. “On lib?re les seigneurs de guerre pendant le festival de la Lune Rouge ?” Un par un, Sartes vit les autres hocher la t?te. M?me Hannah finit par le faire. Il sentit son p?re lui poser une main sur l'?paule. L'approbation qu'il vit dans ses yeux comptait plus que tout pour lui. Il pria simplement pour qu'ils ne meurent pas tous ? cause de son plan. CHAPITRE TROIS Ceres r?vait et, dans ses r?ves, elle voyait s'affronter des arm?es. Elle se voyait en train de combattre ? leur t?te, v?tue d'une armure qui brillait au soleil. Elle se voyait en train de diriger une grande nation, de mener une guerre qui allait d?cider de la destin?e m?me de l'humanit?. Pourtant, dans tout cela, elle se voyait aussi en train de plisser les yeux, de rechercher sa m?re. Elle tendit le bras vers une ?p?e et, quand elle baissa les yeux, elle constata qu'elle n'?tait pas encore l?. Ceres se r?veilla en sursaut. Il faisait nuit et la mer, ?clair?e par le clair de lune, s'?tendait devant elle jusqu'? l'infini. Dansant sur l'eau dans son petit navire, elle ne vit aucune trace de terre. Seules les ?toiles la convainquaient qu'elle faisait encore suivre le bon cap ? sa petite embarcation. Des constellations famili?res brillaient au-dessus. Il y avait la Queue du Dragon, qui se situait bas dans le ciel, sous la lune. Il y avait l’?il de l'Anc?tre, form? autour d'une des ?toiles les plus brillantes que l'on voie dans toute l'obscurit?. Le navire que les gens de la for?t avaient ? moiti? construit et ? moiti? fait pousser semblait ne jamais d?vier du cap que Ceres avait choisi, m?me quand il fallait qu'elle se repose ou qu'elle mange. A tribord, Ceres vit des lumi?res dans l'eau. Des m?duses lumineuses pass?rent ? c?t? d'elle, flottant comme des nuages sous-marins. Ceres vit la silhouette plus rapide d'un poisson en forme de fl?chette se faufiler dans le banc de poissons en sautant sur des m?duses ? chaque passage et en partant vite avant que les tentacules des autres ne puissent le toucher. Ceres les regarda jusqu'? ce qu'ils disparaissent dans les profondeurs. Elle mangea un morceau des fruits sucr?s et succulents dont les insulaires avaient rempli son bateau. Quand elle ?tait partie, il lui avait sembl? qu'elle en aurait assez pour des semaines. Maintenant, il ne lui semblait plus en avoir tant que ?a. Elle se mit ? penser au chef du peuple de la for?t, qui ?tait d'une beaut? si ?trange et asym?trique ? cause de sa mal?diction qui rendait certaines parties de sa peau vert mousse ou rudes comme l'?corce. ?tait-il revenu sur l'?le, jouait-il son ?trange musique, pensait-il ? elle ? Autour de Ceres, la brume commen?a ? s'?lever de l'eau et s'?paissit en r?fl?chissant des fragments du clair de lune tout en l'emp?chant de voir le ciel nocturne au-dessus d'elle. La brume tourbillonna et se d?pla?a autour du bateau. Des tentacules de brouillard avan?aient comme des doigts. Ceres pensait ? Eoin et cela semblait inexorablement la faire penser ? Thanos. Thanos, qui avait ?t? tu? sur les plages de Haylon avant que Ceres ait pu lui dire qu'elle n'avait pas vraiment pens? les paroles violentes qu'elle avait prononc?es quand il ?tait parti. Seule dans son bateau, Ceres ne pouvait oublier ? quel point il lui manquait. L'amour qu'elle avait ressenti pour lui lui semblait ?tre un fil qui la ramenait vers Delos, alors m?me que Thanos ne s'y trouvait plus. Penser ? Thanos la faisait souffrir. Ces souvenirs lui semblaient ?tre une blessure ouverte qui risquait de ne jamais se refermer. Il y avait beaucoup de choses qu'il fallait qu'elle fasse mais aucune d'elles ne lui ram?nerait Thanos. Il y avait beaucoup de choses qu'elle aurait dit s'il avait ?t? l?, mais il n'y ?tait pas. Il n'y avait que le vide de la brume. La brume continuait ? s'enrouler autour du bateau et, ? pr?sent, Ceres voyait des morceaux de roc ?merger de l'eau. Certains ?taient des morceaux tranchants de basalte noir mais d'autres avaient les couleurs de l'arc-en-ciel, comme si on avait d?cor? les eaux bleues et tumultueuses de l'oc?an avec des pierres pr?cieuses g?antes. Certains portaient des marques tourbillonnantes et en spirale et Ceres ne savait pas vraiment si ces marques ?taient naturelles ou si la main d'un artiste disparu depuis longtemps les avait sculpt?es. Est-ce que sa m?re ?tait quelque part au-del? de ces rocs ? Cette pens?e fit frissonner Ceres d'excitation et s'?leva en elle comme la brume qui tourbillonnait autour du bateau. Elle allait voir sa m?re. Sa vraie m?re, pas celle qui l'avait toujours d?test?e et qui l'avait vendue aux esclavagistes ? la premi?re occasion. Ceres ne savait pas ? quoi cette femme allait ressembler mais la simple possibilit? de le d?couvrir la remplissait d'excitation alors qu'elle faisait longer les rocs au petit bateau. De forts courants tiraient sur son bateau, mena?ant de lui arracher le gouvernail de la main. Ceres se dit que, si elle n'avait pas eu la force que lui donnaient ses pouvoirs, elle n'aurait probablement pas pu tenir le coup. Elle tira le gouvernail vers le c?t? et son petit bateau r?agit avec ce qui ?tait presque la gr?ce d'un ?tre vivant, passant si pr?s d'un des rocs que Ceres aurait pu le toucher. Elle continua ? ?voluer entre les rocs et, ? chacun qu'elle passait, elle se mettait ? penser qu'elle se rapprochait toujours plus de sa m?re. Quelle sorte de femme serait-elle ? Dans ses visions, elle avait ?t? impossible ? distinguer mais Ceres pouvait imaginer et esp?rer. Peut-?tre serait-elle douce, gentille et tendre, tout ce que sa m?re de substitution de Delos n'avait jamais ?t?. Qu'est-ce que sa m?re penserait d'elle ? Ceres fut prise au d?pourvu par cette question pendant qu'elle faisait traverser la brume au bateau. Elle ne savait pas ce qui l'attendait. Peut-?tre sa m?re allait-elle la regarder et ne voir en elle qu'une personne qui avait ?chou? au Stade, qui n'avait ?t? qu'une esclave de l'Empire, qui avait perdu la personne qu'elle aimait le plus. Et si sa m?re la rejetait ? Et si elle ?tait dure, ou cruelle, ou sans merci ? Ou peut-?tre, seulement peut-?tre, serait-elle fi?re de sa fille. Ceres sortit de la brume si brusquement qu'on aurait dit qu'un rideau venait d'?tre lev?. Maintenant, la mer ?tait calme, d?barrass?e des rocs ac?r?s qui en avaient ?merg? auparavant. Ceres constata imm?diatement qu'il y avait quelque chose de diff?rent. D'une fa?on ou d'une autre, la lumi?re de la lune semblait avoir plus d'?clat et, autour d'elle, des n?buleuses tournaient en formant des taches de couleur dans la nuit. M?me les ?toiles semblaient chang?es. A pr?sent, Ceres ne retrouvait plus les constellations famili?res qui s'y ?taient trouv?es auparavant. Une com?te laissa une tra?n?e en traversant l'horizon. Elle ?tait rouge feu, de plusieurs teintes de jaune et d'autres couleurs sans ?quivalence ici-bas. Chose encore plus ?trange, Ceres sentit les pouvoirs qui l'habitaient pulser comme s'ils r?pondaient ? l'endroit o? elle se trouvait. Elles lui donn?rent l'impression de s'?tendre en elle, de s'ouvrir et de lui permettre de vivre ce nouvel endroit de cent fa?ons qu'elle n'avait jamais encore imagin?es. Ceres vit une forme s'?lever de l'eau, un cou long et serpentin se dresser avant de replonger sous les vagues en ?claboussant le bateau. La cr?ature refit une br?ve apparition et Ceres eut l'impression que quelque chose d'immense longeait le bateau en nageant dans l'eau puis s'?loignait. Des cr?atures ? forme d'oiseau volet?rent dans le clair de lune et ce fut seulement quand ils s'approch?rent que Ceres vit que c'?taient des phal?nes argent?s plus gros que sa t?te. Ceres sentit soudain ses yeux s'alourdir de sommeil. Elle attacha le gouvernail, s'allongea puis laissa le sommeil s'emparer d'elle. *** Ceres se r?veilla en entendant crier des oiseaux. Elle se redressa, cligna des yeux dans la lumi?re du soleil et vit que ce n'?taient finalement pas des oiseaux. Deux cr?atures avec un corps de grand chat la survolaient de leurs ailes d'aigle et l'appelaient, leur bec de rapace grand ouvert. Cependant, elles ne semblaient pas vouloir se rapprocher d'elle et se content?rent de tourner autour du bateau avant de s'?loigner. Ceres les regarda et, parce qu'elle les regardait, elle vit le minuscule grain de poussi?re form? par l'?le vers laquelle ils se dirigeaient ? l'horizon. Aussi rapidement que possible, Ceres releva la petite voile et essaya d'attraper le vent qui soufflait sur le bateau pour avancer vers l'?le. Le grain de poussi?re grandit et, quand Ceres se rapprocha, ce qui ressemblait ? d'autres rocs s'?leva de l'oc?an mais ce n'?taient pas les m?mes que ceux qu'elle avait rencontr?s dans la brume. Ceux-l? ?taient des artefacts carr?s sculpt?s dans le marbre aux couleurs d'arc-en-ciel. Certains d'entre eux ressemblaient ? des fl?ches de grands b?timents depuis longtemps enfouis sous les vagues. La moiti? d'une arche d?passait ? la surface. Elle ?tait si grande que Ceres ne pouvait imaginer ce qui aurait pu passer dessous. Elle regarda par-dessus bord et l'eau ?tait si claire qu'elle arrivait ? distinguer le fond marin au-dessous. Le fond ?tait proche et Ceres y voyait les d?bris de b?timents tr?s anciens. Ils ?taient si proches que Ceres aurait pu les rejoindre ? la nage rien qu'en retenant son souffle. Cependant, elle n'en fit rien, aussi bien ? cause des choses qu'elle avait d?j? vues dans l'eau qu'? cause de ce qui se trouvait devant elle. Elle l'avait trouv?e. L'?le o? elle recevrait les r?ponses qu'il lui fallait, o? elle s'instruirait sur ses pouvoirs. O? elle finirait par retrouver sa m?re. CHAPITRE QUATRE Lucious donna un coup de son ?p?e par-dessus l'?paule et se r?jouit intens?ment de la fa?on dont elle scintillait dans la lumi?re de l'aube juste avant que sa lame n'abatte le vieil homme qui avait os? se placer sur sa route. Autour de lui, d'autres roturiers tombaient sous les coups de ses hommes : ceux qui osaient r?sister et ceux qui ?taient assez stupides pour simplement se trouver au mauvais endroit au mauvais moment. Il sourit en entendant les cris retentir autour de lui. Il aimait que les paysans essaient de se battre parce que cela donnait ? ses hommes un pr?texte pour leur montrer qu'ils ?taient vraiment sans d?fense face ? leurs sup?rieurs. D'ailleurs, combien en avait-il tu? au cours de raids comme celui-ci ? Il ne s'?tait pas emb?t? ? compter. Pourquoi aurait-il d? accorder ne serait-ce qu'un moment d'attention ? leur esp?ce ? Lucious regarda autour de lui les paysans commencer ? s'enfuir et fit un geste ? quelques-uns de ses hommes. Ils partirent ? leur poursuite. Quand ils s'enfuyaient, c'?tait presque mieux que quand ils r?sistaient parce que c'?tait plus excitant de les chasser comme les proies qu'ils ?taient. “Votre monture, votre altesse ?” demanda un des hommes en amenant l'?talon de Lucious. Lucious secoua la t?te. “Plut?t mon arc.” L'homme hocha la t?te et passa ? Lucious un ?l?gant arc recourb? en fr?ne blanc incrust? de corne et serti d'argent. Il y pla?a une fl?che, tira la corde et laissa partir la fl?che. Au loin, un des paysans en fuite fut abattu. Il n'y avait plus personne ? combattre mais cela ne signifiait pas qu'ils en avaient fini, loin de l?. Lucious avait constat? que, ? leur fa?on, les paysans qui se cachaient pouvaient ?tre aussi amusants que ceux qui se battaient ou ceux qui s'enfuyaient. Il y avait tant de fa?ons diff?rentes de torturer ceux qui semblaient avoir de l'or et tant d'autres fa?ons d'ex?cuter ceux qui avaient peut-?tre des sympathies pour les rebelles. La roue en feu, le gibet, la pendaison … que choisirait-il, aujourd'hui ? Lucious fit signe ? deux ou trois de ses hommes de commencer ? ouvrir les portes ? coups de pied. Il lui arrivait de prendre plaisir ? faire sortir ceux qui se cachaient en br?lant leur maison mais les maisons avaient plus de valeur que les paysans. Une femme sortit en courant et Lucious l'attrapa et la jeta nonchalamment vers un des esclavagistes qui avaient pris habitude de le suivre comme des mouettes suivant un bateau de p?che. Il entra fi?rement dans le temple du village. Le pr?tre ?tait d?j? ? terre et tenait son nez cass? pendant que les hommes de Lucious r?cup?raient les ornements en or et en argent dans un sac. Une femme en robe de pr?tresse se tenait face ? lui, d?fiante. Lucious remarqua l'?clat des quelques cheveux blonds qui s'?taient ?chapp?s de sa capuche et une ressemblance ?l?gante qui le fit s'arr?ter. “Vous ne pouvez pas faire ?a”, insista la femme. “Nous sommes dans un temple !” Lucious la saisit et retira la capuche de sa robe pour la regarder. Elle n'?tait pas le clone de Stephania — aucune roturi?re ne le pouvait — mais elle ?tait assez ressemblante pour que cela vaille la peine qu'il la garde un temps. Du moins, jusqu'? ce qu'il s'ennuie. “J'ai ?t? envoy? par ton roi”, dit Lucious. “N'essaie jamais de me dire ce que je ne peux pas faire !” Trop de gens avaient essay? de le faire au cours de sa vie. Ils avaient essay? de r?duire sa libert? alors qu'il ?tait la seule personne de l'Empire ? laquelle on ne devrait imposer aucune limite. Ses parents avaient essay?, mais il deviendrait roi un jour. Il deviendrait roi et peu importe ce qu'il avait trouv? dans la biblioth?que et que le vieux Cosmas ait cru qu'il ?tait trop b?te pour comprendre. Thanos allait apprendre ? rester ? sa place. Lucious crispa les doigts dans la chevelure de la pr?tresse. Stephania allait apprendre ? garder sa place, elle aussi. Comment avait-elle os? ?pouser Thanos comme ?a, comme s'il ?tait le prince le plus d?sirable ? Non, Lucious trouverait un moyen de rectifier le tir. Il s?parerait Thanos de Stephania aussi facilement qu'il fendait le cr?ne ? ceux qui se mettaient en travers de sa route. Il demanderait Stephania en mariage, aussi bien parce qu'elle ?tait ? Thanos que parce qu'elle serait l'ornement parfait pour un homme de son rang. Il y prendrait plaisir et, en attendant ce moment, la pr?tresse qu'il avait attrap?e serait un bon substitut. Il la lan?a ? un de ses hommes pour qu'il la surveille et partit au village pour voir quels autres amusements il pourrait y trouver. Alors qu'il sortait, il vit deux de ses hommes attacher un des villageois qui s'?tait enfui ? un arbre, les bras ?cart?s. “Pourquoi avez-vous gard? celui-l? vivant ?” demanda s?chement Lucious. Un des deux hommes sourit. “Tor ici pr?sent m'a appris une chose que font les gens du nord. Ils appellent ?a l'Aigle de Sang.” Ce nom plut ? Lucious. Il allait demander ce qu'il impliquait quand il entendit le cri d'un des veilleurs qui l'accompagnaient pour rep?rer les rebelles. Lucious regarda autour de lui mais, au lieu de voir approcher une horde de racailles ordinaires, il vit une silhouette arriver seule sur une monture qui faisait facilement la taille de la sienne. Lucious reconnut imm?diatement son armure. “Thanos”, dit-il. Il claqua les doigts. “Eh bien, on dirait que cette journ?e va se r?v?ler plus int?ressante que je ne l'aurais cru. Rapportez-moi mon arc.” *** Thanos ?peronna son cheval quand il vit son demi-fr?re Lucious et ce qu'il faisait. Quand il vit les paysans morts, les esclavagistes et l'homme attach? ? l'arbre, le feu de sa col?re r?duisit ? n?ant les derni?res traces de doute qu'il avait eues en quittant Stephania. Il vit Lucious avancer et lever un arc. L'espace d'un instant, Thanos ne put croire qu'il puisse faire ?a, mais pourquoi pas, en fait ? Lucious avait d?j? essay? de le tuer. Il vit la fl?che s'?lancer de l'arc et leva son bouclier juste ? temps. La pointe de la fl?che frappa le rev?tement en m?tal de son bouclier puis tomba avec un bruit m?tallique. Une deuxi?me fl?che suivit la premi?re et, cette fois, elle traversa le bouclier et ne s'arr?ta qu'? quelques centim?tres du visage de Thanos. Thanos for?a son cheval ? charger quand une troisi?me fl?che le fr?la en sifflant. Il vit Lucious et ses hommes se sortir pr?cipitamment de sa route juste avant qu'il traverse ? toute vitesse l'endroit o? ils s'?taient tenus. Il se retourna et tira son ?p?e juste au moment o? Lucious se remettait debout. “Thanos, quel empressement ! On aurait cru que tu ?tais impatient de me voir.” Thanos positionna son ?p?e en face du c?ur de Lucious. “Maintenant ?a suffit, Lucious. Je ne te laisserai plus tuer notre peuple.” “Notre peuple ?” r?pliqua Lucious. “C'est mon peuple, Thanos. Je peux en faire ce que je veux. Permets-moi de t'en faire la d?monstration.” Thanos le vit tirer son ?p?e et s'avancer vers l'homme attach? ? l'arbre. Thanos comprit ce que son demi-fr?re allait faire et fit ? nouveau avancer son cheval. “Arr?tez-le”, ordonna Lucious. Ses hommes s'empress?rent d'ob?ir. L'un d'eux s'avan?a vers Thanos et envoya un coup de lance en direction de son visage. Thanos le d?via avec son bouclier, coupa l'extr?mit? de l'arme avec son ?p?e puis donna ? l'homme un coup de pied qui l'envoya par terre. Il donna un coup d'?p?e vers le bas quand un autre homme lui fon?a dessus, transper?a la cotte de mailles de de l'homme ? l'?paule puis retira son ?p?e. Il se for?a ? avancer, ? traverser la foule de ses adversaires. Lucious avan?ait encore vers la victime qu'il avait choisie. Thanos envoya un coup d'?p?e ? un des hommes de main de Lucious et se rua en avant au moment o? Lucious envoyait sa propre ?p?e en arri?re. Thanos parvint tout juste ? interposer son bouclier et on entendit le choc du m?tal contre le m?tal. Lucious saisit le bouclier de Thanos. “Tu es pr?visible, Thanos”, dit-il. “La compassion a toujours ?t? ton point faible.” Lucious tira assez fort pour que Thanos soit arrach? ? sa selle. Thanos roula ? temps pour ?viter un coup d'?p?e et d?gagea son bras des sangles de son bouclier. Il saisit son ?p?e ? deux mains quand les hommes de Lucious se rapproch?rent ? nouveau. Il vit son cheval s'enfuir, mais cela signifiait qu'il n'avait plus l'avantage de surplomber ses ennemis. “Tuez-le”, dit Lucious. “Nous dirons que les rebelles l'ont fait.” “Tu sais bien essayer, n'est-ce pas ?” r?pliqua Thanos. “Dommage que tu sois incapable de finir le travail.” Alors, un des hommes de Lucious se rua vers lui en agitant une massue ? pointes. Thanos s'avan?a ? l'int?rieur de la trajectoire du coup puis il envoya un coup de travers et s'?loigna l'?p?e tendue pour tenir les autres ? distance. Ensuite, les hommes de Lucious s'avanc?rent rapidement comme s'ils savaient qu'aucun d'eux ne pouvait esp?rer vaincre Thanos en combat singulier. Thanos c?da du terrain et tourna le dos contre le mur de la maison la plus proche pour que ses adversaires ne puissent pas l'encercler. A pr?sent, il y avait trois hommes pr?s de lui, un avec une hache, un avec une ?p?e courte et un avec une lame incurv?e comme une faucille. Thanos garda son ?p?e proche de son corps et les observa car il ne voulait donner ? aucun des mercenaires la moindre chance de lui encombrer l'?p?e assez longtemps pour que les autres s'engouffrent dans la br?che. Le mercenaire ? droite de Thanos essaya de lui envoyer un coup de son ?p?e courte. Thanos para le coup en partie en le sentant rebondir bruyamment sur son armure. Un instinct le poussa ? se tourner et ? se baisser juste ? temps pour que la hache de l'homme de gauche lui passe au-dessus. Thanos taillada le voyou ? hauteur des chevilles pour le faire tomber, puis fit faire demi-tour ? son ?p?e et donna un coup en arri?re et entendit crier le premier homme qui se pr?cipita dessus. Celui qui avait la lame incurv?e attaqua avec plus de prudence. “Attaquez-le ! Tuez-le !” exigea Lucious, visiblement impatient. “Oh, et puis je vais le faire moi-m?me !” Le prince se joignit au combat et Thanos para son coup. Il pensait que Lucious ne l'aurait jamais attaqu? lui-m?me s'il n'y avait pas eu d'autre homme pour l'aider et que d'autres mercenaires allaient peut-?tre arriver. En fait, Lucious n'avait qu'? retarder les choses et Thanos risquerait de se retrouver submerg? par le simple nombre de ses adversaires. Par cons?quent, Thanos n'attendit pas mais attaqua. Il envoya coup apr?s coup, tant?t ? Lucious, tant?t au voyou que Lucious avait emmen? avec lui, et imposa son propre rythme. Puis, brusquement, il s'arr?ta. La parade de l'adversaire ? la faucille rencontra de l'air. Thanos profita de l'ouverture et la t?te de l'homme vola. Thanos se jeta imm?diatement sur Lucious et les deux ?p?es s'entrechoqu?rent. Lucious lui envoya des coups de pied mais Thanos les ?vita tous puis tendit le bras par-dessus la garde de l'?p?e de Lucious pour mettre la main sur le pommeau. Thanos tira vers le haut, arracha l'?p?e aux mains de Lucious puis donna un coup de c?t?. Sa lame rebondit sur le plastron de Lucious avec un bruit m?tallique. Lucious sortit un poignard et Thanos changea de prise sur son ?p?e, envoyant un coup bas avec l'extr?mit? de la poign?e pour que la garde accroche le genou de Lucious. Il tira et Lucious tomba. Thanos lui enleva le poignard de la main d'un coup de pied violent. “R?p?te-moi que la compassion est mon point faible”, dit Thanos en levant la pointe de son ?p?e jusqu'? la gorge de Lucious. “Tu ne ferais jamais ?a”, dit Lucious. “Tu essaies juste de me faire peur.” “Te faire peur ?” dit Thanos. “Si je croyais qu'il ?tait possible de te faire peur, je t'aurais fait presque mourir de peur il y a des ann?es. Non, on va en finir.” “En finir ?” dit Lucious. “Impossible que ?a finisse, Thanos. Il faut d'abord que je gagne.” “Tu vas devoir ?tre extr?mement patient pour ?a”, lui assura Thanos. Il leva l'?p?e. Il fallait qu'il le fasse. Il fallait arr?ter Lucious. “Thanos !” Thanos regarda au loin quand il entendit la voix de Stephania. A son grand ?tonnement, il la vit approcher seule au grand galop. Elle portait une tenue d'?quitation qui ?tait tr?s loin d'avoir l'?l?gance de ses robes habituelles et, vu son ?tat d?braill?, il semblait qu'elle l'ait mise ? la h?te. “Thanos, ne fais pas ?a !” cria-t-elle en se rapprochant. Thanos serra son ?p?e plus fort. “Apr?s tout ce qu'il a fait, crois-tu qu'il ne le m?rite pas ?” “Ce n'est pas la question”, dit Stephania en mettant pied ? terre et en se rapprochant. “Ce qui compte, c'est ce que tu m?rites, toi. Si tu le tues, ils te tueront pour cette raison. C'est comme ?a que le syst?me fonctionne et je refuse de te perdre comme ?a.” “?coute-la, Thanos”, dit Lucious, allong? par terre. “Tais-toi”, dit s?chement Stephania. “Ou veux-tu l'encourager ? te tuer ?” “Il faut l'arr?ter”, dit Thanos. “Pas comme ?a”, insista Stephania. Thanos sentit sa main se poser sur son bras et repousser l'?p?e. “Pas d'une fa?on qui te condamne ? mort. Tu as jur? que tu serais ? moi le restant de ta notre vie. Veux-tu vraiment qu'elle soit si courte ?” “Stephania —” commen?a Thanos, mais elle ne le laissa pas finir. “Et moi ?” demanda-t-elle. “Dans quelle situation serai-je si mon mari tue l'h?ritier du tr?ne ? Non, Thanos. Arr?te. Fais-le pour moi.” Si n'importe qui d'autre avait demand?, Thanos aurait quand m?me pu tuer Lucious. Il y avait trop de choses en jeu. Cependant, il ne pouvait pas risquer de perdre Stephania. Il abattit son ?p?e dans la terre, deux centim?tres ? c?t? de la t?te de Lucious. Lucious roulait par terre et s'?loignait d?j? en se pr?cipitant vers son cheval. “Tu le regretteras !” cria Lucious. “Je te promets que tu le regretteras !” CHAPITRE CINQ Thanos vit les gardes qui l'attendaient quand ils repass?rent les portes de la cit?, retournant chez eux, lui et Stephania. Il leva le menton et continua ? avancer. Il s'y ?tait attendu et il ne les fuirait pas. Visiblement, Stephania les aper?ut elle aussi. Thanos la vit se raidir sur sa selle. De d?tendue, elle devint guind?e et formelle en un instant. C'?tait comme si un masque s'?tait superpos? ? ses traits et Thanos se surprit ? mettre automatiquement une main sur la sienne pendant qu'elle tenait les r?nes. Les gardes crois?rent leurs hallebardes pour leur barrer le chemin quand ils approch?rent et Thanos arr?ta son cheval. Il s'interposa entre Stephania et les gardes juste au cas o? Lucious aurait d'une fa?on ou d'une autre soudoy? des hommes pour l'attaquer. Il vit un officier sortir du groupe de gardes et le saluer. “Prince Thanos, bienvenue ? Delos. Mes hommes et moi-m?me avons re?u l'ordre de vous emmener voir le roi.” “Et si mon mari ne souhaite pas faire le trajet avec vous ?” demanda Stephania sur un ton qui aurait pu commander l'Empire tout entier. “Pardonnez-moi, madame”, dit l'officier, “mais les ordres que le roi nous a donn?s ?taient clairs.” Thanos leva une main avant que Stephania ne puisse protester. “Je comprends”, dit-il. “Je vais vous suivre.” Les gardes ouvrirent la marche et eurent le m?rite de faire ressembler la convocation ? une escorte comme promis. Ils leur firent traverser Delos et Thanos remarqua que l'itin?raire qu'ils avaient choisi passait par les endroits les plus beaux de la cit?, se cantonnait aux avenues long?es d'arbres qui contenaient des maisons de nobles et ?vitait les parties les moins d?sirables m?me quand elles auraient permis de raccourcir le trajet. Peut-?tre essayaient-ils simplement de rester dans les zones les plus s?res, ou peut-?tre pensaient-ils que des nobles comme Thanos et Stephania ne voulaient pas voir la mis?re qui r?gnait ailleurs. Bient?t, les murailles du ch?teau les surplomb?rent. Les gardes les firent entrer par les portes et les palefreniers prirent leurs chevaux. La travers?e du ch?teau leur parut plus confin?e car de nombreux gardes les entouraient dans les ?troits couloirs du ch?teau. Stephania prit la main ? Thanos et il la serra doucement pour la rassurer. Quand ils atteignirent les appartements royaux, les membres de la garde du corps royale leur bloqu?rent le passage ? la porte. “Le roi souhaite parler au Prince Thanos seul”, dit l'un d'eux. “Je suis son ?pouse”, dit Stephania dit sur un ton si glacial qu'il aurait convaincu la plupart des gens de s'?carter imm?diatement, pensa Thanos. Ce ton ne sembla pas du tout impressionner le garde du corps royal. “Peu importe.” “?a ira”, dit Thanos. Quand il s'avan?a ? l'int?rieur, le roi l'attendait. Le Roi Claudius s'appuyait sur une ?p?e dont la garde formait les tentacules d'un kraken qui se contorsionnait. Elle lui arrivait presque au niveau de la poitrine et Thanos ?tait s?r que sa lame ?tait tranchante comme un rasoir. Thanos entendit la porte se refermer derri?re lui avec un clic. “Lucious m'a dit ce que tu as fait”, dit le roi. “Je suis s?r qu'il est venu vous voir ? toute vitesse”, r?pondit Thanos. “Vous a-t-il aussi dit ce qu'il faisait ? ce moment-l? ?” “Il faisait ce qu'on lui avait ordonn? de faire”, r?pondit s?chement le roi, “afin de mater la r?bellion. Et toi, tu es parti l'attaquer. Tu as tu? ses hommes. Il dit que tu l'avais vaincu par la ruse et que tu l'aurais tu? lui aussi si Stephania n'?tait pas intervenue.” “En quoi le massacre des villageois aide-t-il la r?bellion ?” r?pliqua Thanos. “Tu t'int?resses plus aux paysans qu'? tes propres actions”, dit le Roi Claudius. Il souleva l'?p?e qu'il tenait comme pour la soupeser. “Attaquer le fils du roi, c'est de la trahison.” “Je suis le fils du roi”, lui rappela Thanos. “Vous n'avez pas fait ex?cuter Lucious quand il a essay? de me faire assassiner.” “C'est uniquement gr?ce ? cela que tu es encore en vie”, r?pondit le Roi Claudius. “Tu es mon fils mais Lucious l'est aussi. Tu n'as pas le droit de le menacer.” Alors, la col?re monta en Thanos. “Apparemment, je n'ai aucun droit. On ne reconna?t m?me pas qui je suis.” Dans un coin de la pi?ce, il y avait des statues qui repr?sentaient les anc?tres c?l?bres de la lign?e royale. Ils n'?taient pas mis en valeur. En fait, ils ?taient presque cach?s, comme si le roi ne voulait pas qu'on lui rappelle leur existence. Cependant, Thanos les montra du doigt. “Lucious peut regarder ces statues et affirmer que sa l?gitimit? remonte ? l'?poque de la cr?ation de l'Empire”, dit-il. “Il peut revendiquer les droits de tous ceux qui ont conquis le tr?ne quand les Anciens ont quitt? Delos. Et moi, j'ai quoi ? De vagues rumeurs sur mon origine ? Des images ? moiti? oubli?es de parents qui pourraient ?tre des illusions ?” Le Roi Claudius se rendit fi?rement ? son grand fauteuil. Il s'assit et tint son ?p?e tout contre ses genoux. “Tu as une place honorable ? la cour”, dit-il. “Une place honorable ? la cour ?” r?pondit Thanos. “J'ai une place de prince de rechange dont personne ne veut. M?me si Lucious a essay? de me faire assassiner sur Haylon, c'est quand m?me vous et personne d'autre qui m'y avez envoy?.” “Il faut mater la r?bellion o? qu'elle se trouve”, r?pliqua le roi. Thanos le vit glisser le pouce le long du tranchant de l'?p?e qu'il tenait. “Il fallait que tu l’apprennes.” “Oh, j'ai appris”, dit Thanos en traversant la pi?ce pour aller se placer devant son p?re. “J'ai appris que vous pr?f?reriez vous d?barrasser de moi que me reconna?tre. Je suis votre fils a?n?. Selon les lois du royaume, je devrais ?tre votre h?ritier. Le fils a?n? est l'h?ritier depuis les premiers jours de Delos.” “Le fils a?n? qui survit”, dit tranquillement le roi. “Penses-tu que tu aurais surv?cu si ?a s'?tait su ?” “Ne pr?tendez pas que vous me prot?giez”, r?pondit Thanos. “C'est vous-m?me que vous prot?giez.” “C'est mieux que perdre son temps ? se battre pour des gens qui le m?ritent m?me pas”, dit le roi. “Sais-tu quelle impression ?a donne quand tu prot?ges des paysans qui devraient conna?tre leur rang ?” “Il faudrait que quelqu'un s'occupe d'eux !” cria Thanos. Il ne pouvait plus s'emp?cher d'?lever la voix, puisque cela semblait ?tre le seul moyen de se faire comprendre par son p?re. Peut-?tre que, s'il pouvait lui faire comprendre, alors, l'Empire pourrait finalement ?voluer dans un sens positif. “ Il faudrait que leurs souverains ne soient pas des ennemis dont le but est de les tuer mais des gens dignes de respect. Il faudrait que leur vie signifie quelque chose pour nous, alors que nous nous en d?barrassons tout en nous adonnant ? des soir?es luxueuses !” Quand Thanos se tut, le roi resta silencieux tr?s longtemps. Thanos vit la furie qui luisait dans ses yeux. Aucun probl?me. Elle ?tait presque l'?gale de la col?re que ressentait Thanos. “A genoux !” dit finalement le Roi Claudius. Thanos n'h?sita qu'une seconde mais, visiblement, c'?tait bien assez. “A genoux !!” hurla le roi. “Ou veux-tu que je demande qu'on t'y oblige ? Je suis quand m?me le roi, ici !” Thanos s'agenouilla sur le sol dur en pierre devant le fauteuil du roi. Il vit le roi lever l'?p?e qu'il tenait avec difficult?, comme s'il ne l'avait pas fait depuis longtemps. Thanos pensa ? l'?p?e qu'il portait au flanc. Il savait sans le moindre doute que, si la situation d?g?n?rait en bataille entre lui et le roi, il gagnerait. Il ?tait plus jeune, plus fort et s'?tait entra?n? avec les meilleurs ma?tres du Stade. Cependant, cela reviendrait ? tuer son p?re. Pire encore, ce serait vraiment de la trahison. “J'ai appris beaucoup de choses dans ma vie”, dit le roi pendant que l'?p?e restait sur l'?paule de Thanos, pr?te. “Quand j'avais ton ?ge, j'?tais comme toi. J'?tais jeune, j'?tais fort. Je me battais, et je me battais bien. J'ai tu? des hommes ? la guerre et dans des duels au Stade. J'ai essay? de me battre pour tout ce que je pensais ?tre juste.” “Que vous est-il arriv? ?” demanda Thanos. Le roi retroussa une l?vre, m?prisant. “J'ai m?ri. J'ai appris que, si tu laisses faire le peuple, il ne vient pas t'?lever comme un seul homme. Il essaie plut?t de t'an?antir. J'ai essay? de faire preuve de compassion et, en v?rit?, la compassion n'est que de la stupidit?. Si un homme s'?l?ve contre toi, alors, tu le d?truis parce que, si tu ne le fais pas, c'est lui qui te d?truit.” “Ou on en fait son ami,” dit Thanos, “et il nous aide ? am?liorer les choses.” “Ami ?” demanda le Roi Claudius en levant un peu plus son ?p?e. “Les hommes de pouvoir n'ont pas d'amis. Ils ont des alli?s, des domestiques et une suite, mais ne t'imagine pas un seul moment qu'ils ne se dresseront pas contre toi. Un homme sens? les force ? rester ? leur place ou les voit se dresser contre lui.” “Le peuple m?rite mieux que ?a”, insista Thanos. “Tu penses que l'on obtient ce qu'on m?rite ?” hurla le Roi Claudius. “On obtient ce qu'on prend ! Tu parles comme si tu croyais que le peuple est notre ?gal. Il ne l'est pas. D?s notre naissance, on nous ?l?ve pour les gouverner. Nous sommes plus ?duqu?s, plus forts, meilleurs dans tous les domaines. Si, toi, tu veux installer les porchers dans les ch?teaux, ? c?t? de chez toi, moi, je veux leur montrer qu'ils doivent rester dans leur porcherie. Lucious le comprend, lui.” “Lucious ne comprend que la cruaut?”, dit Thanos. “Et c'est par la cruaut? qu'il faut gouverner !” Alors, Thanos vit le roi abattre l'?p?e. Il aurait peut-?tre pu l'?viter. Il aurait peut-?tre m?me pu tenter de se saisir de sa propre ?p?e. Au lieu de ?a, il resta agenouill? l? et regarda l'?p?e s'abattre vers sa gorge, observa la trajectoire de l'acier dans la lumi?re du soleil. La lame s'arr?ta juste avant de lui couper la gorge, mais de peu. Thanos sentit le tranchant de la lame lui piquer la chair mais il ne r?agit pas, m?me s'il en avait fortement envie. “Tu n'as pas tressailli”, dit le Roi Claudius. “Tu as tout juste clign? des yeux. Lucious aurait tressailli. Il aurait probablement pri? pour qu'on lui ?pargne la vie. C'est l? son point faible. Cela dit, Lucious a la force de faire le n?cessaire pour perp?tuer notre pouvoir. C'est pour ?a qu'il est mon h?ritier. Tant que tu ne parviendras pas ? arracher cette faiblesse de ton c?ur, je ne te reconna?trai pas. Je ne dirai pas que tu es mon enfant. Et si tu attaques mon fils reconnu une fois de plus, je te d?capiterai. Tu comprends ?” Thanos se releva. Il en avait assez de s'agenouiller devant cet homme. “Je comprends, P?re. Je vous comprends parfaitement.” Il se retourna et marcha vers les portes sans attendre la permission de le faire. Qu'est-ce que son p?re pouvait faire ? Le rappeler serait un signe de faiblesse. Thanos sortit. Stephania l'attendait. On aurait dit qu'elle avait fait semblant d'?tre calme pour ne pas para?tre faible devant les gardes du corps, mais, d?s que Thanos sortit, elle se pr?cipita vers lui. “Tu vas bien ?” demanda Stephania en levant une main vers sa joue. Quand elle la baissa, Thanos vit qu'elle ?tait tach?e de sang. “Thanos, tu saignes !” “Ce n'est qu'une ?gratignure”, lui assura Thanos. “J'ai probablement r?colt? pire lors du combat avec Lucious.” “Que s'est-il pass? l?-dedans ?” demanda-t-elle. Thanos se for?a ? sourire mais le r?sultat fut plus crisp? qu'il ne l'aurait voulu. “Sa majest? a choisi de me rappeler que, bien que je sois prince, je vaux moins que Lucious ? ses yeux.” Stephania lui posa les mains sur les ?paules. “Je te l'ai d?j? dit, Thanos. Il ne fallait pas faire ?a. Tu ne peux pas prendre de tels risques. Il faut que tu me promettes de me faire confiance et de ne plus jamais refaire une telle b?tise. Promets-le moi.” Il hocha la t?te. “Pour toi, mon amour, je le promets.” Il le disait s?rieusement. Aller affronter Lucious comme ?a, ? visage d?couvert, ce n'?tait pas la bonne strat?gie parce que ?a ne pouvait pas donner de r?sultat suffisant. Le probl?me, ce n'?tait pas Lucious, c'?tait l'Empire tout entier. Il avait bri?vement cru qu'il pourrait peut-?tre persuader le roi de faire ?voluer la situation mais, en v?rit?, son p?re ne voulait pas que la situation ?volue. Non. A pr?sent, la seule chose ? faire ?tait de trouver des moyens d'aider la r?bellion. Pas seulement les rebelles de Haylon mais tous les rebelles. Seul, Thanos ne pourrait pas accomplir grand chose mais, ensemble, ils arriveraient peut-?tre ? renverser l'Empire. CHAPITRE SIX Sur l'?le Au-Del? du Brouillard, partout o? Ceres regardait, elle voyait des choses qui la for?aient ? s'arr?ter et ? contempler leur ?trange beaut?. Des faucons aux plumes aux couleurs de l'arc-en-ciel d?crivaient des cercles en chassant leurs proies qui couraient ? terre, mais, ? leur tour, ils se faisaient chasser par un serpent ail? qui finit par s'installer sur une fl?che de marbre blanc. Elle marchait sur l'herbe ?meraude de l'?le et avait l'impression de savoir exactement o? il fallait qu'elle aille. Dans sa vision, elle s'?tait vue l?-bas, au sommet de la colline qui s'?levait au loin, o? des tours aux couleurs de l'arc-en-ciel d?passaient comme les piquants d'un grand et myst?rieux animal. Des fleurs poussaient sur la mont?e qui conduisait ? la colline et Ceres se baissa pour les toucher. Cependant, quand elle les effleura des doigts, elle constata que leurs p?tales ?taient en pierre fine comme du papier. Quelqu'un les avait-il sculpt?es aussi finement ou ?taient-elles, d'une fa?on ou d'une autre, en roche vivante ? Le seul fait de pouvoir imaginer cette possibilit? lui montrait que cet endroit ?tait vraiment tr?s ?trange. Ceres continua de marcher et vers l'endroit o? elle savait, o? elle esp?rait, que sa m?re serait en train de l'attendre. Elle atteignit les pentes inf?rieures de la colline et commen?a l'ascension. Autour d'elle, l'?le ?tait pleine de vie. Des abeilles bourdonnaient dans l'herbe basse. Une cr?ature ressemblant ? un cerf mais avec des dents de cristal ? la place des bois regarda longtemps Ceres avant de s'enfuir d'un bond. Pourtant, malgr? les b?timents qui parsemaient le paysage autour d'elle, elle ne voyait personne sur cette ?le. Les b?timents les plus proches de Ceres lui semblaient vides et immacul?s, comme une pi?ce que l'on n'avait quitt?e que quelques instants auparavant. Ceres continua de monter vers le sommet de la colline, vers l'endroit o? les tours formaient un cercle autour d'une large zone herbeuse et lui offraient une vue sur tout le reste de l'?le si elle regardait entre elles. Pourtant, elle ne regarda pas dans cette direction. Au lieu de ?a, Ceres se mit ? regarder au centre du cercle, o? une silhouette solitaire se tenait, v?tue d'une robe blanc pur. Contrairement ? sa vision, la silhouette n'?tait ni trouble ni floue. Elle ?tait l?, aussi nette et r?elle que Ceres elle-m?me. Ceres s'avan?a presque assez pr?s pour la toucher. Ce ne pouvait ?tre qu'une seule personne. “M?re ?” “Ceres.” La silhouette en robe se lan?a en avant au m?me moment que Ceres et, quand elles se rencontr?rent, elles se serr?rent l'une contre l'autre avec une violence qui semblait exprimer toutes les choses que Ceres ne savait pas comment dire : l'impatience avec laquelle elle avait attendu ce moment, ? quel point elle l'aimait, ? quel point elle ?tait ?tonn?e de rencontrer en chair et en os la femme qu'elle n'avait rencontr?e que dans une vision. “Je savais que tu viendrais”, dit la femme, sa m?re, en reculant, “mais, m?me en le sachant, c'est tellement diff?rent de te voir en chair et en os.” Alors, elle retroussa la capuche de sa robe et il sembla presque impossible que cette femme puisse ?tre sa m?re. Sa s?ur, peut-?tre, parce qu'elle avait les m?mes cheveux et les m?mes traits. Pour Ceres, c'?tait presque comme si elle se regardait dans un miroir. Cette femme avait l'air trop jeune pour ?tre sa m?re. “Je ne comprends pas”, dit Ceres. “Tu es bien ma m?re ?” “Je le suis.” Elle tendit les bras et serra Ceres contre elle une fois de plus. “Je sais que ?a doit avoir l'air ?trange, mais c'est vrai. Mon esp?ce peut vivre longtemps. Je m'appelle Lycine.” Un nom. Ceres avait finalement un nom pour sa m?re. D'une fa?on ou d'une autre, cela comptait plus que tout le reste. ?a suffisait ? donner sens ? son voyage. Elle aurait voulu rester l? ? contempler sa m?re pour toujours. Cela dit, elle avait quand m?me des questions ? lui poser. Elle en avait tellement qu'elles sortirent ? toute vitesse. “Quel est cet endroit ?” demanda-t-elle. “Pourquoi es-tu toute seule ici ? Attends, que veux-tu dire par ‘mon esp?ce’ ?” Lycine sourit et s'assit dans l'herbe. Ceres la rejoignit et, quand elle s'assit, elle se rendit compte que ce n'?tait pas que de l'herbe. Sous l'herbe, elle vit des fragments de pierre qui formaient une mosa?que depuis longtemps recouverte par la prairie qui les entourait. “Il est difficile de r?pondre ? toutes tes questions”, dit Lycine, “surtout si on tient compte du fait que j'ai moi aussi des quantit?s de questions ? te poser sur toi, sur ta vie. Sur tout, Ceres. Cela dit, je vais essayer. Et si on le faisait ? l'ancienne ? Une question chacune ? tour de r?le ?” Ceres ne savait pas quoi r?pondre ? cela, mais il semblait que sa m?re n'en ait pas encore fini. “Est-ce qu'on raconte encore les histoires des Anciens dans ton monde ?” “Oui”, dit Ceres. Elle avait toujours accord? plus d'attention aux histoires des seigneurs de guerre et de leurs exploits au Stade, mais elle en connaissait quelques-unes qui portaient sur les Anciens : ceux qui ?taient arriv?s avant l'humanit?, qui ressemblaient parfois aux hommes et semblaient parfois ?tre bien plus, qui avaient b?ti tant de choses puis les avaient perdues. “Attends, veux-tu dire que tu fais —” “Partie des Anciens, oui”, r?pondit Lycine. “C'?tait un de nos lieux d'habitation, avant que … bon, il y a des choses dont il vaut mieux ne pas encore parler. De plus, tu me dois une r?ponse. Donc, dis-moi comment a ?t? ta vie. Je ne pouvais pas ?tre ? tes c?t?s, mais j'ai pass? beaucoup de temps ? essayer d'imaginer comment tu vivais.” Ceres fit de son mieux, m?me si elle ne savait pas o? commencer. Elle dit ? Lycine qu'elle avait grandi ? la forge de son p?re, lui parla de ses fr?res. Elle lui parla de la r?bellion et du Stade. Les noms de Rexus et de Thanos sortirent ?touff?s et fractur?s mais elle arriva quand m?me ? lui parler d'eux. “Oh, ma ch?rie”, dit sa m?re en posant une main sur la sienne. “J'aurais voulu pouvoir t'?pargner un peu de cette douleur. J'aurais voulu pouvoir ?tre l? pour toi.” “Pourquoi ne le pouvais-tu pas ?” demanda Ceres. “Es-tu rest?e ici tout ce temps ?” “Oui”, dit Lycine. “Autrefois, cet endroit ?tait un des lieux d'habitation de mon peuple. Les autres l'ont abandonn?. Je l'ai moi aussi abandonn? pendant un certain temps mais, ces derni?res ann?es, il est devenu une esp?ce de sanctuaire. Et un lieu d'attente, ?videmment.” “D'attente ?” demanda Ceres. “Tu veux dire que tu m'y as attendue ?” Elle vit sa m?re hocher la t?te. “On dit que voir l'avenir est un don”, dit Lycine, “mais c'est aussi une sorte de prison. Si tu comprends ce qui va se passer, tu perds les choix que tu as quand tu ne le sais pas et tes souhaits les plus profonds ne p?sent plus bien lourd …” Sa m?re secoua la t?te et Ceres vit sa tristesse. “Ce n'est pas le moment de regretter le pass?. J'ai ma fille ? mes c?t?s et tu as un temps limit? pour apprendre ce que tu es venue apprendre.” Elle sourit et prit la main ? Ceres. “Marche avec moi.” *** Ceres eut l'impression de parcourir l'?le magique avec sa m?re pendant des jours. Ces vues, la pr?sence de sa m?re, c'?tait ? couper le souffle. Tout cela ressemblait ? un r?ve. Alors qu'elles marchaient, elles parlaient surtout de pouvoirs. Sa m?re essaya de les expliquer ? Ceres et cette derni?re essaya de comprendre. Il arriva une chose des plus ?tranges : alors que sa m?re parlait, Ceres avait l'impression que ses mots lui conf?raient r?ellement ces pouvoirs. M?me maintenant, alors qu'elles marchaient, Ceres sentait ces pouvoirs monter en elle, tourbillonner comme de la fum?e quand sa m?re lui touchait l'?paule. Il fallait qu'elle apprenne ? contr?ler ces pouvoirs et c'?tait pour cette raison qu'elle ?tait venue ici mais cela lui semblait moins important que la rencontre de sa m?re. “Notre sang t'a donn? des pouvoirs”, dit Lycine. “Les insulaires ont essay? de t'aider ? les lib?rer, n'est-ce pas ?” Ceres pensa ? Eoin et ? tous les exercices ?tranges qu'il l'avait forc?e ? ex?cuter. “Oui.” “Pour des gens qui ne sont pas de notre sang, ils comprennent bien le monde”, dit sa m?re. “Cependant, il y a des choses que m?me eux ne peuvent pas te montrer. As-tu d?j? transform? quelque chose en pierre ? Comme c'est un de mes talents, j'imagine que ce sera un des tiens.” “Transformer des choses en pierre ?” demanda Ceres. Elle ne comprenait pas. “Jusqu'? pr?sent, j'ai d?plac? des choses. J'ai ?t? plus rapide et plus forte. Ensuite —” Elle voulait en dire plus. Elle ne voulait pas que sa m?re ait une mauvaise opinion d'elle. “Et tes pouvoirs ont-ils tu? des choses qui ont essay? de te nuire ?” dit Lycine. Ceres hocha la t?te. “Tu ne dois pas en avoir honte, ma fille. Je n'ai pas vu grand chose de toi mais je sais ce que te r?serve ta destin?e. Tu es quelqu'un de bien. Tout ce que je pouvais esp?rer. En ce qui concerne la transformation des choses en pierre …” Elles s'arr?t?rent dans une prairie de fleurs violettes et jaunes et Ceres regarda sa m?re cueillir une petite fleur aux p?tales d?licats et soyeux dans la prairie. Par l'interm?diaire du contact avec sa m?re, elle sentit la fa?on dont les pouvoirs vacillaient en son for int?rieur. Ils lui semblaient familiers mais bien plus contr?l?s, ?labor?s, fa?onn?s. La pierre se r?pandit partout sur la fleur comme le gel sur une fen?tre, mais pas seulement ? la surface. Tout fut fini au bout d'une seconde et la m?re de Ceres tenait une des fleurs de pierre que Ceres avait vues dans les plaines de l'?le. “L'as-tu senti ?” demanda Lycine. Ceres hocha la t?te. “Mais comment l'as-tu fait ?” “Regarde encore.” Elle cueillit une autre fleur et, cette fois-ci, ce fut ? une lenteur incroyable qu'elle la transforma en un objet aux p?tales de marbre et ? la tige en granit. Ceres essaya de suivre le d?roulement des pouvoirs en son for int?rieur et c'?tait comme si ses propres pouvoirs r?agissaient ? ceux de sa m?re en essayant de les imiter. “Bien”, dit Lycine. “Ton sang conna?t ce pouvoir. Maintenant, ? toi d'essayer.” Elle passa une fleur ? Ceres. Ceres se pencha et se concentra en essayant de se saisir des pouvoirs qui l'habitaient et de les forcer ? adopter la forme qu'elle avait senti prendre ceux de sa m?re. La fleur explosa. “Eh bien”, dit Lycine en riant, “voil? quelque chose d'inattendu.” C'?tait extr?mement diff?rent de la fa?on dont la m?re avec laquelle elle avait grandi aurait r?agi. Elle avait battu Ceres ? chaque ?chec. Lycine se contenta de lui passer une autre fleur. “D?tends-toi”, dit-elle. “Tu sais d?j? quelles sensations cela devrait faire na?tre en toi. Prends ces sensations. Imagine-les. Rends-les vraies.” Ceres essaya de le faire en pensant ? ce qu'elle avait ressenti quand sa m?re avait transform? sa fleur. Elle prit la sensation et la remplit de ses pouvoirs comme son p?re aurait pu remplir un moule de fer ? la forge. “Ouvre les yeux, Ceres”, dit Lycine. Avant que sa m?re ne prononce ces mots, Ceres ne s'?tait m?me pas rendue compte qu'elle les avait ferm?s. Elle se for?a ? regarder, bien qu'? ce moment-ci cela lui fasse peur. Cela dit, quand elle eut regard?, elle eut peine ? en croire ses yeux. Elle tenait une seule fleur parfaitement form?e et p?trifi?e, transform?e par ses pouvoirs en une pierre ressemblant ? du basalte. “C'est moi qui ai fait ?a ?” demanda Ceres. Malgr? tout ce qu'elle pouvait faire d'autre, cela lui semblait quand m?me quasi-impossible. “Oui”, dit sa m?re, et Ceres entendit sa fiert?. “Maintenant, il suffit que tu apprennes ? le faire sans fermer les yeux.” Cela prit plus longtemps et il fallut beaucoup plus de fleurs. Pourtant, Ceres se rendit compte qu'elle appr?ciait son entra?nement. Plus encore, ? chaque fois que sa m?re souriait ? ses efforts, Ceres sentait l'amour appara?tre subitement en elle et s'y r?pandre. Les minutes devinrent des heures mais elle continua de progresser. “Oui”, dit enfin sa m?re, “c'est parfait.” C'?tait plus que ?a : c'?tait facile. Facile d'aller chercher les pouvoirs qui se trouvaient en elle. Facile de les canaliser. Facile d'obtenir une fleur en pierre parfaitement pr?serv?e. Ce ne fut que lorsque l'excitation de l'entra?nement se calma que Ceres se rendit compte qu'elle ?tait ?puis?e. “C'est normal”, dit sa m?re en lui prenant la main. “Tes pouvoirs consomment de l'?nergie et des efforts. M?me le plus fort d'entre nous ne pourrait pas en faire plus ? la fois.” Elle sourit. “Cela dit, maintenant, tes pouvoirs se connaissent. Ils se d?clencheront quand quelqu'un te menacera ou quand tu les invoqueras. Ils en feront ?galement plus.” Ceres sentit sa m?re d?clencher une minuscule partie de ses pouvoirs et comprit tout le potentiel de ses pouvoirs personnels. Elle vit les b?timents et les jardins de pierre d'un nouvel ?il, les envisagea comme des choses qui avaient ?t? construites avec ces pouvoirs et fa?onn?es d'une mani?re qu'aucun humain ne pouvait comprendre. D'une fa?on ou d'une autre, elle se sentit pleine, compl?te. Une partie de la joie de sa m?re sembla dispara?tre de son visage. Ceres l'entendit soupirer. “Que se passe-t-il ?” demanda Ceres. “J'aimerais seulement que nous ayons plus de temps ? passer ensemble”, dit Lycine. “J'adorerais te faire visiter ces tours et te raconter l'histoire de mon peuple. J'adorerais tout savoir sur ce Thanos que tu aimais tant et te montrer les jardins o? le soleil n'a jamais touch? les arbres.” “Alors, fais-le”, dit Ceres. Elle avait la sensation qu'elle aurait pu ?ternellement rester en ce lieu. “Montre-moi tout cela. Raconte-moi le pass?. Parle-moi de mon p?re et de ce qui est arriv? quand je suis n?e.” Cependant, sa m?re secoua la t?te. “C'est l? une chose que tu n'es pas encore pr?te ? entendre. En ce qui concerne le temps, je t'ai d?j? dit que la destin?e peut ?tre une prison, ma ch?rie, et tu as une destin?e plus grande que la plupart des gens.” “J'en ai aper?u des fragments”, admit Ceres en pensant aux r?ves qui l'avaient visit?e de fa?on r?currente sur le bateau. “Dans ce cas, tu sais pourquoi nous ne pouvons pas rester ici en famille, m?me si nous le voulons beaucoup toutes les deux”, dit sa m?re. “A moins que l'avenir ne nous r?serve du temps pour ?a. ?a et plus encore.” “Mais d'abord, il faut que je reparte, n'est-ce pas ?” dit Ceres. Sa m?re hocha la t?te. “Oui”, dit-elle. “Tu dois repartir, Ceres. Repartir lib?rer Delos de l'Empire, comme ta destin?e l'a toujours pr?vu.” CHAPITRE SEPT Stephania avait peine ? croire que ?a faisait d?j? six semaines qu'elle ?tait mari?e ? Thanos. Pourtant, le banquet de la Lune Rouge arrivait et ?a faisait bien six semaines. Six semaines de b?atitude, toutes aussi merveilleuses qu'elle aurait pu l'esp?rer. “Tu es superbe”, dit-elle en regardant Thanos dans l'appartement qu'ils partageaient maintenant au ch?teau. Habill? de soie rouge fonc? d?cor?e d'or rouge et de rubis, il ?tait magnifique. Certains jours, elle avait peine ? croire qu'il ?tait ? elle. “Le rouge te va bien.” “On dirait que je suis couvert de sang”, r?pondit Thanos. “Ce qui est tout ? fait appropri?, vu que c'est la p?riode de la Lune Rouge”, fit remarquer Stephania. Elle se pencha vers lui pour l'embrasser. Elle aimait pouvoir le faire quand elle le voulait. Si elle avait eu plus de temps, elle aurait pu en profiter pour aller beaucoup plus loin. “De toute fa?on, ce que je porte importe peu”, dit Thanos. “Dans la chambre, personne ne me regardera quand tu seras l?, ? c?t? de moi.” Un autre homme aurait peut-?tre pu pr?senter ce compliment avec plus d'?l?gance mais le s?rieux avec lequel Thanos l'avait dit comptait plus pour Stephania que tous les meilleurs po?mes du monde. De plus, elle avait r?ellement pass? pas mal de temps ? s?lectionner la plus belle robe de Delos. Les nuances de rouge de cette robe chatoyaient comme si elle s'?tait envelopp?e d'une flamme. Elle avait m?me soudoy? le couturier pour qu'il s'assure que la livraison de l'original, qui ?tait destin? ? une femme noble de rang inf?rieur de la cit?, soit irr?m?diablement remise ? plus tard. Stephania offrit son bras ? Thanos, qui le prit, et l'escorta vers la grande salle de banquet o? ils avaient c?l?br? leur mariage. Cela faisait-il d?j? six semaines qu'ils ?taient mari?s ? Six semaines d'une b?atitude plus abondante que Stephania aurait pu le croire, ? vivre ensemble dans des appartements que la reine avait r?serv?s pour eux au c?ur du ch?teau. Certaines rumeurs disaient m?me que le roi pr?voyait d'accorder une nouvelle propri?t? ? Thanos ? quelque distance de la cit?. Pendant six semaines, ils avaient ?t? le couple le plus observ? de la cit? et on avait fait leur ?loge partout o? ils ?taient all?s. Stephania l'avait appr?ci?. “Souviens-toi bien de ne pas frapper Lucious quand tu le verras ce soir”, dit Stephania. “J'y suis arriv? jusqu'? pr?sent”, r?pondit Thanos. “Ne t'inqui?te pas.” Cependant, Stephania s'inqui?tait bel et bien. Elle ne voulait pas prendre le risque de perdre Thanos maintenant qu'elle l'avait comme mari. Elle ne voulait pas qu'il se fasse ex?cuter pour avoir attaqu? l'h?ritier du tr?ne, et pas seulement ? cause de la situation dans laquelle cela la plongerait. Peut-?tre avait-elle d'abord eu l'intention de faire de lui son mari pour le prestige que cela lui aurait rapport?, mais maintenant … maintenant, ? sa grande surprise, elle se rendait compte qu'elle l'aimait. “Le Prince Thanos et son ?pouse, Lady Stephania !” annon?a le h?raut stationn? ? la porte. Stephania sourit et s'appuya la t?te contre l'?paule de Thanos. Elle aimait toujours entendre dire ?a. Elle scruta la salle. Leur mariage avait ?t? con?u en blanc mais la soir?e actuelle brillait d'un ?clat rouge et noir. Le vin qu'elle voyait dans les verres ?tait d'un ?pais rouge sang, les tables de banquet pr?sentaient des viandes quasi-saignantes et tous les nobles pr?sents portaient les couleurs de la lune changeante. Stephania marchait avec Thanos bras dessus bras dessous, d?cryptant les relations ici et s'informant sur les derni?res intrigues l?, tout en appr?ciant simplement d'?tre regard?e. ?tait-ce Lady Christina qui s'?clipsait dans la p?nombre pour parler ? un prince marchand des ?les Lointaines ? La fille d'Isolde portait-elle moins de bijoux que d'habitude ? Bien s?r, elle vit que Lucious buvait trop, mangeait trop et reluquait les femmes. Stephania eut bri?vement l'impression qu'il croisait rapidement le regard avec elle et que ce regard aurait forc?ment pouss? Thanos ? se battre contre lui s'il l'avait vu. Il ?tait vraiment dommage que sa tentative d'empoisonnement au banquet de mariage se soit si mal d?roul?e. Si Thanos ne l'avait pas mis dans une col?re qui l'avait pouss? ? briser son verre ? vin, alors, Lucious se serait endormi le soir pour ne jamais se r?veiller. Le travail aurait ?t? fait. Êîíåö îçíàêîìèòåëüíîãî ôðàãìåíòà. Òåêñò ïðåäîñòàâëåí ÎÎÎ «ËèòÐåñ». Ïðî÷èòàéòå ýòó êíèãó öåëèêîì, êóïèâ ïîëíóþ ëåãàëüíóþ âåðñèþ (https://www.litres.ru/pages/biblio_book/?art=43694951&lfrom=688855901) íà ËèòÐåñ. Áåçîïàñíî îïëàòèòü êíèãó ìîæíî áàíêîâñêîé êàðòîé Visa, MasterCard, Maestro, ñî ñ÷åòà ìîáèëüíîãî òåëåôîíà, ñ ïëàòåæíîãî òåðìèíàëà, â ñàëîíå ÌÒÑ èëè Ñâÿçíîé, ÷åðåç PayPal, WebMoney, ßíäåêñ.Äåíüãè, QIWI Êîøåëåê, áîíóñíûìè êàðòàìè èëè äðóãèì óäîáíûì Âàì ñïîñîáîì.
Íàø ëèòåðàòóðíûé æóðíàë Ëó÷øåå ìåñòî äëÿ ðàçìåùåíèÿ ñâîèõ ïðîèçâåäåíèé ìîëîäûìè àâòîðàìè, ïîýòàìè; äëÿ ðåàëèçàöèè ñâîèõ òâîð÷åñêèõ èäåé è äëÿ òîãî, ÷òîáû âàøè ïðîèçâåäåíèÿ ñòàëè ïîïóëÿðíûìè è ÷èòàåìûìè. Åñëè âû, íåèçâåñòíûé ñîâðåìåííûé ïîýò èëè çàèíòåðåñîâàííûé ÷èòàòåëü - Âàñ æä¸ò íàø ëèòåðàòóðíûé æóðíàë.