Êîò ìóðëû÷åò... áåë è ñåð, Îí ïîíÿòëèâûé... Æèë äà áûë ýñýñýñýð - Òðàâû ìÿòíûå. Òðàâû ìÿòíûå, åùå Ìàòü-è-ìà÷åõà, Ðåêè ñ ñèãîì è ëåù¸ì - Ìàòåìàòèêà! Óðàâíåíèÿ, èêñû, Ñèíóñ-êîñèíóñ... Âîçëå ñòàäà âîë÷üÿ ñûòü... Ïàðíè ñ êîñàìè... Ñ÷àñòüå óøëîå ëîâè - Äåâêè ñ âîëîñîì Ðàñïåâàëè î ëþáâè Ñëàäêèì ãîëîñîì... À âåñåííåþ ïîð

Il Suffira D'Un Duc

Il Suffira D'Un Duc Bianca Blythe Elle doit se marier… Et il va lui trouver un ?poux. Une amusante com?die historique. Quand la m?re de Margaret Carberry la force ? l’accompagner ? l’?tage lors d’un bal, Margaret ne s’imagine pas que ce soit pour l’attacher sur un lit et fermer la porte ? double tour. H?las, la m?re de Margaret a pris l’initiative de d?clarer la r?putation de sa fille compromise – que Margaret ait envie ou non de recourir ? de telles strat?gies pour pi?ger un futur mari. Jasper Tierney, duc de Jevington, est surpris de tomber nez-?-nez avec une jeune femme ? moiti? d?v?tue ?tendue sur son lit. Il est encore plus stup?fait de d?couvrir son identit?. Margaret Carberry a la r?putation d’?tre une incorrigible collet mont?, pas une s?ductrice, quelle que soit la fa?on dont sa peau nue sur sa literie tente Jasper. Quand Margaret d?clare ne pas vouloir accepter les man?uvres de sa m?re et souhaiter trouver un mari par elle-m?me, Jasper promet de lui apporter son aide, de peur que la m?re de Margaret ne concocte une autre m?thode pour la placer dans une situation compromettante. Jasper est certain d’une chose : il n’a aucune envie de se marier. Tandis que Jasper travaille ? unir Margaret ? un duc de ses amis, la perspective d’un mariage forc? avec elle perd de son ignominie initiale. Peut-?tre a-t-il manqu? l’occasion de trouver le bonheur ? Table des Mati?res IL SUFFIRA D’UN DUC (#u03a117cc-24cb-53f9-889d-78a06032753c) Chapitre Un (#ufe427c6a-890e-5659-b33c-90d07b50dae0) Chapitre Deux (#uf161c2d6-0273-5a84-84fe-d1d381524ae6) Chapitre Trois (#uc5cfdf24-86da-5887-8c2a-40c9fb7bc619) Chapitre Quatre (#u565faeef-b74b-55ff-a64c-0dff91c4b008) Chapitre Cinq (#u0486d7f3-b151-511a-8d5c-26b678fe1c7d) Chapitre Six (#u3a03a91c-fde8-597a-beef-ebf855106777) Chapitre Sept (#u49d34577-4a17-5fab-b2e5-c798eca41ca7) Chapitre Huit (#u7342995d-fcfd-59d9-a25c-cd52a1e57adb) Chapitre Neuf (#u7c9dab1f-d40d-5fa6-b26b-de1c17655f56) Chapitre Dix (#uff2360fe-3a00-5855-9319-96512d677d87) Chapitre Onze (#u653b73cd-97cc-5eb9-bbdd-cc46cbf8c72b) Chapitre Douze (#u3364f65f-a1e9-5a0a-bcb0-d32c10153a7d) Chapitre Treize (#uaa3007ad-5576-5f6a-8d3c-ca7560bb75e7) Chapitre Quatorze (#u8d8e8cd2-5f19-51a2-94b3-d2575789ebba) Chapitre Quinze (#ub46cd389-cd30-50ec-9a52-5a153ba0c820) Chapitre Seize (#uc6bd9cbc-9f2b-5cc4-ac83-50f5130468de) Chapitre Dix-sept (#ubdbf7719-171d-5091-a5cc-0127ebf57245) Chapitre Dix-huit (#u47389280-8285-5bf5-9737-d8d5d878e349) Chapitre Dix-neuf (#ue090d129-b3c6-5f5c-9e85-06ba559cc9b2) Chapitre Vingt (#u18b77e7f-b4bf-5b7b-ade0-acb70ed9286d) Chapitre Vingt-et-un (#u4824409f-531c-5da4-8e41-60d7db4c6c8e) Chapitre Vingt-deux (#uc72cd45e-f9d3-5e4f-9dba-689f656d27db) Chapitre Vingt-trois (#u05621f96-f300-5d1b-92b7-82fe98b6164a) Chapitre Vingt-quatre (#u92324e68-67d0-5d7a-88cf-58f2cb71fa90) Chapitre vingt-cinq (#ueb3bf200-8388-599d-8893-9daa823247d6) Chapitre Vingt-six (#u521bf65e-1d3f-54fa-b69a-b17d295dd6ca) Chapitre Vingt-sept (#u017d711c-70ca-59a7-93c5-34ce4ae5be8a) Chapitre vingt-huit (#uf5b3eef8-9d64-5ae5-8052-657f72ea22e6) ?pilogue (#u9406615e-0e80-5510-9149-ac3eef34cf18) ? propos de l’auteure (#u9b1694bc-3233-56aa-b18d-390272d72c41) IL SUFFIRA D’UN DUC Elle doit se marier… Et il va lui trouver un ?poux. Quand la m?re de Margaret Carberry la force ? l’accompagner ? l’?tage lors d’un bal, Margaret ne s’imagine pas que ce soit pour l’attacher sur un lit et fermer la porte ? double tour. H?las, la m?re de Margaret a pris l’initiative de d?clarer la r?putation de sa fille compromise – que Margaret ait envie ou non de recourir ? de telles strat?gies pour pi?ger un futur mari. Jasper Tierney, duc de Jevington, est surpris de tomber nez-?-nez avec une jeune femme ? moiti? d?v?tue ?tendue sur son lit. Il est encore plus stup?fait de d?couvrir son identit?. Margaret Carberry a la r?putation d’?tre incorrigiblement r?serv?e, pas d’?tre une s?ductrice, peu importe combien sa peau nue sur la literie para?t tentante. Quand Margaret d?clare ne pas vouloir accepter les man?uvres de sa m?re et souhaiter trouver un mari par elle-m?me, Jasper promet de lui apporter son aide, de peur que la m?re de Margaret ne concocte un autre plan pour la placer dans une situation compromettante. Jasper est certain d’une chose : il n’a aucune envie de se marier. Tandis que Jasper travaille ? unir Margaret ? un duc de ses amis, la perspective d’un mariage forc? avec elle perd de son ignominie initiale. Peut-?tre a-t-il manqu? l’occasion de trouver le bonheur ? This is a work of fiction. Similarities to real people, places, or events are entirely coincidental. IL SUFFIRA D’UN DUC Copyright © 2020 Bianca Blythe. Written by Bianca Blythe. Translated by Sabine Ingrao. Published by Tektime. Chapitre Un –––––––– JUIN 1820 Londres La premi?re r?gle pour faire tapisserie ?tait de se procurer un excellent si?ge. Margaret Carberry, fille du magnat ?cossais du m?me nom et parente d’absolument aucun aristocrate, n’?tait plus une novice dans l’art de participer aux bals : sa m?re acceptait chaque invitation. Margaret se dirigeait d’un bon pas vers la partie la plus calme de la salle, le plus loin possible des musiciens et des danseurs, exactement comme elle le faisait ? chaque bal. Juliette et Genevi?ve seraient l?, et elle se fraya un chemin parmi la foule des invit?s avec expertise. Les femmes portaient de fines robes de bal blanches orn?es de rubans pastel et garnies de dentelle, une tentative ind?niable de contrecarrer la chaleur estivale. Les hommes arboraient des sourires contraints, visiblement mal ? l’aise avec leurs cravates savamment nou?es, leurs gilets aux couleurs chatoyantes et leurs redingotes un peu ?troites, cette derni?re ?troitesse ?tant le r?sultat d’une saison de festins. La deuxi?me r?gle pour faire tapisserie ?tait de n’interagir avec personne. Margaret n’avait pas besoin de voir l’expression des invit?s changer quand ils s’inqui?taient de devoir lui faire la conversation. Bien que l’?chelon sup?rieur de la bonne soci?t? ne soit pas enclin ? la timidit?, peu d?siraient ?tre vu en conversation avec elle. Les mamans entremetteuses et les fiers papas ne s’interrogeaient plus sur le bien-fond? de trainer leurs deuxi?mes et troisi?mes fils pour faire sa connaissance, et Margaret ne se sentait plus embarrass?e de tenter de converser avec la haute soci?t? : apr?s tout, les r?sultats demeuraient identiques. Les premi?res notes chantantes de son accent ?cossais rencontraient la d?sapprobation de la cr?me de la cr?me, et quand ils ?tablissaient l’identit? de son p?re, ils s’excusaient avec empressement. M?me ceux poss?dant des dettes consid?rables jugeaient pr?f?rable de supporter des rencontres embarrassantes avec leur tailleur et de sabrer dans le nombre de leurs domestiques que de mettre en danger leur respectabilit?. La haute soci?t? jugeait suspecte la pr?sence de Margaret aux occasionnelles festivit?s, voyant en elle un ind?sirable nivellement par le bas de la soci?t?, ?voquant des id?aux probablement partag?s par les paysans arm?s de fourches qui avaient un jour peupl? l’autre c?t? de la Manche. Le p?re de Margaret avait beau ?tre plus fortun? que beaucoup d’entre eux r?unis, elle-m?me avait beau avoir fr?quent? les m?mes finishing schools que les autres filles de la haute soci?t?, cela ne signifiait pas qu’elle en faisait partie. Margaret se trouverait tout simplement un bon si?ge, puis discuterait avec ses ch?res amies. M?me Maman ne s’attendrait pas ? ce qu’elle trouve un mari au dernier bal de la saison. Margaret sourit, alors que lors de sa premi?re participation ? un bal, ses joues avaient ?t? douloureuses ? force de feindre le ravissement. ? pr?sent, elle appr?ciait presque de se rendre ? ces soir?es mondaines. La foule s’?paissit, et Margaret posa une main sur son turban pour entraver tout instinct que les plumes qui le d?coraient pourraient avoir de prendre leur envol. La seule chose pire que de porter une monstruosit? emplum?e serait de porter une monstruosit? d?plum?e. Aucune importance. C’?tait la derni?re r?ception de la saison : c’?tait presque termin?. Margaret n’avait peut-?tre pas trouv? de mari, mais elle ne serait pas la premi?re femme ? ne pas ?tre fianc?e apr?s une seule saison. En outre, Papa n’?tait pas exactement appauvri. Maman conviendrait peut-?tre qu’elle n’avait nul besoin d’une seconde saison, et qu’elle pourrait tout simplement se trouver un cottage dans le Dorset et vivre heureuse, confortablement install?e avec ses volumes scientifiques pr?f?r?s. Les violons murmuraient plaisamment. Le corps de Margaret s’all?gea, et elle acc?l?ra le pas. Soudain, quelque chose de mouill? ruissela le long de sa robe, et une immanquable odeur d’alcool envahit ses narines. Elle fron?a les sourcils, mais elle n’avait pas r?v? – un liquide glac? lui coulait bien le long du dos. Sapristi ! Une fl?te de champagne se brisa sous son pied sur le parquet en pin cir? du duc de Jevington, g?chant le dessin ?labor? ? la craie, et Margaret r?prima un cri. Qu’avait-elle fait ? De toute ?vidence, la r?cente exp?rience de Margaret en mati?re de bals ne l’avait pas pr?par?e ? ?viter de renverser des verres. Du liquide s’?coula ? travers la robe de Margaret. Double sapristi. Elle t?tonna dans son dos avec h?sitation et baissa les yeux sur les ?clats de verre bris?, d?cor?s avec un motif dor? complexe. Eh bien, le motif ?tait ? pr?sent moins ?labor?. Quelques dames plus ?g?es lanc?rent ? Margaret des regards horrifi?s, ouvrant la bouche et fron?ant les sourcils avec un m?pris inhabituel pour l’?ventuelle formation de rides. Un valet de pied se pr?cipita, un mouchoir blanc serr? dans la main. Il plongea au sol pour rassembler les ?clats de verre. Certaines d?butantes tourn?rent le buste vers toute cette agitation et sourirent d’un air suffisant. Leurs manches bouffantes demeuraient sans la moindre t?che due au contact inopin? avec un liquide, et leur tissu recouvert de broderies d?gageait un parfum de perfection non-alcoolis?e. Le ventre de Margaret se tordit. Ce bal ?tait suppos? ?tre agr?able. Et elle venait de tout g?cher. Quelqu’un agrippa le coude de Margaret, et lorsqu’elle se retourna, elle vit sa propre m?re. — J’ai vu ce qui s’est pass?, dit Maman d’un ton brusque. Comme c’?tait maladroit de votre part. Je suis accourue aussit?t. — Je-Je suis d?sol?e, b?gaya Margaret, prise de court par l’apparition impromptue de sa m?re. Je ne sais pas comment… Maman agita la main d’une mani?re d?sinvolte peu habituelle chez elle. — Cela n’a aucune importance, ma ch?re. Margaret en resta bouche b?e. La plupart des choses ?taient d’une importance capitale pour Maman. Faire une bonne impression au duc de Jevington se classait probablement en t?te des d?sirs de Maman. C’?tait le bal du duc, et il ne s’?prendrait tr?s probablement pas d’une femme qui avait transform? son parquet cir? et ?tincelant en zone dangereuse. Le duc ne se serait ?videmment pas ?pris d’elle, m?me si Margaret n’avait pas accidentellement renvers? un verre de champagne. M?me d’autres jeunes femmes faisant tapisserie jugeaient Margaret sans int?r?t. Aucun duc ne d?sirait avoir une duchesse qui bafouillait quand elle parlait et dont les joues rougissaient ? intervalles r?guliers. La capacit? de Margaret ? ?noncer des faits scientifiques avec le m?me enthousiasme que d’autres mettaient ? vanter leurs vagues relations avec la noblesse, ?tait une pi?tre consolation. — Il faut vous s?cher. Maman passa le bras de Margaret sous le sien, comme si elle craignait que Margaret ne d?cide de gambader vers les autres danseurs pour entamer un quadrille dans sa tenue d?goulinante. Elles progress?rent lentement vers la sortie, comme un plus grand nombre de gens affluaient vers la salle. Certaines personnes regard?rent Margaret avec curiosit?, se demandant peut-?tre pourquoi elle avait d?cid? qu’une musique agr?able, la danse et la nourriture ?taient des exp?riences ? d?laisser, plut?t qu’? savourer. D’autres ?taient occup?s ? lever la t?te vers les merveilles peintes au plafond, comprenant des ch?rubins et des cieux c?rul?ens, m?me si on ne voyait fr?quemment ni les uns ni les autres au-dessus de Grosvenore Square. Enfin, Margaret et sa m?re purent franchir les solides portes en bois sculpt? et se retrouv?rent sur l’?tincelant carrelage noir et blanc du vestibule du duc. Margaret se dirigea vers le vestiaire. Partir en avance ?tait embarrassant, mais au moins elles n’avaient pas aper?u le duc : cela devait ?tre consid?r? comme une victoire. Le moment manquait de gloire, mais Margaret releva tout de m?me le menton. De l’alcool lui d?goulina le long du dos, et elle frissonna. Maman tira sur la manche de Margaret. — Allons ? l’?tage. — ? l’?tage ? dit Margaret d’une voix tremblante. M-Mais. Margaret s’arr?ta. Les invit?s ne s’aventuraient pas dans les ?tages. Elle se sentit ridicule de devoir rappeler les r?gles de l’?tiquette ? sa m?re. Apr?s tout, c’?tait sa m?re qui les lui avait enseign?es. Maman laissa ?chapper un petit gloussement, et Maman ne gloussait jamais. Margaret la regarda d’un air soup?onneux. Sa m?re agissait de fa?on tr?s ?trange. Margaret avait souvent souhait? que sa m?re soit moins stricte et cat?gorique, mais elle ne s’?tait certainement pas attendue ? voir Maman se transformer en une femme qui batifole dans la r?sidence du duc. — Ne soyez pas aussi collet mont?, ma ch?re, dit Maman. Si je dis que c’est convenable, ?a l’est. Maman avait toujours ?t? l’incarnation de la biens?ance, auparavant. Margaret h?sita, mais sa m?re la tira d’un coup sec vers un escalier imposant. Un frisson, ? ne pas mettre uniquement sur le compte du champagne renvers?, descendit furtivement le long de la colonne vert?brale de Margaret. — Nous ne devrions pas aller l?, dit Margaret. Ce sont les appartements du duc. — Balivernes, chuchota Maman. Vous ne pouvez pas garder du champagne sur votre robe. C’est inconvenant. En outre, le duc est dans la salle de bal. Les yeux de Maman p?till?rent, et ses l?vres rest?rent recourb?es d’une fa?on plus commun?ment aper?ue chez les gens assistant ? un op?ra-comique. Elle entreprit l’ascension des marches de marbre avec d?termination, balayant l’ourlet de sa robe contre la balustrade avec une telle force que certains des rubans qui s’y trouvaient cousus se d?nou?rent. Visiblement, la femme de chambre de Maman n’avait pas ?t? pr?par?e ? l’?nergie de Maman. Margaret fr?mit ? l’id?e de ce que Maman pourrait faire ? l’?tage, o? elle risquait de c?der ? l’envie de fureter partout. Maman pouvait difficilement errer seule dans les recoins priv?s de la r?sidence. Margaret jeta un coup d’?il en direction du majordome. Heureusement, il ?tait occup? ? surveiller la porte – pas ce qui se passait ? l’int?rieur de la r?sidence. Margaret soupira et suivit sa m?re, glissant une main gant?e de dentelle sur la rampe. Dans des cadres dor?s, des peintures de diff?rents paysages magnifiques, vraisemblablement les immenses terres du duc, garnissaient les escaliers. Tout ?tait superbe, m?me s’il ?tait peu probable que des amateurs d’art ne se hissent en haut des marches pour d?tailler les peintures. S’il y avait d’autres peintures dans la r?sidence, elles devaient ?tre encore plus exceptionnelles. Le pallier non-?clair? sembla un peu inqui?tant, mais une bonne s’approcha bient?t d’elles en tenant une lanterne. Margaret se recroquevilla. Elles ?taient d?couvertes. Sapristi. Margaret se dandina, se pr?parant ? affronter un regard glac? et un mot s?v?re, comme ceux adress?s ? ses camarades de classe ? leur finishing school, mais qui n’avaient jamais ?t? dirig?s vers elle. Margaret ob?issait aux r?gles, m?me celles qui n’?taient pas ?crites. Elle ?tait suffisamment maligne pour ne pas errer dans les ?tages, m?me si le duc ne se promenait pas en ce moment dans les couloirs sombres. La bonne allait leur dire de partir d’une minute ? l’autre. Mais ? la place, la bonne hocha la t?te ? l’adresse de Maman. — Par ici. Margaret cligna des paupi?res. La bonne avait-elle assist? ? l’incident et ?tait-elle mont?e par un autre escalier ? Mais les bonnes n’?taient g?n?ralement pas pr?sentes lors des bals. Peut-?tre un valet l’avait-il inform?e ? Margaret fron?a les sourcils. La bonne avan?ait d’un bon pas, passant devant des buffets et des vases d?mesur?s en porcelaine bleu et blanc qui avaient l’air somptueux m?me dans cette pauvre lumi?re, et Maman et Margaret se d?p?ch?rent apr?s elle. Leurs pieds s’enfonc?rent dans des tapis luxueux qui assourdissaient leurs pas, mais l’?trange silence n’apaisait pas le c?ur battant toujours plus vite de Margaret. Un sourire b?at rayonnait sur les l?vres de Maman, alors que d’ordinaire elle aurait marmonn? que la d?marche rapide de la bonne n’?tait pas n?cessaire. Enfin, la bonne s’arr?ta devant une porte. — C’est ici. — Merci, dit Maman en pressant quelque chose dans les mains de la bonne. J’ai bien peur d’avoir besoin de votre aide. La bonne hocha gravement la t?te. — Bien s?r. Elle est plut?t grande. L’instant d’apr?s, la bonne saisissait les poignets de Margaret et la trainait ? l’int?rieur de la pi?ce. — Que faites-vous ? s’?cria Margaret en luttant contre la solide prise de la bonne. Margaret ?tait en pleine confusion. Les bonnes n’?taient pas suppos?es tirer quelqu’un dans les chambres. Personne n’?tait suppos? faire cela. — Maman ? plaida Margaret. Des mains pouss?rent Margaret. Des mains qui n’appartenaient pas ? la bonne. Les deux mains de la bonne ?taient referm?es autour des poignets de Margaret, comme des menottes de fortune. Le parfum de lavande pr?f?r? de sa m?re qui flotta autour de Margaret, ne laissa aucune ?quivoque : Maman la for?ait ? entrer dans la pi?ce. Maman n’?tait pas encline ? faire des c?lins, et pourtant, ? pr?sent, elle poussait le dos de Margaret. — Le lit est sur la droite, dit la bonne d’un ton professionnel, comme si elle expliquait la disposition de la chambre ? une nouvelle invit?e qui ?tait entr?e de mani?re normale, avec une invitation. — S’il vous pla?t, rel?chez-moi, dit Margaret de sa voix la plus autoritaire. Que se passe-t-il, au juste ? — Je garantis votre paix et votre bonheur futurs, dit Maman avec un petit cri de joie. N’est-ce pas merveilleux ? Margaret sentit son c?ur s’alourdir. Une id?e lui vint. Une id?e abominable, atroce et alarmante. — ? qui appartient cette chambre ? La voix de Margaret tremblota, peinant dans une gorge soudainement s?che, comme si elle venait d’entrer au Sahara, et pas dans une chambre somptueuse situ?e dans la tr?s humide et moite Angleterre. — Celle du duc de Jevington, d?clara Maman. Votre futur mari. Juste ciel. Margaret ferma les yeux avec force. Malheureusement, quand elle les rouvrit, le monde demeurait le m?me qu’auparavant. — Vous plaisantez, dit Margaret. Vous devez ?tre en train de plaisanter. Maman n’avait peut-?tre jamais fait de plaisanterie auparavant, et elle avait peut-?tre enr?l? cette ?trange bonne pour l’assister dans sa blague, mais cela ne signifiait pas qu’elle n’?tait pas en train de plaisanter. S?rement pas. Maman n’allait pas r?ellement mettre en sc?ne une situation compromettante, n’est-ce pas ? — Le duc m’a peut-?tre invit?e ? sa r?sidence, mais cela ne veut pas dire qu’il d?sire me trouver install?e dans son lit, dit Margaret. Maman ?clata de rire et referma la porte. La bonne posa la lanterne sur la table avec un bruit m?tallique. La lumi?re dor?e illumina un plafond ? caissons. L’atmosph?re embaumait le c?dre et le citron, une odeur masculine bien diff?rente de la senteur de lavande de la chambre de Margaret. Une rosette tomba de sa robe sur le tapis visiblement co?teux juste en-dessous. Non pas que le duc doive en connaitre le co?t. Le p?re de Margaret gagnait de l’argent, mais un noble conservait le sien, et personne n’?tait plus noble que le duc de Jevington. Ses anc?tres avaient probablement fait rapporter le tapis depuis l’Empire ottoman ? dos d’?nes par-del? les Alpes durant les croisades. Sapristi. Le c?ur de certaines femmes devait battre plus fort ? l’id?e d’?tre la femme du duc de Jevington. Contrairement ? la plupart des ducs, il ?tait en ?ge de se marier ; cependant, contrairement ? la plupart des ducs, il n’?tait pas mari?. Maman souhaitait sans aucun doute changer ce fait pr?cis. Le physique s?duisant du duc ?tait de notori?t? publique, suscitant chez les grands-m?res potentielles d’agr?ables visions de b?b?s aux visages sym?triques, quand elles n’?taient pas en train de penser aux vastes domaines de cet homme et ? ses caisses convenablement remplies d’argent. Le duc avait r?ussi ? ne pas se laisser attraper, en d?pit d’une r?sidence ? Mayfair lui donnant un acc?s ais? aux m?res marieuses et ? leurs filles d?butantes d?sesp?r?es. En outre, le duc de Jevington n’autoriserait personne ? le compromettre. Elle l’avait d?j? rencontr? auparavant : c’?tait le meilleur ami du mari de son amie, Lady Metcalfe. Elle avait pass? deux tr?s inconfortables semaines en pr?sence du duc lors d’une partie de campagne. Ils n’avaient m?me pas r?ellement eu la moindre conversation, mais assur?ment, si le duc avait d?, pour quelque ?trange raison, d?clarer sa passion pour elle, il aurait eu amplement l’occasion de le faire alors. Il accueillerait probablement le scandale avec plaisir m?me si la m?re de Margaret faisait entrer la totalit? des invit?s de la salle de bal pour admirer bouche b?e Margaret sur le lit. C’?tait le genre de situation qui pouvait assurer ? un homme une place de choix sur la liste convoit?e des S?ducteurs ? Adorer que Mariages pour Jeunes Filles Sages publiait chaque ann?e. Margaret s’arcbouta contre l’emprise de la bonne, mais celle-ci n’avait rien perdu de sa fermet?. La bonne ricana, mais Margaret r?sista ? l’envie de pleurer. Tout se passerait bien. Il le fallait. Elle convaincrait sa m?re et la bonne de la rel?cher, ramasserait sa rosette sur le sol, et si le duc remarquait une odeur de champagne en entrant dans sa chambre ce soir, il l’attribuerait ? un agr?able souvenir des festivit?s. Margaret n’allait pas accepter de devenir la ris?e de la haute soci?t?. Pas ? nouveau. Margaret releva le menton. — J’exige de partir. Maman la fixa du regard un instant. Ses sourcils et sa l?vre inf?rieure partirent dans des directions oppos?es, comme s’ils d?siraient se s?parer. Margaret refusa de trembler. Puis Maman partit d’un rire juv?nile. — Vous n’allez rien exiger, dit-elle en se tournant vers la bonne. O? sont les entraves ? Entraves ? Margaret leva brusquement les sourcils. La bonne retira un long ruban de la poche de son tablier. Le ruban avait l’air affreusement solide, et Margaret recula. Sa m?re resserra son ?treinte sur Margaret. — Vous ne pouvez pas m’attacher, dit vivement Margaret. En outre, personne ne croira qu’il m’ait compromise. Votre plan ne marchera pas. La bonne eut un sourire narquois. Elle ?tait plus que probablement consciente de l’absurdit? de ce plan. Combien d’argent exactement Maman lui avait-elle promis ? — Ma ch?re enfant, dit Maman. Je suis tr?s heureuse que votre innocence soit encore intacte, mais je vous assure que les gens croiront que vous avez ?t? compromise s’ils vous d?couvrent attach?e. Maman for?a Margaret ? s’allonger sur le lit ? baldaquin et s’assit sur ses jambes. Margaret se d?battit, mais Maman ?tait lourde, et la bonne attacha un poignet de Margaret ? chaque montant du lit. Des tentures couleur saphir en descendait majestueusement, enveloppant Margaret de leur somptuosit?. Le lit serait consid?r? comme luxueux dans la plupart des circonstances, mais Margaret frissonna lorsque sa peau s’appuya contre la couverture du duc. Elle ne devrait pas ?tre ici. Sans aucun doute, d’autres rosettes cousues sur sa robe ?taient-elles en train de se d?nouer. — Dois-je lui lier les chevilles, demanda la bonne. — Quoi ? Margaret gigota sur le lit, essayant de se lib?rer. — On ne dit pas ‘quoi’, ma ch?re, dit Maman par automatisme. J’ai appris que c’?tait assez grossier. ‘Excusez-moi’ est de loin pr?f?rable. Il y a un nombre suppl?mentaire de syllabes, mais le but est toujours la politesse. — La courtoisie n’est pas mon souci actuel, souffla Margaret. Une m?che de cheveux s’?chappa de sa coiffure. Et puis une autre. Et puis une autre. Margaret aurait aim? ?tre un pirate pour avoir un large ?ventail de jurons ? prof?rer. — Lorsque le duc reviendra dans sa chambre, dit Maman. Il vous d?couvrira. — Et il saura qu’il ne m’a pas mise l?. — Cela n’a aucune d’importance. Vous serez d?couverts ensemble. Un t?moin m’accompagnera. Je serai boulevers?e. Maman joignit les mains, et ses l?vres trembl?rent. Puis elle eut un sourire radieux, comme si elle se r?jouissait de ses talents d’actrice. Margaret la regarda fixement. — Il y a un bon moment que vous avez r?fl?chi ? tout ceci. — J’en ai r?v? toute ?veill?e. Et ? pr?sent, gr?ce ? de g?n?reux paiements, cela se r?alisera, dit Maman en lan?ant un regard reconnaissant vers la bonne et en applaudissant. Oh, pensez au mariage que nous allons organiser pour vous. Toute la soci?t? y assistera. — Parce qu’ils auront peine ? croire que le duc et moi nous mariions jamais. — Votre impopularit? ne sera plus qu’un lointain souvenir, dit Maman d’une voix d?bordant de confiance. Margaret fron?a les sourcils. Maman ?tait impossible. Depuis que Papa les avaient rendus riches, Maman avait voulu marier Margaret ? un excellent parti. Malheureusement, il semblait plus facile que Papa invente quelque chose et, ? partir de cela, cr?e une entreprise toute enti?re, que pour Maman de pi?ger un beau-fils poss?dant un titre. Clairement, Maman ne devrait pas viser un duc. M?me les plus exp?riment?es des m?res marieuses devaient h?siter devant cet objectif. — Vous perdrez votre poste si vous faites cela, dit Margaret ? la bonne. Je le raconterai au duc. — Son futur est assur?, dit Maman avec pr?cipitation en hochant la t?te vers la bonne. Notre r?sidence peut toujours ?tre plus ?tincelante. La m?re de Margaret ouvrit son r?ticule en brocart de velours et en sortit un pot. Maman enleva le couvercle et une senteur florale agr?able se diffusa dans la pi?ce. — Ce parfum ne me calmera pas, dit Margaret. — Tr?s ch?re, ce ne sont pas de vos ?motions dont je me soucie. Maman voleta dans la pi?ce, passant du lit ? baldaquin ? la m?ridienne. Elle r?pandit quelque chose en chantonnant. Margaret ?carquilla les yeux. — ?tes-vous en train de r?pandre des p?tales de rose ? — Je pensais que c’?tait ?vident, dit Maman. Mieux vaut rendre cela romantique, ma ch?re. C’?tait insens?. Margaret lutta contre la tentation de hurler. Selon toute vraisemblance, cela lui vaudrait uniquement d’?tre b?illonn?e. En outre, cet ?tage ?tait d?sert, et le bruit des festivit?s avait pratiquement caus? des vibrations. Elle pourrait peut-?tre retirer ces liens. C’?tait peu probable, mais pour l’instant, c’?tait son seul espoir. — Vous souhaitez qu’elle garde ses v?tements ? demanda la bonne. — La r?ponse est oui. De toute ?vidence, s’exclama Margaret. — Une d?chirure suffira, dit Maman. — Bien s?r. La bonne d?chira le corsage de la robe de bal de Margaret avec efficacit?. — Vous n’?tes pas oblig?e de faire cela, Maman, supplia Margaret. Ce plan ne marchera pas. Ce n’est pas le bon moyen pour me marier. Et nous pourrions simplement partir. Personne ne le saura. Et je ferai davantage d’efforts – je le promets. Maman pin?a les l?vres, puis marcha d’un pas d?cid? vers Margaret. Margaret reprit espoir. Maman allait peut-?tre vraiment la lib?rer. Peut-?tre que tout se passerait bien. Au lieu de cela, Maman retira les ?pingles des cheveux de Margaret. Elle retira un peigne de son r?ticule et lui lissa les cheveux. Ses yeux s’?clair?rent, et elle pin?a les joues de Margaret. — Beaucoup mieux. Vous avez l’air tr?s ind?cente, comme si l’on venait de vous ravir. Puis Maman se retourna et sortit de la pi?ce avec la bonne. Margaret fut seule. Elle avait toujours su que Maman ?tait enthousiaste ? l’id?e de la marier, mais elle n’avait pas r?alis? qu’elle se r?soudrait ? cela. N’aurait-elle pas d? s’y attendre ? Maman n’avait-elle pas soudoy? quelqu’un pour l’assister quand le marquis de Metcalfe avait ouvertement cherch? une ?pouse ? La gorge de Margaret se teinta de naus?e. Si seulement elle avait travaill? plus dur afin de trouver un mari cette saison. La prochaine fois que quelqu’un de m?me vaguement convenable montrerait le moindre int?r?t pour elle, Margaret jurait de l’?pouser. Elle n’aurait probablement m?me pas ma chance de le faire. Margaret serait perdue une fois qu’elle serait d?couverte dans le lit du duc. Son c?ur trembla, et elle ?tudia son nouvel environnement. Du tissu vert fonc? habillait les murs, comme s’il avait ?t? choisi pour s’assortir avec l’habit de chasse du duc. De lourds meubles des si?cles pass?s garnissaient la pi?ce. Des bustes royaux d’empereurs romains ?taient perch?s sur la table. Clairement, la personne qui les y avait plac?s n’avait pas pr?vu que des femmes puissent ?tre train?es dans cette pi?ce par leurs m?res marieuses. En mati?re de literie, celui-ci surpassait les autres par sa somptuosit?. Les coussins poss?daient une plaisante densit? de plumes, et le cordage du sommier ne s’affaissait pas de fa?on intol?rable. La courtepointe ?tait confortablement moelleuse, et aucune brise de soufflait ? travers la fen?tre. Le duc avait le bon nombre d’oreillers, et sa literie ?tait convenablement douce. Aucun doute, les nuages pourraient en prendre exemple. Mais en d?pit de la texture soyeuse, le c?ur de Margaret tambourinait toujours, comme si elle ?tait une criminelle en fuite, et pas allong?e sur l’un des lits les plus luxueux de Grande-Bretagne. Margaret m?prisait la danse, mais elle n’avait que peu d’envie de passer toute la dur?e du bal ici. Elle songea avec envie ? la nourriture align?e sur la table de banquet. Genevi?ve et Juliette se demanderaient probablement o? elle ?tait. ? un moment donn?, le duc de Jevington entrerait dans la pi?ce, et tout se passerait horriblement. Margaret continua ? tirer sur ses liens. Malheureusement, ils ne montr?rent aucun signe de faiblesse. Chapitre Deux Jasper Tierney, duc de Jevington, n’avait jamais estim? qu’il excellait ? grand-chose. Ses aptitudes sportives ?taient acceptables, m?me s’il n’ait jamais compris l’int?r?t de risquer de se briser la nuque pour plonger apr?s une balle en jouant au rugby. Ses comp?tences scolaires ?taient pires. Harrow n’incluait aucun cours qui d?cernait de bonnes notes pour l’aptitude de quelqu’un ? faire rire ses camarades de classe, et Jasper manquait d’enthousiasme, ? parts ?gales, pour d?cliner les mots latins et diviser les fractions. Mais Jasper s’?tait tromp? : il excellait ? organiser des r?jouissances. Les r?ceptions de Jasper ?taient r?put?es, et il se tenait sur la mezzanine tandis que ses invit?s dansaient et plaisantaient, buvaient et se r?jouissaient. Des valets de pied transportaient des plats en argent d’une main, sans se d?monter face aux hommes et aux femmes qui affluaient autour d’eux. Une musique enjou?e flottait dans la salle de bal, et les gens se balan?aient joyeusement, formant les figures complexes habituelles avec gaiet?. Un an auparavant, Jasper les aurait rejoints, mais ? pr?sent, observer lui suffisait. L’organisation d’une r?ception ?tait ?puisante, et le souvenir qu’il garderait de cet ?v?nement ne serait pas rehauss? par un mal de t?te d? au brandy. Il tambourina les doigts contre la rampe de la mezzanine. Quelques jeunes femmes lev?rent la t?te vers lui, les cils papillonnants, et donn?rent des coups de coude ? leurs voisines. Des diamants et des rubis scintillaient ? leur gorge et leurs boucles savamment coiff?es demeuraient impeccables. Jasper leur envoya son grand sourire coutumier. Il ne dut pas attendre longtemps avant qu’elles ouvrent leurs ?ventails. Ce rituel lui avait paru plus int?ressant quand il ?tait nouveau ? Londres. Normalement, il descendrait et ferait leur connaissance, ou, comme dans la plupart des cas maintenant, la referait, mais un ennui ?trange enlisait ses actions coutumi?res. Cependant, il ne pouvait rester sur la mezzanine toute la nuit. Il descendit les escaliers et se m?la ? la foule. L’un de ses valets de pied s’approcha de lui. — J’ai un message pour vous, Votre Gr?ce. Les bals n’?taient pas l’endroit habituel pour recevoir de la correspondance, mais Jasper tendit la main. Les ?paules du valet se d?tendirent, et il se d?p?cha de partir. Jasper lut le message. Il ne reconnut pas l’?criture et se dirigea d’un bon pas vers le valet, le rejoignant rapidement. — Il me faut aller dans ma chambre ? — Je – euh – suppose, dit le domestique en d?tournant les yeux. — Qui vous a donn? ceci ? — Est-ce important ? La voix du valet tremblait, et il se recroquevilla avec un curieux air de culpabilit?. Jasper soupira. Le valet ?tait nouveau, et m?me si Jasper s’?vertuait ? ne pas intimider son personnel, son titre rendait le processus difficile. — Ne vous inqui?tez pas, le rassura Jasper. Sa curiosit? ?tait, apr?s tout, bel et bien piqu?e. Une veuve avait-elle arrang? un t?te-?-t?te ? Plus probablement, un de ses amis avait envie de vanter les charmes de l’une des jeunes femmes pr?sentes et d’?tablir une strat?gie pour pouvoir gagner son c?ur. Jasper se balada ? travers la salle, parcourant la foule de f?tards. D’anciens camarades d’?cole lui ass?n?rent une tape dans le dos, souriant joyeusement, comme s’ils ne parvenaient toujours pas ? croire qu’ils avaient atteint un ?ge auquel ils pouvaient boire et danser avec grand plaisir ; un monde dans lequel l’arithm?tique et les le?ons de g?ographie n’existaient plus et o? personne ne viendrait leur donner des coups de b?tons ? cause de d?clinaisons latines erron?es. Des d?butantes se mirent ? glousser lorsqu’elles le virent, rejetant leurs cheveux de fa?on ? ce que leurs anglaises, boucl?es avec soin, captent la lumi?re. Enfin, il quitta la salle de bal, et Jasper frissonna. De toute ?vidence, la temp?rature ?tait retomb?e. De toute ?vidence, il ne frissonnait pas ? cause de quelque pr?monition, m?me s’il se demandait effectivement pourquoi il avait ?t? convoqu? dans sa chambre ? coucher. Il fit un signe de t?te au majordome, puis grimpa les escaliers. Le bruit de la musique fut assourdi, mais lorsqu’il entra dans le couloir sombre, le porte de la salle de bal claqua en bas. Apparemment, il n’?tait pas le seul ? abandonner les festivit?s, m?me s’il ?tait encore t?t. Jasper foula les tapis orientaux familiers, passa devant le buffet aux pieds dor?s familier jusqu’? ce qu’il parvienne ? sa chambre. Tout ceci est ridicule. Il aurait d? ignorer le message. Cependant, il pouvait aussi bien enqu?ter. Jasper ouvrit la porte et cligna des yeux dans la faible lumi?re. Un parfum de rose flottait dans la pi?ce. Derri?re lui, des bruits de pas r?sonn?rent, et des voix, soprano et baryton, chuchot?rent. En d’autres circonstances, il aurait ri int?rieurement, se demandant si ces deux personnes cherchaient une chambre libre dans laquelle ils pourraient s’adonner ? une ?treinte illicite. Ce ne serait pas la premi?re fois que des gens c?daient ? la passion lors de l’une de ses r?ceptions. Jasper excellait ? cr?er une atmosph?re plaisante qui inspirerait les poursuites amoureuses. — ? l’aide, appela une femme. Jasper fut interloqu?. Ce n’?tait pas Shoreditch, tout de m?me. Personne ne devrait requ?rir assistance en sa demeure. — Vite, ajouta la femme. Jasper se tourna vers la voix. Le son provenait de son lit. — ? l’aide ! r?p?ta la voix. Jasper ?tait peut-?tre confus, mais il n’en restait pas moins un gentleman. Il s’approcha d’elle en vitesse. D’ordinaire, si une femme l’appelait depuis son lit, c’?tait pour qu’il la touche ici et l? et sans tarder. En d?pit du ton insistant de cette femme, et la ressemblance avec certaines frasques nocturnes pass?es, Jasper douta que c’?tait ce que cette femme d?sirait. Apr?s tout, il ne reconnaissait pas sa voix. Il saisit une bougie et craqua une allumette, projetant une lueur vers le lit. Il y avait effectivement une jeune femme dans son lit. Elle ?tait allong?e ? demi d?v?tue. Des m?ches sombres s’?talaient sur ses ?paules. Cette vue n’?tait pas totalement inhabituelle, m?me s’il avait diminu? ces cas de figure depuis que son ami Hugh s’?tait mari?. Mais les mains de cette femme ?taient attach?es aux montants de son lit. Etrange. Il cligna des paupi?res. Cette jeune femme ressemblait ? Miss Margaret Carberry. Tr?s ?trange. De toutes les femmes qu’il aurait pu trouver dans son lit, il ne serait jamais attendu ? Miss Carberry. Il avait fait sa connaissance lors d’une partie de campagne, et il avait le souvenir d’une jeune femme r?serv?e et rigide, une de celles qui trouvaient intimidante la seule perspective d’avoir une conversation, et qui avaient encore ? apprendre les r?gles pas-tr?s-difficiles du bavardage. Mais ? ce moment-l?, elle avait ?t? tr?s convenablement habill?e. Contrairement ? ses compagnes, elle n’avait montr? aucun enthousiasme ? converser avec lui. Elle n’avait pas battu des cils. En fait, elle avait plut?t sembl? tr?s enthousiaste ? l’id?e de se fondre dans le d?cor. Mais Miss Carberry ?tait assur?ment tr?s visible, ? pr?sent. Une immanquable odeur de champagne flotta vers lui, et de longs cheveux boucl?s encadraient le visage de Miss Carberry de mani?re s?duisante. Elle ?tait v?tue d’une robe jaune, mais l’attention de Jasper fut attir?e par une profonde d?chirure dans son corsage qui r?v?lait une peau d?licieuse. — Miss Carberry ? — D?tachez-moi, s’il vous pla?t, ordonna-t-elle. Il se for?a ? d?tacher son regard d’elle et chassa l’image de sa poitrine ronde, peu importe combien elle ?tait attirante. Pourquoi ?tait-elle ici ? Miss Carberry avait toujours sembl? pragmatique. Si elle essayait de le s?duire, elle ne serait pas si press?e de quitter le lit. Il se creusa les m?ninges. Une id?e horrible lui vint ? l’esprit. — Quelqu’un vous a-t-il fait du mal ? Il passa d’une jambe sur l’autre, peu d?sireux d’envisager que l’un de ses invit?s pour avoir agi avec une telle bassesse. — Parce que si vous me donnez son nom, je vous assure que je ferai en sorte de— — Non, dit-elle pr?cipitamment. Rien de ce genre. Il fut ? nouveau interloqu?. — Ce n’est pas le moment des explications, dit-elle. Jasper aimait peut-?tre bavarder, mais il savait reconna?tre quand sa conversation n’?tait pas la bienvenue. Il se h?ta vers le lit, retira un couteau d’un tiroir ? son chevet, et la d?livra rapidement. — Merci. Elle sauta en bas du lit ? baldaquin et atterrit dans une pile de p?tales de roses. Elle avait les cheveux d?faits, et de lourdes boucles s’?chappaient de son chignon. Elle ne battit pas des cils dans sa direction. Au lieu de cela, elle lan?a des regards fr?n?tiques dans la pi?ce. — Que signifie tout ceci ? exigea une voix d’homme inconnue. Miss Carberry se baissa rapidement, et son ample poitrine tressauta. Jasper eut soudain le gorge s?che, et il fit le v?u de ne pas songer ? ces globes rebondis. — Oh, je vous en prie, venez ! clamait une voix de femme. D?p?chez-vous ! Ma fille est ici. Seule avec le duc. — Bont? divine, dit l’homme. En ?tes-vous s?re ? — Naturellement ! Jasper tourna brusquement la t?te sur le c?t?. De quoi ces gens parlaient-ils ? Miss Carberry avan?ait ? quatre pattes sur le tapis comme si elle ?tait une espionne fran?aise. Des p?tales de rose coll?es dans les cheveux. Bon sang, il n’y avait aucune raison pour que des p?tales de roses se trouvent sur le sol. Miss Carberry n’avait pas simplement ?t? attach?e sur le lit – sa robe avait ?t? d?chir?e. Comme si je l’avais d?chir?e en abusant d’elle. Les poings de Jasper se referm?rent ?troitement. Enfer et damnation. C’?tait en train de se produire : la chose que tous les aristocrates redoutaient. Il ?tait victime d’un coup mont? destin? ? le faire appara?tre comme ayant compromis une jeune femme. Jasper avait rencontr? la m?re de Miss Carberry. Elle avait pouss? Miss Carberry vers son ami Hugh, le marquis de Metcalfe. ? pr?sent que le marquis ?tait mari?, Mrs Carberry avait peut-?tre d?cid? de reporter son attention sur Jasper. Double enfer et damnation. — Ils ne peuvent pas me trouver ici, chuchota Miss Carberry avant de courir vers la fen?tre. — Que faites-vous ? demanda Jasper. Un homme n’?tait pas suppos? trouver normal de d?couvrir des filles attach?es dans son lit. C’?tait le genre de choses qui rendrait n’importe quel homme – m?me le plus exp?riment? et raffin? – d?sireux de poser quelques questions. Questions auxquelles Miss Carberry ne paraissait pas ?tre d’humeur ? r?pondre. — Ils arrivent, dit Miss Carberry en se pr?cipitant derri?re le rideau. La porte s’ouvrit, et Jasper d?tourna la t?te. Deux personnes firent irruption : une version plus s?v?re et plus ?g?e de la jeune femme qu’il venait de voir, en qui il reconnut Mrs Carberry, et un autre homme, portant un col blanc. Bon sang. La m?re de cette fille avait train? un membre du clerg? avec elle : un ?v?que. La parole d’un homme qui se pliait aux r?gles morales et ?thiques, ou d’un homme qui, ? tout le moins, pr?conisait que les autres se plient aux r?gles morales et ?tiques, serait prise au s?rieux. Personne n’aimait contredire les ?v?ques, pas si l’on ne prenait pas un plaisir particulier aux flammes ?ternelles, avec pour seules distractions les cris des malheureux r?sidents et des cr?atures orn?es de cornes brandissant des fourches. — Elle est ici ! Mrs Carberry fit un geste th??tral de la main en direction du lit ? baldaquin. Ses bracelets cliquet?rent, et sa voix r?sonna avec une ?trange note de triomphe. Ce son ne contenait pas l’angoisse que Jasper imaginait que devait ressentir une personne croyant que sa fille avait r?ellement ?t? compromise. Non, la voix de Mrs Carberry ?tait, sans ?quivoque, pleine de satisfaction. Et ? pr?sent, sa fille en ?tait r?duite ? se blottir ? l’ext?rieur de la fen?tre de Jasper. Il n’avait pas eu une haute opinion de Mrs Carberry quand il l’avait rencontr?e auparavant. Il r?visa instantan?ment son jugement et la pla?a dans la colonne des n?gatifs, juste un cran au-dessus de soldats fran?ais en train de charger. — De quoi parlez-vous donc ? demanda Jasper du ton glacial qu’il pr?f?rait ne jamais employer, favorisant une approche des autres plus chaleureuse. Ceci, cependant, ?tait un instant m?ritant une attitude hautaine toute aristocratique. Mrs Carberry ouvrit grand les yeux, puis son visage p?lit. — Vous ?tes dans mes appartements, dit Jasper. Et je ne vous ai pas invit?s. — Euh – oui, dit Mrs Carberry en gardant son regard fix? sur le lit. — Cette femme dit qu’une jeune demoiselle est retenue ici contre con gr?, dit l’?v?que avec h?sitation — Elle fait erreur, monseigneur, dit Jasper Je suis seul. Elle a peut-?tre succomb? ? quelque r?verie. Malgr? son nom, il n’est pas n?cessaire d’?tre endormi pour en faire l’exp?rience. — Je n’ai pas imagin? ce d?sastre, souffla Mrs Carberry. L’?v?que la regarda d’un air dubitatif. Il plissa son ample front d?barrass? du fardeau d’une chevelure. — C’est tr?s ?trange. Tr?s ?trange, en v?rit?. — Une observation louable, dit Jasper. Tr?s astucieuse. Mais apr?s tout, la vie n’est-elle pas remplie d’?tranget? ? Un air renfrogn? envahit le visage de l’?v?que. — Votre Gr?ce, je pr?f?re voir le monde comme ?tant merveilleux, rempli des manifestations de Notre Seigneur. — Tout ? fait, tout ? fait, dit rapidement Jasper. Commencer une discussion th?ologique alors qu’un bal parfaitement agr?able se d?roulait au rez-de-chauss?e, sans parler de la jeune femme dissimul?e de l’autre c?t? de ses tentures, n’?tait pas parmi les d?sirs imm?diats de Jasper. ? cet instant pr?cis, la seule chose qu’il d?sirait ?tait un verre g?n?reusement servi. — De telles m?prises peuvent se produire, dit Jasper avec dignit? malgr? que ce fait pr?cis ne lui soit jamais arriv? avant, et que cela ne paraissait pas du tout involontaire. Il se dirigea vers la porte. — ? pr?sent, redescendons. Je vous assure que le bal est plus int?ressant. L’?v?que le suivit docilement, mais Mrs Carberry s’arr?ta. Le c?ur de Jasper sombra. Une femme dispos?e ? attacher sa fille au lit d’un duc n’allait vraisemblablement pas se laisser d?monter pas l’absence temporaire de la fille en question. — Mais elle ?tait ici ! insista Mrs Carberry. Regardez. Le lit est… froiss? ! — J’esp?re que vous n’insultez pas le travail de ma femme de chambre ? demanda Jasper. — Balivernes, dit Mrs Carberry. Je la complimentais. Je doute qu’elle ait laiss? une telle empreinte. — Cela ressemble bien ? un compliment, Votre Gr?ce, dit gaiement l’?v?que. — Je pense m’?tre assis sur le lit, dit Jasper. — Vous pensez ? demanda l’?v?que. — Je suis tout ? fait certain, corrigea Jasper. Absolument certain. L’?v?que ne paraissait pas conscient du fait que ‘absolument’ ?tait un mot d?notant l’assurance, parce que le front de l’?v?que se plissa ? nouveau. — Vous ne d?siriez pas assister ? votre propre bal ? — Je venais d’arriver, dit Jasper. En outre, pourquoi festoyer lorsqu’on peut contempler les miracles de la vie ? — Tout ? fait juste, dit l’?v?que. Vous ?tes un homme sage, Votre Gr?ce. — C’est un homme dissimulant ma fille, s’exclama Mrs Carberry. Margaret ! Margaret ! O? ?tes-vous ? Pendant un instant, Jasper pensa que Miss Carberry pourrait passer la t?te de derri?re la tenture, mais aucun bruit ne parvint depuis la fen?tre. — Elle n’est pas l?, dit Jasper. Visiblement. — Nous devrions vraiment partir, conseilla vivement l’?v?que ? sa compagne. S’attarder dans les appartements priv?s du duc est inconvenant. — Je refuse de recevoir des le?ons de biens?ance de la part d’un ?v?que, renifla Mrs Carberry. Il doit l’avoir cach?e quelque part. — Je ne cache pas de femmes dans ma chambre, dit Jasper avec raideur. — Elle est peut-?tre dans votre garde-robe, dit Mrs Carberry. — Une suggestion abominable, dit l’?v?que. Je vous en prie, ne vous mettez pas dans l’embarras. Nous ne voudrions pas que le duc ait une pi?tre opinion de vous. Mrs Carberry h?sita, r?fl?chissant, nul doute, aux cons?quences de s’attarder, mais finalement, elle secoua fermement la t?te. Le c?ur de Jasper sombra. Mrs Carberry pensait peut-?tre qu’elle avait d?j? compromis sa place sur la liste des invit?s pour les prochaines festivit?s. Si elle trouvait sa fille, cela lui assurerait un statut plus ?lev?. — N?anmoins, je vais regarder. Mrs Carberry marcha d’un pas d?termin? vers la garde-robe, l’ouvrit, contempla les rang?es de redingotes et de pantalons, et la referma rapidement. — Pas ici. — Pr?cis?ment, dit Jasper. Je ne causerais pas de tort ? votre fille. Mrs Carberry renifla et abaissa la t?te sous le lit. Son visage s’?tait empourpr?, adoptant une certaine ressemblance avec une fraise, mais elle continua ? fouiller la pi?ce. Jasper admirait presque sa r?solution. — Elle se cache peut-?tre derri?re les tentures ! Mrs Carberry se dirigea d’un pas d?termin? vers la fen?tre. — N-Non, dit Jasper. Si Mrs Carberry la d?couvrait, ce qu’elle ferait certainement, l’?v?que deviendrait soup?onneux. Il annoncerait sans aucun doute le besoin imm?diat pour Jasper de publier les bans. Avec la chance actuelle de Jasper, l’?v?que verrait l’archev?que de Canterbury le lendemain et commencerait les arrangements pour une d?rogation sp?ciale. — Ce n’est pas n?cessaire, s’?cria Jasper. — Au contraire, c’est tout ? fait n?cessaire, r?pondit Mrs Carberry. Bien que la chambre de Jasper soit de dimensions g?n?reuses, et bien que les jambes de Mrs Carberry soient plut?t courtes, il ne fallut pas longtemps ? Mrs Carberry pour atteindre la fen?tre. — Je pr?f?rerais que vous ne regardiez pas, dit Jasper. Mrs Carberry pin?a les l?vres en une fine ligne, et elle tira la tenture. Aucune jeune femme n’?tait derri?re. Jasper resta bouche b?e. Miss Carberry aurait d? se tenir juste ? l’ext?rieur. Aucun escalier ne descendait du balcon. O? diable avait-elle bien pu passer ? Chapitre Trois Une bourrasque frappa Margaret. Le vent, qui avait sembl? insignifiant lorsque Margaret avait fait la file au dehors, se classant plus bas dans l’irritation que l’incessant crachin, ?tait ? pr?sent impossible ? ignorer. Si seulement le duc avait d?cid? de briser la tradition et d’avoir une chambre au rez-de-chauss?e. Margaret avait su qu’elle n’aurait pas d? sortir par la fen?tre, m?me avant d’avoir vu la fa?on exacte dont les sourcils majestueux du duc avaient bondi vers ses cheveux ?l?gamment ?bouriff?s. On ne sortait pas des chambres ? coucher par les fen?tres. Cela dit, on ne devrait pas non plus ?tre ligot? aux montants des lits. Curieusement, les actes de Margaret avaient sembl? indiqu?s, mais elle fut envahie par une gratitude nouvelle pour l’usage des escaliers et les raisons de leur incontestable popularit?. L’escalade de fa?ades n’?tait pas une activit? courante, m?me pour les sportifs. Margaret n’?tait pas sportive. Courir ne faisait qu’irriter sa g?n?reuse poitrine, et s’adonner ? d’autres exercices, qui consistaient ? plier et contorsionner son corps dans d’?tranges positions, la faisait se sentir ridicule. Et pourtant, elle se tenait l?, sur un balcon ?troit. Elle regarda en bas. Les invit?s ne faisaient plus la file ? l’ext?rieur de la r?sidence. La derni?re chose dont Margaret avait besoin ?tait que quelqu’un la remarque et crie « Au voleur ». Ou, encore pire, que quelqu’un la reconnaisse. Il n’y avait aucune explication possible pour justifier qu’une d?butante soit sur le balcon menant ? la chambre ? coucher d’un duc. Apr?s tout, aucun chaperon n’?tait ? ses c?t?s. Pas m?me Grand-m?re Agatha, qu’elle parvenait habituellement ? inciter ? l’accompagner pour des visites qui pr?sentaient moins d’int?r?t pour sa propre m?re. Margaret ?valua la situation. Le probl?me d’?tre cramponn?e ? un balcon ?tait l’air ? pr?sent frisquet. Des rafales de vent la frappaient continuellement, emportant sa robe couleur canari comme si elles ?taient ravies d’avoir autant de tissu avec lequel jouer. M?me si le vent d?cidait d’?tre moins actif, l’air glacial resterait tout de m?me piquant. En-dessous d’elle, des cal?ches passaient, d?posant parfois des passagers, ou emportant parfois ceux qui se contentaient de faire une br?ve apparition avant une longue nuit ? errer de r?ception en r?ception. La pluie ?claboussait Margaret, glissant le long de ses doigts. Elle avait d?j? d?truit ses gants de dentelle en essayant de rompre ses liens. Margaret ?tait contente de ne pas voir l’expression du duc – mais m?me si elle ne voyait pas son visage, elle savait qu’il devait ?tre horrifi?. Margaret remua les jambes. Des voix r?sonn?rent en dessous, et elle se tapit contre le balcon, souhaitant que l’architecte ait con?u la fa?ade avec moins d’enthousiasme pour les colonnes. Personne n’avait ? ce point besoin d’un b?timent ressemblant ? un temple grec quand – m?me en Gr?ce – les gens avaient arr?t? d’adorer leurs dieux des si?cles auparavant. La voix de sa m?re retentit. Elle allait fouiller le balcon. Le c?ur de Margaret s’affola, se pr?cipitant de-ci de-l?, sans se pr?occuper des autres vaisseaux sanguins du corps. Respirer devint de plus en plus difficile. Elle devait se cacher. Tout de suite. Malheureusement, les balcons faisaient d’horribles cachettes. Une id?e lui vint. Margaret grimpa h?tivement par-dessus le rebord du balcon et pla?a ses pieds sur le petit c?t? de la brique sur sa gauche. Cela marchait, et Margaret rayonna. D’autres femmes auraient peut-?tre craint le manque de stabilit?, mais Margaret avait r?ussi. Elle s’accrocha ? la balustrade en fer du balcon, et maintenant, si sa m?re ouvrait la porte – quand sa m?re ouvrirait la porte – Margaret serait cach?e. C’?tait parfait. La pluie continua ? d?gouliner sur son visage et ses mains ; elle continua ? mouiller sa robe, mais cela n’avait pas d’importance. Une demi-heure plus t?t, elle avait ?t? certaine qu’elle serait forc?e d’?pouser le duc. Et, bien que l’homme n’ait montr? aucun signe de cruaut?, elle n’avait aucun d?sir d’?pouser un homme oblig? de devenir son mari. Il saurait toujours qu’il ?tait un duc, et qu’elle n’?tait qu’une jeune fille r?serv?e introduite dans le beau monde par la seule force de la soudaine abondance d’argent de son p?re. — Oh? ! L?-haut ! cria un homme. Margaret se figea. Sa robe n’avait aucune chance de se fondre dans le mur de briques, et elle maudit le fait que le duc de Jevington n’ait pas manies excentriques qui l’auraient incit? ? ordonner que les briques soient peintes d’une couleur assortie au soleil. Au lieu de cela, la maison ressemblait ? toutes les autres r?sidences de la rue. Seule la composition exacte des colonnes et des fioritures diff?rait. — Descendez, jeune fille. C’est dangereux, l?-haut ! cria l’homme. Oh, bon sang. Le vent souffla en rafale, mais ?choua ? emporter la voix de l’homme. La m?re de Margaret allait fouiller le balcon d’un instant ? l’autre, et cet instant arriverait plus t?t que pr?vu si cet homme continuait ? faire ?talage des capacit?s de son diaphragme. Margaret jeta un regard vers le bas. Il ?tait facile ? rep?rer. Il portait une cape et un haut-de-forme, la livr?e habituelle des cochers. Margaret tourna le buste de mani?re peu ?l?gante vers l’homme, m?me si se retourner quand on devait garder le pied sur le bord d’une brique au-dessus d’une fen?tre et garder les mains agripp?es ? la balustrade d’un balcon, comptait parmi les choses les plus stupides ? faire. Si seulement Margaret avait accord? plus d’int?r?t ? la pratique sportive. Elle s’?tait toujours moqu?e des femmes qui estimaient ces man?uvres comme ?tant le sommet de leur journ?e, leur pr?f?rant les joies de la m?morisation de nouveaux faits scientifiques. Margaret posa un doigt sur ses l?vres, esp?rant que l’homme se tairait. — Attention, ma petite dame ! brailla-t-il. Elle r?p?ta son geste. — Vous avez vu cette jeune femme ? cria l’homme en tournant la t?te. Margaret grima?a d’embarras. L’homme n’?tait pas la seule personne ? l’ext?rieur. Aucun doute, dans quelques minutes, il aurait ameut? tous les cochers pour la regarder. Pire, il pourrait attirer l’attention du majordome se tenant ? l’entr?e, pour la regarder. — Silence ! articula-t-elle silencieusement. La porte du balcon s’ouvrit, et Margaret se figea. Puis la porte fut referm?e d’un claquement, avant que l’homme ne puisse ? nouveau crier, et le soulagement envahit Margaret. Elle ?tait sauv?e. Elle essaya d’ajuster sa position, pour qu’elle puisse remonter sur le balcon et attendre jusqu’? ce que sa m?re ait quitt? la chambre du duc. Une bourrasque de vent la renversa presque, semblant d?sireuse d’agrandir la d?chirure de sa robe pour augmenter son ind?cence. Les doigts de Margaret gliss?rent. Elle lutta pour conserver sa prise, mais de la pluie tomba encore, enveloppant sa main de liquide glac?. Le c?ur de Margaret tressauta d’incertitude, mais elle serra les dents. Je peux y arriver. Je dois y arriver. Margaret se concentra pour raffermir sa prise autour de la balustrade, ne se pr?occupant pas de savoir si elle avait l’air ridicule depuis la rue. Elle ne pouvait pas l?cher. L?cher signifiait probablement des blessures. L?cher signifiait probablement la mort. — Accrochez-vous, ma petite, cria l’homme. Ne tombez pas. Vous n’avez pas envie de vous tuer. Les braillements de l’homme n’?taient pas rassurants. — Cette fille va mourir, dit-il d’une voix sonore. Ici, ? Grosvenor Square. Imaginez un peu. ?a ne vaut pas le coup d’?tre une voleuse, ?a non. Le c?ur de Margaret bondit dans sa poitrine, et la pluie froide continua ? l’arroser. Des gouttes se gliss?rent sous son col, d?goulinant dans son dos avec plus de force que le champagne n’avait r?ussi ? montrer. Margaret claqua des dents, mais elle tint bon. D’autres voix se firent entendre en-dessous d’elle, les roues d’une cal?che grinc?rent sourdement, et un cheval hennit, mais Margaret tint bon. Le processus restait difficile. L’?puisement montait en elle, et une douleur lui parcourut le bras. Le vent souffla en rafale dans sa direction, fouettant des boucles de cheveux sur ses yeux. Ses doigts gliss?rent. Sapristi. Margaret d?gringola. Elle agita les mains en l’air, essayant de se raccrocher ? quelque chose, n’importe quoi. Ses boucles furent balay?es hors de ses yeux, mais tout ce qu’elle vit fut de la grisaille. Elle battit des bras vers le haut, comme s’il pouvait y avoir quelque chose ? agripper, mais il n’y avait rien : c’?tait la fin. Margaret s’?crasa. Elle rebondit. Rebondir n’?tait pas le r?sultat auquel elle s’?tait attendue. Elle roula, puis tomba encore, atterrissant cette fois sur les pav?s. Elle ?tait vivante. C’?tait un ?tat qu’elle avait pris pour acquis, mais qu’? pr?sent, elle appr?ciait beaucoup. De gouttes de pluie froides continuaient ? atterrir sur elle, son corps ?tait douloureux, et sa robe ?tait maintenant ? la fois d?chir?e et boueuse, mais cela n’avait pas d’importance. Je suis vivante. Elle soupira. Avec d?lice. — Mademoiselle ? Le majordome a l’air s?v?re de tout ? l’heure descendit prestement d’une cal?che, suivit par le cocher bavard qui ?tait sur le trottoir. Margaret se releva p?niblement des pav?s. Son turban ? plumes avait atterri dans une flaque de boue, et une plume avait ?t? d?log?e de son perchoir. Bien que Margaret ait souhait? avoir une excuse pour ne pas le porter, la vision de son turban abim? manquait de la satisfaction qu’elle avait imagin?e. Le majordome l’examina avec la vigueur d’un homme habitu? ? chercher la moindre t?che en polissant l’argenterie. — Vous allez bien ? — Oui. Elle allait bien. Elle ?tait debout, et ses mains fonctionnaient. Margaret observa la cal?che. De toute ?vidence, elle avait atterri sur le toit de la cal?che et cela lui avait sauv? la vie. — Vous l’avez d?plac?e pour moi ? Le majordome hocha la t?te. — Apr?s que cet homme m’ait alert?, j’ai envisag? de rentrer et de vous atteindre par le balcon, mais j’ai pens? que ceci serait plus rapide. — Merci, dit-elle. — Vous auriez pu d?truire cette cal?che, aboya le cocher. Bien content que ce ne soit pas la mienne. Il dirigea un regard s?v?re vers le majordome avant de reprendre. — Les cal?ches co?tent cher. — J-Je n’avait pas l’intention de tomber, b?gaya Margaret. Le cocher fron?a ses ?pais sourcils et lui lan?a un regard noir. Il se tourna vers le majordome. — Dois-je aller chercher un vigile ? Elle ?tait peut-?tre en train de cambrioler ! Une robe terriblement ?l?gante, pour une vagabonde. Tr?s suspect. Le majordome lui adressa un sourire aimable. — Je pense que c’est une invit?e, Monsieur. — Une invit?e ? dit le cocher dont les yeux s’?carquill?rent. Vous en ?tes certain ? — Il est difficile d’oublier une robe de cette nuance de jaune. Il en va de m?me pour ce turban. Le majordome dirigea son regard avec gravit? vers la flaque et son contenu d?truit. Les hommes continu?rent ? parler, mais Margaret ne pouvait plus ?couter. Elle devait partir. M?me les plus excentriques n’?taient pas suppos?es escalader l’ext?rieur des balcons ducaux. Margaret n’avait pas surv?cu pour ?tre r?primand?e davantage. Son statut dans le beau monde ?tait d?j? suffisamment bas. Elle n’avait certainement pas besoin de rumeurs disant qu’elle ?tait une cambrioleuse. Elle ne pouvait pas rester l?, mais elle ne pouvait pas retourner au bal avec une robe d?chir?e et boueuse non plus. Des cochers lui jet?rent des regards curieux depuis leurs cal?ches, certains passant la t?te sous la petite pluie fine. Si seulement son propre cocher attendait l?. Malheureusement, il ne passerait les prendre qu’? minuit. Le ciel ?tait peut-?tre sombre, mais elle doutait qu’il soit d?j? proche de cette heure, et Margaret n’avait aucun d?sir de l’attendre. — Voulez-vous entrer ? l’int?rieur ? demanda le majordome. Margaret h?sita. Ne pas rester sous la pluie ?tait tentant. Elle ne devrait pas rester ici et continuer ? converser avec des cochers d?concert?s. Un invit? pourrait sortir de la r?sidence ? tout moment. La pr?sence de Margaret serait impossible ? ne pas remarquer, et la r?putation de Margaret deviendrait encore plus discutable. Margaret n’avait peut-?tre pas ?t? d?couverte au lit avec le duc, mais se retrouver seule, dans la rue, dans une robe d?chir?e et chiffonn?e, n’?tait pas une franche am?lioration. Et pourtant… M?me si elle ne pouvait absolument pas s’attarder au dehors, elle ne pouvait pas s’aventurer ? l’int?rieur. Il ?tait ?vident qu’elle rencontrait plus de membres de la haute soci?t? ? l’int?rieur. Elle ferma tr?s fort les yeux. Sa m?re avait r?ussi ? ruiner sa r?putation apr?s tout, et tout ce que Margaret avait accompli, c’?tait de s’assurer que le duc de Jevington ne soit impliqu? dans aucun scandale. Elle fron?a les sourcils. Elle ?tait ? Grosvenor Square. Daisy vivait ? proximit?. Margaret pouvait lui rendre visite, puisque Daisy ne serait pas au bal. — Vous devriez vraiment rentrer ? l’int?rieur, dit gentiment le majordome. — Je devrais l’embarquer pour voir si c’est pas une criminelle, dit le cocher. C’est pas bon signe quand une femme cambriole une maison dans un beau quartier comme ?a. — Je n’allais pas cambrioler, protesta Margaret. — Alors qu’est-ce que vous alliez faire ? demanda le cocher. ?a m’a tout l’air d’?tre ce que vous alliez faire, m?me si vous aviez une invitation. Margaret le fixa du regard. Le majordome et le cocher la d?visag?rent en retour. D’accord. Margaret remua les jambes. — ?a doit ?tre une professionnelle, en plus, songea le cocher. Parce que je ne l’ai m?me pas remarqu?e en train de grimper. Ce n’?tait plus le moment de r?fl?chir davantage, peu importe combien le processus de la r?flexion ?tait pr?cieux en temps normal. Margaret partit en courant. Elle souleva ses jupes pour ?viter de marcher sur leur ourlet et se pr?cipita dans la rue. Elle ?vita de regarder les cal?ches, comme si ne pas croiser les yeux des cochers signifiait qu’ils ne remarqueraient pas une bourrasque jaune canari avec des boucles brunes. Elle s’enfuit de Grosvenore Square, puis tourna dans une rue adjacente, puis une autre. Trop tard, elle prit conscience qu’elle n’avait m?me pas un r?ticule et n’avait d’argent pour un fiacre. Elle serra les dents. Elle ne cherchait pas un fiacre – pas encore. Elle cherchait Daisy. Enfin, elle arriva ? la r?sidence de son amie. Elle envisagea d’escalader jusqu’? la fen?tre de son amie. Mais contrairement aux h?ro?nes des romans de Loretta Van Lochen, elle ne sentait pas en mesure d’escalader l’immeuble. M?me le balcon du duc s’?tait r?v?l? dangereux. En outre, Daisy ?tait sens?e et n’aurait probablement pas laiss? sa fen?tre ouverte. Cette partie de Mayfair ?tait peut-?tre agr?able, mais cela restait Londres, et de nombreuses personnes en manque d’argent ?tait au courant de la richesse de ce quartier. Margaret lissa sa robe, consciente que de la boue formait des cro?tes en divers endroits. Lisser sa robe n’?tait en rien comparable ? laver sa robe, la s?cher et la repasser, mais cela devrait suffire. Elle saisit le heurtoir, le frappa et apr?s un certain temps, le majordome ouvrit la porte. S’il ?tait indign? d’avoir ?t? interrompu dans ses projets de repos nocturne, il ne l’exprima pas ? haute voix. Par contre, il ouvrit grand les yeux et fit la moue. — Je suis vraiment d?sol?e, dit vivement Margaret. Mais je d?sirais parler ? Miss Holloway. Le majordome se renfrogna, et elle frissonna sous son regard dur. — Est-elle chez elle ? demanda Margaret d’une voix tremblante. — Miss Holloway n’est pas encline ? batifoler en ville ? des heures indues de la nuit. La voix du majordome retentit d’un ton autoritaire. Il excellait sans aucun doute ? diriger les valets, apparaissant peut-?tre m?me dans leurs r?ves apr?s un incident particuli?rement maladroit dans leur service. Margaret fr?mit, comme s’il ?tait un capitaine de navire qui venait d’annoncer que le m?t du bateau s’?tait ab?m? dans l’oc?an et que leur survie ?tait incertaine. — Puis-je la voir, cependant ? Le majordome soupira, et son comportement assur? se teinta de perplexit?. — Ce n’est pas une heure normale pour les visites, jeune demoiselle. Des coups sourds r?sonn?rent ? l’?tage, et Margaret fut soudain reconnaissante pour la puissance de la voix du majordome. — Oh, Jameson, appela Daisy depuis la mezzanine. Vous n’avez pas besoin de pr?tendre ?tre un chien de garde. Ce n’est que Miss Carberry. — Vous n’avez pas vu son accoutrement, murmura Jameson, et ses l?vres se tordirent de cette fa?on particuli?re si commune aux gens qui avaient trouv? la r?partie parfaite, et tentaient, pour des raisons de conservation d’emploi, de ne pas ?mettre leurs sarcasmes ? haute voix. Daisy agita la main ? travers les barreaux de la rampe. — Ne vous pr?occupez pas de lui. Montez. Margaret hocha la t?te et se h?ta de grimper les escaliers. Daisy resta bouche b?e lorsque Margaret approcha. De toute ?vidence, elle venait de remarquer sa tenue. — Je suppose que vous vouliez bavarder. — Euh – oui. Daisy tourna sa chaise et roula en direction de sa chambre. Margaret se h?ta de la suivre. — C’est aimable ? vous de me rendre visite, dit Daisy. Une horloge comtoise ?grenait ?nergiquement son tic-tac. — Je suis d?sol?e pour l’heure tardive, dit Margaret. — Balivernes, dit Daisy avec gaiet?. J’?tais simplement en train de lire. Bien que j’adore Raison et Sentiments, je ne m’inqui?te plus de savoir si Edmund oubliera compl?tement Elinor, et la lecture ne rec?le plus la m?me urgence. Une porte s’ouvrit et Mrs Holloway passa la t?te. Ses boucles blondes ?taient recouvertes d’un bonnet de nuit, et ses sourcils blonds assortis s’?lev?rent de surprise. — Miss Carberry ? La gorge de Margaret fut soudain s?che, mais elle parvint ? s’abaisser en une r?v?rence h?tive. — Enchant?e de vous voir. — Bien s?r, dit Mrs Holloway dont le regard descendait vers la robe de Margaret. Il est assez tard. — Je sais, dit Margaret d’un air d?sol?. Je crains que ce ne soit urgent. Arriver chez une amie ? une heure tardive ?tait un manquement certain ? l’?tiquette, m?me si les tomes les plus ?pais d?di?s ? ce sujet ?chouaient ? mettre explicitement en garde contre cette pratique. Leurs pages se consacraient ? des avertissements s?v?rement formul?s contre les dommages irr?parables qui s’ensuivraient apr?s s’?tre laiss? aller ? un malencontreux faux-pas en prenant la mauvaise fourchette. Non, Margaret ?tait certaine qu’elle avait commis un grave manquement ? la politesse. Mrs Holloway l’examina prudemment. — Votre m?re sait-elle que vous ?tes ici ? Maman. Les doigts de Margaret s’agit?rent. Que faisait sa m?re, en ce moment ? Continuait-elle ses recherches ? Margaret esp?ra qu’elle avait eu le bon sens de s’abstenir. La derni?re chose dont elle avait besoin ?tait que sa m?re informe tout le monde au bal que Margaret ?tait perdue, alors qu’elle n’avait aucune preuve et donc, qu’il ne pourrait jamais y avoir de mariage. Non. Sa m?re poss?dait un certain bon sens. Sa m?re s’inqui?tait peut-?tre, mais en v?rit?, Margaret refusait de se sentir coupable. Pas apr?s ce qui ?tait arriv?. — Je prends ce long silence pour un non, dit Mrs Holloway. Les joues de Margaret s’enflamm?rent. — Je vous assure qu’il y a r?ellement une affaire assez urgente dont j’aimerais discuter. Mrs Holloway se dandina. Son inconfort ?tait palpable, comme si elle avait atteint le sommet de la complexit? en mati?re d’?ducation d’enfant. — Ne vous impliquez pas, Daisy. — Maman ! grogna Daisy. Margaret ne participe tout de m?me pas ? des activit?s illicites. — J’imagine que ce serait inhabituel, dit finalement Mrs Holloway, le regard riv? ? la robe de Margaret comme si elle prenait en consid?ration le fait que l’apparence ?chevel?e de Margaret soit aussi inhabituelle. Bien que l’apparence de Margaret n’atteigne jamais une perfection irr?prochable – ses boucles ?paisses glissaient hors des ?pingles quel que soit le temps qu’elle passait ? les arranger, et sa robe s’arrangeait toujours pour rester froiss?e en permanence – elle avait habituellement un air plus respectable. Finalement, Mrs Holloway soupira. — Soyez br?ve. Daisy fit un grand sourire. — Bien s?r. Chapitre Quatre — Vous tombez affreusement bien, d?clara Daisy en roulant sa chaise vers sa chambre. Papa est ? son club. Les murs de la chambre de Daisy ?taient peints d’une joyeuse couleur tangerine, et Margaret respira. Si sa robe n’avait pas ?t? fichue, tout ceci para?trait presque normal. La m?re de Daisy ne permettrait pas ? Margaret de rester longtemps. Margaret n’avait pas le luxe de postposer cette conversation, peu importe ? quel point revivre cette exp?rience ?tait d?plaisant, et peu importe ? quel point elle ne d?sirait pas lire de la piti? dans le regard de son amie. Margaret ?tait souvent prise en piti?. Davantage de piti? serait intol?rable. Daisy referma la porte d’une pouss?e, et ses yeux bleu vif ?tincel?rent. — Dites-moi tout. R?v?lez vos secrets. Sortez vos squelettes du placard. — Pas de squelette, s’?cria Margaret. — Dommage. Mes parents refusent de me laisser en avoir un vrai, et je n’aurai rien contre en avoir un m?taphorique. L’int?r?t de Daisy pour la m?decine ?tait bien connu, mais Margaret fr?mit tout de m?me. Les squelettes pouvaient rester dans des cimeti?res bien entretenus, sous des pierres tombales tout aussi bien taill?es et, lors d’occasions particuli?res, d?cor?es avec une s?lection de fleurs de bon go?t. Daisy pivota sa chaise roulante contre le mur. — Vous venez du bal. ?tait-ce aussi horrible que vous l’imaginiez ? Margaret pris place dans un fauteuil. — Pire. Daisy frissonna. — Le c?t? agr?able de notre amiti?, c’est que vous ne me donnez jamais l’impression que je manque grand-chose. Maintenant, que s’est-il pass? ? Avez-vous ?t? confin?e dans le coin enfum? ? c?t? de la chemin?e r?serv? ? celles qui font tapisserie ? — Pire. Les yeux de Daisy s’?carquill?rent. — Vous n’?tiez pas en train de danser, tout ce temps, au moins ? Vous donnant en spectacle avec vos pas de danse in?l?gants ? Margaret se redressa vivement. — Comment savez-vous que mes pas de danse sont imparfaits ? Daisy sourit d’un air narquois. — Je vous ai vue marcher. Margaret se renfrogna. Mais c’?tait vrai : elle ?tait une pi?tre danseuse, peu importe combien ses professeurs la corrigeaient, peu importe avec quel enthousiasme ils la suppliaient de s’am?liorer, et peu importe combien Margaret elle-m?me le d?sirait. — Je ne dansais pas, dit Margaret, boudeuse, en croisant les bras. — Mais vous avez bien assist? au bal ? Daisy inspecta du regard la robe de Margaret, comme si elle se demandait si elle ?tait tomb?e dans une flaque de boue et venait seulement de r?ussir ? s’en extirper. — Naturellement, dit Margaret en relevant le menton. De plus, Maman n’aurait jamais accept? de ne pas y assister. Daisy resta silencieuse, son regard intelligent. C’?tait le moment de tout d?voiler, mais le c?ur de Margaret se serra comme s’il d?sirait ?touffer ses cordes vocales. Finalement, Margaret soupira. — Je n’?tais pas pr?s du feu, et je n’?tais pas en train de danser. J’?tais – euh – sur le lit du duc. Daisy en resta bouche b?e. — Donc ce n’?tait pas inconfortable, continua Margaret avec un petit rire ?trange. Le lit ?tait douillet. — Et vous ?tiez r?ellement dans son lit ? Pas dans une chambre d’ami ? — Oh, le duc ?tait pr?sent ?galement. Daisy garda le silence, mais ses sourcils exprim?rent sa surprise. — Enfin, il n’?tait pas pr?sent tout le temps, expliqua Margaret. Ce serait inappropri?. — Je suppose qu’il y a une limite ? ce qui est inappropri?, dit Daisy faiblement. — Pr?cis?ment, acquies?a Margaret. Je n’avais pas choisi de me trouver sur son lit. — Vous avait-il emport?e et d?pos?e l? ? Un enfant naturel du duc va-t-il faire une apparition dans neuf mois ? — Ne dites pas de b?tises. Il ne m’a pas touch?e. Daisy la regarda ?trangement. — Votre m?re vous a-t-elle, ? tout hasard, plac?e sur le lit ? Margaret hocha mis?rablement la t?te, et les yeux de Daisy s’emplirent de larmes. Margaret d?tourna le regard. — Elle a eu de l’aide. — Mais elle a tout orchestr? ? — Oui, couina la voix de Margaret. Elle a amen? un ?v?que pour nous ‘d?couvrir’. — Elle avait l’intention d’accuser le duc de Jevington de vous avoir compromise ? — Tout ? fait. — Et son plan n’a pas march?, dit gentiment Daisy. — Pr?cis?ment. Daisy lui serra la main avec sympathie, puis se mit ? pouffer de rire. — Alors le duc vous a trouv?e dans son lit ? — Ce n’est pas dr?le, dit Margaret. — En ?tes-vous s?re ? Les yeux de Daisy brill?rent de malice, et Margaret sentit ses l?vres esquisser un sourire. — Comment a-t-il r?agi ? Vous a-t-il touch?e ? — Il m’a touch? les poignets, mais c’?tait parce que je le lui avais demand?. — Si j’?tais seule avec lui, je lui demanderais de toucher bien plus que mes poignets, soupira Daisy. Margaret ouvrit des yeux ronds, et les joues de Daisy rosirent. — Il n’?tait pas question de plaisir, dit h?tivement Margaret. Naturellement ! — Naturellement, r?p?ta Daisy d’un air dubitatif. — J’?tais attach?e ? son lit. De toute ?vidence, quand il est entr?, j’ai d? lui demander de me d?tacher. Et le meilleur emplacement pour placer des liens a toujours ?t? sur les poignets. Il para?t que cela rend difficile l’usage des mains. — Les mains sont assez importantes, acquies?a Daisy. — Oui. J’imagine que ce serait bien plus inconfortable s’ils commen?aient ? ligoter le torse des gens. — Ah, la technique bovine. Margaret lan?a ? son amie un regard perplexe. — Habituellement utilis?e par les cow-boys ? l’aide de quelque chose appel?e un lasso, ajouta Daisy. Pendant un moment, elles rest?rent silencieuses, songeant aux excentricit?s tr?s r?pandues dans les anciennes colonies britanniques. Un tout autre soir, Margaret aurait peut-?tre ajout? un commentaire sur le d?go?t passionn? des am?ricains pour le th?, mais ce n’?tait pas le moment de bavarder, m?me pour des bavardages d’un genre indubitablement int?ressant. — Je suis pass?e par la fen?tre et me suis enfuie, dit Margaret. Elle est probablement contrari?e. — Elle est probablement scandalis?e. La plupart des femmes seraient rest?es l?. Vous auriez pu rafler un duc. — Personne n’aurait cru qu’il ?tait en train de me compromettre, de toute fa?on, soupira Margaret. — Je ne crois pas que ce soit vrai. — B-bien s?r que si, b?gaya Margaret. Daisy ne voyait peut-?tre pas comment les autres gens interagissaient avec Margaret, mais Margaret si. Elle faisait tapisserie, et celles qui faisaient tapisserie ne se retrouvaient jamais dans le lit des ducs. — Le duc aurait d?clar? que ma m?re et moi avions mis en sc?ne une fausse situation compromettante, dit Margaret. Et tout le monde l’aurait cru. C’?tait ?vident. Compl?tement. Daisy inclina la t?te, d?pla?ant ses longues m?ches blondes. Margaret avait peut-?tre interrompu Daisy alors qu’elle se brossait les cheveux. Il ?tait tard, et Margaret ne devrait pas ?tre ici. Si seulement ses parents avaient achet? une maison ? Mayfair, au lieu de leur grande r?sidence avec ses jardins exceptionnellement grands. Si seulement Margaret avait pu rentrer directement chez elle. — Il n’aurait peut-?tre pas fait cela, dit Daisy. — Je ne pouvais pas le forcer ? m’?pouser. Je ne pouvais pas commencer ma vie d’?pouse de cette fa?on. — Bien s?r que non, dit chaleureusement Daisy. Et c’est la vraie raison pour laquelle vous ?tes ma plus ch?re amie. Et la raison pour laquelle le duc aurait eu de la chance d’avoir ?t? oblig? de vous ?pouser. — Balivernes, dit Margaret. Le duc pouvait ?pouser n’importe qui. Il ne devrait pas se voir imposer une femme dont tout le monde ?tait heureux de ne pas tenir compte. Elle secoua la t?te. — Je suis d?sol?e. Je n’avais pas l’intention de venir ici et d’?tre aussi abattue. J’ai – euh – bien peur d’avoir perdu mon r?ticule. Pas qu’il ait contenu beaucoup d’argent de toute fa?on. Pensez-vous que je puisse emprunter le prix d’une course en fiacre ? Daisy se redressa. — Vous avez l’intention de rentrer chez vous ? Margaret hocha la t?te. — Apr?s ce que votre m?re ? fait ? Une ?trange indignation r?sonna dans la voix de Daisy, une expression que Margaret n’associait pas au caract?re habituellement plaisant de Daisy. Margaret hocha ? nouveau la t?te. — Bien s?r. — Je suis certaine que ma m?re vous h?bergerait. Margaret haussa les sourcils. — Enfin, dit Daisy en baissant les yeux tandis que ses joues rosissaient, avant de relever les yeux et de se pencher vers Margaret. Nous ne sommes pas oblig?es de le lui dire. Margaret pouffa de rire. — Je suis s?re qu’elle attend impatiemment que je parte. — Vous pourriez grimper par la fen?tre, dit Daisy. — La derni?re fois, je suis tomb?e. — Vous ne pouvez pas tomber chaque fois. — Je doute que l’obscurit? am?liore mes comp?tences. — Dans ce cas, nous le lui dirons, corrigea Daisy. Evidemment, vous ne pouvez vous en retourner. Qui sait ce que votre m?re fera ensuite ? Margaret se renfrogna momentan?ment. Puis elle releva le menton, suivant cette tradition utilis?e depuis toujours par les gens essayant de faire au mieux dans une situation discutable. Il ?tait douteux que ce geste ait le m?rite d’exaucer les souhaits, mais Margaret fit n?anmoins le v?u de ne pas s’inqui?ter. — Il me suffit d’un plan. Enfin, il me suffit d’un bon plan. Et ensuite, je pourrai quitter la maison et vivre heureuse pour le restant de mes jours. Margaret n’allait pas laisser sa m?re continuer ? contr?ler sa vie. Pas quand les plans de sa m?re impliquaient de l’attacher ? des lits. — Ce qu’il vous faut, dit Daisy, c’est vous marier. Margaret regarda soup?onneusement son amie. En g?n?ral, Daisy affichait un caract?re raisonnable que Margaret appr?ciait. Margaret n’avait jamais cru que Daisy avait l’habitude de prof?rer des d?clarations insens?es, et il ?tait regrettable que Daisy ait apparemment perdu la raison ? ce moment tr?s pr?cis. — Je ne vais pas pr?tendre que le duc m’ait compromise. — Alors, n’?pousez pas le duc, dit Daisy. Mais souvenez-vous, si vous vous mariez, vous ne serez plus sujette aux folles tentatives de votre m?re. Margaret se renfrogna. Techniquement, Daisy marquait un point. Sa m?re avait soudoy? quelqu’un, avant que la saison ne d?bute, pour chanter ses louanges aupr?s du marquis de Metcalfe. Malheureusement pour la m?re de Margaret, la femme qu’elle avait choisie avait fini par ?pouser le marquis. Maman avait train? Margaret ? tous les bals de cette saison, la transportant parfois ? un bal diff?rent avant que Margaret n’ait eu l’occasion de go?ter les canap?s. Tout le travail de Maman n’avait servi ? rien : personne ne courtisait Margaret. Personne ne le ferait probablement jamais. — Personne ne m’?pousera, dit Margaret. C’est pour cela que je suis dans cette situation. — Votre situation attach?e sur un lit ? dit Daisy en esquissant un sourire. Margaret croisa les bras. — Ce n’est pas dr?le. Daisy haussa un sourcil, et Margaret soupira. Peut-?tre ?tait-ce amusant. M?me si l’incident avait ?t? extr?mement embarrassant. — Je n’ai pas envie d’?pouser n’importe qui, dit Margaret. J’ai des principes. — Et vous avez raison, dit Daisy. Margaret d?visagea son amie. Pour quelque raison, Daisy continuait ? sourire et ? hocher la t?te, comme si elles avaient une conversation normale, comme si son amie ignorait compl?tement le fait que chaque mot qu’elle pronon?ait ?tait une absurdit? — Personne ne d?sire ?pouser une ?cossaise dont le p?re fait du commerce. Quand les gens bavardent, ils s’?tonnent que j’aie r?ellement ?t? invit?e. — C’est parce que votre p?re est tr?s riche. — Je sais, mais— — Tout va bien se passer, dit Daisy en secouant la t?te. Margaret envisagea de lui dire que chacun de ces mots ?tait absurde. Naturellement, tout n’allait pas bien se passer. Les hommes n’?taient pas connus pour s’extasier sur les frisottis des cheveux trop ?pais ou sur le manque d’une silhouette ?lanc?e. — Les hommes n’ont pas envie de me courtiser. — Pr?cis?ment, sourit Daisy avec enthousiasme. C’est pourquoi vous devrez rapidement faire progresser votre position sociale. Margaret la regarda soup?onneusement. Daisy parlait avec d?sinvolture de quelque chose d’impossible. Si Margaret avait ?t? capable de faire progresser rapidement sa position sociale, l’argent de Papa y serait parvenu. — Vous avez seulement besoin d’un peu d’aide, dit Daisy songeusement. — Les m?res sont suppos?es aider, dit Margaret. — Eh bien, oui. Mais la v?tre est un peu trop enthousiaste dans l’accomplissement de ses devoirs. Mais peut-?tre… Daisy se tut, puis un sourire joua sur ses l?vres. Margaret se raidit tandis que le sourire de Daisy continuait ? s’agrandir, indiquant toutes sortes de mauvais pr?sages. Seules des id?es r?ellement absurdes pourraient faire s’?tirer les l?vres de Daisy dans de telles proportions ou p?tiller ses yeux avec autant de pr?monitions. Daisy se pencha vers l’avant. — Il y a quelqu’un d’autre qui peut vous aider. — J’esp?re que vous n’allez pas me proposer votre m?re. — Ne dites pas n’importe quoi. Elle ne serait pas suffisamment motiv?e. — Mais qui le serait ? — Le duc de Jevington. Margaret fut interloqu?e. Elle ouvrit la bouche pour parler, mais les mots lui ?chapp?rent. Ils semblaient avoir fui devant l’absurdit? de la d?claration de Daisy. Finalement, elle secoua la t?te. — C’est vrai, dit Daisy en se redressant en arri?re avec assurance. — Vous ne l’avez pas rencontr?. Il ne m’aiderait pas. — Il vous a probablement ?t? extr?mement reconnaissant de ne pas ?tre rest?e dans ses appartements. Vous pourriez ?tre en train de faire des pr?paratifs pour devenir duchesse. Au lieu de cela, vous ?tes ici. Un endroit nettement moins noble, dit Daisy en souriant avec ironie. La maison de Daisy avait beau se trouver dans un quartier agr?able, l’int?rieur manquait du luxe pr?sent chez d’autres amies de Margaret. Aucun buste romain n’?tait perch? sur les buffets, et aucune d?esse grecque ne les contemplait depuis des plafonds peints avec recherche. La maison de Daisy semblait… confortable. Apr?s tout, ses parents avaient consacr? du temps ? la conduire de station thermale en station thermale dans l’espoir de la gu?rir de sa claudication. Aucun de leurs efforts n’avaient donn? de r?sultat, malgr? les caisses bien remplies de son p?re et son enthousiasme ? d?penser de l’argent. Ces caisses ?taient ? pr?sent moins pleines, refl?tant malheureusement de fa?on similaire un moral moins gai, et la m?re de Daisy n’?tait pas attel?e ? la t?che de le cajoler pour obtenir un budget g?n?reux pour des tentures ou pour vanter les m?rites d’un ameublement renouvel?, avec la m?me vigueur que d’autres femmes de la haute soci?t?. — Je ne peux pas lui demander de me trouver un mari, dit Margaret sans prendre l’id?e au s?rieux. — Le duc de Jevington n’a pas la r?putation d’?tre cruel. — Il n’a pas non plus celle d’?tre d?raisonnable. Daisy ne se raidit pas. ? la place, elle retira son r?ticule de son bureau, l’ouvrit, et glissa une pi?ce dans la main de Margaret. — Mes parents insistent pour que je la garde en cas d’urgence. Jameson vous aidera ? trouver un fiacre. Et demain, vous rendrez visite au duc et lui parlerez de votre situation. Malgr? le trajet sans heurts de la cal?che, ? pr?sent que Londres ?tait plong?e dans la nuit et lib?r?e de la plus grande partie de ses fiacres, charrettes et passants, Margaret rentra chez elle sur ses gardes, tout en r?fl?chissant aux paroles de son amie. Enfin, le fiacre s’arr?ta devant la r?sidence familiale. Margaret regarda fixement l’immeuble mena?ant qui se profilait plus haut que les immeubles avoisinants, comme si la taille pouvait indiquer la majest?. Sa famille n’avait emm?nag? l? que r?cemment, et le b?timent lui semblait aussi ?tranger que tout le reste dans la capitale. Elle devrait peut-?tre simplement dire au cocher de faire demi-tour et aller passer la nuit chez Daisy. Mais ce n’?tait pas une solution d?finitive. Ce n’?tait pas la premi?re fois que Margaret souhaitait ?tre chez elle – vraiment chez elle. Tout avait ?t? plus simple avant que les affaires de Papa ne prennent leur essor. Le cocher ouvrit la porte, et Margaret sortit du fiacre. Son c?ur fr?mit, m?me si marcher jusqu’? la porte ?tait un acte qu’elle avait accompli ? maintes reprises auparavant, m?me si, normalement, elle ?tait accompagn?e par sa m?re ou par une bonne. Cependant, il n’y avait aucune raison de tergiverser. Elle leva la main vers le heurtoir et frappa, se demandant si le majordome aurait abandonn? son poste, ?tant donn? l’heure tardive. Elle n’eut pas besoin de s’inqui?ter. La porte s’ouvrit imm?diatement. Au lieu de l’expression solennelle du majordome, sa m?re apparut. — Ma ch?re enfant ! s’?cria Maman avec un cri per?ant, enveloppant Margaret dans ses bras. Maman ne la serrait pas dans ses bras, d’habitude. Les embrassades ?taient r?serv?es aux petits enfants, pas aux filles dont on craignait qu’elles ne terminent c?libataires. — J’?tais si inqui?te, clama Maman d’une voix aigu?. Margaret se demanda si elle devait lui rappeler qu’elle n’aurait pas ?t? aussi inqui?te si elle n’avait pas pris la d?cision de la ligoter au lit du duc. Lily trottina vers elle, agitant la queue, inconsciente de ce que cette soir?e avait de diff?rent de toutes les autres. Margaret s’accroupit et caressa la fourrure p?le de sa chienne. — Ah, vous voil?, dit Papa. M?me si la lumi?re se refl?tait sur son pince-nez comme ? l’ordinaire, Margaret vit les rides amicales autour de ses yeux, m?me si Papa affichait moins d’?motions que sa m?re. — Jeune fille, vous auriez d? rentrer ? la maison avec votre m?re, dit Papa comme s’il se souvenait que le moment ?tait propice ? une d?monstration d’autorit? parentale, m?me si ces occasions ?taient rares. Pourquoi diable avez-vous ?t? s?par?e d’elle ? Maman regarda Margaret avec nervosit?. Margaret h?sita. C’?tait le bon moment pour tout raconter ? son p?re, et pourtant, quel but atteindrait-elle ? Papa r?primanderait-il Maman ? Non. C’?tait entre sa m?re et elle. Elle devait simplement se montrer plus prudente, de peur que sa m?re ne d?cide de mettre ? nouveau en sc?ne une situation compromettante. — Je suis l?, maintenant. — Bien s?r, bien s?r. Vous ?tes l?, dit Papa en hochant la t?te. Un autre p?re se serait mis en col?re, avec l’air d’un homme qui se s’?tait toujours demand? ce que cela ferait d’?tre un dictateur et qui prenait toute mauvaise conduite comme opportunit? d’explorer pleinement ce potentiel. Papa n’?tait pas comme la plupart des hommes. Lorsqu’il faisait une pause dans ses r?unions incessantes et sa lecture de divers livres de comptes et rapports, c’?tait uniquement pour sourire d’un air heureux, comme s’il avait constamment une tasse de chocolat en main. Papa ?tait reconnaissant pour sa bonne fortune et r?sistait ? la tentation ? laquelle des hommes plus faibles avaient succomb?, de se montrer paternaliste avec tous ceux qui n’avaient pas r?ussi ? devenir des magnats. — Je vais monter, dit Margaret en se dandinant. — Tr?s raisonnable, dit Papa. Je – heu – devrais retourner ? mes livres. Maman hocha la t?te, mais il y avait un ?clat glacial dans ses yeux, et quand Margaret grimpa l’escalier, elle se demanda si elle n’avait pas commis une erreur en ne disant pas tout. Êîíåö îçíàêîìèòåëüíîãî ôðàãìåíòà. Òåêñò ïðåäîñòàâëåí ÎÎÎ «ËèòÐåñ». Ïðî÷èòàéòå ýòó êíèãó öåëèêîì, êóïèâ ïîëíóþ ëåãàëüíóþ âåðñèþ (https://www.litres.ru/pages/biblio_book/?art=67033360&lfrom=688855901) íà ËèòÐåñ. Áåçîïàñíî îïëàòèòü êíèãó ìîæíî áàíêîâñêîé êàðòîé Visa, MasterCard, Maestro, ñî ñ÷åòà ìîáèëüíîãî òåëåôîíà, ñ ïëàòåæíîãî òåðìèíàëà, â ñàëîíå ÌÒÑ èëè Ñâÿçíîé, ÷åðåç PayPal, WebMoney, ßíäåêñ.Äåíüãè, QIWI Êîøåëåê, áîíóñíûìè êàðòàìè èëè äðóãèì óäîáíûì Âàì ñïîñîáîì.
Íàø ëèòåðàòóðíûé æóðíàë Ëó÷øåå ìåñòî äëÿ ðàçìåùåíèÿ ñâîèõ ïðîèçâåäåíèé ìîëîäûìè àâòîðàìè, ïîýòàìè; äëÿ ðåàëèçàöèè ñâîèõ òâîð÷åñêèõ èäåé è äëÿ òîãî, ÷òîáû âàøè ïðîèçâåäåíèÿ ñòàëè ïîïóëÿðíûìè è ÷èòàåìûìè. Åñëè âû, íåèçâåñòíûé ñîâðåìåííûé ïîýò èëè çàèíòåðåñîâàííûé ÷èòàòåëü - Âàñ æä¸ò íàø ëèòåðàòóðíûé æóðíàë.