Êîò ìóðëû÷åò... áåë è ñåð, Îí ïîíÿòëèâûé... Æèë äà áûë ýñýñýñýð - Òðàâû ìÿòíûå. Òðàâû ìÿòíûå, åùå Ìàòü-è-ìà÷åõà, Ðåêè ñ ñèãîì è ëåù¸ì - Ìàòåìàòèêà! Óðàâíåíèÿ, èêñû, Ñèíóñ-êîñèíóñ... Âîçëå ñòàäà âîë÷üÿ ñûòü... Ïàðíè ñ êîñàìè... Ñ÷àñòüå óøëîå ëîâè - Äåâêè ñ âîëîñîì Ðàñïåâàëè î ëþáâè Ñëàäêèì ãîëîñîì... À âåñåííåþ ïîð

Absolution Providentielle

Absolution Providentielle Pamela Fagan Hutchins Lorsque le destin offre ? Katie Connell, avocate et relativement instable, une seconde chance inattendue dans les Cara?bes, va-t-elle retrouver son ?quilibre, ou un tueur va-t-il tour faire chavirer ? « Katie est le premier personnage dont je suis absolument tomb?e amoureuse depuis Stephanie Plum ! » Stephanie Swindell, propri?taire d'une librairie. La carri?re de Katie Connell, avocate au Texas et buveuse inv?t?r?e, vient de fondre sous ses yeux. Apr?s un ?chec tr?s public lors d'un proc?s d’une c?l?brit? o? elle n’avait aucune chance de gagner et une rupture d?chirante, elle ?vite la cure de d?sintoxication en se retirant sur l'?le tropicale o? ses parents sont d?c?d?s tragiquement. Mais lorsqu'elle arrive, il devient ?vident que le pr?tendu accident de ses parents avait ?t? un meurtre froid et calcul?. Alors que Katie cherche des indices, elle re?oit l'aide d'une source inattendue : une maison hant?e par l’esprit d’Annalise. Entre le fant?me de l'?me s?ur, une chanteuse locale et un s?duisant chef, les bizarreries de l'?le vont faire perdre la t?te ? l'ancienne avocate. Katie pourra-t-elle recoller les morceaux du puzzle de sa vie et r?soudre le meurtre de ses parents dans le cadre de son nouveau d?part ? Les livres du personnage de Katie affichent plus de 4000 commentaires et une moyenne de 4,5 ?toiles. Ils sont disponibles en version num?rique, imprim?e et en livre audio. Absolution providentielle est le premier livre autonome de la trilogie Katie et le livre n°1 de la s?rie de romans policiers « Ce qui ne vous tue pas… ». Once Upon A Romance qualifie Hutchins « d’ auteur de premier plan en devenir ». Si vous aimez Sandra Brown ou Janet Evanovich, vous allez adorer Pamela Fagan Hutchins, la meilleure vendeuse du USA Today. Ancienne avocate et texane de naissance, Pamela a v?cu dans les ?les Vierges am?ricaines pendant pr?s de dix ans. Elle refuse d'admettre qu'elle a pris des notes pour cette s?rie pendant cette p?riode. Ce que les lecteurs d'Amazon disent de la s?rie des myst?res « Ce qui ne vous tue pas… » : « Incontournable ». « Attention lecteurs : r?servez votre agenda avant de l’ouvrir, car vous ne pourrez plus le fermer avant de l’avoir termin?. » « Hutchins est une ma?tresse de la tension. » « Un myst?re intrigant... une romance captivante. » « Tout s?duit : l'intrigue, les personnages et le style d’?criture. Les lecteurs vont se r?galer. » « Imm?diatement accrochant. » « Envo?tant. » « Un myst?re au rythme effr?n?. » « Je ne peux pas le poser. » « Divertissant, complexe et qui donne ? r?fl?chir. » « Le meurtre n'a jamais ?t? aussi amusant ! » « Vous allez adorer le voyage ! » Achetez d?s aujourd'hui Absolution providentielle pour un myst?re humoristique que vous ne pourrez plus l?cher ! Absolution Providentielle Table des mati?res Free PFH Ebooks (#ub782dbf0-d04c-523c-a9ef-69880d959088) Chapitre 1 (#u40d396f6-b87c-5a82-be8b-281b03642409) Chapitre 2 (#u053f7748-7868-5c79-8ed3-f7d4e3aee4d8) Chapitre 3 (#uf8670c84-a9d8-5f8c-b3a1-f32b61d127d7) Chapitre 4 (#u8bee63b6-e0b0-59e5-9f5d-a2472a684b72) Chapitre 5 (#uaaee059b-3d91-5014-8248-e66e2a94e67c) Chapitre 6 (#u962fadfe-0a13-54e3-8d2d-9116c5374f9f) Chapitre 7 (#uf11a3e40-baf4-5763-a0fc-5edfbb13b55f) Chapitre 8 (#ue9c8861a-b17c-58cf-99d1-a8fdb3fa5302) Chapitre 9 (#u355a3485-7cbd-5f38-854b-5aaa3164f0c9) Chapitre 10 (#u2c593d67-b4b1-5859-ae93-e6b8d614840b) Chapitre 11 (#u2084907b-3c5f-59f5-bf7b-e717f1dde481) Chapitre 12 (#u918af04e-2b99-5537-a4c4-076d8a409911) Chapitre 13 (#u57b39837-6992-59c9-8ef7-8d77872877ec) Chapitre 14 (#u8b6a9f3d-1040-5ddb-ac51-88e1177d067c) Chapitre 15 (#u42e08d12-a1f8-5fc7-881e-891951068299) Chapitre 16 (#u8d5ade16-91f4-5372-a8a2-3ef6d7099f87) Chapitre 17 (#u4e332318-5ce7-5ba6-bdc6-569332a74e9b) Chapitre 18 (#u45b8d735-f215-5455-8f5b-9931d5b58392) Chapitre 19 (#uafea0a9f-5447-5b81-86cd-bd9a6857ed99) Chapitre 20 (#u55b05da9-0dc4-5acf-bbe3-aa8d5f56b032) Chapitre 21 (#ua12d5b51-3b89-5413-bc63-e5b30afdefcd) Chapitre 22 (#udc761781-12b4-5e87-9c12-8207ace82dbe) Chapitre 23 (#ud2d65243-b7b4-5c13-8f01-fe3331d65f1a) Chapitre 24 (#ue397caf0-aacb-5882-b753-a49dfc664c8b) Chapitre 25 (#u0a1f819f-70f4-514b-8e8e-6b03abe16f7b) Chapitre 26 (#u883bb36e-af0f-5fdc-9c85-efaf0bfaf915) Chapitre 27 (#u0d55f815-e7d9-52a6-8986-b436ba083168) Chapitre 28 (#ud8a930db-30a9-5e39-b448-744207eb6146) Chapitre 29 (#u3f23d722-90b8-5e61-be77-ada629eafd29) Chapitre 30 (#u7573fc59-8f85-511e-8d4a-a80448b00496) Chapitre 31 (#ub88cea12-556f-594c-b587-52a150f34008) Chapitre 32 (#u00169266-9e4e-5db2-964a-4c5236fda83e) Chapitre 33 (#ub5789cb6-4dff-5d06-a0af-fd7f657bedcb) Chapitre 34 (#uefbf31f8-1559-5749-9301-16cd47989784) Chapitre 35 (#u7aa2915a-1cc0-54a4-b2a9-5ce95617121b) Chapitre 36 (#u28fcab6e-ea0f-581c-967b-4dfa35e63919) Chapitre 37 (#u6b233a8f-88a7-5324-a7fc-6f44d0f79242) Chapitre 38 (#u0c4c2422-82a2-5f81-bf9b-fa49e13d3b69) Chapitre 39 (#ucaeb02e7-923b-5491-b4ca-4f0f3d7bccf2) Chapitre 40 (#u2ed9cb59-0401-5924-a7cf-f29f9fcb1a32) Chapitre 41 (#u8037e037-98f5-53b6-ab5a-2617469ecf28) Chapitre 42 (#uec81b473-cee9-5889-8a3e-80aec0c325eb) Chapitre 42 (#ufed618c9-f18c-5a54-96ba-26d1bca92961) Chapitre 43 (#uacf19f59-9c5f-580a-9a30-7cc0be629df2) Chapitre 44 (#u5e1962c1-fdeb-5771-9d63-07d1b3a49ea5) Chapitre 45 (#u3238afec-007c-5030-ab58-dc714f7c2792) Chapitre 46 (#u59e20bad-3b3b-5cbe-86dc-7d80eb4348a8) Chapitre 47 (#ub772bab9-f61e-5701-a5f9-359cc36319bf) Chapitre 48 (#u577eac23-5182-5ae2-97de-340043dd8056) D?vouement (#ufc391e79-19b7-50ce-b5f1-48a15957719f) Remerciements (#u0f2d2140-c50f-5a09-a78a-431dc5cc80a7) Livres de l’auteur (#ueabebf6f-c754-5fd6-b3c7-99101b7109b2) ? propos de l’auteur (#u15507a29-748d-591a-834a-8338672f9ece) ?loge de Pamela Fagan Hutchins (#u17b40afc-5a80-5738-a504-f2ee10efeb47) Autres livres de SkipJack Publishing (#uef98c2fb-3bc9-5ca4-ac16-dad8c32361b2) Droits d'auteur (#ub4bd8075-aef1-5d3a-b6b5-7f2db1e1fd2d) Avant-propos (#u9c00a669-d8f2-5373-a6cc-efc3cfc2c96c) Free PFH Ebooks Avant de commencer ? lire, vous pouvez obtenir une s?rie de livres ?lectroniques gratuits de Pamela Fagan Hutchins Ce qui ne vous tue pas... en rejoignant sa liste de diffusion ? l’adresse suivante https://www.subscribepage.com/PFHSuperstars (https://www.subscribepage.com/PFHSuperstars). Chapitre 1 L’Eldorado, Shreveport, Louisiane Le 14 mars 2012 L’ann?e derni?re avait d?j? ?t? nulle, et celle-ci s’annon?ait encore pire. L’ann?e pass?e, lors du d?c?s de mes parents dans un « accident » pendant leurs vacances aux Cara?bes, j’avais ?t? trop occup?e pour ?couter mon instinct, qui criait « couillonnade » si fort que j’avais failli en devenir sourde de ma troisi?me oreille. Je me pr?parais pour la plus grosse affaire de ma carri?re, j’avais donc une excuse qui me convenait tant que j’?tais ? l’heure pour l’ap?ritif, mais la v?rit?, c’est que j’?tais obs?d?e par le d?tective priv? charg? de mon dossier. Nick. Nick, le presque divorc?. Mon nouveau coll?gue Nick, qui m’envoyait parfois des vibrations indiquant qu’il voulait arracher mon chemisier Ann Taylor avec ses dents, quand il ne passait pas son temps ? m’ignorer. Mais les choses avaient chang?. Je venais de recevoir le verdict de mon m?ga-proc?s, l’affaire Burnside, un cas de licenciement abusif. Mon cabinet prenait rarement des affaires de plaignants, alors j’avais pris un gros risque avec celle-ci et j’avais gagn? 3 millions de dollars pour M. Burnside, dont un tiers pour le cabinet. C’?tait tout le contraire d’une d?bandade. Apr?s mon coup d’?clat au palais de justice de Dallas, mon assistante juridique Emily et moi avions fil? tout droit sur la I-20 jusqu’? l’h?tel o? l’ensemble de notre cabinet avait pris un cong? m?rit? ? Shreveport, en Louisiane. Shreveport ne figurait pas dans la liste des dix meilleures escapades d’entreprise, mais notre associ? principal se prenait pour un joueur de poker et aimait la cuisine cajun, le jazz et les casinos sur les bateaux ? aubes. Ce cong? ?tait une excellente excuse pour que Gino s’adonne ? un peu de poker « Texas Hold’Em » entre les sessions de consolidation d’?quipe, tout en passant pour un bon chef d’?quipe, mais cela impliquait un trajet de trois heures et demie dans chaque sens. Ce n’?tait pas un probl?me pour Emily et moi. Nous avions facilement combl? le foss? entre la parajuriste et l’avocate et entre la coll?gue et l’amie, en grande partie parce que ni l’une ni l’autre n’aimait vraiment Dallas. Ou m?me pas du tout. Emily et moi nous pr?cipit?mes ? l’int?rieur pour nous enregistrer ? l’Eldorado. La r?ceptionniste nous demanda : - Voulez-vous un plan des visites guid?es hant?es ? avec son accent texan, cajun et sudiste polyglotte qui donnait un ton « vizites guidays » ? ses mots. - Merci beaucoup, mais non merci, r?pliqua Emily. Depuis dix ans qu’elle avait ?migr?, elle n’avait toujours pas r?ussi ? faire dispara?tre l’Amarillo de sa voix ni ? renoncer aux courses de chevaux. Je ne croyais pas non plus aux tours de sorcellerie pour touristes et je n’?tais pas fan des casinos, qui empestaient la fum?e de cigarette et le d?sespoir. - Vous avez un karaok? ou autre chose que des casinos sur place ? - Oui, madame, nous avons un bar sur le toit avec karaok?, billards, et ce genre de choses. La jeune fille repoussa sa frange, puis balan?a la t?te pour la remettre exactement ? la m?me place. - ?a ressemble plus ? ce que nous voulons, dis-je ? Emily. - Karaok?, dit-elle. Encore ! Elle roula les yeux. Seulement si on fait moiti?-moiti?. Je veux jouer au blackjack. Apr?s avoir d?pos? nos sacs dans nos chambres et nous ?tre rafra?chies, tout en continuant la conversation sur nos t?l?phones portables d’une chambre ? l’autre, nous avons rejoint notre groupe. Tous nos coll?gues applaudirent lorsque nous entr?mes dans la salle de conf?rence. La nouvelle de notre victoire nous y avait pr?c?d?e. Nous f?mes la r?v?rence, et je pointais les mains vers Emily, dans le genre pr?sentatrice de jeu t?l?vis?. Elle me rendit la pareille - O? est Nick ? M’?criai-je. Viens par ici. Nick avait quitt? la salle d’audience lorsque le jury ?tait sorti pour d?lib?rer, il nous avait donc devanc?s ? l’h?tel. Il se leva d’une table ? l’autre bout de la salle, mais ne nous rejoignit pas. Je lui fis quand m?me une courbette ? longue distance. Les applaudissements se turent et certains de mes partenaires me firent signe de m’asseoir avec eux ? une table pr?s de l’entr?e. Je m’attablai avec eux et nous nous mirent tous au travail pour r?diger une d?claration de mission pour le cabinet pendant les quinze minutes suivantes. Emily et moi ?tions arriv?es juste ? temps pour la fin des sessions du premier jour. ? la pause, le groupe se rua de l’h?tel vers la barge amarr?e qui abritait le casino. En Louisiane, les jeux d’argent ne sont l?gaux que « sur l’eau » ou sur les terres tribales. Sur une impulsion, je me dirigeai vers l’ascenseur plut?t que vers le casino. Juste avant que les portes ne se ferment, une main se coin?a entre elles et elles se rouvrirent. Je me retrouvai ? monter dans les ?tages des chambres de l’h?tel avec nul autre que Nick Kovacs. - Alors, Helen, vous n’?tes pas non plus une joueuse, dit-il lorsque les portes de l’ascenseur se ferm?rent. Mon estomac se retourna. C’est ringard, oui, mais quand il ?tait de bonne humeur, Nick m’appelait Helen, comme dans H?l?ne de Troie. J’avais promis ? Emily de la rejoindre au blackjack avant le karaok?, mais il n’avait pas besoin de le savoir. - J’ai la chance des Irlandais, r?pondis-je. Les jeux d’argent sont dangereux pour moi. Il r?pondit par un silence de mort. Chacun de nous regardait le plafond, le sol, les murs, et n’importe o? pour s’?viter ce qui ?tait difficile, puisque l’ascenseur ?tait ?quip? de miroirs au-dessus d’une main courante dor?e et de panneaux de bois. La tension dans l’air ?tait palpable. - J’ai entendu dire qu’il y avait une table de billard au bar de l’h?tel, et je serais partante pour ?a, ai-je propos?, me jetant t?te baiss?e dans le vide et retenant ma respiration pendant la descente. Toujours un silence de mort. Un long silence de mort. Le sol allait faire mal quand j’atterrirai. Sans ?tablir de contact visuel, Nick r?pondit : - OK, je te retrouve l?-bas dans quelques minutes. Avait-il vraiment dit qu’il me retrouverait l?-bas ? Juste nous deux ? Comme un rendez-vous ? Oh mon Dieu, Katie, qu’as-tu maniganc? ? Les portes de l’ascenseur s’ouvrirent, et nous nous dirige?mes dans des directions oppos?es vers nos chambres. Il ?tait trop tard pour faire marche arri?re maintenant. Je marchais dans un ?tat second. Hyperventilation. Les aisselles en sueur. Le c?ur battant la chamade. Ma tenue ne convenant pas du tout, j’abandonnais donc le chemisier Ann Taylor pour un jean, un haut blanc structur? et, oui, je l’admets, un sac ? main Jessica Simpson multicolore et ses sandales ? plateforme orange assorties. Le blanc allait bien avec mes longs cheveux roux ondul?s tombant sur mes ?paules, que je d?coiffais et r?arrangeais avec les doigts. Pas tr?s professionnel, mais c’?tait le but. De plus, je n’aimais m?me pas mon boulot d’avocate, alors pourquoi voudrais-je en avoir l’air guind? maintenant ? Normalement, je suis Katie l’Immacul?e, mais je me contentai d’un rapide brossage de dents, d’une douche express et d’un trait de rouge ? l?vres. J’avais envisag? d’appeler Emily pour lui dire que j’allais lui faire faux bond, mais je savais qu’elle comprendrait quand je lui expliquerai plus tard. Je trottinai jusqu’? l’ascenseurs et le maudissant de s’arr?ter ? chaque ?tage jusqu’au bar La Grotte, sur le toit. Ding. Pas trop t?t. Je fis une pause pour reprendre mon souffle. Je comptai jusqu’? dix, respirai profond?ment pour me donner du courage, et j’arrivai sous les lumi?res tamis?es ?clairant le bar en pierre. Je me tenais pr?s d’un homme dont je pouvais sentir la masculinit? palpiter ? plusieurs m?tres de distance. La chaleur enflamma mes joues. Mes hormones avaient allum? un feu de camp. L’homme que j’?tais venu voir ?tait d?j? l?. Nick ?tait d’origine hongroise, et c’est ? ses anc?tres gitans qu’il devait son teint sombre, yeux, cheveux et peau, et ses pommettes saillantes. Il avait une prestance musculaire que j’aimais, mais il n’?tait pas beau au sens artistique du terme. Son nez ?tait large et tordu, car il avait ?t? cass? trop souvent. Il m’avait dit une fois qu’une de ses dents de devant d?vi?e venait d’une planche de surf qu’il avait pris dans la tronche. Mais il ?tait magnifique d’une mani?re ind?finie, et je voyais souvent dans les regards rapides des autres femmes que je n’?tais pas la seule dans la pi?ce ? le remarquer. Il remarqua ma pr?sence. - Salut, Helen. - Salut, Paris, r?pondis-je. Il renifla. - Oh, je ne suis absolument pas ton Paris. Paris ?tait une mauviette. - Hmmmmm. M?n?las, alors ? - Um, bi?re. - Je suis presque s?re qu’il n’y avait pas de Bi?re dans l’histoire d’H?l?ne de Troie, dis-je en reniflant d’un faux-air sup?rieur. Nick s’adressa au barman. - Une St. Pauli Girl. Il m’adressa finalement le « sourire Nick », et la tension de notre dernier trajet en ascenseur disparut. - Qu’est-ce que tu prends ? J’avais besoin d’avaler un peu plus que de l’air pour avoir du courage. - Une Amstel Light. Nick passa la commande. Le barman tendit deux verres de bi?res perl?s de condensation ? Nick, puis secoua l’eau de ses mains. Nick me tendit le mien que j’enroulai dans une serviette en papier, alignant les bords avec la pr?cision militaire que j’adorais. Nick fredonnait « Honky-tonk Women », sa t?te oscillant d’un c?t? ? l’autre. - Je crois que je te pr?f?re ? Shreveport qu’? Dallas, lui dis-je. - Merci pour le compliment. Et j’aime te voir heureuse. Je suppose que ?a a ?t? une ann?e difficile pour toi, la perte de tes parents et tout ?a. ? ton sourire, dit-il en brandissant sa bi?re vers moi. Le toast me pris par surprise. Il avait raison pour la partie difficile, surtout au sujet de mes parent. Je trinquai avec lui mais sans pouvoir soutenir son regard. - Merci, Nick, vraiment. - Tu veux faire un billard ? demanda-t-il. - Pourquoi pas. J’?tais ?tourdie, comme une fille de seconde sortant avec le gars populaire de terminale. Nous aimions tous les deux la musique, alors nous discut?mes des genres, des groupes (son ancien groupe, Stingray, et les « vrais » groupes), mon sujet d’?tude en classe de musique ? Baylor (https://www.subscribepage.com/PFHSuperstars) et du LSD, alias la maladie du chanteur. Autour d’un tonneau de bi?res, nous ?change?mes des histoires sur le lyc?e, et il me raconta qu’il avait une fois sauv? un fou bless?. - Un fou bless? ? Demandais-je. Sociopathe ou psychopathe ? Boule de huit dans le coin. Je la coulai. Il r?cup?ra les boules et les pla?a dans le triangle pendant que j’enfon?ais le bout de ma queue dans la craie bleue et que je soufflais l’exc?dent. - Tu es tellement terre ? terre. Un fou est un oiseau, Katie. Je fis tourner son utilisation de mon vrai nom dans mon cerveau, en appr?ciant la sensation. - Je surfais, et j’ai trouv? un fou de bassan qui ne pouvait pas voler. Je l’ai ramen? ? la maison et j’en ai pris soin jusqu’? ce que je puisse le rel?cher. - Oh, mon Dieu ! Est-ce qu’il sentait mauvais ? Il t’a donn? des coups de bec ? Je parie que ta m?re ?tait ravie ! Je parlais vite, avec des points d’exclamation interminables. Embarrassant. J’?tais une fille de la vall?e sous acide, comme Oh Mon Dieu. - Il ?tait en ?tat de choc, donc il ?tait calme, mais il devenait plus ?nergique chaque jour. J’avais quatorze ans, et ma m?re ?tait contente que je ne sois pas dans ma chambre ? feuilleter des magazines porno, donc ?a ne la d?rangeait pas. C’est vrai qu’apr?s quelques jours, il sentait vraiment mauvais. Je cassai. Les boules claqu?rent et ricoch?rent dans toutes les directions, et une boule ray?e tomba dans un trou lat?ral. - Ray?es, annon?ais-je. Alors, ta m?re t’a d?j? surpris avec des revues porno, hein ? - Hum, je n’ai pas dit ?a... dit-il, et il s’arr?ta en b?gayant. J’?tais plus amoureuse que jamais. « Damn, I Wish I Was Your Lover » passait en fond sonore. Je n’avais pas entendu cette chanson depuis des ann?es. ?a me fit r?fl?chir. Pendant des mois, j’avais lutt? contre l’envie de passer mes bras autour du cou de Nick et de mordiller sa nuque, mais je savais que la plupart des gens consid?reraient cela comme inappropri? au travail. Plut?t ?troit d’esprit de leur part, si vous voulez mon avis. Je regardais le grand balcon ? l’ext?rieur du bar et je pensai que si je pouvais juste man?uvrer Nick dans cette direction, peut-?tre que je pourrais faire en sorte que ?a arrive. Mes chances semblaient bonnes jusqu’? ce qu’un de nos coll?gues n’entre dans le bar. Tim ?tait un conseiller juridique de la soci?t?. « Conseiller » signifiait qu’il ?tait trop vieux pour ?tre appel? un associ?, mais il n’?tait pas un faiseur de pluie. En plus, il portait son pantalon remont? ? la taille et trop court de cinq centim?tres. Le cabinet n’en ferait jamais un associ?. Nick accrocha son regard au mien. Jusqu’? pr?sent, nous avions ?t? deux radios ? ondes courtes sur le m?me canal, le signal cr?pitant entre nous. Mais maintenant, le cadran ?tait devenu statique et ses yeux s’assombrirent. Il se raidit et s’?loigna subtilement de moi. Il appela Tim. - H?, Tim, par ici. Tim nous fit un signe de la main et traversa le bar enfum?. Tout bougeait au ralenti alors qu’il s’approchait, un pas apr?s l’autre. Ses pieds r?sonnaient dans ma t?te en touchant le sol, non… non… non… Ou peut-?tre que je le disais ? haute voix. Je n’aurai pu l’affirmer, mais ?a ne faisait aucune diff?rence. - H?, Tim, c’est g?nial. Prends une bi?re, viens faire un billard. Oh, s’il te pla?t, dis-moi que Nick ne vient pas juste d’inviter Tim ? se joindre ? nous. Il aurait pu lui donner un petit « H?, comment ?a va, passe une bonne nuit, j’allais partir », ou n’importe quoi d’autre d’ailleurs, mais non, il avait demand? ? Tim de jouer avec nous. Tim et Nick me regard?rent pour confirmation. J’eus une pens?e fugace dans laquelle j’envoyais un coup de pied lat?ral parfait dans l’intestin de Tim et qu’il se roulait par terre avec des haut-le-c?ur. ? quoi servaient les treize ann?es de cours de karat? que mon p?re m’avait forc? ? prendre si je ne pouvais pas les utiliser dans des moments comme celui-ci ? « Chaque femme devrait ?tre capable de se d?fendre, Katie », disait papa en me d?posant au dojo. Ce n’?tait peut-?tre pas techniquement un moment d’autod?fense physique, mais l’arriv?e de Tim avait an?anti mes espoirs de morsure de cou, et de tout ce qui aurait pu suivre. N’?tait-ce pas une raison suffisante ? Je rejetai cette pens?e. - En fait, Tim, pourquoi tu ne me remplaces pas ? J’ai pass? toute la semaine au tribunal, et je suis ?puis?e. Nous commen?ons t?t demain. C’est le dernier jour de notre cong?, la grande finale pour l’?quipe de Hailey & Hart. Je tendis ma queue de billard ? Tim. Tim pensa que c’?tait une bonne id?e. Il ?tait clair que les femmes lui faisaient peur. Si j’avais esp?r? un argument de la part de Nick, rien ne vint. Il ?tait retourn? ? son num?ro de « Katie qui ? » en dehors du travail. Tout ce qu’il me dit fut un « Bonne nuit », sans Helen ni Katie. J’attrapai une autre Amstel Light au bar avant de retourner dans ma chambre. Chapitre 2 L’Eldorado, Shreveport, Louisiane Le 14 mars 2012 Quinze minutes plus tard, j’avais extirp? une bouteille de vin du mini-bar. Je m’accrochai ? mon iPhone avec l’intention d’envoyer un message. Envoyer des textos en ?tat d’?bri?t? n’est jamais une bonne id?e. J’aurais aim? qu’un flic soit l? pour me menotter, ?a m’aurait ?vit? la suite. A Nick : - Tu m’as largu? pour Tim. Je suis toute seule. J’aurai aussi bien pu ajouter, « Avec amour, une fille folle de toi. » Pas de r?ponse. J’attendis cinq minutes en finissant un verre de vin. Je remplis ? nouveau mon verre. Je fis d?filer les trois cents textos d’Emily demandant o? j’?tais et je lui r?pondis par - Nick !!! Vraiment d?sol?e. On se parle plus tard. J’en envoyais un autre ? Nick. - T’es l? ? Tjrs avec Tim ? - Yop, fut sa r?ponse. Un autre texte de Nick sonna quelques secondes plus tard. - Il faut qu’on parle. Bonne ou mauvaise conversation ? me demandais-je. Parler, comme un euph?misme pour ne pas parler ? Je r?pondais ? Nick : - oki, o?, quand ? - Lundi, au bureau. Coup de poing dans l’estomac. Reste calme, Katie, reste calme. Ne laisse pas ce moment t’?chapper. Il y a encore une chance. - Pas juste. Maintenant ? Choisis un endroit. - Mauvaise id?e. J’ai picol?. - Je m’en fiche. Chbre 632. Pas de r?ponse. R?fl?chis, r?fl?chis, r?fl?chis, r?fl?chis, r?fl?chis. Il n’a pas dit non. Il n’a pas dit oui. Je pourrai renvoyer un texto et demander une r?ponse claire, mais ?a pourrait ?tre une mauvaise id?e. Suppose que c’est oui et ressaisis-toi, ma fille. J’inspectai la chambre d’h?tel spartiate, l’affreuse couette marron grisonnante, trop souvent pass?e dans des lave-linge industriels, les rideaux marron d?color?s par les ann?es « fumeur » de la chambre, une reproduction encadr?e en s?rie d’un bateau ? aubes accroch?e sur un mur couvert de papier peint m?tallis?. Ce n’?tait pas tr?s prometteur pour un interlude romantique. Je nettoyai la pi?ce, et moi, du mieux possible, et j’essayai de me stabiliser sur une pens?e et un comportement sobres. Pas de Nick. Je fis les cent pas. Je me racontai des histoires. Je rev?rifiai mes textos. Et puis, soudain, je su qu’il ?tait l?, je le sentis avec ma perception Nick extrasensorielle. Je regardai par le judas. Oui, il ?tait l?, faisant la m?me chose que moi de l’autre c?t? de l’?paisse plaque de bois. Mais je ne pouvais pas ouvrir la porte, sinon il aurait su que j’?tais l? ? le regarder. Il leva la main pour frapper. Il la baissa. Il se retourna pour s’?loigner ; il revint ? la porte. Il passa sa main dans ses cheveux en se massant le cr?ne et ferma les yeux. Il frappa ? la porte. Je retins ma respiration en formulant une pri?re rapide. « S’il vous pla?t, mon Dieu, aidez-moi ? ne pas tout faire foirer ». Ce n’?tait pas la pri?re la mieux con?ue ou la plus ?labor?e que j’aie jamais prononc?e. J’ouvris la porte. Aucun de nous ne dit un mot. Je fis un pas en arri?re et il entra, serrant une serviette de bar dans sa main gauche. Sa main droite ratissant ? nouveau ses cheveux en un tic nerveux que je n’avais jamais remarqu? avant ce soir. Je m’assis sur le lit. Il s’assit dans un fauteuil pr?s de la fen?tre. - Tu as dit que nous devions parler, commen?ais-je. Il se concentra sur sa serviette froiss?e pendant un long moment. Quand il leva les yeux, il fit un mouvement de va-et-vient entre nous deux et dit : - Ma vie est bien trop compliqu?e en ce moment. Je suis d?sol?, mais ?a ne peut pas arriver. Ces mots n’?taient pas ceux que j’avais esp?r? entendre. Peut-?tre n’?taient-ils pas ceux que je m’attendais ? entendre, mais j’avais gard? espoir jusqu’? ce qu’il les prononce. Mon visage br?lait. Compte ? rebours avant l’effondrement. - Par « ?a », je suppose que tu fais r?f?rence ? une sorte de « truc » entre toi et moi ? Bien s?r que ?a ne peut pas se produire. Je suis une associ?e du cabinet. J’entendis ma voix en ?cho. Sup?rieure. D?daigneuse. - Je sais que je peux passer pour une dragueuse, mais je suis comme ?a avec tout le monde, Nick. Ne t’inqui?te pas. Je ne te cours pas apr?s. Je pouvais presque voir l’empreinte virtuelle d’une main sur son visage laiss?e par la gifle de mes mots. - Je t’ai entendu parler ? Emily sur ton portable quand tu es arriv?e cet apr?s-midi. Cela semblait de mauvais augure. - De quoi tu parles ? - Je passais devant ta chambre. La porte ?tait grande ouverte. Je t’ai vue. Je t’ai entendue. Je protestais, - Comment savais-tu que c’?tait moi ? - Je connais ta voix. Vous parliez de moi. J’ai entendu mon nom. Je suis d?sol? d’avoir ?cout? aux portes, mais je n’ai pas pu m’en emp?cher. Je me suis arr?t? et j’ai ?cout?. Je tentais de le couper ? nouveau, mais il continua. - Tu as dit, (et, oh, j’aurai voulu ne pas entendre la suite) que tu ne pouvais pas croire ? quel point je t’attirais. Que tu te sentais coupable parce que tu pensais ? moi plus qu’au travail ou ? ce qui ?tait arriv? ? tes parents... Nick tr?buchait sur ses mots, luttant pour faire sortir quelque chose. - Tu as dit ? Emily que tu ne pouvais pas t’emp?cher d’?tre amoureuse de moi. Oh, mon Dieu. Oh, mon Dieu. Tout ce sang br?lant qui se vidait de mon visage. J’avais dit ?a au t?l?phone ? Emily. Elle avait appel? pour s’assurer que je venais directement ? la s?ance, et j’avais d?tourn? la conversation vers Nick. C’?tait une chose tellement normale que je l’avais oubli?e. Bon sang, c’?tait tellement normal qu’elle avait probablement fait abstraction de tout ?a. Soudain, je sus ? quel point j’?tais ivre, et la pi?ce se mit ? tourner. Je for?ai un rire ? briser du cristal. - Oui, j’ai mentionn? ton nom, mais ce n’est pas ce que j’ai dit. - Non, c’?tait bien ?a, interrompit-il. Je ne suis pas un cr?tin. Je sais ce que j’ai entendu. - Eh bien, tu l’as mal interpr?t?, insistais-je. Je ne cours pas apr?s toi, Nick. Pour ce que j’en sais, tu es toujours mari?. Et nous travaillons ensemble. Je suis d?sol?e si je t’ai mis mal ? l’aise. Je vais essayer de ne pas le refaire. - Tu ne m’as pas mis mal ? l’aise. Il s’arr?ta et pass? la main dans les cheveux une troisi?me fois, fixant ? nouveau la serviette. Il y avait quelque chose d’?crit sur cette foutue chose. - C’est juste que... Il soupira et n’alla pas plus loin. - Juste quoi ? Pas de r?ponse. J’aurai aim? que ce soit seulement l’alcool qui me fasse sortir des sarcasmes, mais ce n’?tait pas le cas. - Pourquoi ne pas consulter ta serviette magique pour savoir ce que tu dois dire ? Son visage s’assombrit. - C’est pas sympa. J’?tais en train d’accumuler de la pression. - Eh bien, il semble que tu sois venu me voir avec ton discours tout pr?par?. Remettre la pauvre Katie en mal d’amour ? sa place. Je pris une inspiration et je crachai : - Je n’arrive pas ? croire que tu aies d? prendre des notes sur une serviette de bar. - Je ne suis pas aussi bon que toi avec les mots, Madame l’avocate. Je voulais faire ?a correctement. Ne te moque pas de moi parce que je te prends au s?rieux. - D?sol?e de t’avoir caus? tant de probl?mes. Je n’?tais pas d?sol?e sur le moment, et je pense que mon ton le lui fit comprendre. - Mais je t’en prie, finis de lire ta serviette. Il se leva. - Il n’y a rien d’autre qui vaille la peine de discuter. Trop tard, j’avais vu ? quel point j’?tais nulle. - Nick, je suis d?sol?e. Oublie ce que j’ai dit. J’ai trop bu. Merde, je bois trop ces derniers temps, et je vais vraiment r?duire ma consommation. J’esp?re que cela ne fera pas reculer notre amiti?, et que nous pourrons continuer ? travailler normalement. Tu sais comment je suis. Je suis bien trop excessive, et j’ai une grande gueule. J’interrompis mon bavardage inutile et luttai pour garder le contact visuel avec lui. Mes pens?es ?taient devenues confuses. Comment avais-je pu me tromper autant sur lui ? J’ai toujours cru qu’au fond, il ?tait aussi attir? par moi - et pas seulement sur le plan physique - que je l’?tais par lui. Que si je lui donnais la bonne ouverture et le bon coup de pouce, il m’emporterait dans son carrosse magique et me conduirait au bonheur. Comme c’?tait ridicule. Je n’?tais pas Cendrillon. J’?tais Glenn Close avec le lapin bouilli dans Liaison fatale. Et il ?tait Michael Douglas cherchant un moyen de s’?chapper. Je ne savais pas comment r?cup?rer les choses. Ses yeux devenaient plus hostiles ? chaque seconde. Sans m’adresser un mot de plus, il s’en alla avec sa fichue serviette ? la main. Chapitre 3 L’Eldorado, Shreveport, Louisiane Le 15 mars 2012 Je me r?veillai avec une m?chante gueule de bois qui provenait autant de l’humiliation que de l’Amstel Light et du vin du mini-bar, puis je me souvins de Nick dans ma chambre et de la fa?on dont j’avais agi. Il semblait peu probable d’avoir fait pire, mais au moins je ne lui avais pas ouvert la porte nue avec une rose entre les dents. J’allais me lever et me ressaisir. J’allais ?tre s?duisante dans mon ensemble Ellen Tracy vert mousse. J’allais r?parer tout ?a. Mais d’abord, je voulais lire mes textos parce que mon t?l?phone vibrait. ? cette heure matinale ? - O? diable es-tu ? C’?tait Emily. - ?? Je me pr?pare. Ce n’?tait pas totalement vrai, mais la r?gle cardinale des textos ?tant d’?tre brefs, j’avais omis les d?tails r?v?lateurs. - Nous avons commenc?. D?p?che-toi ! Peut-?tre que ce n’?tait pas aussi t?t que je le pensais. - J’arrive. Eh bien, avoir l’air sexy et professionnelle ?taient hors de question maintenant, bien que je ne sache pas si j’aurai pu r?aliser cela dans ces circonstances, peu importe le temps dont je disposais. Je me ressaisis en respectant les minima hygi?niques et esth?tiques et je m’en allais rejoindre la session de consolidation d’?quipe du deuxi?me et dernier jour de ce s?jour. J’esp?rais pouvoir assez bien simuler pour berner mes coll?gues. Je m’arr?tai devant la porte ouverte de la salle de conf?rence et j’?coutai le pr?sentateur. L’entreprise avait engag? un consultant en expression ?motionnelle pour nous aider ? r?soudre les probl?mes que nous avions les uns avec les autres de mani?re positive et constructive. Bonne chance avec ?a, pensais-je. Je me demandais s’il m’aiderait ? r?soudre mon « Je veux coucher avec mon coll?gue de travail qui est peut-?tre encore mari? et qui, en fait, me d?teste ». Ce n’?tait pas une session du genre de celles qui sentent la violette, cependant, le consultant ?tait en fait assez bon. Aujourd’hui, il nous apprenait ? parler de ce dont nous avions besoin de plus et de moins de la part des autres. Il nous demanda de nous associer ? la personne avec laquelle nous avions le plus besoin d’entretenir une relation de travail efficace. J’entrai dans la salle de conf?rence aux fleurs criardes. En quelques secondes, presque tous les couples se form?rent. Je balayai la pi?ce du regard ? la recherche des long cheveux blonds texans d’Emily, esp?rant qu’elle m’avait attendu, mais elle ?tait avec l’assistant juridique principal, prenant l’activit? beaucoup trop au s?rieux. Je lui lan?ai un regard furieux et elle haussa les sourcils, comme pour dire : « Ce n’est pas ma faute si tu me poses un lapin et que tu ne peux pas sortir du lit avant midi. » Tout en grommelant dans ma barbe, je cherchai un partenaire dans la pi?ce. Alors que je scannai l’espace, le regard terne de Nick se fixa lentement sur le mien. Pas bon. Je conservai ?galement un visage sans expression, un effort gargantuesque si l’on consid?re que le m?lange de fruits secs du minibar de la veille semblait vouloir remonter. Je me d?tournai, puis je r?alisai qu’il marchait vers moi. Je m’attendais ? ce qu’il continue son chemin, jusqu’? ce qu’il s’arr?te devant moi. Comme il restait silencieux, j’ouvris la bouche. Je ne pouvais pas m’en emp?cher. J’ai toujours pris les reines. Pas ?tonnant que mon grand fr?re m’ait dit que je repoussais les hommes. - Alors, tu veux finir les restes ? Je tentais un sourire d’autod?rision. Il ne me retourna pas mon sourire. - C’est le meilleur moyen d’?claircir tout ?a et de nous mettre d’accord avant de retourner au bureau. Il faisait aller et venir sa main entre nous. ?a me rappela la nuit derni?re, et pas dans le bon sens. Nous nous ass?mes. Les fleurs sur le papier peint et le sol ne faisaient pas grand-chose pour me remonter le moral. Les lianes du tapis se mirent ? onduler et s’enroul?rent autour de mes chevilles, me ligotant aux pieds de ma chaise. Non, imb?cile, c’est ton imagination et une bonne gueule de bois. Ugh. Troublant. Je passai mes mains sur mes avant-bras, essayant d’att?nuer ma chair de poule. Nick lisait les instructions ? haute voix. Nous allions devoir suivre la liste d’exercices ? tour de r?le. Tout d’abord, nous allions devoir ?noncer ce que nous trouvions de positif chez l’autre ; ensuite, les choses dont nous avions besoin en plus ou en moins ; et enfin, ce que nous allions nous engager ? faire en plus ou en moins pour l’autre. Au cas o? nous aurions oubli? ces instructions en cours d’exercice, elles ?taient inscrites en caract?res gras en couleur sur les tableaux de conf?rence tout autour de la salle. Je vous remercie, tableaux, d’interrompre ce cauchemar fleuri, pensais-je. - Tu commences, Nick. Je pense que tu dois ?noncer ce que tu appr?cies chez moi. Dis-je d’un ton enjou?. Il commen?a tr?s s?rieux, sans h?siter. - J’appr?cie que tu sois professionnelle, tu fais un bon travail et tu travailles dur. Tu es importante pour le cabinet. Pas vraiment chaleureux. - Merci, Nick. Autre chose ? Tu peux continuer ? faire des compliments si tu veux. J’essayais un autre sourire, inclinant la t?te vers la droite. Mon meilleur profil. - C’est tout. ?a ne se passait bien. - Bon, alors, ce que j’appr?cie chez toi, c’est... Alors qu’il avait pris la voie strictement professionnelle, je refusais d’?tre aussi impersonnelle, - Ta cr?ativit? et ta perspicacit?, et la fa?on dont nous avons travaill? ensemble sur l’affaire Burnside. Je canalisais la langue de bois de l’atmosph?re, une version l?gale d’un mauvais ?pisode de Dr Phil. - Et j’appr?cie que tu n’aies pas de serviette en papier avec toi aujourd’hui. Clin d’?il mental - Nick, d?passons ?a. Aucune chance. - Maintenant nous faisons la partie suivante, plus et moins. Il passa ses mains dans ses cheveux. Oh oh. - Ce que je veux, c’est que tu fasses plus souvent savoir ? Gino que tu as besoin de mon soutien, et lui et moi nous pourrions faire le n?cessaire. Ce que je veux que tu fasses moins, c’est... Il h?sita, puis continua, - Me pi?ger. Est-ce que j’avais mal entendu, ou est-ce que Nick venait de me larguer ? Et m’accusait de le harceler ? En si peu de mots. M?me apr?s la fin difficile de notre soir?e, le coup de pied professionnel semblait extr?me. Sugg?rait-il que je l’avais harcel? sexuellement ? Je passai de z?ro ? soixante sur le compteur de rage en moins d’une seconde. Oups. - Tu ne veux plus travailler avec moi ? Je te PI?GE ? Nous avons eu une seule conversation personnelle difficile, et tu refuses de travailler avec moi ? - Peux-tu baisser d’un ton ? siffla-t-il. Je levais les mains en l’air. Il prit ?a pour un oui et continua. - Je veux juste minimiser nos contacts, dit-il. Sa voix ?tait aussi froide que ses yeux. - C’est absurde. La main de Nick se leva, et je montais le volume. - Nous faisons une bonne ?quipe. C’est un ?norme avantage pour cette entreprise quand nous travaillons ensemble. Je ne comprends pas pourquoi tu fais ?a. C’est ? cause d’hier soir ? Une centaine d’yeux me regardaient m’effondrer dans un tas de d?bris ?motionnel. Non, c’?tait juste ma parano?a. Mes mains remont?rent vers mon col et tent?rent de le desserrer davantage. - Je ne vais pas parler du pourquoi. J’ai juste besoin d’un peu d’espace. Si tu as un probl?me avec moi, tu devras aller voir Gino. Moment de d?cision et de contr?le de soi. Si je faisais une sc?ne plus importante, je l’embarrasserais, et ensuite je ne pourrais jamais revenir en arri?re. J’avais pass? la moiti? de la nuit derni?re ? me r?concilier avec le fait qu’il n’y aurait jamais de « nous », pas de Nick et Katie. Je n’aimais pas pratiquer le droit, mais l’ann?e derni?re, j’avais ador? travailler avec Nick. Travailler avec lui, c’?tait mieux que rien. Cela pourrait m?me ?tre suffisant. Mais s’il m’enlevait cette partie, il ne me resterait que moi avec des pens?es que je ne voulais pas avoir. Je devais aussi ?tre r?aliste. J’?tais importante pour le cabinet, mais le futur ex-beau-p?re de Nick ?tait notre plus gros client. Ce foss? devait rester entre Nick et moi. Il n’y aura pas de « aller voir Gino » pour moi. De plus, qu’est-ce que je lui dirais ? « Gino, Nick ne veut pas travailler avec moi parce qu’il pense que je veux coucher avec lui. Fais en sorte qu’il soit gentil avec moi ou je vais faire un caca nerveux. » Je repris la parole avec des mots mesur?s. - Je suppose que je n’ai pas le choix. Je vais honorer tes souhaits, mais laisse-moi ?tre claire ? cent pour cent : C’est ta d?cision. Je ne comprends pas, et ce n’est pas ce que je veux. Je promets ?galement d’?tre honn?te avec toi. Je vais commencer par ?a tout de suite. ?a semblait ?tre un bon point de d?part, puisque je lui avais menti hier soir et qu’il le savait. - Cela me fait mal. Tu me traites comme si tu me d?testais. Nous avons eu un moment regrettable ce week-end. Je pense que nous devrions reparler de tout ?a au bureau. - ?a ne fera aucune diff?rence, ici ou l?-bas, dit Nick. Il se leva, mais je l’arr?tai. - Attends. J’ai le droit de dire ce que je voudrais que tu fasses de plus ou de moins. Il se rassit. J’ignorais la douleur lancinante dans mon estomac et je commen?ais. - J’aimerais que tu fasses davantage preuve d’ouverture d’esprit et de moins juger et prendre moins de d?cisions irr?fl?chies. - OK. - OK, tu t’engages ? le faire ? - OK, je t’ai entendue. Nous nous sommes regard?mes fixement pendant quelques secondes de plus. Puis Nick se leva. Les pieds de sa chaise firent un horrible bruit strident contre le tapis d’h?tel en laine d’acier. Je grima?ai. Vu le resserrement de ses l?vres et de ses sourcils, il interpr?ta ma grimace de travers. Il s’?loigna sans un mot. Je restai coll?e ? ma chaise. Un peu plus tard - quelques secondes, quelques minutes - Emily interrompit mon interpr?tation de sculpture de glace. - La Terre ? Katie. C’est l’heure de la pause. Tu viens ? demanda-t-elle. Sa voix ?tait hargneuse, mais moins que ses textes pr?c?dents. Je levais les yeux vers elle. Elle avait de longues jambes, des bottes de cow-boy et un jean qu’elle avait compl?t? par une veste de chez Gap et une chemise violette en coton tricot?. - Hum, merci, non, je vais te retrouver plus tard, lui r?pondis-je. Emily sortit de la salle de conf?rence avec un groupe de parajuristes. Je me dirigeai vers le bar. Quelle boisson ?tait respectable ? dix heures du matin ? Je commandai un Bloody Mary, un cocktail que je n’avais jamais essay?. Qui savait que les Bloody Marys ?taient si bons ? Le premier ?tant bien descendu, j’en commandai un autre. Avec l’aide de mon nouvel ami le Bloody Mary, je d?cidais que je pouvais r?parer les choses avec Nick. Seulement, je n’arrivais pas ? le trouver. De retour de la pause, je coin?ai Emily. - Tu as vu Nick ? Lui demandais-je Emily soupira. - Il est parti. Je l’ai entendu dire ? Gino qu’il avait une urgence familiale. La guigne. Le reste de la journ?e se d?roula dans le brouillard. Je ne me rappelle pas grand-chose. Je pense avoir fait des expressions faciales et des commentaires appropri?s lorsque cela ?tait n?cessaire. Ou peut-?tre que non. Mon cerveau en tambour de machine ? laver ?tait agit? par des pens?es ? propos de Nick. Cet apr?s-midi-l?, Emily me reconduisit chez moi dans ma vieille Accord argent?e. Le jour se transforma en nuit, et la nuit se transforma en jour, et le lendemain, me r?veillant au son de la voix de mon fr?re, j’?tais ?tal?e sur le canap? de mon salon. Chapitre 4 Appartement de Katie, Dallas, Texas Le 16 mars 2012 - Tu n’as pas de meilleure excuse que ?a pour ne pas r?pondre ? mes appels ? Dit Collin sur son ton s?v?re de grand fr?re. Je for?ai mes yeux ? s’ouvrir assez longtemps pour le voir gesticuler dans ce qui fut un jour le beau salon de mon appartement. Collin ?tait mon jumeau irlandais, mon fr?re a?n? de onze mois. Nous avions cependant termin? le lyc?e la m?me ann?e, car mon p?re, en bon Texan, avait insist? pour faire redoubler Collin d’une ann?e pour lui permettre d’acqu?rir un avantage physique sur le terrain de football. Nous ?tions donc des camarades de classe ainsi que des fr?res et s?urs. Malgr? cela, Collin avait toujours agi de mani?re paternelle envers moi, surtout l’ann?e derni?re apr?s la perte de maman et papa. J’ouvris un peu plus les yeux, assez pour voir le d?sordre. Je suppose que ?a n’avait pas l’air pr?sentable. Je suis g?n?ralement tr?s pointilleuse sur mon environnement. Collin avait toujours insinu? que j’avais des troubles obsessionnels compulsifs, mais je n’?tais pas d’accord. Je passais l’aspirateur en marchant ? reculons parce que je ne voulais pas laisser de traces de pas sur le tapis. Je classais mes v?tements par saison et les sous-cat?gories par fonction et par couleur, car qui ne le fait pas ? Et si les autres ne peignaient pas la frange de leurs coussins, je pense qu’ils le devraient. Une frange emm?l?e. Quelle horreur. Ces derni?res semaines, cependant ? Eh bien, pas tant que ?a. Il y avait des emballages de casse-cro?tes sur la table de la cuisine et quelques bouteilles vides de jus de tomate et de vodka Ketel One sur le comptoir. Ce n’?tait pas insalubre selon les normes de Dennis la Menace, mais, d’apr?s mon fr?re, c’?tait troublant. Mon pyjama ?tait mon uniforme de travail de la veille, et les v?tements des jours pr?c?dents gisaient en tas ? c?t? du canap? - canap? sur lequel la frange du coussin me narguait avec ses n?uds. La t?l?vision diffusait « Runaway » de Bon Jovi sur une station de musique rock des ann?es 80 de Direct TV. Un Bloody Mary presque vide me narguait depuis la table basse, o? il tr?nait ? c?t? de mon ordinateur portable Vaio rouge, d’une bouteille d’Excedrin et de mon iPhone. Je m’assis d’une mani?re aussi digne que possible et je lissai mes v?tements. - Pourquoi n’ai-je pas entendu l’alarme quand tu es entr? ? Lui demandais-je. Collin avait un jeu de cl?s de mon appartement, mais mon alarme aurait d? sonner ? l’ouverture de la porte. Sans m?nagement, Collin r?pondit : - Je suppose que tu ?tais trop bourr?e pour te rappeler de l’activer. Ou peut-?tre que tu as eu un visiteur qui s’est esquiv? au milieu de la nuit ? Il cherchait un deuxi?me verre, mais j’avais bu en solitaire. Collin commen?a ? organiser mon d?sordre. - Collin, je vais faire ?a, lui dis-je. - Non. Va te rafra?chir, dit-il. Je t’invite au petit d?jeuner. C’est un ordre. Je le regardais tristement. Il portait son habituel jean 501 avec un t-shirt Hooters, et il son attitude criait « Je n’ai pas de probl?mes ». Je ne voulais pas aller prendre le petit d?jeuner avec lui. Je voulais me mettre en boule. Je voulais dormir et ?tre seule. Je voulais rester l?, sans bouger, comme si je n’existais pas. Il me regarda, immobile sur le canap?, et quelque chose le poussa ? poser la poubelle et ? revenir vers moi. Prenant ma main, il me for?a ? me lever. Il serra mon corps raide dans une ?treinte d’ours, me ber?ant doucement pendant une bonne minute. Oh oh. Au d?but, j’essayai de me retenir, mais ensuite je m’?croulai et me mis ? sangloter sur sa large ?paule. Les sanglots se transform?rent en reniflements, puis en hoquets, puis en soupirs. Il fit basculer ma t?te en arri?re de son gros pouce sous mon menton et me regarda dans les yeux pour m’?valuer. - Va prendre une douche chaude. On va aller manger dans un endroit d?contract?, mais je pars, avec toi, dans la voiture dans vingt minutes. Il toucha l’os de mon menton avec les articulations de son poing ferm?. - Allez, allez. Tu sais que je vais te trainer s’il le faut. Ne m’oblige pas ? le faire. D’une l?g?re pouss?e, il m’envoya dans le couloir vers ma salle de bain, puis je l’entendis reprendre le nettoyage. Des larmes coulaient sur mon nez et mes joues. Bon sang, j’allais devoir boire des litres d’eau au petit-d?jeuner, parce qu’au rythme o? je pleurais et avec la quantit? de vodka que j’avais consomm?e la veille, j’?tais au bord d’un gros mal de t?te pour cause de d?shydratation. Quarante-cinq minutes plus tard, nous prenions place dans le IHOP de Mockingbird Lane. C’?tait l’un des endroits pr?f?r?s de notre enfance, mais aujourd’hui, je remarquai que le d?cor ?tait beaucoup moins orange criard qu’avant, et j’en ?tais un peu d??ue. Collin me surpris en demandant une table pour trois, mais je n’avais pas assez d’?nergie pour le questionner. Je compris lorsque je vis la chevelure d’Emily ? l’entr?e du restaurant. Elle s’avan?a vers nous dans un pantalon bleu marine pliss? et une chemise jaune soyeuse serr?e par une ceinture en cuir assortie ? ses escarpins marron. - Salut, Katie. Elle m’observa un moment, puis d?tourna les yeux. Je levai une main molle pour la saluer. Super. Une autre personne ? me voir dans cet ?tat. J’avais ?vit? de croiser mon image dans le miroir avant de quitter l’appartement, mais le bref coup d’?il que j’avais eu m’avait suffi. Une queue de cheval humide. Un vieux surv?tement et un t-shirt. Les yeux bouffis et le teint p?le. Beurk. Nous examinions nos menus en silence jusqu’? ce que la serveuse d’?ge moyen, qui aurait vraiment d? porter un uniforme d’une taille plus large, vienne prendre notre commande. Les muscles de mon estomac se contract?rent en la regardant s’?loigner. Je pensais l’arr?ter pour ajouter un jus d’orange dont je ne voulais pas ? ma commande, mais je ne le fis pas. Il ne servait ? rien de retarder l’in?vitable. Collin nous avait r?unis pour une raison, et quelque chose de d?sagr?able allait se passer. - Emily et moi avons discut?, et elle m’a dit ce qui se passait avec toi, commen?a Collin. J’esp?rais qu’Emily en avait omis une partie, mais je ne pouvais pas lui reprocher de se soucier de moi. Ou de c?der ? Collin. C’?tait un flic, dans la belle tradition filiale, et il aimait ? dire qu’il n’avait jamais rencontr? un t?moin qu’il ne pouvait pas faire flancher. Collin continua. - Nous sommes inquiets pour toi. Tu es dans un sale ?tat. Tu te fais du mal. Il lan?a un regard ? Emily pour avoir son support et elle fixa la table en formica blanc. Tel que je connaissais Collin, il l’avait entra?n?e dans cette petite intervention, et tel que je connaissais Em, elle avait r?sist?. Emily ?tait s?re d’elle, mais faire chavirer le bateau n’?tait pas son style. Je n’avais pas la force de me battre avec Collin sur ce point, et je n’?tais pas vraiment en d?saccord avec lui. J’?tais une ?pave en ce moment, c’est s?r. Il m’avait surprise ? l’un de ces rares moments o? la femme ? la grande gueule n’?tait pas l? pour d?fendre la petite fille fragile au fond de moi. Elle ?tait probablement encore vautr?e sur mon canap? ? soigner sa gueule de bois. - Tu as raison, ai-je avou?. Les mots avaient un go?t de poussi?re sur ma langue s?che. - J’ai besoin de me ressaisir. - Je pense que tu devrais suivre une cure de d?sintoxication. Les mots de Collin me semblaient acides, mais comment des mots comme « va en d?tox » pourraient sonner agr?ables et enjou?s. C’est donc ce qu’avait ressenti Amy Winehouse. Et elle ?tait morte maintenant. Il fallait que j’y r?fl?chisse. Sauf que je n’?tais pas Amy Winehouse. - J’ai ?t? dans le creux de la vague, oui, et j’ai bu un peu trop, mais seulement depuis quelques semaines. Je ne pense pas que ?a justifie une cure de d?sintoxication. L’id?e de parler de mes probl?mes avec tous ces alcooliques me rendait claustrophobe. Le syst?me des Alcooliques Anonymes peut fonctionner pour certains, mais les activit?s de groupe en chantant et en se serrant les mains, c’est pas mon genre. De plus, je n’?tais pas alcoolique. - Ces trois derni?res semaines ont ?t? particuli?rement mauvaises, mais tu es sur cette pente depuis bien plus longtemps que cela, d?clara Collin. Comme du genre un an. Est-ce que tu peux r?duire ou arr?ter ? Je parie que tu as d?j? essay?, n’est-ce pas ? J’?vitais son regard. - Et je parie que ?a n’a pas march?. J’avais presque r?pondu « Non, connard, je n’ai pas essay? ». Presque. Au lieu de cela, je r?pondis : - Je n’ai pas essay?. Je sais que je peux, quand je serais pr?te. Mon omelette au fromage ?tait arriv?e, mais je n’avais pas faim. Aucun d’entre nous ne touchait ? sa nourriture. - J’admets que j’aurais du mal ? m’arr?ter ici ? Dallas si j’essayais. Lorsque j’essaierai. Mais je sais que si je pouvais sortir de cet environnement pendant quelques semaines, je pourrai ma?triser la situation. Je suis pr?te ? commencer par ?a. La d?sintoxication n’est pas pour moi. Peut-?tre qu’un jour, si vous me ramassez dans le caniveau... mais pas maintenant. - Tr?s bien. Je te donne une chance, s?urette, alors saisis-la. Tu as quelque chose en t?te ? Demanda Collin. J’inspirai autant d’air que possible, puis j’expirai de force jusqu’? ce que mon estomac s’effondre. - St. Marcos. J’ai besoin de savoir ce qui est arriv? ? maman et papa. Je commen?ai ? pleurer, puis je me retins. J’ouvris la bouche pour parler et les larmes commenc?rent ? couler. - Tu es s?re ? Demanda Collin. Je hochai la t?te et utilisai le c?t? propre de ma serviette en papier pour m’essuyer les yeux. Lorsque je levai les yeux, une jeune femme noire attira mon attention, en partie parce qu’elle me fixait, et en partie parce qu’elle ?tait pieds nus ? IHOP et que ses v?tements semblaient ?tre vieux de cent cinquante ans. Maintenant, celle-l? avait un probl?me. La drogue, ? ce qu’il semblait. Une candidate parfaite ? la cure de d?sintoxication. Pas moi. J’essuyai mes yeux ? nouveau et lorsque je les rouvris, elle avait disparu. Comme si elle n’avait jamais exist?. Je devenais folle. J’aspirai une bouff?e d’air. J’avais d?sesp?r?ment besoin de faire une pause. Ce voyage, cette cure de d?sintoxication en solo ou ces mini-vacances ou quoi que ce soit, serait une aubaine. Et donc nous avons convenu que j’allais partir. Imm?diatement. Comme du genre, demain. Oups. Un peu plus t?t que pr?vu, mais Collin avait insist?, et Emily avait promis de m’aider ? m’organiser. Je dis au-revoir ? Collin lorsqu’il me d?posa ? mon appartement, alors qu’Emily se garait juste derri?re nous. Apr?s avoir enfil? un pantalon d’?t? couleur cr?me acceptable pour le travail, Emily et moi arriv?mes chez Hailey & Hart en milieu de matin?e. Nous ne f?mes grand-chose d’autre que de pr?parer mon voyage et de lib?rer mon emploi du temps. Je pr?sentai mes projets de vacances ? Gino, m’attendant ? ce qu’il chicane, mais il ne le fit pas. Il me tapota la main. Ugh. - Un cong? vous fera le plus grand bien, dit-il. Vous avez travaill? dur cette ann?e dans des circonstances difficiles, et vous avez besoin de vous ressourcer et de retrouver le meilleur de vous-m?me. Super. C’?tait le langage du patron pour dire « tu es une ?pave, d?gage de l?. » Eh bien, il n’avait pas tort. Humili?e et passant pour une bille. Il n’?tait pas trop t?t pour s’?loigner de ?a apr?s tout. ? la demande de Collin, Emily allait rester avec moi cette nuit, laissant son mari seul ? la maison. Emily ?tait une bien meilleure amie que je ne le m?ritais, mais il fut un temps o? j’avais jou? son r?le lorsque Rich avait temporairement rompu leurs fian?ailles. L’?quilibre de la vie. Tard dans la soir?e, j’avais finalement mentionn? le nom que personne n’avait prononc? de toute la journ?e. - Si Nick demande o? je suis, donne-lui la version aseptis?e. Emily ?tait assise sur un tabouret de bar, et je me tenais de l’autre c?t? du comptoir de ma cuisine. Elle se pencha vers moi. - N’y pense m?me pas. Nick se comporte comme un connard avec toi depuis Shreveport. Allez, ma fille. Laisse tomber. J’avais re?u de nombreux messages sublim?s aujourd’hui. Celui-ci voulait dire « tu ne l’int?resse pas ». A?e, mais elle avait raison. Mais pourrais-je laisser derri?re moi mes sentiments ? son ?gard et partir vraiment ? St. Marcos l’esprit tranquille ? Je tournai et virai dans mon lit toute la nuit, ballott?e entre les images de mes parents et de Nick. Chapitre 5 A?roport international DFW, Dallas, Texas Le 17 mars 2012 - Veuillez maintenant ?teindre et ranger tous les appareils ?lectroniques, d?clara la voix de l’h?tesse dans le syst?me de sonorisation d’American Airlines. Merde. J’?tais en train d’?crire un courriel ? Emily lui promettant un d?ner de c?te de b?uf de chez Del Frisco, mon cadeau, si elle ?liminait les restes de sushi de mon r?frig?rateur, mais j’eus le temps d’appuyer sur Envoyer. Je m’?tais install?e dans mon si?ge de premi?re classe en route pour St Marcos avec mes affaires indispensables ?tal?es autour de moi : passeport, ordinateur portable Vaio rouge, iPhone dans sa bo?te Otter ? motifs z?br?s. Je savais que Dell et Blackberry ?taient les technologies de choix pour la plupart des avocats, mais j’aimais montrer que je n’?tais pas comme tout le monde. Bien s?r, ces derniers temps, je correspondais au pire des st?r?otypes de l’avocat : celui qui picole. C’?tait mauvais pour moi. Le courriel que j’avais envoy? hier ? mes amis hors de mon cercle professionnel expliquait ma disparition soudaine comme des vacances. Ils m’imagineraient sirotant des pi?a coladas sur la plage et dansant toute la nuit sur de la musique calypso avec un Antillais sexy, retrouvant mon rythme comme Stella. Emily s’occuperait d’envoyer un m?mo similaire au bureau pour moi ce matin. En parlant d’hommes antillais, celui qui ?tait ? c?t? de moi en premi?re classe, l?g?rement bedonnant, tentait de lire mon ?cran. Je le tournai de l’autre c?t?. O? ?taient ses mani?res de premi?re classe ? Je reportai mon attention sur mon courriel. Devrais-je envoyer l’information ? Nick moi-m?me ? Peut-?tre qu’il avait agi comme un connard, mais jusqu’aux ?v?nements de Shreveport, je lui aurais envoy? un mot sexy sur mon voyage. Si c’?tait lui qui disparaissait, je voudrais en conna?tre la raison. Ipso facto, n’est-ce pas ? Sous l’emprise de ce manque de logique, je lui envoyai un courriel rapide. ? [email protected] (mailto:[email protected]) De [email protected] (mailto:[email protected]) Sujet : Voyage Nick, Je voulais t’informer, au cas o? tu remarquerais mon absence, que je suis en vacances aux Cara?bes. Je serais de retour dans une semaine. Emily s’occupera de mes affaires pendant mon absence. Et Nick, je suis d?sol?e. Pour tout. Katie Je lui avais promis de lui dire la v?rit? apr?s Shreveport. J’?tais plut?t honn?te, car c’?tait des sortes de vacances. Je fermais les yeux avec mon doigt vacillant au-dessus de la touche Envoyer. - Madame, vous devez l’?teindre et le ranger maintenant. L’h?tesse de l’air aux cheveux gris ?tait pench?e vers moi, un sourire crisp? sur le visage. Comme elle devait d?tester r?p?ter ces mots encore et encore et encore chaque jour ? des gens comme moi qui mentaient, trichaient et volaient pour obtenir quelques pr?cieuses secondes de plus de temps de connexion avant le d?collage. Cependant, j’?tais une bonne fille cette fois. - Pas de probl?me, r?pondis-je. J’appuyai sur Envoyer et ?teignis mon ?cran. Eh bien, une sorte de bonne fille. Je me calais dans mon si?ge, d?gageant ma maxi robe violette qui s’?tait inconfortablement torsad?e sous mes jambes. - Je m’appelle Guy, dit l’homme ? c?t? de moi. Il me tendit la main. Nooonnn. Je voulais dormir. Je lui serrais la main, une main tr?s douce, douce comme de la vaseline, et je r?pondis - Katie. Ravie de vous rencontrer, puis je rompis le contact visuel. Je penchai ma t?te en arri?re. Ne pense pas aux pellicules, aux poux et aux autres parasites capillaires, marmonnais-je. Je fis imm?diatement une fixation sur cette pens?e. Un gamin hurlait. Je me penchai dans l’all?e pour trouver le coupable. Un jeune p?re voyageait seul avec un enfant dans la premi?re rang?e. Cela ne pr?sageait rien de bon. L’h?tesse de l’air ?tait de retour. Sa peau semblait plus jeune que ses cheveux, et ses yeux ?taient brillants. - Puis-je vous servir une boisson avant le d?collage, madame ? J’?tais anxieuse apr?s avoir envoy? ce courriel ? Nick. L’enfant terrible et le probl?me potentiel des poux me portaient sur les nerfs. J’?tais en route pour conqu?rir des d?mons et affronter des probl?mes personnels dans un environnement ?tranger. M?me un buveur responsable aurait command? un cocktail en premi?re classe dans ces conditions. - Un Bloody Mary, dit quelqu’un. Moi. Oups. - Absolument, madame. Eh bien, je n’?tais pas ? l’h?tel, je n’?tais m?me pas encore ? St. Marcos. Si on y pense vraiment, c’?tait le compte ? rebours, mais il n’?tait pas encore ? z?ro. Je n’avais pas besoin de faire une pause dans ma consommation d’alcool jusqu’? mon arriv?e. D’ailleurs, ? quoi servaient les surclassements en premi?re classe si ce n’?tait pas pour les boissons gratuites ? Bien s?r, ils vous servaient un bol de noix m?lang?es r?chauff?es au micro-ondes et vous tendaient une serviette chaude avec une pince, peut-?tre m?me vous donnaient-ils un biscuit gluant aux p?pites de chocolat si vous ?tiez chanceux, mais l’alcool ?tait ce qui comptait le plus. - M?me chose pour moi, dit mon nouvel ami Guy. Il se pencha l?g?rement vers moi et dit : - Cela semblait parfait. J’?tais ? Los Angeles pour rencontrer des producteurs de t?l?vision afin de tourner une ?mission sur St. Marcos. C’est ext?nuant. - N’est-ce pas int?ressant ? r?torquais-je. Apr?s l’atterrissage ? St. Marcos, j’?tais encore sous l’emprise de mes libations en vol. Je souhaitai un adieu chaleureux ? Guy ? qui j’avais menti sur mon nom de famille et sur le lieu de vill?giature o? je s?journais, afin de m’assurer que je ne le reverrai pas par hasard. Je pris place dans le taxi-van pour l’h?tel de la Fleur de Paon, en balan?ant la t?te de mani?re appr?ciative au rythme de « I Shot the Sheriff » de Bob Marley. Lorsque j’arrivai ? l’h?tel, je le trouvai encore plus beau que je ne l’avais imagin?. Il se dressait fi?rement, en stuc rose, sur deux ?tages, entour? de palmiers royaux. Je pouvais voir pourquoi mes parents avaient aim? s?journer ici. Alors que je passais l’entr?e, le portier me tendit un gobelet en plastique transparent de punch au rhum avec un gros morceau d’ananas sur le bord. Un fruit. D?ner. Les gens ici ?taient parfaitement charmants. Alors que je m’enregistrais ? la r?ception, le r?ceptionniste appela le plus sympa des employ?s pour m’aider ? trouver ma chambre. Ce faisant, il remplit ? nouveau mon verre de punch au rhum. - Vous allez avoir une longue marche d?shydratante jusqu’? votre chambre, mademoiselle, dit-il avec un clin d’?il. Son accent ?tait d?licieux. Ma chambre se trouvait en bordure de la plage, mais dans un bosquet de palmiers pour plus d’intimit?. - Beaucoup de gens c?l?bres ont s?journ? dans cette chambre. Il me regarda attentivement. - Est-ce que je vous connais ? Vous ?tes terriblement belle, mademoiselle. ?tes-vous un mannequin ? Je choisis d’ignorer le fait qu’il me faisait ce commentaire ? la porte de ma chambre, et que le moment co?ncidait id?alement avec ma d?cision de lui donner un pourboire. Je lui r?pondis : - Merci, en glissant un billet de vingt dollars dans sa main. Il s’inclina ? moiti? et me souhaita un « bon apr?s-midi ». J’explorai mon environnement. Ah, bien, l’espace de bureau ?tait parfait. Je posai mon sac ? main sur le sol ? c?t? et je pla?ai mon ordinateur portable parfaitement align? sur la table, comme je l’aimais. Je consultai mon t?l?phone. La batterie ?tait morte. Je fouillai dans la sacoche de mon ordinateur portable pour trouver le chargeur de t?l?phone et le branchai. Dieu sait combien de temps j’avais perdu ? attendre des messages avec un portable ?teint. Probablement juste au moment o? Nick m’aurait aussi r?pondu par courriel. Je d?ballai mes affaires pendant que le t?l?phone rassemblait assez de jus pour pouvoir se connecter. Je continuai mon exploration. Le site Internet de l’h?tel indiquait que la baignoire ?tait assez grande pour deux personnes, et elle ?tait telle que sur la photo. Assez grande pour contenir moi et mon alter ego mal?fique ? la langue ac?r?e qui buvait trop. Des carreaux de marbre aux couleurs terre, de teintes, de textures, de tailles, de formes et de motifs vari?s, d?coraient la salle de bains. ?a aurait pu ?tre trop criard, mais ?a ne l’?tait pas. C’?tait stup?fiant. La palette tropicale att?nu?e du reste de la suite mettait magnifiquement en valeur les tons naturels de la salle de bains. C’?tait le meilleur de la nature incorpor? d?licatement ? l’int?rieur. Les meubles et le ventilateur de plafond ?taient en bambou, les draps ?taient en coton ?gyptien ivoire ? rayures, d’une ?paisseur moelleuse, recouverts d’une couette douillette de couleur cr?me. J’avais h?te de me glisser dans le lit et de me rouler dans ces draps, de frotter du coton frais sur ma peau. La plupart des couleurs de la pi?ce, jaunes ?clatants, verts palmier et fuchsia, provenaient de boutures fra?ches de plantes et de fleurs locales. Une porte-fen?tre s’ouvrait depuis la chambre sur un patio carrel? de pav?s en travertin de couleur amande. Le patio descendait sur une courte pelouse parsem?e de cocotiers qui se terminait par un acc?s ? la plage priv?e. Au-del? de la plage s’?talait la mer turquoise et saphir des Cara?bes. J’arborai un sourire. Cela ferait l’affaire. Mon iPhone ?tait assez charg? pour un t?l?chargement de donn?es. Je le ramassai et fis d?filer mes courriels. Ma secr?taire avait envoy? quelques questions, et Collin et Emily m’avaient tous deux demand? de leur faire savoir que j’?tais bien arriv?e. Je leur envoyai une note et je fis d?filer d’autres messages, surtout des pourriels. Et puis j’arrivai ? l’un qui me coupa le souffle : une r?ponse de Nick. Je posai l’iPhone jusqu’? ce que je puisse respirer normalement. J’essuyai mes paumes moites sur ma jupe violette, puis je ramassai le t?l?phone. Pas de probl?me. J’?tais calme. Le texte du courriel ?tait court : « Ok » Ok. OK !! Deux lettres minuscules, un mot. Pas vraiment de quoi s’extasier. Il aurait pu supprimer mon courriel sans le lire. Il aurait pu le lire et ne pas r?pondre. Il aurait pu le lire et r?pondre en disant quelque chose de grossier (est-ce que « ok » ?tait grossier ?). Ou, il aurait pu le lire et r?pondre par quelque chose de positif, comme « Je te verrai ? ton retour » ou « Bonne chance ». Mon cerveau se mit ? rouler ? toute allure sur les pistes famili?res de Nick, comme un aspirant de Formule 1 sur un parking. Ce n’?tait pas bon. Je vidai mon punch au rhum et mangeai mon d?ner de garniture d’ananas. Je regardai dans le mini-frigo. Jackpot. Un pichet entier de punch au rhum m’attendait ? l’int?rieur. Malheureusement, il n’y avait pas de fruits. Le jus de fruit ?tait assez sain, cependant. Le punch au rhum serait un parfait substitut insulaire au Bloody Mary. Je me versai un verre. Nick. L’abruti incroyablement froid. Je me retenais de ne pas lui r?pondre. Je descendis le punch au rhum. J’essayai de r?sister un peu plus. Je gobai un autre verre. Et puis je pris ma d?cision. Il fallait que je sorte de l?. J’attrapai mon sac ? main, mon t?l?phone et la cl? de ma chambre et je me dirigeai vers le bar que j’avais vu pendant l’enregistrement. Le bar ?tait un patio couvert au sommet d’une colline, avec vue sur la plage et l’oc?an. Je montai les marches de pierre et je d?bouchai au milieu d’une bonne foule se tenant autour du bar en acajou et des tables rondes dispos?es ?? et l? sur le sol carrel?. Quelques couples dansaient, coll?s et lascifs, sur un groupe de reggae qui sonnait plut?t bien. Ils jouaient une chanson parlant des 36 degr?s ? l’ombre. La chanteuse entonna le refrain : « Vraiment chaud, ? l’ombre des palmiers ». Je m’assis au bar et je me retournai pour les regarder apr?s avoir command? mon Bloody Mary au barman blond ? la coiffure rasta. Apr?s une gorg?e, je r?alisai qu’il ?tait mal dos? et je commandai un punch au rhum. - Vous refusez une boisson parfaitement acceptable ? Qu’est-ce qui ne va pas chez vous, ma ch?re ? La voix avait prononc? « ch?re » comme « chay ». Je me retournais et r?alisais que c’?tait la chanteuse. - J’ai chang? d’avis, lui dis-je. - ? moins que vous n’ayez une maladie contagieuse, vous pouvez me donner ce truc, dit-elle. « Donnay ce tuc. » Je poussai le verre dans sa direction, luttant contre ma peur de partager des poux avec une ?trang?re. Je ne voulais pas para?tre impolie. - Je l’ai gout?, dis-je pour la pr?venir. Elle retira la paille du cocktail et la jeta vers la poubelle derri?re le bar. Panier rat?. - Merci. Chanter donne soif. Elle me tendit la main. - Je suis Ava. Je lui serrai la main. - Katie - Les gens se l?vent et partent avant qu’on n’ait fini la soy?e. ?a fait des pobl?mes. J’essayais de suivre, mais son accent chantant me d?stabilisait. J’avais rat? la moiti? de ce qu’elle disait. Elle eut piti? de moi. - L?, tu ne me comprends pas. Elle s’enfila le Bloody Mary. - J’ai dit que mes camarades de groupe venaient de me quitter et que nous n’avions m?me pas fait notre dernier set. Nous allons avoir des probl?mes avec le propri?taire. Elle s’?tait exprim?e parfaitement cette fois, en pronon?ant chaque mot distinctement. - Oh, woa, oui, je comprends maintenant. - D?sol?e. Je parle avec l’accent local lorsque je me produis, ou lorsque je parle ? d’autres habitants. Mais je peux faire l’aristo, quand j’en ai besoin. - Faire l’aristo ? - Parler comme une dame. C’est comme parler deux langues. Parler le patois graisse les pattes et impressionne les touristes. ?a fait partie de la vie d’un natal. - Qu’est-ce que ?a veut dire natal ? - En local, ?a veut dire « n? ici ». Vous pouvez vivre ? Saint Marcos pendant quarante ans, mais vous n’?tes vraiment local que si vous ?tes natal. Ce que j’?tais. - Maintenant, je vous dois un verre, dit-elle en faisant signe au barman, et je paie toujours mes dettes ? mes amis. Chapitre 6 Station baln?aire de la Fleur de Paon, St. Marcos, USVI Le 18 mars 2012 Je me r?veillai sur ma chaise longue le lendemain matin, encore v?tue de ma maxi robe de la veille. M?me chanson, diff?rents couplets. Mais j’?tais encore plus d?go?t?e de moi-m?me que d’habitude. J’?tais ici pour enqu?ter sur la mort de mes parents et retrouver mon ?quilibre, ce qui ?tait cens? inclure une r?duction de ma consommation d’alcool. Et penser ? autre chose qu’? Nick. Il semblait que tout ce que j’avais fait ?tait d?placer mes probl?mes dans ce nouvel univers, et que j’?tais pr?te continuer le pr?sent en me basant sur le pass?. Bien jou?, ma fille. Dans un moment de panique, je me souvins d’une partie de la nuit pr?c?dente. Le courriel de Nick. Le punch au rhum. Le bar de l’h?tel. Est-ce que je lui avais envoy? un autre message ? Oh, par piti?, non. Je sautai sur mes pieds, mon c?ur r?sonnant dans mes tympans. L’eau bleue taquinait le sable ambr? de la plage devant moi. Au loin, deux petits enfants jouaient avec des seaux pr?s des vagues. Au-dessus de moi, le soleil du matin traversait les feuilles de palmier pour r?chauffer le tapis d’herbe devant mon patio. La s?r?nit? de ma retraite me r?confortait. Tout irait bien. Je trouvai mon t?l?phone ? c?t? de moi et je fis d?filer les textes et les courriels envoy?s sur mon iPhone. Rien, Dieu merci. J’avais tout g?ch? hier soir. Mais aujourd’hui, j’?tais d?cid?e ? enqu?ter sur le myst?re de la mort de mes parents, et ? reprendre ? z?ro sur le plan personnel. Apr?s quelques heures de sommeil suppl?mentaires. Je me repliai sur ma chaise. - H?, ma fille, on fait la f?te comme des rock stars, articula une voie de femme. Une femme juste ? c?t? de moi semblait-il. Je me redressai d’un bon. Je reconnaissais la voix rauque. Le nom de la femme ? qui elle appartenait ne me revenait pas. Je r?fl?chis. Abigail ? Ariel ? Eva ? Non. Ava. C’?tait Ava. Je me for?ais ? rire. - Ouais, je suppose que c’est ce que j’ai fait. Au moins, ce dont je me souviens. Je regardais la chaise longue de l’autre c?t? du patio, et, bien s?r, Ava y ?tait ?tal?e. Elle se leva, s’?tira de la pointe des pieds au bout des doigts en tendant les bras vers le ciel, ce qui aurait mieux donn? dans une tenue autre qu’une mini-robe en lycra jaune. Je d?tournai mon regard. Elle se rassit et se renversa sur sa chaise, se tripotant la paupi?re. - Eh bien, je suppose que nous ferions mieux de commencer, dit-elle en posant un faux cil sur la table du patio et tirant sur l’autre paupi?re. - Je vote d’abord pour un baril d’eau et deux Excedrin avec des ?ufs. Je n’avais absolument aucune id?e de ce qu’elle voulait dire. J’essayai de dissiper les brumes de gueule de bois enfumant mon cerveau. Devrais-je m’inqui?ter ? J’avais lu des histoires de pirates et d’escrocs dans les Cara?bes. Peut-?tre qu’elle ?tait une sorte d’arnaqueuse. Je pourrai, par essence, ?tre sa prisonni?re. Bon, je d?lirais, mais pourquoi pas. Quelque chose chatouilla les cellules de ma m?moire, puis disparut. Ava continuait ? parler. - Je connais le cuisinier du restaurant. C’est un pote. Ava attrapa le t?l?phone pos? sur la table du patio ? c?t? d’elle. Je l’?coutais commander dans son patois insulaire. Elle avait continu? ses ablutions pendant qu’elle ?tait au t?l?phone, retirant des boucles d’oreilles, un bracelet et un collier, et elle se releva en raccrochant. - Allez, allez, Katie. Ils nous attendent en bas. Elle retira sa robe d’un seul geste fluide, r?v?lant des courbes caf? au lait impeccables, quelque peu contenues par un soutien-gorge et une culotte en satin imprim? l?opard. Mes mains pos?es sur mes propres hanches saillantes, j’avais l’air de Pippi Longstocking ? c?t? de Beyonc?. Elle s’engouffra dans ma chambre. Je serrais les dents et me concentrai sur ses mots. Poste de police. Oui. C’est ?a. Des bribes de notre conversation d’hier soir me revenaient en m?moire, notamment le fait que j’avais racont? ? Ava ma qu?te pour d?couvrir ce qui ?tait arriv? ? mes parents, et son appel ? un policier avec qui elle sortait ou qui voulait sortir avec elle ou quelque chose comme ?a. Oui. C’est ?a. Je me rappelais. Soulagement. Elle passa la t?te derri?re la porte en rassemblant ses longs cheveux noirs boucl?s en un chignon haut. - ?a te d?range si j’utilise la douche d’abord ? - C’est bon, r?pondis-je. Elle leva un sourcil. - Tu vas bien ? Je sautais sur mes pieds. - Absolument. D?p?chons-nous avec les douches et essayons de finir avant que le service de chambre n’arrive. - Ya mon, dit-elle, et elle disparut ? nouveau. Je renversai ma t?te en arri?re, les yeux ferm?s, et je me pin?ai l’ar?te du nez. Ce n’est pas parce que je me rappelais de la veille au soir que la journ?e d’aujourd’hui ?tait forc?ment une bonne id?e. Je ne connaissais m?me pas Ava. Est-ce que je devenais folle ? Je redressai ma t?te pour la remettre dans sa position normale. Eh bien, j’?tais sur le point de le d?couvrir. Chapitre 7 Station baln?aire de ma Fleur de Paon, St. Marcos, USVI Le 18 mars 2012 - Je n’arrive pas ? croire que tu laisses tout tomber pour m’aider, lui dis-je. Ava avait engouffr? ses courbes dans un haut de bikini et une mini-jupe en jean bleu, qui m’appartenaient tous les deux, puis elle avait enfil? par-dessus une de mes chemises et en avait nou? les pans au-dessus de son nombril. Elle ?tait pieds nus. - C’est la meilleure offre que j’ai eue de la journ?e, dit-elle. Je suis revenue sur l’?le il y a six mois. J’ai fait le truc danse-chante-agence-cr?ve la faim ? New York, mais mes parents vieillissent et, eh bien, je ne peux pas rester loin de l’?le pour toujours. St. Marcos coule dans mes veines. Elle prit son t?l?phone, faisant d?rouler sa galerie, puis me tendit l’appareil. Elle avait fait afficher une photo d’elle-m?me se tenant entre un homme blanc beaucoup plus ?g? et une femme ? la peau sombre qui avait l’air d’?tre la grande s?ur d’Ava. - Mes parents, expliqua-t-elle. Donc je peux comprendre l’objet de ta visite ici. Si quelque chose arrivait ? maman ou papa, je ferai la m?me chose. Il me semblait que je lui avais racont? beaucoup de choses la nuit derni?re. - Ils sont beaux, r?pondis-je. Tu es un parfait m?lange des deux. Je lui ai rendis son t?l?phone. Et elle l’?tait. Ava ?tait tr?s sexy et, avec sa peau couleur caf? au lait et ses cheveux noirs ondul?s, elle pouvait passer pour n’importe quelle race, italienne, ?gyptienne, mexicaine, ou tout cela ? la fois. C’est un m?lange qui fonctionnait. Elle sortit un rouge ? l?vres de son sac ? main et entra dans la salle de bains, toujours en parlant. - Ouais, ils sont super. Quoi qu’il en soit, je suis revenue chez moi, mais il n’y a pas beaucoup de travail sur l’?le pour les actrices de th??tre form?es ? l’universit? de New York, sp?cialis?es dans les com?dies musicales de Broadway, et qui n’ont pas d’autres comp?tences employables. J’?levai la voix pour qu’elle puisse m’entendre dans la salle de bain. - Je peux comprendre. J’ai ?tudi? le chant ? l’universit? avant de devenir raisonnable. J’ai pass? trois ans ? comprendre que je ne gagnerai jamais d’argent dans la musique. - Tu chantes ? Ma ch?rie, pourquoi tu ne m’as pas dit ?a hier soir ? On aurait pu te faire monter sur sc?ne. - Pas question, dis-je en riant C’?tait il y a longtemps. - ?a ne veut rien dire. En tout cas, je suis contente que tu sois l?. C’est bien mieux que de regarder Oprah avec maman. Ava revint dans la chambre et se planta devant moi, debout, les mains sur les hanches, m’?tudiant. - Le fait est que je te trouve tr?s bien. Je l’aimais bien, m?me si elle ?tait mon oppos? polaire. Et j’aimais l’?couter, je commen?ais m?me ? mieux la comprendre : « chuis » ?tait « je suis » et « t?s » ?tait « tu es » par exemple. Ce n’?tait pas si difficile apr?s tout. Je lui dis : - Encore une fois, merci de m’avoir aid?e. Ava mit son pied ? c?t? du mien et pencha la t?te. - J’ai besoin de chaussures. Tout ce que j’ai, c’est les pompes ? talons que je portais hier soir. T’as de grands pieds, alors si on essayait les plus petites chaussures que tu as ? Son argot me secouait un peu, surtout ? cause de l’?ducation de ma m?re institutrice de maternelle, mais je ne m’offusquais pas des commentaires sur mes pieds. Je faisais 10 cm de plus qu’elle. - Que penses-tu de celles-ci ? Lui demandais-je en lui lan?ant des sandales Reef qui ?taient une demi-pointure plus petite que ce que j’aurais d? acheter. Elle y glissa ses pieds et prit la pose. - Qu’est-ce que tu en penses ? - Je pense que mes affaires te vont mieux qu’? moi, et on ferait mieux d’y aller ou je vais commencer ? te d?tester. Elle s’esclaffa et passa son bras sous le mien. - Ouais, ou je vais te d?tester parce qu’? c?t? de toi, mon cul a l’air plus large qu’il ne l’est d?j?, dit-elle en tapotant sur son post?rieur de son autre main. - Viens, on s’en va. Ava retira son bras. J’enfilai mes lunettes de soleil, attrapai mon sac ? main sur le bureau et enfon?ai mes pieds dans des sandales Betsey Johnson qui semblaient heureusement trop grandes pour ma nouvelle amie. Je verrouillai la porte derri?re Ava. Je marchai d’un bon pas sur le trottoir vers la voiture de location que le concierge avait gar? ici sur ma demande, ragaillardie par cette magnifique matin?e. - Ralentit un peu, Katie. Tu vas trop vite pour le rythme de l’?le, beugla Ava derri?re moi. J’ouvris la porti?re de la jolie Malibu verte. - Ralentir, je peux ralentir. L?. Une fois en route, Ava m’enseigna les subtilit?s des salutations locales, en m’expliquant combien il ?tait important que je passe pour une habitu?e de l’?le pour le succ?s de ma qu?te. - Ne dis pas salut. Dis bonjour, bonne journ?e et bonne nuit. Dis-le quand tu entres dans une pi?ce pleine de gens, ? la cantonade. Tu n’as pas besoin d’?tablir un contact visuel. Fais une longue pause apr?s l’avoir dit, et donne ? ton interlocuteur la possibilit? de te r?pondre et de s’enqu?rir poliment de ta sant? et de ta famille. Alors, et seulement alors, tu peux poser tes questions. Si tu ne fais pas ?a, tu n’arriveras ? rien. - Oui, madame, r?pondis-je en inclinant la t?te. - Je suis s?rieuse. Si tu vas trop vite, parle trop vite, et ne dis pas les choses correctement, un Antillais fera seulement semblant d’?couter, et tu penseras que les choses vont bien alors que ce ne sera pas le cas. Je me retenais de rire. - Je sais que tu es s?rieuse, et j’appr?cie l’aide. - Quand m?me, laisse-moi le plus gros de la conversation. Je n’?tais pas tr?s dou?e pour laisser quelqu’un d’autre parler pour moi, mais j’allais essayer. Nous ?tions en centre-ville ? ce moment, et je fis une embard?e pour ?viter une limousine qui sortait d’une place de parking juste devant moi. En donnant un coup de volant sur ma gauche, je sentis un craquement sous l’un de mes pneus. J’enfon?ai le klaxon. C’?tait d?j? assez difficile de conduire en ville sans ?a. Je jetais un ?il dans le r?troviseur pour lire la plaque d’immatriculation ? l’envers. Plaque personnalis?e. Pas surprise de ?a. On pouvait lire « BondsEnt. » - C’est mon futur mari, dit Ava, en pointant la limousine. - Vraiment ? - Nan, il est juste assez riche pour m’entretenir. Un p?t? de maisons plus loin, j’entendis un bruit sourd. Pneu ? plat. - Merde, dis-je en me garant. - On est dimanche matin, dit Ava, comme pour m’expliquer quelque chose. Je devais avoir l’air perplexe, car elle ajouta : Du verre bris? par les f?tards en centre-ville. - Ah, r?pondis-je. Parce que je suis perspicace. - Ce n’est pas un probl?me, dit Ava en sautant de la voiture. Je la suivis sur le trottoir. Jouant ? balancer ses cheveux par-dessus son ?paule, elle fut bient?t entour?e d’une foule d’antillais pr?ts ? lui pr?ter main forte. - Ah, mon petit, c’est ? ?a que servent ces gros muscles. Elle encourageait le jeune homme, se penchant pour lui donner une bonne vue sur son d?collet?. - Je peux te montrer ? quoi ils servent, si tu me laisse faire, r?pondit-il. - Ah, tu es trop fort pour quelqu’un comme moi. Tu dois avoir des tas de poulettes qui se battent pour toi jour et nuit. - Tu es la seule fille pour moi, Ava. Tu n’as qu’un mot ? dire. Une fois le changement de pneu termin?, elle se d?gagea de la foule sans effort. On remonta dans la voiture. - Je suis impressionn?e, lui dis-je. Ava r?pondit par un sourire. Nous continu?mes ? rouler dans le centre-ville parmi les vieux b?timents de style danois. Le stuc et des arches dans un arc-en-ciel de couleurs att?nu?es pr?dominaient. Presque tous les autres b?timents ?taient dans un ?tat de d?labrement. Certains avaient perdu leur toit. ? cause d’ouragans, peut-?tre ? D’autres n’?taient que des d?combres en ruine l? o? les murs auraient d? se trouver. Les habitants du coin tra?naient en petits groupes aux coins des rues. Plus souvent que je ne l’aurais cru, nous croisions un sans-abri poussant un caddie rempli de tr?sors ramass?s ?? et l?. Les touristes en t-shirt se faufilaient parmi les habitants, sacs ? provisions dans une main, c?nes de glace dans l’autre. Il ne nous prit pas trop de temps pour traverser la ville. ? son extr?mit?, nous arriv?mes ? un b?timent danois de deux ?tages de couleur bleu layette. Quartier g?n?ral de la police. On s’arr?ta sur le parking pour sortir de la voiture. Il ?tait temps de rendre justice ? maman et papa. Chapitre 8 Taino, St Marcos, USVI Le 18 mars 2012 Ava s’?tait arrang?e pour rencontrer son ami ? 11h30 tapantes. Nous entr?mes dans la vieille maison convertie en commissariat de police avec un quart d’heure de retard, ce qui, selon Ava, ?tait ? la limite d’?tre trop en avance. Ava, roulant lascivement des hanches, et moi, je retenais ma longue foul?e en me sentant ridiculement vierge dans ma robe blanche ? ses c?t?s. J’enlevais mes lunettes de soleil et les rangeai dans leur ?tui dans mon sac. - Bonjour, annon?ais-je ? notre entr?e dans la station. Un ch?ur de « bonjour » r?sonna en r?ponse. Je failli exploser de rire. Ava se tourna vers moi pour voir si je me moquais d’elle, puis me r?compensa d’un signe de t?te approbateur. - Bonjour ! Nous sommes ici pour voir Jacoby, dit-elle ? la greffi?re assise au bureau derri?re le comptoir d’accueil, l’interrompant au milieu d’une demi-sieste. Ava se retrouva entour?e d’officiers serviables en quelques secondes, tous pr?tendant conna?tre Jacoby, ?tre Jacoby, ou ?tre plus viril que Jacoby ne le sera jamais. Ils occupaient le hall du rez-de-chauss?e, une petite pi?ce qui, une centaine d’ann?es plus t?t, avait probablement ?t? le vestibule d’une grande maison. Il abritait d?sormais des chaises pliantes et une table basse en stratifi? couverte de magazines et de journaux pas tr?s frais. Je ramassais un journal pendant qu’Ava faisait la cour, et parcouru vaguement une histoire d’acquisition de la compagnie locale de t?l?phonie cellulaire par un gros patron de l’?le. Son nom ?tait Bonds. Gregory Bonds. Je gloussais ? lisant son nom. Ah, oui, ?a devait ?tre le futur mari d’Ava, le gars avec un stupide chauffeur. La flagornerie des journalistes me d?gouta de poursuivre ma lecture. Lorsque le vrai Jacoby se pr?senta, j’eus un choc. Il ?tait un Shrek noir, pas le dieu d’?b?ne exotique que j’avais imagin? convenant ? la beaut? sulfureuse d’Ava. Ava gloussa comme une poule, ce qui me laissa bouche b?e, et jeta ses bras autour de son cou sous un concert de murmures masculins d??us, de grognements et de bruits de b?cotages humides. Beurk. Les autres policiers se dispers?rent, disparaissant derri?re des portes et par un escalier visible dans une pi?ce adjacente au hall. - Katie, voici Jacoby. On a ?t? copains d’?cole depuis la maternelle. Jacoby, Katie. Il me tendit sa main. - Darren Jacoby. Je la saisis. - Ravi de vous rencontrer, Officier Jacoby. Je suis Katie Connell. Jacoby pointa du geste vers l’une des pi?ces jouxtant le hall, et s’engagea dans cette direction. Il ouvrit la porte en bois massif donnant sur une salle de conf?rence vide, aux murs int?rieurs ?pais en b?ton. Construite pour r?sister ? M?re Nature. Il y avait l? une table m?tallique pliante et d’autres chaises pliantes identiques ? celles du hall. Encore une fois, mon esprit identifia les origines de la pi?ce. Je d?cidai qu’elle avait ?t? une chambre. Nous pr?mes place autour de la table. - Alors, Ava, je suppose que je n’ai pas r?v? de ton plan cul d’hier soir, commen?a-t-il. S’il existait un exemple d’espoir ?ternel, c’en ?tait un. - Tu r?ves d’un plan cul, mais c’est moi qui t’ai appel?, r?pondit-elle. Katie a besoin d’aide. Ses parents sont morts ? St Marcos l’ann?e derni?re, pendant leurs vacances. Il d?tourna son attention d’Ava. - Je suis d?sol?, Mlle Connell, dit-il. - Katie, s’il vous pla?t. Merci. Il me fit signe de continuer ? parler. Ava voulait-elle continuer la conversation ? Je d?cidai qu’elle ne le voulait pas et je pris le relais. - La police nous a dit, ? mon fr?re et ? moi, que nos parents ?taient morts dans un accident de voiture. Je ne voudrais pas offenser la police de St. Marcos, mais, compte tenu des circonstances telles qu’elles nous ont ?t? expliqu?es, cela semble incoh?rent. ?a ne leur ressemble pas. J’esp?rais pouvoir parler ? l’officier qui a travaill? sur l’affaire, et peut-?tre voir le dossier. Pour aplanir mes doutes, me faire ? l’id?e. Expliquais-je. Il plissa les yeux. - Connaissez-vous le nom de l’officier ? Demanda-t-il. - Non, je ne sais pas, r?pondis-je. Je suis d?sol?e. Collin saurait cela. J’aurais d? lui demander. - Leur nom est Connell ? - Oui. Frank et Heather Connell. Sans un autre mot, il repoussa sa chaise. Un des pieds avait perdu son coussinet, et elle raclait le sol, ce qui me rappela Shreveport, et Nick. Jacoby quitta la pi?ce. - C’?tait abrupt, dis-je ? Ava. - Ils ont tendance ? se serrer les coudes, surtout si tu n’es pas du coin, dit Ava. C’est pourquoi je t’ai dit hier soir que tu avais besoin de moi pour t’accompagner, et que nous devions travailler avec Jacoby, du moins autant que possible. Une pens?e me traversa l’esprit. - J’esp?re qu’il n’?tait pas l’officier charg? de l’affaire. Si c’?tait lui, je viens juste de l’accuser d’avoir b?cl? son boulot. Ava ne r?pondit pas, un sourire de Mona Lisa sur les l?vres. Les secondes d?filaient sur l’horloge murale derri?re elle. Une minute passa, puis une autre, et encore une autre. Ava sortit son t?l?phone et commen?a ? jouer avec. J’?loignai ma main de ma bouche, r?alisant trop tard que j’avais arrach? la cuticule de mon index. Une goutte de sang avait perl?. Puis Jacoby revint, sa carrure remplissant la pi?ce. Il tenait un dossier sous un bras et une petite feuille de papier dans son autre main. - J’ai parl? ? mon patron, le chef adjoint. Tutein. Il m’a dit de vous donner ?a. Il parlait « ma langue », au lieu de son patois pr?c?dent. Il me tendit le bout de papier qui avait ?t? arrach? d’un carnet de notes. Une adresse ?tait ?crite au crayon : Walker, 32 King’s Cross. - Est-ce le nom de l’officier ? Demandais-je. - Non, l’officier qui travaillait sur l’affaire s’est noy? il y a onze mois, dit Darren, d’une voix sans ?motions. Il ne donna pas de d?tails. Je n’en demandai pas. - Je suis d?sol? d’entendre ?a. Et le dossier ? Je peux le voir ? Il me lan?a un regard noir. - C’?tait juste un incident de circulation. Il se frotta l’arri?re du cou de la main. Nous avons le rapport d’accident. Je vous en ai fait une copie. Peut-?tre que le m?decin l?giste a plus d’information. Il me tendit le dossier, puis l’ouvrit en le retournant. Une page. Je la pris avec pr?caution, mes yeux tra?ant les noms de Frank Connell et Heather Connell. Je parcouru le reste jusqu’? ce que j’arrive au nom de l’officier de police qui avait r?pondu ? l’appel. Tap? proprement, je pouvais lire Michael Jacoby. Sign? d’une main ferme et rapide par George Tutein. Jacoby. Mais pas ce Jacoby, parce que ce Jacoby - Darren - ?tait tr?s vivant. - Walker est un d?tective priv?, le seul de St. Marcos. Tutein dit que Walker conna?t tous ceux qu’il doit conna?tre sur l’?le, et qu’il travaille pour quelques-unes des plus grandes entreprises. Peut-?tre qu’il peut vous aider. Jacoby commen?a ? s’?loigner, puis se retourna. - Mais vos parents sont morts dans un accident de voiture. On dirait qu’il n’y a pas grand-chose ? d?couvrir pour vous. - Donc il n’y a personne ici ? qui je peux parler ? Une bouff?e de col?re commen?ait ? m’envahir. - Juste Michael. Et il est mort. Il regarda Ava. - Content de te voir. Il tourna les talons et sortit. Mes joues et mes oreilles br?laient. Cette conversation avait tir? toutes mes sonnettes d’alarme. J’ouvris la bouche mais Ava porta son doigt ? ses l?vres. Je la fermais et je serrais les dents. Elle fit un signe de la t?te vers la sortie, puis se dirigea vers la porte, en beuglant ? tous ceux qui ?taient ? port?e de voix - Un agr?able bon apr?s-midi ? vous. Un mur de chaleur moite m’attendait ? la porte, mais je ne m’arr?tai pas, d?j? ?chauff?e par ma frustration. Deux officiers pass?rent devant nous et entr?rent dans le b?timent, et nous f?mes soudainement seules. Je plissai les yeux et cherchai mes lunettes de soleil. Consciente de leur amiti?, je tentais de calmer ma fureur. - Ava, je sais que c’est ton ami, mais n’as-tu pas l’impression qu’il s’est foutu de moi ? Je sais que je ne suis pas d’ici, tout ?a me laisse une mauvaise impression. Les yeux d’Ava balayaient de gauche ? droite. - Chut, Katie. Les choses se passent diff?remment ici qu’aux ?tats-Unis. J’ouvris mon c?t? de la voiture et d?verrouillai les autres porti?res. Nous mont?mes dans la voiture. - Laisse-moi voir ce rapport, dit Ava. Je lui tendis l’enveloppe. Il n’y avait pas grand-chose ? voir. Un accident de voiture, plongeon d’une falaise, atterrissage dans les rochers en dessous. Le conducteur et le passager d?c?d?s. Mes parents. Sans quitter la feuille des yeux, Ava demanda : - Pourquoi es-tu si s?re que leur mort n’est pas un accident ? - Je ne suis pas s?re. Je crois beaucoup ? l’intuition, et c’est juste un sentiment que j’ai, ? partir de petites choses qui n’ont pas de sens. Comme le fait que ma m?re portait toujours l’alliance de ma grand-m?re, mais la police ne l’a jamais trouv?e. Pas sur elle, ni dans ses affaires ? l’h?tel. J’ai trouv? ?a bizarre. En plus, j’ai parl? ? mes parents cette nuit-l?. Ils avaient d?n?, et ils ?taient sur le chemin du retour ? la Fleur de Paon. Ils m’ont appel? pendant qu’ils conduisaient. Ils avaient l’air heureux. Et l’instant d’apr?s, ils ?taient morts. Merde. Mes yeux commenc?rent ? fuir. - Okay, okay. Il est dit ici que ton p?re ?tait ivre. Sa voix ?tait devenue plus formelle. Plus s?rieuse. - Oui, c’est l’autre chose qui me d?range. Mon p?re ?tait un alcoolique repenti. Il n’avait pas l’air d’?tre saoul quand je lui ai parl? au t?l?phone. Et je n’arrive pas ? imaginer ma m?re restant l? ? le regarder picoler. Maman s’?tait occup?e d’enfants de maternelle pendant vingt ans, un travail dont elle aimait ? dire que ?a l’entra?nait ? s’occuper de mon p?re. Elle ?tait ? la fois tendre et tr?s d?termin?e. Seul sa grossesse surprise avec Collin avait fait d?railler ses plans pour devenir avocate. - Peut-?tre qu’elle n’avait pas remarqu? ? Sugg?ra Ava. - Peut-?tre. Je ne sais pas Tout est possible. Je lui fis une confession. - C’est ce que pense mon fr?re. Collin. Il est officier de police. Quand il a appris la mort de mes parents, il a appel? ici et parl? ? un officier. Collin a dit qu’il ?tait gentil, qu’il ?tait serviable, et qu’il a dit qu’ils voyaient tout le temps des touristes sur St. Marcos, conduisant en ?tat d’ivresse et se mettant dans de mauvaises situations. Collin pensait que papa avait peut-?tre rechut? et qu’il le cachait ? ma m?re. Ava posa sa main sur mon avant-bras. - Je d?teste dire ?a, Katie, mais les touristes et les conducteurs ivres sont la m?me chose pour nous. Cela n’aidait pas mes yeux ? s?cher. - Mais ton copain a agi si bizarrement. Tu ne crois pas ? Elle me regarda, et ses yeux ?taient doux et tristes. - L’officier sur cette affaire, celui qui est mort... - Michael Jacoby ? - C’?tait le fr?re de Darren. Son petit fr?re. - Je suis d?sol?e. Oh mon Dieu, je suis tellement d?sol?e. Je me sens ?go?ste. Je... Un coup sec sur la vitre derri?re ma t?te me coupa court. Je poussais un glapissement en sursautant, me cognant la t?te contre le toit. Ava pris une goul?e d’air. Je me retournai et me trouvai face ? face au large visage de Darren Jacoby dans l’encadrure de la vitre. J’essayais de l’ouvrir mais les boutons ne r?pondaient pas. Ce n’est qu’? ce moment-l? que je me suis rendu compte que nous ?tions assises dans une voiture en plein soleil, sans vitres baiss?es ni climatisation. Je tournai la cl? et d?marrai le moteur, puis je baissai la vitre. Ava se pencha sur moi, et prit son accent local. - Jacoby, tu nous as coll? la trouille. Il ne souriait pas. - Je voulais lui dire... il me regarda directement, - Pour dire que je suis d?sol? pour vos parents. Je sais que c’est dur de perdre quelqu’un qu’on aime. Je sais que ?a vous fait poser des questions. Mais mon fr?re ?tait un bon flic, et je lui fais confiance. S’il a dit qu’ils sont morts dans un accident de voiture, c’est ce qui s’est pass?. Il ?tait repass? ? l’accent local. - Je suis d?sol?e pour votre fr?re, lui dis-je. Il inclina la t?te, baissa les yeux, puis les remonta ? nouveau pour rencontrer les miens. - Bonne journ?e, Mlle Connell. Je remontais la vitre alors qu’il s’?loignait. J’?tais plus confuse maintenant que je ne l’avais ?t? avant d’arriver ? la station. Il aurait ?t? pr?f?rable de laisser tomber, de faire confiance au jugement de Collin, de chercher la paix plut?t que les probl?mes. Je le savais. Normalement, je faisais aussi enti?rement confiance ? Collin. Mais il avait eu des probl?mes sentimentaux juste avant la mort de maman et papa. Sa fianc?e l’avait largu? pour une femme, et il n’?tait tout simplement pas lui-m?me alors, distrait par ses propres probl?mes. Si j’avais des doutes, alors je le devais ? mes parents de faire ce que je faisais. Je les avais laiss?s tomber pendant un an, laissant tout le reste ?tre plus important que mon intuition, qu’eux, et tant qu’une once de doute subsistait en moi, je devais continuer. Je me d?gageai de ma place de parking et pris la route. Chapitre 9 Taino, St Marcos, USVI Le 18 mars 2012 Quinze minutes plus tard, Ava et moi ?tions assises dans le bureau d’un certain Paul Walker au 32 King’s Cross Street. Son bureau ?tait une longue pi?ce ?troite dont les murs et le sol ?taient recouvert de briques rouges. Il avait probablement ?t? autrefois une ruelle ou un passage pour pi?tons. Il ?tait coinc? entre une boutique de friperie et un magasin de disques ? l’abandon avec des albums couverts de poussi?re en vitrine et qui d?gageait une impression de d?ch?ance, de d?cr?pitude. Je me demandai s’il renfermait des tr?sors cach?s dans ses profondeurs. Probablement pas. Walker se rendit au fond de son espace jusqu’? un mini-r?frig?rateur, duquel il extirpa deux bouteilles d’eau. Il essuya les bouteilles et les bouchons avec la manche de sa chemise en claudiquant sur le sol in?gal devant nous. Les murs se resserraient derri?re lui, projetant son ombre vers l’avant, du moins c’est ce que mes yeux me disaient. ?a ressemblait au palais des glaces d’une f?te foraine de bas ?tage. - Parlez-moi donc de l’affaire, Mlle Connell, commen?a Walker en nous tendant les bouteilles avant de s’asseoir derri?re son bureau. Je n’avais travaill? en ?troite collaboration qu’avec un seul autre d?tective auparavant : Nick. Quel contraste entre Walker et lui. Le ventre de Walker lui donnait l’air d’?tre enceint de cinq mois sous son t-shirt publicitaire Cruzan Rum. De la sueur perlait sur son front. La pi?ce empestait la malpropret?. Si j’avais eu un mouchoir sur moi, j’aurais pu y enfouir mon nez, apr?s avoir nettoy? ma bouteille d’eau avec. Je posai la bouteille sur le sol ? c?t? de moi. - Mes parents ont pass? une semaine ? St Marcos l’ann?e derni?re. Ils sont venus ici pour leur quaranti?me anniversaire de mariage. Ils passaient un bon moment, et ils m’appelaient chaque jour. Un sentiment de culpabilit? me traversa ? l’id?e de l’irritation que j’avais ressentie en voyant quotidiennement leur num?ro sur mon t?l?phone. Des gens que j’aimais interrompant une vie que je n’aimais pas, et ils m’irritaient. - Ils ont particip? ? toutes les activit?s habituelles pour touristes. Ils ont pris un catamaran pour aller sur l’un des atolls. Ils ont fait de la randonn?e dans la for?t tropicale. Ils sont all?s sur une plage isol?e pour faire de la plong?e. C’est comme s’ils avaient retrouv? leur jeunesse. Ils m’ont m?me appel? un jour pour me dire qu’ils ?taient tomb?s sur deux personnes faisant l’amour sur la plage, litt?ralement. Ma m?re gloussait comme une adolescente en me racontant l’histoire, un grand homme blond aux cheveux touffus et une petite femme noire, m’a-t-elle dit. Mais elle s’amusait bien. Elle a tout aim? de ce voyage. Va droit au but, Katie. C’est dr?le comme je pouvais ?tre ?loquente sur les probl?mes des autres, mais si maladroite sur les miens. Je terminais le reste de mon histoire sans m’?taler sur des d?tails non pertinents. Les yeux de Walker scrutaient mon visage pendant que je parlais. Une fois termin?, il resta silencieux, tapotant lentement son stylo contre ses l?vres. - M. Walker ? Avez-vous des questions ? Demandais-je. - Oh. D?sol?. Vous me rappelez quelqu’un que j’ai connu, r?pondit-il. Son commentaire rampa sur ma peau comme un scorpion. - Oui, juste quelques questions pour m’aider ? d?marrer. Avant la mort de vos parents, o? sont-ils all?s d?ner ? Je me souvenais de ?a. Ils avaient ador? le restaurant et y sont retourn?s pour leur dernier d?ner. - Chez Fortuna’s. Vous connaissez ? - Oui, c’est un endroit tr?s populaire. Mes yeux s’arr?t?rent sur le certificat encadr? des dix ans de service de la police de New York, clou? sur le mur au-dessus de son ?paule gauche. ? c?t?, la photo de p?che obligatoire quand on vit sur une ?le : Walker, un homme noir de la m?me taille et un homme blond encore plus grand, debout sur le pont arri?re d’un bateau nomm? Big Kahuna, tous les trois soutenant un ?norme marlin. Ava pris la parole pour la premi?re fois depuis que nous avions ?chang? nos salutations au d?but de l’entretien. - Baptiste’s Bluff pas exactement sur le chemin du restaurant ? l’h?tel. Walker l’ignora et s’adressa ? moi. - A votre connaissance, sont-ils all?s ailleurs cette nuit-l? ? - Pas que je sache. - Le casino ? Une promenade au clair de lune sur la plage, peut-?tre ? - Je suis d?sol?e, je ne sais pas. J’ai le rapport d’accident de la police, cependant. Et ils ont dit que le m?decin l?giste pourrait ?galement avoir un rapport. Je lui tendis le dossier de police, il le saisit, l’ouvrit et le posa devant lui. - Okay, je vais demander ?a au m?decin l?giste. - Aussi... J’h?sitais, regardais Ava, puis continuais. - L’officier qui a enqu?t? sur leur mort est d?c?d? peu de temps apr?s eux. Vous pouvez voir sur le rapport qu’il a ?t? sign? par un autre officier que celui qui a enqu?t?. Je ne sais pas si ?a veut dire quelque chose, mais... Walker me coupa la parole. - Je vais voir ?a. D’accord. Il jeta un coup d’?il au dossier ouvert et au rapport de police sur son bureau. - Je pense que j’ai tout ce dont j’ai besoin de votre part. Il y a un acompte de cinq cents dollars, pour commencer. Il fallait que je fasse quelque chose, mais est-ce que je faisais assez confiance ? cet homme pour lui faire un ch?que et le laisser s’occuper de l’enqu?te pour moi ? D?penser l’argent de l’assurance dont je n’avais pas besoin me ferait-il me sentir moins coupable ? Je voulais appeler Nick et lui demander conseil. Je voulais sortir d’ici ? toute allure. Je voulais un punch au rhum. Je voulais que maman et papa reviennent. J’avalai difficilement ma salive et sortis mon ch?quier. Pendant que je remplissais le ch?que, il continua. - J’ai pas mal de boulot en ce moment. Je sais que je ne pourrai pas commencer avant plusieurs semaines. Ce n’est pas une urgence, apr?s tout, puisque vos parents sont d?j? morts. Une autre vague de chair de poule. Il avait raison, cependant. Grossier, mais exact. Je posais le ch?que sur le bureau avec ma carte de visite par-dessus et le poussais vers lui du bout des doigts. Il laissa une tra?n?e propre dans la poussi?re de son bureau. - Eh bien, merci, Mlle Connell. Je vous contacterai, dit-il en saisissant le ch?que avant que j’aie le temps de retirer mes doigts. Alors qu’Ava et moi nous nous lev?mes pour partir, il nous arr?ta. - Oh, une derni?re chose. C’est mieux pour moi si je contacte directement les t?moins potentiels. Cela interf?re avec mon enqu?te quand mon client essaie de le faire lui-m?me. Donc, si vous le voulez bien, laissez-moi faire mon boulot, et profitez du reste de votre s?jour sur notre belle ?le. - Tr?s bien, dis-je. Et nous nous ?lan??mes vers la sortie, aussi vite que la politesse nous le permettait. Chapitre 10 Taino, St Marcos, USVI Le 18 mars 2012 Ava et moi marchions silencieusement sur le trottoir, comme un vieux couple mari? plut?t que comme deux femmes qui s’?taient rencontr?es quinze heures auparavant. Je marchais toujours devant elle, mais plus lentement. Physiquement, cependant, pas mentalement. Lorsque nous arriv?mes ? la voiture, Ava posa ses paumes ? plat sur le toit. - Dis-moi que tu as faim et que tu es pr?te pour un cocktail. Elle leva son avant-bras devant son visage comme pour consulter une montre imaginaire. - Ouaip, c’est vraiment l’heure de l’appel de l’estomac. - Je dois voir Baptiste’s Bluff, lui dis-je. J’ai juste besoin de voir l’endroit. Je ne pense pas que je puisse laisser ?a ? Walker et continuer ? vivre sans me rendre compte par moi-m?me. Ava pris une pose dramatique, les bras en l’air, les doigts pointant vers le ciel, et roula les ?paules avec une emphase dramatique. - Bien s?r, tu dois te rendre compte. Elle abandonna sa pose th??trale et se pencha vers moi. - Et je vais t’y conduire, mais tu auras un sandwich au poisson volant dans une main et une bi?re dans l’autre quand on y arrivera. Elle pointa vers une rue sur notre gauche. - Tu conduis, et c’est par l?. Apr?s avoir remont? dans la Malibu br?lante, nous quitt?mes la ville par la route sc?nique, vers la c?te nord sinueuse, bleu ? droite, vert ? gauche. Fen?tres baiss?es, nous laiss?mes le vent emm?ler nos cheveux. J’avais besoin d’un ouragan force quatre pour purger mon syst?me de ces contrari?t?s, mais une forte brise c?ti?re ferait l’affaire pour le moment. Nous pass?mes devant une marina. L’odeur du diesel et des charognes de poissons envahit l’habitacle pendant un moment, et j’expirais par le nez. Je repoussais une m?che de cheveux que le vent poussait devant mes l?vres et je pris une gorg?e de la bouteille d’eau du bureau de Walker. Cette bouteille que j’avais frott?e avec une lingette d?sinfectante trouv?e dans le fond de mon sac ? main apr?s ?tre mont?e dans la voiture. Apr?s dix minutes de route, Ava d?signa une cabane sur la plage. - Gare-toi l?, ordonna-t-elle. La cabane ?tait en fait un petit restaurant de plats ? emporter, avec un bar et quelques tabourets de plage. Elle ne portait pas de nom que je puisse voir. Ava enleva ses/mes chaussures et sortit de la voiture, et je fis de m?me. Nous march?mes dans le sable jusqu’? la cabane sans nom o? un couple de chiens nous accueillit. - Des ramasseurs de noix de coco, expliqua Ava. Elle leur donna l’ordre de rentrer d’une voix plus grave que celle que je lui connaissais, et les chiens ob?irent en remuant la queue. Ava h?la le propri?taire comme s’il ?tait un vieil ami et lui a passa notre commande. Il tendit la main vers moi et j’y d?posais un billet de 20. Il cligna des yeux et tendit son autre paume. Je sortis un deuxi?me billet de 20. Il hocha la t?te, et je pla?ais l’autre billet dans sa main. Il jeta l’argent sous le comptoir dans un panier et se retourna vers ses friteuses, rentrant ses joues dans l’espace creux o? auraient d? se trouver ses molaires. Pas de monnaie. Le paradis n’?tait pas bon march?. Ava grimpa sur l’un des tabourets du bar et a fit face ? la mer. Je l’imitais. Quel d?cor pour un d?jeuner. Je pourrais m’y habituer. Je posai mes pieds sur la barre du tabouret et mes coudes sur mes genoux, le visage dans mes paumes. - Le d?jeuner est toujours aussi cher sur cette ?le ? Demandais-je. - Ben ouais. Si tu n’es pas d’ici. J’?tais indign?e. - Donc il t’aurait fait payer moins que ce qu’il m’a fait payer ? Elle renifla. - Lui ? Non, c’est un voleur. Mais en g?n?ral, il y a une remise locale. Oh d’accord. Je n’?tais pas surprise. Je fis rouler ma t?te, appr?ciant quelques craquements de cou. L’oc?an m’appelait. - ?a te d?range si je me trempe les orteils pendant qu’on attend ? Demandais-je ? Ava. - Non, vas-y. Je reste ici et je t’appelle quand la bouffe est pr?te. Le sable ?tait chaud, presque br?lant. Mes pieds s’enfon?aient le talon en premier, ralentissant ma marche. Plus je me rapprochais de l’eau plus le sable devenait ferme et froid. Je n’h?sitais pas. J’entrai dans l’eau, d’abord jusqu’aux chevilles, puis jusqu’aux genoux. Je remontai ma robe blanche de quelques centim?tres. L’eau affluait contre mes genoux, puis la vague monta jusqu’? mes cuisses. Quand elle reflua devant mes jambes, je sentis la douce brise commencer ? s?cher ma peau. Je pouvais voir mes orteils sur le sable blanc ? travers l’eau claire, et je les remuai. Une autre vague arriva, me soulevant presque. Un banc de petits poissons argent?s tournait autour de moi, ? quelques centim?tres seulement de la surface. - Katie, appela Ava. C’est pr?t ! J’aurais pu rester l? pendant des heures. Mais je revins vers la plage, m’?claboussant ? chaque foul?e. J’imaginais ma m?re, je me demandai si elle avait fait la m?me chose, si elle l’avait fait ici, sur cette plage. Si le vieil homme qui m’observait depuis la hutte l’avait vue, il devait penser que je lui ?tais famili?re. Depuis mon adolescence, les gens disaient qu’on pouvait passer pour des jumelles. Maman roulait les yeux et r?pondait : « De 100 m?tres pour un septuag?naire myope. » Elle avait tort, cependant. Elle ?tait morte bien trop jeune. Je rejoignis Ava et nous embarqu?mes nos sandwichs et nos accras au poisson emball?s dans du papier gras dans la voiture. L’accras est un genre de pain frit, l’?quivalent carib?en des beignets ou des sopapillas pour les Mexicains. Juste ce dont ma cellulite avait besoin. Sauf qu’en r?alit?, c’?tait ? cause du manque d’exercice au cours des cinq derni?res ann?es, apr?s avoir arr?t? le karat?, et bien trop de calories. Ava tenait aussi les goulots de deux bouteilles de Red Stripes glac?es entre ses doigts. - C’est encore loin ? Demandais-je. - Dix minutes, r?pondit-elle. Apr?s avoir conduit un autre kilom?tre le long de la c?te, nous tourn?mes tout droit vers l’int?rieur des terres en remontant. Je d?testais quitter la s?r?nit? du rivage. Les huit derni?res minutes de notre trajet se d?roul?rent sur des chemins de terre parsem?s d’orni?res qui disparaissaient dans des buissons denses ? chaque virage. - Ce n’est pas un endroit ? explorer tout seul, dit Ava en d?signant l’une des routes secondaires. Trop isol?. - C’est magnifique ici, pourtant, r?torquais-je. En fait, j’?tais choqu?e de voir ? quel point l’endroit ?tait grandiose. Diff?rent du rivage, ?videmment, mais diff?rent dans le bon sens, un sens qui ?tait parfait. Les arbres ?taient plus grands et se rencontraient au-dessus de la route, cr?ant une arche au-dessus de nous et att?nuant le bruit du ressac contre le sable et les rochers ? seulement un kilom?tre de l?. Je vis un ?clat de plumes dans un des arbres. - C’est un ara ? - Ben ouais. Ils vivent ici. Je ne savais pas si je pourrais un jour ?tre aussi blas?e qu’Ava de cette flore et de cette faune. Je m’impr?gnais de la sc?ne : des orchid?es plus belles que des fleurs de serre, des lianes flamboyantes fuchsia, rose et orange se dressant fi?rement, me rappelant les mimosas de chez moi. - Tourne ici, dit Ava, et je virais ? droite, dans la direction g?n?rale de l’eau, mais ? des centaines de m?tres au-dessus. Nous roul?mes trois cents m?tres de plus, puis nous sort?mes des arbres. Le changement de notre environnement fut soudain, nous arrachant ? la tranquillit? de la for?t. Mon humeur se d?grada de m?me. De qui je me moquais ? Mes ?motions ?taient ? vif, et mon humeur montait et descendait les octaves plus vite que Sarah Brightman dans le Fant?me de l’Op?ra. - Tu peux te garer o? tu veux, indiqua-t-elle. J’arr?tai la voiture pour me garer, puis coupai le moteur et retint ma respiration. Me trouver ? l’endroit o? mes parents ?taient d?c?d?s, c’?tait comme entrer dans les ?glises orn?es de la Vall?e de la Nativit? au Texas. Nous y ?tions all?s en famille lors d’un court voyage en voiture ? La Grange quand j’?tais au coll?ge. Dans ces vieilles ?glises en bois, je savais que j’?tais en pr?sence de quelque chose de saint et de puissant, et que sous leurs toits, les probl?mes de la vie et les b?n?dictions ?taient li?s, tout comme ici, l? o? la for?t tropicale se m?lait aux falaises. O? la vie rencontrait la mort. Ava avait saut? de la voiture, ? nouveau pieds nus et se dirigeait vers un chemin escarp?. Je trainai derri?re elle. Je voulais tout absorber. Je voulais sentir mes parents ? nouveau, et je voulais qu’ils sachent que j’?tais venue sur ces lieux, qu’ils avaient compt? pour moi. Que si je n’accomplissais rien d’autre au cours de ce voyage, je pourrai au moins leur dire au revoir. - Je vous aime, maman et papa, chuchotais-je. Ava avait franchi la colline et en trois pas, elle disparut. J’acc?l?rais le pas. Je haletais en arrivant sur la cr?te et je d? faire un pas en arri?re ? cause d’un vertige. Le sol descendait sur trente m?tres, puis disparaissait tout simplement. Au-del?, il n’y avait que le ciel, qui se confondait avec la mer des Cara?bes ? l’horizon. - Ils n’ont pas ?t? les premiers ? tomber de cette falaise, dit Ava sur un ton solennel. - Oh mon Dieu, dis-je, sans pouvoir trouver d’autres mots. Je m’affalai dans l’herbe. Assise sur un monticule et tentais de rassembler mes pens?es. Pourquoi ? Pourquoi ?taient-ils venus ? cet endroit pr?cis ? - C’est en quelque sorte notre coin des amoureux, dans un sens rude et inaccessible. Beaucoup de filles que je connais ont perdu leur virginit? ici. Il a ?galement ?t? le site de quelques suicides d’amoureux. Il a toujours eu cette atmosph?re romantique ? laquelle les gens ne peuvent pas r?sister. Je r?fl?chissais ? ses mots. Est-il possible que mes parents aient recherch? cet endroit ? Un dernier frisson pour leur anniversaire de mariage ? Je les imaginai tous les deux, main dans la main, yeux dans les yeux. Je l’esp?rais. Quelque chose en moi ne le croyait pas, mais Dieu, je l’esp?rais. - Au-revoir, maman et papa, murmurais-je. Je fermais ? nouveau les yeux, comptais ? rebours ? partir de cent en essayant de ne penser ? rien et j’ouvris mon c?ur au ciel. Chapitre 11 Baptiste’s Bluff, St. Marcos, USVI Le 18 mars 2012 Nous nous ?loign?mes de Baptiste’s Bluff pour retraverser la for?t tropicale une demi-heure plus tard. J’avais retrouv? une partie de mon ?quilibre mental, suffisamment pour que la beaut? des fleurs m’emporte ? nouveau. Elles semblaient maintenant rendre hommage ? mes parents. Compositions florales fun?raires. La for?t tropicale n’?tait pas uniquement un plaisir pour les yeux, elle me faisait me sentir plus proche de maman et papa. Je d?testais devoir m’?loigner. - Tu sais, j’ai un ami qui organise des visites guid?es de la for?t tropicale. Il a fait la navette avec son groupe depuis la Fleur de Paon. Tu devrais aller avec eux demain. Je vais l’appeler et le pr?venir. - Une randonn?e ? Je ne suis pas une randonneuse. Mais je suis une excellente conductrice. Est-ce qu’il fait aussi des visites guid?es en voiture ? - Non. Il est botaniste. Arr?te d’argumenter et suis-le. ?a va changer ta vie. La totalit? de ce s?jour avait d?j? l’air de changer ma vie, et je n’avais ?t? sur place que depuis 24 heures. Je succombai ? une bouff?e d’honn?tet?. - C’est pourquoi je suis ici, tu sais. Pour changer ma vie. Ou je suis cens?e le faire, en tout cas, autant que je peux en une semaine. Mon fr?re a vraiment insist?. Il pense que je bois trop. J’essaie de passer au-del? des sympt?mes et de remonter ? la source. Ce n’est pas l’alcool. C’est mes parents. Mes mauvaises d?cisions. Courir apr?s le mauvais gars. Tout ?a et plus encore. Mes mots se trainaient, g?n?e de ne pas pouvoir les r?exp?dier ? l’endroit d’o? ils ?taient sortis. Ma confession n’impressionna pas Ava. - La plupart des gens fuient quelque chose quand ils viennent ici. La plupart du temps, ils doivent comprendre s’ils fuient la bonne chose, ou si c’est la mauvaise chose qui les poursuit. Sa d?claration ?tait profonde. J’en avais fini avec la philosophie pour la journ?e, alors je gardai le silence. Ava continua. - Tu as dit que ton p?re ?tait alcoolique ? Je crois avoir lu que c’est g?n?tique, d?clara-elle. - Ouais. Peut-?tre. Sauf que je n’?tais pas Amy Winehouse. - Beaucoup de gens qui s’installent ici deviennent alcooliques, dit-elle. C’est un environnement difficile pour arr?ter de boire. - J’avais un peu remarqu? ?a. Au moins, elle ne s’?tait pas arr?t?e sur le fait que je courais apr?s le mauvais gars, mais j’?tais pr?te ? en finir avec le sujet des probl?mes de Katie. Nous ?tions presque de retour en ville. - O? est-ce que je te d?pose ? Demandais-je. - Emm?ne-moi chez moi pour que je puisse me changer. J’ai un rendez-vous plus tard, mais tu peux rester avec moi jusque-l?. - Tu ne chantes pas ce soir ? Demandais-je. - Pas officiellement. Quoi que ?a veuille dire. On s’arr?ta devant la maison d’Ava et elle me fit signe d’entrer. C’?tait petit, mais propre. Mignon, avec des meubles en osier et des coussins blancs moelleux. Je regardai ses photos jusqu’? ce qu’elle sorte de sa chambre habill?e d’une courte robe turquoise scintillante avec un d?collet? en trou de serrure. Elle portait des sandales blanches ? talons hauts qui reprenaient le design du d?collet? de la robe dans le travail du cuir. - Est-ce que c’est celui auquel je pense ? Demandais-je, en montrant une photo d’une Ava plus jeune avec un acteur magnifique et reconnaissable. - Ouais, j’?tais ? l’?cole avec lui ? NYU. Ne le dis ? personne, mais il est gay. Tous ceux qui sont vraiment beaux sont gays. Elle fourra un tube de brillant ? l?vres dans son sac ? main blanc. - Pr?te ? - ?a d?pend de ce pour quoi je dois ?tre pr?te, mais, en g?n?ral, je suis pr?te ? partir. - Tu parles comme une avocate. - En fait, je suis une avocate. - Oh, ?a explique beaucoup de choses, dit-elle sur un ton qui laissait entendre que j’avais beaucoup de choses ? expliquer. - Ouais, ouais, ouais. Mais ? quoi suis-je cens? ?tre pr?te ? - ? chanter. J’?clatai de rire. - Tu m’as surprise. Et non, je ne suis pas pr?te ? ?a. - Tr?s bien. Alors allons au casino. Ils ont un buffet et des boissons gratuites. Il n’y avait rien ? redire, alors j’acquies?ais. Apr?s un arr?t ? mon h?tel qui dura plus longtemps que pr?vu pour pouvoir r?pondre ? des courriels de travail, nous arriv?mes au casino Porcus Marinus. Le casino se trouvait sur la rive sud, ? c?t? d’une station touristique du m?me nom et faisant face ? une plage de sable blanc. La pleine lune se refl?tait sur la surface de l’eau pliss?e par les vagues. De notre c?t? de la route se trouvait un ?norme b?timent ressemblant ? un bunker avec son parking attenant, le plus large de l’?le. Nous mont?mes les marches du bunker et pass?rent sous une ?norme banderole au-dessus de la porte qui annon?ait : « Soir?e karaok? ». - Soir?e karaok? ? Demandais-je ? Ava en plissant les yeux. - C’est le destin, r?torqua-t-elle. Apr?s quelques pas ? l’int?rieur, je me mis imm?diatement ? tousser. La fum?e de cigarettes s’accumulait vers les plafonds hauts du casino. Pour la premi?re fois depuis mon arriv?e ? St Marcos, J’avais l’impression d’un minuit ?ternel. Pas de fen?tres. Beaucoup de bruit, cependant, au-dessus du bruit de fond des tintements des machines ? sous ?clataient les rugissements ? intervalles r?guliers des jeux de tables. Et un autre bruit. En arri?re-plan, j’entendais la voix d’un DJ qui faisait la promotion du karaok? aupr?s de la foule environnante. - Qui sera le prochain ? Est-ce que c’est vous, ma belle ? Ou vous, monsieur, l?-bas dans la chemise que vous avez emprunt?e ? Jimmy Buffett ? Ava me donna une petite pouss?e entre les omoplates en direction de la sc?ne. L’endroit ?tait bond?, et il n’?tait m?me pas encore neuf heures. Nous nous faufil?mes entre des Antillais moroses et quelques touristes titubants. La plupart d’entre eux auraient mieux fait de d?penser leur argent pour un repas d?cent ou des v?tements frais. Une observation ?trange et malvenue me frappa. Le Porcus Marinus n’?tait pas diff?rent du bref aper?u que j’avais eu de l’int?rieur du casino Eldorado ? Shreveport. Je balayai cette id?e de ma t?te. C’?tait diff?rent. Un monde ? part, diff?rent. Il n’y a pas de quoi avoir honte, diff?rent. Je levais le menton un peu plus haut. Lorsque nous arriv?mes ? la sc?ne, Ava ne s’arr?ta pas. Elle passa devant moi pour rejoindre le DJ. - Mlle Ava, annon?a-t-il dans son micro. Quelques personnes dans la foule applaudirent et siffl?rent. - Ce sera quoi ce soir, ma belle ? - Commence avec No Doubt, des Fugees, et... Elle se tourna vers moi. Quoi d’autre ? - Je suis du Texas. Trouve moi du Dixie Chicks et du Miranda Lambert. Le DJ r?pondit : - Miranda quoi ? - Oublie ?a. Dixie Chicks. - C’est les trois gonzesses blondes ? demanda-t-il. J’?tais s?re qu’elles adoreraient cette description, mais elles s’en sortaient mieux que Miranda, de toute fa?on. - Oui. - Ouais, je les ai. Ava jeta son sac ? main dans la cabine du DJ comme un frisbee. Je m’approchais et je posais le mien sur son comptoir. - Est-ce que je peux ? Lui demandais-je. Il avait d?j? charg? le morceau « Underneath It All » de No Doubt et balan?ait la t?te en rythme avec la musique qui sortait des enceintes et du casque qu’il portait. Il ne regardait pas dans ma direction. Ses yeux ?taient riv?s sur Ava. - Et puis merde, marmonnais-je en me dirigeant vers une table devant la sc?ne pour la regarder. - Huh uh, dit-elle dans le microphone. - Am?ne tes fesses sur la sc?ne, ma fille. Son accent s’?tait ?paissi. La petite foule applaudissait maintenant plus fort. Super, me dis-je. Je suis l’imb?cile continentale. Le touriste bouffon. - Je ne vais pas vieillir ici. Continua Ava, une main sur sa hanche. Oh ouais. Je d?ambulai en soupirant jusqu’? la sc?ne dans la robe blanche que je portais depuis le matin, montais les trois marches du destin et me posai ? ses c?t?s, devant la toile de fond noire. Mon profil angulaire contrastait ? c?t? de ses courbes et son allure provocante. Si tu dois faire ?a, fais-le en style, pensais-je en redressant le menton. La foule s’?tait jointe ? Ava pour applaudir et m’encourager. Elle me tendit le micro et pointa vers l’?cran du moniteur. - Chante, ordonna-t-elle. Alors je me mis ? chanter. Puis ce fut son tour, puis ensemble, et c’?tait ?poustouflant. Ma voix nasillarde, capable d’atteindre les notes les plus aigu?s mais pas assez forte, ?tait entrem?l?e et renforc?e par sa voix plus profonde, plus jazz. J’harmonisai avec elle dans les refrains, je l’accompagnai dans les couplets, puis elle me rendait la pareille. J’?tais d?tendue et j’imaginais que mon attitude guind?e s’?tait assouplie, du moins un peu. Je m’amusais. Nous quitt?mes la sc?ne vingt minutes plus tard sous les ovations, m?me si elle ne se composait que de dix soulards et d’une petite dame aux cheveux bleus qui s’?tait perdue en revenant des toilettes. - Maintenant, qui est assez courageux pour prendre la rel?ve ? demanda le DJ. La foule lui r?pondit bruyamment. - Pas moi, pas question, non monsieur. Il posa un disque sur la platine, nous fit un signe de la main et partit en pause. Je m’effondrai sur ma chaise. - Champagne, dis-je en me tournant vers la serveuse qui nous avait suivis jusqu’? notre table. - La m?me chose, dit Ava. Elle griffonna notre commande et s’?loigna, me donnant la meilleure d?monstration que j’ai vue jusqu’? pr?sent de vie au ralenti. - On d?chire, Katie Connell, s’exclama Ava. Et bon sang, tu es encore plus grande sur sc?ne. Je n’avais pas chant? depuis des ann?es, sauf dans la voiture et sous la douche. Je me sentais soudainement ?lectrifi?e. Vivante, d’une mani?re que je n’avais jamais ressentie dans la pratique du droit, ?a c’est s?r. - On arrache, dis-je en gloussant. On arrache. Comme si c’?tait une expression que j’utilisais souvent. - Ouais ma s?ur, dit Ava. Notre serveuse revenait vers nous avec deux boissons sur un plateau. Alors qu’elle passait devant une petite table ronde de l’autre c?t? de la zone de karaok?, une femme tendit la main et l’attrapa par le bras. Sa voix trancha ? travers le bruit de la foule. - O? est ma boisson ? Je l’ai command?e il y a cinq minutes. - Je l’apporte sous peu, dit la serveuse en se d?gageant de l’emprise de la femme. - Je veux mon verre imm?diatement. C’est ridicule. O? est votre patron ? demanda la femme, dont l’accent indiquait qu’elle venait probablement de New-York ou des environs. La serveuse hocha la t?te, sourit et r?pondit : - Oh, oui, madame, je vous l’apporte tout de suite. Elle continua vers nous, encore plus lentement cette fois. Une fois ? notre table, Ava lui dit : - Ouah, elle pense qu’elle est sp?ciale. - Pour de vrai, convint la serveuse. Elle n’est pas pr?s d’?tre servie. Elle posa nos boissons sur la table et s’en alla. - Qu’est-ce que je disais ? Me dit Ava. - Je ralentis, je ralentis... dis-je. Nous b?mes notre champagne servit dans des gobelets en plastique orn?s de dauphins bleus. Je pris une gorg?e et les bulles me chatouill?rent le nez. Je gloussais ? nouveau. Je ne buvais jamais ce truc. Je ne gloussais jamais. - Sant?, dis-je en levant mon verre. Ava et moi trinqu?mes nos gobelets l’un contre l’autre, ?claboussant nos bras de champagne. Un peu plus de gloussements. - Est-ce que cette chaise est occup?e ? demanda une voix grave. Un de nos fans, peut-?tre ? Ses larges ?paules bloquaient le soleil, wahou. Sauf qu’il n’y avait pas de soleil dans le casino. Il bloquait la lumi?re des luminaires de pacotille. Le halo de lumi?re autour de la t?te ? qui appartenait la voix occultait son visage. Ava reconnut la voix, cependant. - Jacoby, assieds-toi, mon ami. Elle tapota le si?ge rembourr? en simili-cuir ? c?t? d’elle. Petite ?le. Darren Jacoby, toujours dans son uniforme de policier, s’assit face ? Ava, et les deux autochtones s’?chang?rent la bise sur la joue. Il avait eu l’air plut?t bien pendant un moment, dans le noir. - Bonjour, Mlle Connell, dit-il par-dessus son ?paule. Il n’avait vraiment pas l’air de vouloir m’appeler Katie. Bon, enfin. - Bonjour, officier Jacoby. - Je ne peux pas rester longtemps, dit-il ? Ava. Je suis en service. Mon quart se termine ? dix heures. Je faisais juste une ronde quand je t’ai vue. Qu’est-ce que tu fais ? - Nous sommes all?es voir le d?tective priv? que vous avez recommand?, dis-je, m’adressant ? son profil. Il se retourna, sans expression. - Eh bien, j’esp?re que ?a se passera bien pour vous. Quand retournez-vous aux ?tats-Unis ? La subtilit? n’?tait pas son fort. - Dans cinq jours, r?pondis-je. - Soyez prudente, alors. Il reporta toute son attention sur Ava. - Tu veux qu’on se voie plus tard ? J’ai Love and Basketball en DVD. Oh, bon sang, encore moins subtile. Il aurait pu aussi bien se placarder sur un panneau d’affichage. - Oh, Jacoby, je ne peux pas. J’ai un rendez-vous. Sa m?choire se contracta et la col?re traversa ses yeux si vite que je faillis ne pas l’apercevoir. - Il y a toujours quelqu’un, n’est-ce pas, Ava ? Sa m?choire se d?tendit. Ses larges ?paules s’affaiss?rent. - Eh bien, une autre fois. - Bien s?r, dit-elle. - Je vais y aller, alors. Ava et lui se firent ? nouveau la bise, il se retourna, me salua de la t?te, et s’?loigna avec la d?marche d’un grizzly. Il ne m’aimait pas beaucoup, mais j’avais quand m?me de la peine pour lui. Ava avait l’air triste. - Il a toujours ?t? comme ?a. Il n’abandonne pas facilement. Elle sortit son t?l?phone et dit : Je ferais mieux de v?rifier mon rendez-vous. Quelques clics plus tard, elle continua. - Guy a r?serv? une chambre ici, sur la colline. Une suite. Ooo l? l?. - Est-ce que tu vas me le pr?senter ? Demandais-je. - Non. Il est tr?s discret ? notre sujet. Elle pointa le quatri?me doigt de sa main gauche et chuchota le mot « mari? ». - Il ne me contacte m?me pas lui-m?me. C’est comme si j’avais une affaire avec son assistant, Eduardo. - Je suis d?sol?e, dis-je, parce que je ne savais pas quoi dire d’autre. ?a me semblait assez arrogant et grossier. - Oh, ce n’est pas un probl?me, dit Ava en chassant le probl?me imaginaire de la main. - C’est un s?nateur. Les gens le connaissent. C’est une petite ?le. J’avais cru remarquer. Je pensais ? ce que je ressentais quand Nick m’ignorait en public. Et je n’avais m?me pas « une affaire » avec lui. Jacoby n’?tait pas non plus avec Ava, mais cela ne semblait pas l’emp?cher d’?prouver une certaine aigreur ? propos de son rendez-vous. - Mais ?a ne te d?range pas ? Ava pin?a les l?vres. - Je ne suis pas amoureuse de lui, Katie. Il est sympa et il essaye de m’obtenir un r?le dans une ?mission pilote de t?l?vision qui se passera ici. Nous satisfaisons nos int?r?ts mutuels. Je pr?f?re les riches aux puissants, de toute fa?on, et il n’est pas riche. Elle prit une autre gorg?e de champagne. Je coin?ai une m?che de cheveux derri?re mon oreille. Un pilote pour une ?mission de t?l? ? Son gars s?nateur avait d? ?tre mon compagnon de beuverie pendant mon vol. Je d?cidai de ne pas en parler, puisqu’il m’avait dragu? sans rel?che. H? puis, si leur arrangement ne d?rangeait pas Ava, je n’allais pas m’en faire. Je serais peut-?tre plus heureuse si j’?tais aussi d?tach?e qu’elle. Peut-?tre. Mais probablement pas. - Alors, qui est le mauvais gars, de toute fa?on ? demanda-t-elle. - Quoi ? J’?tais embrouill?e, pensant pendant un moment que nous parlions encore de son type. - Celui pour lequel tu n’es pas cens?e mourir d’amour. Ah, lui. Je fis signe ? la serveuse d’apporter plus de champagne. Puis, prudemment, je me frayai un chemin dans l’histoire, en essayant de ne pas buter sur des mines qui feraient exploser ma fragile tr?ve sentimentale. - Tu es mieux sans lui. D?clara Ava. Je vais m’occuper de toi et te trouver un homme pour t’occuper l’esprit cette semaine. - Pas d’hommes, Ava. - Oh Alors t’es pinc?e ? On dirait que tu ne fais pas trop d’efforts pour le fuir. - Je ne suis pas pinc?e. Je l’?vite. Vraiment. Ava n’avait pas l’air trop convaincue. - Si tu le dis, Katie. Si tu le dis. Êîíåö îçíàêîìèòåëüíîãî ôðàãìåíòà. Òåêñò ïðåäîñòàâëåí ÎÎÎ «ËèòÐåñ». Ïðî÷èòàéòå ýòó êíèãó öåëèêîì, êóïèâ ïîëíóþ ëåãàëüíóþ âåðñèþ (https://www.litres.ru/pages/biblio_book/?art=67033208&lfrom=688855901) íà ËèòÐåñ. Áåçîïàñíî îïëàòèòü êíèãó ìîæíî áàíêîâñêîé êàðòîé Visa, MasterCard, Maestro, ñî ñ÷åòà ìîáèëüíîãî òåëåôîíà, ñ ïëàòåæíîãî òåðìèíàëà, â ñàëîíå ÌÒÑ èëè Ñâÿçíîé, ÷åðåç PayPal, WebMoney, ßíäåêñ.Äåíüãè, QIWI Êîøåëåê, áîíóñíûìè êàðòàìè èëè äðóãèì óäîáíûì Âàì ñïîñîáîì.
Íàø ëèòåðàòóðíûé æóðíàë Ëó÷øåå ìåñòî äëÿ ðàçìåùåíèÿ ñâîèõ ïðîèçâåäåíèé ìîëîäûìè àâòîðàìè, ïîýòàìè; äëÿ ðåàëèçàöèè ñâîèõ òâîð÷åñêèõ èäåé è äëÿ òîãî, ÷òîáû âàøè ïðîèçâåäåíèÿ ñòàëè ïîïóëÿðíûìè è ÷èòàåìûìè. Åñëè âû, íåèçâåñòíûé ñîâðåìåííûé ïîýò èëè çàèíòåðåñîâàííûé ÷èòàòåëü - Âàñ æä¸ò íàø ëèòåðàòóðíûé æóðíàë.