Êàêîå, â ñóùíîñòè, íåëåïîå çàíÿòèå ïèñàòü ñòèõè: ......................è "ãëàç ëóíû", è "ñîëíöà äèñê" êàê ìèð ñòàðû. ............................Äóøè øèðîêèå îáúÿòèÿ òîëïå íàâñòðå÷ó ðàñïàõíóòü... - ................................................ïîäîáíûé ðèñê ê ÷åìó òåáå? - ........................Ãëóõîé ñòåíîé - íåïîíèìàíèå; ðàçäàâëåí òÿæåñòüþ

L’alibi Id?al

L’alibi Id?al Blake Pierce Un thriller psychologique avec Jessie Hunt #8 «Dans ce chef-d’?uvre de suspense et de myst?re, Blake Pierce a magnifiquement d?velopp? ses personnages en les dotant d’un versant psychologique si bien d?crit que nous avons la sensation d’?tre ? l’int?rieur de leur esprit, de suivre leurs angoisses et de les encourager afin qu’ils r?ussissent. Plein de rebondissements, ce livre vous tiendra en haleine jusqu’? la derni?re page.». –Books and Movie Reviews, Roberto Mattos (? propos de Sans Laisser de Traces). L’ALIBI ID?AL est le huiti?me tome d’une nouvelle s?rie de suspense psychologique par l’auteur ? succ?s Blake Pierce qui commence par LA FEMME ID?ALE, best-seller n°1 disponible en t?l?chargement gratuit qui a obtenu presque 500 critiques ? cinq ?toiles… Une ?pouse et m?re de banlieue ?chappe ? l’emprise d’un tueur en s?rie psychotique, mais finit assassin?e quelques semaines plus tard… ?tait-ce une co?ncidence? Ou existe-t-il un tueur en s?rie qui joue au chat et ? la souris comme l’?tre malsain qu’il est … avant de tuer? Est-ce que la c?l?bre agente du FBI, Jessie Hunt, 29 ans, peut faire abstraction de ses traumatismes personnels et se mettre ? la place de ce tueur ? Peut-elle sauver la prochaine victime, et peut-?tre elle-m?me, avant qu’il ne soit trop tard? Thriller psychologique palpitant aux personnages inoubliables et au suspense haletant, L’ALIBI ID?AL est le tome 8 d’une nouvelle s?rie fascinante qui vous tiendra ?veill? tard la nuit… Le tome 9 de la s?rie Jessie Hunt, LA VOISINE ID?ALE, est maintenant disponible lui aussi. Blake Pierce L’ALIBI ID?AL l’alibi id?al (roman de suspense psychologique avec Jessie Hunt, tome 8) b l a k e   p i e r c e Blake Pierce Blake Pierce est l’auteur de la s?rie ? succ?s myst?re RILEY PAIGE, qui comprend dix-sept volumes (pour l’instant). Black Pierce est ?galement l’auteur de la s?rie myst?re MACKENZIE WHITE, comprenant quatorze volumes (pour l’instant) ; de la s?rie myst?re AVERY BLACK, comprenant six volumes ; et de la s?rie myst?re KERI LOCKE, comprenant cinq volumes ; de la s?rie myst?re LES ORIGINES DE RILEY PAIGE, comprenant six volumes (pour l’instant), de la s?rie myst?re KATE WISE comprenant sept volumes (pour l’instant) et de la s?rie de myst?re et suspense psychologique CHLOE FINE, comprenant six volumes (pour l’instant) ; de la s?rie de suspense psychologique JESSE HUNT, comprenant sept volumes (pour l’instant), ; de la s?rie de myst?re et suspense psychologique LA FILLE AU PAIR, comprenant deux volumes (pour l’instant) ; et de la s?rie de myst?re ZO? PRIME, comprenant trois volumes (pour l’instant) ; de la nouvelle s?rie de myst?re AD?LE SHARP et de la nouvelle s?rie myst?re VOYAGE EUROP?EN. Lecteur avide et admirateur de longue date des genres myst?re et thriller, Blake aimerait conna?tre votre avis. N’h?sitez pas ? consulter son site www.blakepierceauthor.com afin d’en apprendre davantage et de rester en contact. Copyright © 2020 by Blake Pierce. Tous droits r?serv?s. Sauf autorisation selon Copyright Act de 1976 des U.S.A., cette publication ne peut ?tre reproduite, distribu?e ou transmise par quelque moyen que ce soit, stock?e sur une base de donn?es ou stockage de donn?es sans permission pr?alable de l'auteur. Cet ebook est destin? ? un usage strictement personnel. Cet ebook ne peut ?tre vendu ou c?d? ? des tiers. Vous souhaitez partager ce livre avec un tiers, nous vous remercions d'en acheter un exemplaire. Vous lisez ce livre sans l'avoir achet?, ce livre n'a pas ?t? achet? pour votre propre utilisation, retournez-le et acheter votre propre exemplaire. Merci de respecter le dur labeur de cet auteur. Il s'agit d'une ?uvre de fiction. Les noms, personnages, soci?t?s, organisations, lieux, ?v?nements ou incidents sont issus de l'imagination de l'auteur et/ou utilis?s en tant que fiction. Toute ressemblance avec des personnes actuelles, vivantes ou d?c?d?es, serait purement fortuite. Photo de couverture Copyright Abie Aguiar sous licence Shutterstock.com. LIVRES PAR BLAKE PIERCE LES MYST?RES DE AD?LE SHARP LAISS? POUR MORT (Volume 1) CONDAMN? ? FUIR (Volume 2) CONDAMN? ? SE CACHER (Volume 3) LA FILLE AU PAIR PRESQUE DISPARUE (Livre 1) PRESQUE PERDUE (Livre 2) PRESQUE MORTE (Livre 3) LES MYST?RES DE ZOE PRIME LE VISAGE DE LA MORT (Tome 1) LE VISAGE DU MEURTRE (Tome 2) LE VISAGE DE LA PEUR (Tome 3) S?RIE SUSPENSE PSYCHOLOGIQUE JESSIE HUNT LA FEMME PARFAITE (Volume 1) LE QUARTIER ID?AL (Volume 2) LA MAISON ID?ALE (Volume 3) LE SOURIRE ID?ALE (Volume 4) LE MENSONGE ID?ALE (Volume 5) LE LOOK ID?AL (Volume 6) LA LIAISON ID?ALE (Volume 7) L’ALIBI ID?AL (Volume 8) S?RIE SUSPENSE PSYCHOLOGIQUE CHLOE FINE LA MAISON D’? C?T? (Volume 1) LE MENSONGE D’UN VOISIN (Volume 2) VOIE SANS ISSUE (Volume 3) LE VOISIN SILENCIEUX (Volume 4) DE RETOUR ? LA MAISON (Volume 5) VITRES TEINT?ES (Volume 6) S?RIE MYST?RE KATE WISE SI ELLE SAVAIT (Volume 1) SI ELLE VOYAIT (Volume 2) SI ELLE COURAIT (Volume 3) SI ELLE SE CACHAIT (Volume 4) SI ELLE S’ENFUYAIT (Volume 5) SI ELLE CRAIGNAIT (Volume 6) SI ELLE ENTENDAIT (Volume 7) LES ORIGINES DE RILEY PAIGE SOUS SURVEILLANCE (Tome 1) ATTENDRE (Tome 2) PIEGE MORTEL (Tome 3) ESCAPADE MEURTRIERE (Tome 4) LA TRAQUE (Tome 5) LES ENQU?TES DE RILEY PAIGE SANS LAISSER DE TRACES (Tome 1) R?ACTION EN CHA?NE (Tome 2) LA QUEUE ENTRE LES JAMBES (Tome 3) LES PENDULES ? L’HEURE (Tome 4) QUI VA ? LA CHASSE (Tome 5) ? VOTRE SANT? (Tome 6) DE SAC ET DE CORDE (Tome 7) UN PLAT QUI SE MANGE FROID (Tome 8) SANS COUP F?RIR (Tome 9) ? TOUT JAMAIS (Tome 10) LE GRAIN DE SABLE (Tome 11) LE TRAIN EN MARCHE (Tome 12) PI?G?E (Tome 13) LE R?VEIL (Tome 14) BANNI (Tome 15) MANQUE (Tome 16) CHOISI (Tome 17) UNE NOUVELLE DE LA S?RIE RILEY PAIGE R?SOLU S?RIE MYST?RE MACKENZIE WHITE AVANT QU’IL NE TUE (Volume 1) AVANT QU’IL NE VOIE (Volume 2) AVANT QU’IL NE CONVOITE (Volume 3) AVANT QU’IL NE PRENNE (Volume 4) AVANT QU’IL N’AIT BESOIN (Volume 5) AVANT QU’IL NE RESSENTE (Volume 6) AVANT QU’IL NE P?CHE (Volume 7) AVANT QU’IL NE CHASSE (Volume 8) AVANT QU’IL NE TRAQUE (Volume 9) AVANT QU’IL NE LANGUISSE (Volume 10) AVANT QU’IL NE FAILLISSE (Volume 11) AVANT QU’IL NE JALOUSE (Volume 12) AVANT QU’IL NE HARC?LE (Volume 13) AVANT QU’IL NE BLESSE (Volume 14) LES ENQU?TES D’AVERY BLACK RAISON DE TUER (Tome 1) RAISON DE COURIR (Tome2) RAISON DE SE CACHER (Tome 3) RAISON DE CRAINDRE (Tome 4) RAISON DE SAUVER (Tome 5) RAISON DE REDOUTER (Tome 6) LES ENQUETES DE KERI LOCKE UN MAUVAIS PRESSENTIMENT (Tome 1) DE MAUVAIS AUGURE (Tome 2) L’OMBRE DU MAL (Tome 3) JEUX MACABRES (Tome 4) LUEUR D’ESPOIR (Tome 5) CHAPITRE PREMIER Accroupie, serr?e et roul?e en boule, Caroline Gidley utilisait l’int?rieur de ses cuisses pour se r?chauffer. M?me si l’on ?tait ? la fin du printemps, il faisait froid la nuit, surtout dans les circonstances o? elle se trouvait. Il ?tait fou qu’elle puisse m?me les consid?rer comme de simples « circonstances » mais, apr?s quatre jours pass?s attach?e dans une cage pour chiens uniquement v?tue de son soutien-gorge et de sa culotte et avec seulement une fine couverture pour se r?chauffer, cette situation ?tait devenue sa nouvelle normalit?, d’une fa?on ou d’une autre. Tout avait commenc? de mani?re tr?s banale. En sortant du travail, elle s’?tait dirig?e vers sa voiture quand un homme lui avait demand? la direction de l’autoroute. Comme ils avaient ?t? dans un parking public tr?s fr?quent? et qu’il avait paru tr?s inoffensif et h?sitant quand il s’?tait approch? d’elle, elle ne s’?tait gu?re m?fi?e. Elle avait commenc? ? r?pondre en se tournant et en tendant le bras vers l’est. Avant m?me qu’elle ait compris ce qui se passait, il lui avait bondi dessus et plac? un tissu ?pais sur la bouche et le nez. En perdant conscience, elle l’avait vu ouvrir le coffre de la voiture gar?e ? c?t? de la sienne. Quand il l’y avait pouss?e avant de le refermer bruyamment, elle avait eu une derni?re id?e avant de s’endormir. Il s’est gar? juste ? c?t? de moi. Il a tout pr?vu. Quand elle s’?tait r?veill?e, elle s’?tait retrouv?e dans la cage, v?tue de seulement quelques sous-v?tements, les mains attach?es devant par une corde ?lastique fine et serr?e. Elle avait examin? ses alentours et rapidement d?termin? qu’elle ?tait d?tenue dans une sorte de b?timent d?labr?. Des fils m?talliques pendaient librement du plafond et quelques fen?tres ?taient cass?es. Il n’y avait pas d’?clairage int?rieur et, comme le soleil semblait ?tre en train de se coucher, sa capture devait remonter ? plusieurs heures. Presque comme si elle l’avait appel?, l’homme ?tait entr? par une porte ?paisse en m?tal. Son c?ur avait commenc? ? battre la chamade de mani?re presque audible. Elle avait senti l’odeur de sa propre peur. Elle avait essay? de ne plus y penser et de se concentrer sur son ravisseur. Quand il s’?tait approch?, elle avait remarqu? plusieurs choses qui lui avaient ?chapp? lors de cette premi?re rencontre br?ve sur le parking. Il portait visiblement une perruque. Ses cheveux fonc?s ?pais faisaient penser Caroline ? un musicien de heavy metal des ann?es 1980. Sa barbe fournie ?tait visiblement fausse, elle aussi, et le gros nez en mastic qu’il portait ne l’?tait pas moins. Elle avait m?me dout? qu’il ait r?ellement besoin des lunettes teint?es ? monture ?paisse qu’il avait sur le nez. Quand il s’?tait approch?, il avait souri et elle avait vu qu’il portait ?galement des fausses dents. Son d?guisement ?tait tellement grotesque qu’elle avait soup?onn? cet homme d’avoir voulu ?tre ridicule. – Bonjour, Caroline, avait-il dit avec un l?ger z?zaiement dont elle avait attribu? la cause aux fausses dents. C’est la seule fois que tu me verras. Dor?navant, tu auras les yeux band?s. Je ne t’ai pas b?illonn?e, mais je le ferai si n?cessaire. Si tu essaies de retirer ton bandeau ? quelque moment que ce soit, je t’attacherai les mains derri?re le dos au lieu de devant. Si tu essaies de t’?vader, il faudra que je te … fasse du mal. Je pr?f?rerais l’?viter. – Pourquoi faites-vous ?a ? avait-elle demand? en essayant que sa voix ne trahisse pas sa terreur. – Tu ne comprendrais pas. Les femmes comme toi, ?a ne comprend jamais. Alors, il avait sorti quelque chose de derri?re son dos. C’?tait une sorte de pistolet ? fl?ches. – Je vous en supplie, avait-elle suppli?, la voix cass?e. Rien ne vous force ? faire ?a. – Souviens-toi des r?gles, lui avait-il dit impassiblement. Si tu les respectes, tout ira beaucoup mieux pour toi. Sans prononcer un autre mot, il avait tir?. Caroline avait senti une forte piq?re ? la cuisse gauche. Alors, tout lui avait paru lourd. Ses yeux s’?taient ferm?s et le monde ?tait redevenu noir. Quand elle s’?tait r?veill?e la fois suivante, elle avait eu les yeux band?s, comme il l’avait promis. La vague initiale de panique qu’elle avait ressentie pendant ces premi?res heures avait fini par c?der la place ? l’espoir quand elle avait tent? de rassembler toutes les informations qu’elle avait pu. Elle avait mesur? le temps en se basant sur les moments o? il lui avait apport? ? manger, sur la chaleur relative qui r?gnait dans le b?timent et sur les faibles ?clats de lumi?re qui passaient par le bandeau. ? intervalles r?guliers, il revenait. Ses chaussures r?sonnaient sur le sol en b?ton de la pi?ce vide. Malgr? tous les efforts de Caroline, ce son lui provoquait de l’hyperventilation. Elle l’entendait d?verrouiller le cadenas de la cage, faire glisser les barres de confinement, ouvrir la chati?re en m?tal et poser deux bols par terre. Parce qu’elle avait les poignets attach?s, Caroline ?tait r?duite ? laper la nourriture et l’eau comme un vrai chien. Il ne la laissait jamais aller vraiment aux toilettes. Pour faire ses besoins, elle devait retirer sa culotte et aller dans un coin de la cage. Parfois, il entrait dans la cage et les aspergeait, elle la cage, avec un jet d’eau, puis il repartait. Apr?s le premier jour, elle avait compris qu’il valait mieux qu’elle enfonce ses sous-v?tements et sa couverture dans les trous de la cage au-dessus d’elle pour qu’ils se mouillent moins quand le jet d’eau la frapperait. La routine devint si r?guli?re que le moindre changement l’inqui?tait. Lors d’un repas, il ne lui apporta qu’un bol et dit que, comme c’?tait du rago?t, ?a satisferait tous ses besoins. Une autre fois, elle se r?veilla, certaine qu’on ?tait le matin, mais il n’?tait venu qu’? midi et elle avait craint qu’il ne l’ait compl?tement abandonn?e. Parfois, elle se demandait si les autres l’avaient abandonn?e, eux aussi. Est-ce que ses amis et sa famille avaient remarqu? sa disparition ? Si oui, avaient-ils averti la police ? Est-ce que quelqu’un la recherchait ? Cependant, ce fut par cette nuit fra?che de fin de printemps, alors qu’elle essayait d’emp?cher sa pitoyable couverture de glisser sur son dos en s’appuyant sur la paroi de la cage et qu’elle appuyait l’int?rieur de ses cuisses contre ses bras pour arr?ter de trembler, qu’elle remarqua un autre changement dans la routine. Quand l’homme la quitta apr?s avoir emport? les restes de l’eau et des haricots noirs en bo?te qui avaient constitu? son d?ner, elle ne l’entendit pas verrouiller la cage avant de partir comme d’habitude. Il remit les barres de confinement en place mais re?ut un appel sur son t?l?phone portable juste apr?s ?a. En s’?loignant pour y r?pondre, il laissa la porte de la cage d?verrouill?e. Caroline attendit en pensant qu’il allait revenir terminer ce qu’il avait commenc? mais, au bout de ce qu’elle estima ?tre une heure, il lui parut clair qu’il ne le ferait pas. Comme elle ?tait certaine qu’il la filmait avec une cam?ra de surveillance, ce fut avec une prudence extr?me qu’elle baissa tr?s l?g?rement son bandeau pour jeter un coup d’?il. Il faisait sombre. La seule lumi?re venait de la demi-lune dont les rayons passaient par les fen?tres cass?es. Dans l’obscurit?, elle ne voyait pas d’?quipement de surveillance, mais cela ne signifiait pas qu’il n’y en avait pas. Aussi discr?tement que possible, elle observa l’endroit de la barre de confinement d’en haut o? le cadenas aurait d? ?tre. Il s’y trouvait mais, comme elle l’avait suppos?, il n’avait pas ?t? verrouill? et pendait ? la barre. Pour autant qu’elle puisse dire, pour sortir de la cage, elle n’aurait qu’? d?gager le cadenas et faire glisser la barre de c?t?. Caroline resta assise en silence et se demanda comment elle allait proc?der. Si elle devait s’?vader un jour, ce moment ?tait le meilleur. Vu la fa?on dont s’?taient d?roul?es ses nuits pr?c?dentes, l’homme ne reviendrait pas avant le matin, au plus t?t. Cela lui laissait des heures pour essayer de s’?loigner et, esp?rait-elle, trouver de l’aide. Si elle voulait passer ? l’action, c’?tait maintenant qu’il fallait qu’elle le fasse. Elle pensa au sort qu’elle subirait si elle ne faisait rien. L’homme qui la d?tenait comptait clairement la tuer. Ce n’?tait qu’une affaire de temps. Combien de jours la garderait-il encore dans une cage, la nourrirait-il avec une gamelle de chien et la laverait-il au jet d’eau avant de perdre patience et de passer ? une chose plus excitante ? Allait-elle vraiment rester roul?e en boule en attendant que cela se produise ? Avant m?me qu’elle ait consciemment pris sa d?cision, elle plongea les doigts entre les fils de la cage pour chien et s’effor?a d’atteindre et de retirer le cadenas. Elle avait les doigts engourdis parce qu’elle ne les avait pas utilis?s depuis longtemps et ? cause des cordes ?lastiques qui lui serraient les poignets, mais elle finit par attraper et retirer le cadenas. Alors, elle saisit la barre de confinement du haut et la fit glisser vers la droite. Elle fit de m?me avec celle du bas. Alors, elle poussa. La porte s’ouvrit en grin?ant. Pendant une seconde, elle resta assise l?, fig?e, terrifi?e, puis elle sortit de la cage. Elle se tint debout pour la premi?re fois en plusieurs jours et ce fut douloureux et difficile. Caroline poussa sur le sol avec les paumes engourdies de ses mains. Quand elle se leva en titubant, elle sentit les muscles de ses cuisses et de ses mollets se figer. Il lui fallut presque une minute avant qu’elle ait assez confiance en elle-m?me pour faire un pas. Quand elle fut presque s?re qu’elle n’allait pas s’effondrer, elle se dirigea vers la porte par laquelle elle avait vu l’homme entrer lors de la premi?re nuit. Elle poussa fort, mais la porte ?tait verrouill?e de l’ext?rieur. Elle s’enleva compl?tement le bandeau et regarda autour d’elle. Il n’y avait aucune autre porte en vue. Alors, elle aper?ut une des fen?tres cass?es. Elle ?tait trop haute pour qu’elle l’atteigne en grimpant et elle ne pouvait pas courir puis bondir. Elle inspecta la pi?ce ? la recherche d’une chaise, mais il n’y en avait aucune. Par contre, il y avait la cage. Avec le peu de force qu’il lui restait, Caroline la tra?na et la pla?a juste sous la fen?tre. Il y avait des ?clats de verre le long du rebord de la fen?tre et elle utilisa ses coudes pour les enlever. Alors, elle grimpa sur la cage en priant pour qu’elle supporte son poids. Elle tint bon. Incapable de s’appuyer sur ses mains attach?es, elle se pencha par la fen?tre en posant les avant-bras sur le rebord. Quand elle appuya, elle sentit quelques ?clats de verre restants s’enfoncer dans sa peau. Elle essaya de les ignorer et pr?f?ra se demander si le sol ?tait loin sous elle. Dans le clair de lune blafard, elle ?valua la distance ? environ un m?tre cinquante. Elle n’avait pas grand choix. Donc, elle appuya ses avant-bras sur le bord et poussa vigoureusement contre la cage avec ses pieds. La cage glissa et s’?carta quand Caroline bougea. Elle tomba. Son ventre et ses hanches heurt?rent le rebord et les morceaux de verre tranchants comme des lames de rasoir qui s’y ?taient accumul?s. Heureusement, la plus grande partie de son poids avait atterri sur la partie ext?rieure du bord et elle chuta lentement dehors la t?te la premi?re. Elle atterrit sur son ?paule droite avant de tomber sur le dos avec un bruit sourd. Ignorant la douleur violente, elle se releva et s’?loigna du b?timent en chancelant, ? la recherche d’une voie susceptible de ressembler ? une route. Apr?s plusieurs minutes de recherche, elle en trouva une par accident quand ses pieds nus pass?rent de l’herbe ? la terre et au gravier. Elle baissa les yeux, ? peine capable de distinguer la diff?rence de couleur entre les deux surfaces. Cependant, elle fit de son mieux pour suivre la route, utilisant ses pieds plus que ses yeux pour se guider et essayant de r?sister ? la panique. Quand elle passa un coin ? c?t? d’un flanc de coteau, elle se demanda o? son ravisseur avait pu l’emmener. En effet, elle ne voyait aucun ?clairage urbain. Soudain, elle en vit. D?s qu’elle eut quitt? la colline, les lumi?res ?clatantes du centre-ville de Los Angeles l’illumin?rent comme un phare de la taille d’une ville qui lui offrait ? la fois un signal et du r?confort. Elle avan?a, ?blouie par ces lumi?res. Caroline habitait ? West Hollywood, o? il ne faisait presque jamais noir et o? elle ne le remarquait que rarement quand ?a arrivait. ? pr?sent, l’apparition soudaine de la ville lui donnait l’impression qu’elle venait de tomber sur une oasis apr?s avoir v?cu dans un d?sert. Elle se rapprocha d’un pas, laissant la terre derri?re elle et sentant ? nouveau l’herbe humide sous ses pieds. Cependant, elle sentit soudain le sol se d?rober sous elle. Elle se rendit compte trop tard qu’elle ?tait all?e au bord d’un autre flanc de coteau et qu’il s’effondrait sous ses pieds. Elle se retourna quand son corps tomba et essaya de tendre les bras pour attraper une racine ou une branche mais, avec les cordes qui lui liaient les poignets, c’?tait impossible. Soudain, elle d?vala le coteau, roulant sur elle-m?me et rebondissant sur des rochers et des arbres. Elle essaya de se mettre en boule mais ne put gu?re que grogner. ? un moment, sa jambe droite heurta un tronc d’arbre et prit un angle peu rassurant. Caroline ne sut pas combien de temps elle tomba mais, quand elle s’arr?ta finalement, seule une douleur insoutenable lui garantit qu’elle ?tait encore en vie. Elle ouvrit les yeux en prenant conscience du fait qu’elle les avait gard?s ferm?s pendant tout le temps qu’elle avait d?val? la colline. Il lui fallut plusieurs secondes pour s’orienter. Elle se rendit compte qu’elle ?tait sur le dos et qu’elle regardait vers le haut de la colline d’o? elle venait. Elle estima qu’elle avait d? tomber d’une falaise abrupte couverte de rochers, de buissons et d’arbres morts qui devait facilement mesurer vingt-deux m?tres de hauteur. Elle pencha la t?te ? gauche et vit une chose qui, malgr? toute la douleur qu’elle ressentait, la remplit de joie : des phares. Elle se for?a ? rouler sur le ventre. Elle savait qu’elle ne pourrait jamais appuyer sur sa jambe droite et encore moins se tenir debout. Donc, elle rampa, enfon?ant les ongles dans la terre qui se trouvait devant elle et poussant avec sa jambe encore fonctionnelle. Elle r?ussit ? emmener son corps ? moiti? sur la route, o? elle roula sur le dos et agita d?sesp?r?ment ses bras attach?s au-dessus de sa t?te. Les phares arr?t?rent de bouger et elle entendit s’arr?ter le moteur du v?hicule. Quand quelqu’un sortit du c?t? conducteur, Caroline vit des bottes avancer vers elle et eut une crainte aussi subite qu’horrible. Et si c’?tait l’homme qui m’avait captur?e ? Un moment plus tard, ses craintes disparurent quand la personne s’agenouilla et qu’elle vit que c’?tait une femme qui portait ce qui ressemblait ? un uniforme d’agent des parcs. – Qu’est-ce que … ? dit la femme avant de sortir sa radio et de parler dedans en toute h?te. Poste principal, ici le Ranger Kelso. J’ai une urgence sur Vista Del Valley Drive dans le secteur six. Il y a une femme bless?e allong?e sur la route. Sa jambe droite comporte une fracture grave et ses poignets sont li?s. Appelez les urgences. Je crois qu’elle a ?t? enlev?e, comme les autres. CHAPITRE DEUX – Pourquoi est-ce que ?a sent le br?l? ? Hannah posa la question calmement, mais Jessie entendit son ton accusateur. Si quelque chose br?lait, ce ne pouvait ?tre que pour une seule raison : Jessie essayait de faire de la p?tisserie et, une fois de plus, c’?tait un d?sastre. Jessie se leva en toute h?te de la table de la cuisine, o? ils jouaient ? Trivial Pursuit, et se rua vers le four. Quand elle en ouvrit ?nergiquement la porte, elle d?couvrit que ses scones ? la canneberge et ? l’orange avaient un air distinctement noir?tre et br?l?. Elle se d?p?cha de se mettre une manique et sortit ses scones, qu’elle laissa tomber sans m?nagement sur le haut de la cuisini?re. Des petits ruisseaux de fum?e s’?levaient du scone le plus carbonis?, le petit qui avait ?t? au fond. Jessie entendit Ryan glousser ? la table. Hannah avait un air d??u, comme si elle ?tait la tutrice officielle et qu’elle tentait de ne pas gronder sa prot?g?e en difficult?. Bien s?r, comme les choses se passaient habituellement dans l’autre sens, l’expression de Hannah contenait aussi une touche de satisfaction. – Ne te moque pas ! dit Jessie, sur la d?fensive. – Jamais je ne ferais une chose pareille, r?pondit Hannah, pr?tendument offens?e. – On pourrait peut-?tre s’en servir comme palets de hockey, sugg?ra Ryan. – Pourquoi pas comme triangles de jet ? proposa Hannah avec beaucoup trop d’enthousiasme. Tu sais, comme des ?toiles de jet chinoises, mais avec des glucides en plus. Jessie essaya de ne pas trop s’?nerver des taquineries bon enfant de sa demi-s?ur. Elle baissa les yeux vers les restes fumants de ses efforts et soupira. – Je crois qu’on va devoir sortir ta derni?re fourn?e du cong?lateur, dit-elle avec r?signation. – Pas de probl?me, dit Hannah, mais fais vite. Je vais gagner cette partie. Je n’en suis qu’? deux camemberts. – Donne-moi une minute, dit Jessie. Elle fouilla dans le cong?lateur, o? elle trouva le r?cipient qui contenait les scones. Elle les mit dans le mini-four et attendit qu’ils se r?chauffent pour ?viter de les br?ler eux aussi. – Je ne comprends pas, dit Ryan pour la taquiner. Tu es la deuxi?me profileuse criminelle de Californie du Sud en termes de c?l?brit?, et pourtant, tu as l’air incapable de cuire quoi que ce soit sans four ? micro-ondes. Comment est-ce possible ? – J’ai mes priorit?s, Hernandez, r?pondit-elle simplement. Entre deux tueurs en s?rie, il faut que je me d?brouille avec la politique de la section, que je reste sexy pour toi … – Beurk, coupa Hannah. – … et que j’?duque une adolescente qui croit tout savoir, poursuivit-elle. – Si tu tiens ? le savoir, je n’ai pas besoin qu’on m’?duque, r?pliqua Hannah en souriant. Jessie persista. – Quelque part au milieu de tout ?a, j’ai oubli? d’apprendre ? faire de la p?tisserie. Fais-moi un proc?s. – Est-ce pour cela que ton ex-mari a essay? de te tuer ? demanda Hannah en faisant son innocente. – Non, interrompit Ryan. C’?tait ? cause de son pain de viande. C’est un crime contre l’humanit?. Jessie essaya de ne pas sourire. – Je n’appr?cie pas que vous vous liguiez contre moi. De plus, vous devriez savoir qu’aucun de ceux qui ont tent? de me tuer n’a dit que c’?tait ? cause de ma cuisine. – C’est parce qu’ils ont ?t? polis, dit Hannah. Jessie allait r?pondre quand le mini-four sonna. Elle sortit les scones et les mit sur des assiettes, qu’elle tendit aux deux autres. Alors, elle s’assit et prit une bouch?e d’un des siens. – Mmm, murmura-t-elle doucement malgr? elle-m?me. – Pas trop br?l?s ? demanda Hannah. – Je voudrais ?tre sarcastique, mais je n’y arrive pas, marmonna Jessie, la bouche pleine. Comment fais-tu pour les r?ussir autant ? Hannah fit un grand sourire enti?rement d?pourvu de son cynisme habituel. Jessie ne put s’emp?cher de remarquer qu’elle avait l’air tr?s joyeuse ces jours-ci. Ses yeux verts, qui ?taient en g?n?ral ternes et indiff?rents, ?tincelaient. D’une fa?on ou d’une autre, ses cheveux blonds roux avaient l’air plus brillants que d’habitude. Elle semblait m?me plus grande, ces jours-ci, et elle marchait la t?te plus haute. ? un m?tre soixante-quinze, elle ne mesurait que deux centim?tres de moins que Jessie mais, avec sa posture r?cemment am?lior?e et son corps d’athl?te, elle aurait pu ?tre la doublure de sa s?ur. – Le secret tient en un seul mot : le beurre. En fait, en plusieurs mots : beaucoup de beurre. Avant que Jessie ait pu prendre une autre bouch?e, son t?l?phone sonna. Elle baissa les yeux et se rendit compte que c’?tait un appel qu’elle avait pr?vu. Est-il d?j? vingt-et-une heures ? Elle s’?tait tellement amus?e qu’elle n’avait pas vu passer le temps. – C’est qui ? demanda Ryan. – C’est le plus c?l?bre des profileurs criminels de Californie du Sud. Il voulait mon opinion sur une affaire, mentit-elle. Donnez-moi quinze minutes. – OK, dit Hannah, mais, apr?s ?a, on passera ton tour. – Compris, dit Jessie en emportant le scone et son t?l?phone dans la chambre. Elle essayait de garder un ton positif, mais m?me les scones d?licieux de Hannah n’arrivaient pas ? d?m?ler le n?ud que venait de devenir son estomac. Elle allait d?crocher, mais elle envisagea de faire autrement. Elle ne voulait pas interrompre cette soir?e quasi-parfaite pour parler de sujets sinistres et d?cida de ne pas le faire. Elle laissa r?pondre la messagerie et envoya un SMS. Je passe une excellente soir?e avec Hannah et je ne veux pas l’interrompre. Pourrons-nous en parler demain ? Plusieurs secondes plus tard, elle re?ut une r?ponse. Elle entendit presque sa brusquerie. On se voit en personne dans la salle de repos du poste ? 7 h pile. Elle r?pondit « OK » et n’en dit pas plus. Elle savait que ce gars aimait arriver au travail t?t, mais elle ne pouvait s’emp?cher de penser qu’il lui imposait cette heure inhumaine pour la punir d’avoir chang? le rendez-vous. Cependant, si cela lui permettait de passer plus de bon temps avec Hannah, cela en valait la peine. – H?, dit-elle en revenant dans le salon, j’ai d?cid? que vous foutre une racl?e ?tait plus important que toutes les affaires criminelles du monde. J’esp?re que vous n’avez pas pass? mon tour. En les rejoignant, elle comprit qu’elle ne faisait que repousser une ?ch?ance qui la pr?occupait. Cela dit, une soir?e de plus ? la maison, ce n’?tait pas la fin du monde, ou, du moins, c’?tait ce qu’elle se disait. La r?alit? l’attendrait quand m?me le lendemain, par?e de toute sa laideur. CHAPITRE TROIS ? une exception notable, la salle de repos ?tait vide. – Merci d’avoir trouv? du temps pour moi, dit Jessie quand elle arriva ? 6 h 58. Par simple pr?caution, elle verrouilla la porte derri?re elle. – Je suis tr?s occup?, dit ironiquement Garland Moses en se tournant vers elle. Il ?tait assis ? une table et il mangeait ce qui semblait ?tre une barre granola. Jessie fut tent?e de faire une blague en lui disant de faire attention ? son dentier, mais elle se retint. – Occup? au point de m’avoir ?vit?e tout le mois dernier, fit-elle remarquer. – J’avais une grande affaire ? r?soudre, protesta-t-il, puis j’ai eu cette conf?rence ? Philadelphie. Enfin, j’ai pris des vacances. – Te fous pas de moi, Garland. Lors de notre derni?re vraie conversation ? ma f?te d’anniversaire, tu as sugg?r? que tu t’inqui?tais pour Hannah. Apr?s ?a, tu m’as zapp?e pendant un mois. J’ai paniqu?. C’?tait exag?r?. En fait, pendant les quatre derni?res semaines, les choses s’?taient tr?s bien d?roul?es avec Hannah. Vu tout ce que sa demi-s?ur avait subi au cours des six derniers mois, le fait qu’elle puisse sinc?rement appr?cier une soir?e tranquille consacr?e aux jeux de plateau et aux scones ?tait un petit miracle. C’?tait en partie pour cela que Jessie n’avait pas voulu interrompre sa soir?e de la veille. – Tu sais que je suis un homme ?g?, n’est-ce pas ? dit Garland. Dans mes conversations, je n’emploie pas le verbe « zapper ». – Tu essaies de gagner du temps, dit-elle. – Certes, j’ai du mal avec le temps, dit-il en se levant lentement. Allons boire un caf?. Il emmena Jessie ? la machine ? caf?. Jessie essaya de ne pas regarder le distributeur qui se trouvait ? c?t?. Elle n’avait pas encore pris de petit d?jeuner et elle sentait son estomac gargouiller ? l’id?e de consommer ces en-cas pleins de conservateurs. En regardant Garland marcher, Jessie remarqua qu’il portait une tenue qui, comme elle avait fini par l’apprendre, ?tait en g?n?ral son uniforme quotidien. Il portait une veste de sport grise us?e sur un sweat marron et une chemise ?l?gante beige terne. Son pantalon bleu marine ?tait froiss? et ses mocassins ?taient couverts d’?raflures. Ses cheveux blancs partaient dans toutes les directions comme s’il essayait de gagner un concours de d?guisement en Albert Einstein. Perch?es sur l’ar?te de son nez, ses lunettes ? double foyer compl?taient son style. Toutefois, Jessie avait appris que les apparences pouvaient ?tre trompeuses et que le profileur v?t?ran cultivait son air n?glig? pour que les gens le sous-estiment. Il ?tait toujours ras? ? la perfection et presque aucun poil ne lui ?chappait. Ses dents blanches ?taient immacul?es et ses ongles ?taient impeccables. Les lacets de ses mocassins us?s ?taient nouveaux et soigneusement attach?s avec des doubles n?uds. Sur tous les points importants, il cultivait l’excellence. Jessie, qui avait toujours respect? ce vieux monsieur, avait fini par l’aimer sinc?rement. – OK, Mme Hunt … commen?a-t-il, ayant apparemment d?cid? de passer aux choses s?rieuses. – Je crois que tu peux m’appeler Jessie, maintenant, Garland. En fait, j’envisage de t’appeler grand-p?re, dor?navant. – S’il te pla?t, ne fais pas ?a, demanda-t-il avec insistance. OK, Jessie. Je ne voulais pas te faire paniquer, mais j’avais bien quelques inqui?tudes sur Hannah. J’accepte de te les communiquer, du moment que tu les laisses dans leur contexte appropri?. – De quel contexte s’agit-il ? demanda Jessie. – N’oublie pas que c’est une fille de dix-sept ans dont les parents adoptifs ont ?t? violemment assassin?s sous ses yeux par son p?re biologique, tueur en s?rie notoire. – J’en suis tout ? fait consciente, Garland, dit impatiemment Jessie. D’abord, j’y ?tais. Ensuite, ce tueur en s?rie ?tait aussi mon p?re, si tu t’en souviens. – Je ne fais que brosser un portrait, dit-il patiemment. Puis-je continuer ? – Vas-y, dit Jessie en d?cidant de ne pas interrompre l’homme auquel elle avait essay? de parler pendant un mois. – Alors, poursuivit-il, quelques semaines plus tard, elle a ?t? kidnapp?e par un autre tueur en s?rie qui a voulu la transformer en assassin comme lui-m?me et son p?re. Ce faisant, il l’a forc?e ? le regarder pendant qu’il assassinait ses parents adoptifs. Jessie eut envie de signaler que, comme c’?tait elle qui avait sauv? Hannah dans ces deux cas, elle connaissait les d?tails de pr?s. Cependant, Garland Moses savait visiblement tout ?a. Il rappelait seulement la situation. Donc, au lieu de l’interrompre, pendant qu’il parlait, elle contempla son reflet dans la vitre du distributeur en essayant de s’effacer les rides du front par pure volont?. – C’est vrai, fit-elle remarquer d’un ton qu’elle garda neutre. – Ensuite, au milieu de tout ?a, elle a appris qu’elle avait une demi-s?ur qu’elle avait vue soumise ? la torture et qui semblait courir apr?s la mort et le danger par la nature m?me de son travail. Tu es sa derni?re famille encore en vie et, ? chaque fois qu’elle te dit au revoir, elle sait que c’est peut-?tre pour la derni?re fois. Jessie n’avait pas pens? ? ce fait et se sentit imm?diatement mal ? l’aise, aussi bien pour Hannah qu’? cause de son propre manque de perspicacit?. – Pourtant, r?pondit-elle finalement, tu savais d?j? tout ?a quand tu l’as rencontr?e. – Tu veux dire quand tu m’as demand? de la garder pour pouvoir la profiler en secret ? – Si tu le dis. Le plus important, c’est que tu savais tout ?a quand tu l’as rencontr?e et que, malgr? ?a, tu m’as dit que tu t’inqui?tais. – C’est le cas, admit-il finalement. Je ne vais pas rentrer dans les d?tails parce que je ne veux pas trahir sa confiance et qu’ils ne sont pas si importants que ?a, de toute fa?on. Toutefois, si je me base sur les choses dont nous avons discut?, je m’inqui?te du manque apparent d’empathie de Hannah. Ce que je ne sais pas, c’est si je devrais m’inqui?ter plus. Jessie trouva r?v?lateur de se contempler dans la vitre du distributeur pendant qu’elle dig?rait cette nouvelle. Comme ?a, elle pouvait voir ses r?actions en temps r?el. Elle esp?rait qu’elle ?tait plus impassible quand quelqu’un tentait de lui faire baisser les yeux en public mais, dans la confidentialit? relative de la salle de repos et avec Garland qui s’occupait d’ajouter du sucre ? son caf?, elle n’essaya pas de cacher qu’elle venait soudain de bl?mir ou que ses yeux verts exprimaient de la peur. D’un souffle, elle expulsa ses cheveux marron de devant ses yeux et r?pondit prudemment. – Tu veux bien pr?ciser ? – Voil?, r?pondit-il. La plupart des adolescents sont intrins?quement ?gocentriques jusqu’? un certain point. Cela les aide ? trouver leur propre identit?. Trouver qui on est, cela n?cessite de s’?tudier. C’est normal, m?me si c’est parfois exasp?rant. – Jusque-l?, je te suis. – Cependant, elle a aussi subi tant de traumatismes qu’il ne serait pas ?tonnant qu’elle se ferme compl?tement sur le plan ?motionnel. Si tout ce qu’elle ressent n’est qu’une s?rie de douleurs diverses, pourquoi ressentirait-elle quoi que ce soit, pas seulement pour elle-m?me, mais pour qui que ce soit d’autre ? Donc, il est possible qu’une partie d’elle-m?me soit insensible pour se prot?ger. Bien que ce soit troublant, ?a n’aurait rien de choquant. – Et pourtant … dit Jessie pour l’encourager en le regardant. – Et pourtant, conc?da-t-il, rien ne me prouve que sa nature renferm?e n’ait pas d?j? exist? avant tous ces ?v?nements. Certaines personnes ne se lient ni ne s’attachent de mani?re forte, quelle qu’en soit la raison. Sa m?re est morte quand elle ?tait petite. Elle a ?t? plac?e quelque temps avant d’?tre adopt?e. De nombreux ?l?ments auraient pu bloquer sa capacit? ? cr?er des liens. – Ou alors, elle est peut-?tre n?e comme ?a, proposa Jessie. C’est peut-?tre g?n?tique. – C’est une autre possibilit?, convint Garland en s’?cartant pour qu’elle puisse prendre du caf?. Le probl?me, c’est que nous n’avons pas d’?tudes de qualit? qui fournissent des donn?es fiables sur ce point. Toutefois, ce n’est pas vraiment ce que tu demandes, n’est-ce pas ? – Qu’est-ce que je demande, Garland ? r?pliqua Jessie. – Tu demandes si elle a le potentiel pour devenir un assassin. C’est ce qu’?tait votre p?re, ce que Bolton Crutchfield a essay? de faire d’elle et ce que tu crains de devenir toi-m?me. Est-ce exact ? Jessie resta silencieuse plus longtemps qu’elle ne l’aurait voulu. – C’est exact, dit-elle finalement ? voix basse. Jessie garda les yeux sur son caf?, o? elle versait de la cr?me, mais elle entendit le silence prudent que produisit Garland avant de r?pondre. Elle imagina qu’il se demandait comment continuer au mieux. – La r?ponse est d?cevante : je ne sais pas. Nous sommes tous les deux parfaitement conscients du fait que la recherche comportementale du FBI indique que presque tous les tueurs en s?rie enregistr?s ont connu une sorte de traumatisme pendant leur jeunesse. Ce traumatisme peut s’?tre manifest? sous forme de maltraitances, de harc?lement ou par la perte d’un ?tre cher. Mon exp?rience empirique personnelle est en accord avec ces d?couvertes. – La mienne aussi, convint Jessie, mais j’ai remarqu? que tu as dit « presque » tous les tueurs en s?rie. – Oui. On rapporte que certains tueurs semblent avoir eu une enfance parfaitement normale sans avoir subi de traumatisme bien d?fini. Certaines personnes sont juste … d?sax?es. Tu le sais aussi bien que moi. – Oui, dit Jessie quand ils revinrent ? la table. Cependant, ce que je veux savoir, c’est si ma demi-s?ur, la fille qui habite sous mon toit, est une de ces personnes parce que, si elle a subi une telle quantit? d’horreurs si t?t dans sa vie et si elle n’a pas le g?ne de l’empathie (aussi douteuse que soit cette expression), alors, nous avons un probl?me. – Peut-?tre, dit prudemment Garland quand ils s’assirent, ou peut-?tre pas. Pour autant que nous sachions, elle n’a pas tortur? d’animaux et n’a tu? personne. – Pour autant que nous sachions, conc?da Jessie. – De plus, tu as connu beaucoup de traumatismes semblables aux siens. Ton p?re tueur en s?rie a assassin? ta m?re et tes parents adoptifs et a essay? de te tuer, tout comme un autre tueur en s?rie obs?d? par ta personne. Et puis, il ne faut pas oublier l’ex-mari qui a tent? de te faire accuser pour l’assassinat de sa ma?tresse avant d’essayer de te tuer quand tu as d?couvert la v?rit?. Tu as connu beaucoup de traumatismes toi-m?me, mais tu n’es pas devenue tueuse. – Non, dit Jessie, r?fl?chissant avant de r?v?ler une chose qu’elle n’avait d?voil?e qu’? peu de gens, mais je me suis souvent demand? si j’avais adopt? cette profession pour ?tre proche de la violence et de la cruaut? de ces gens sans ?tre oblig?e d’aller aussi loin qu’eux. Je crains de trouver du plaisir ? ?tre en contact avec leurs crimes. Garland resta silencieux un moment et Jessie craignit qu’il ne se demande la m?me chose. – C’est ? ?a que sert la th?rapie, dit-il finalement sans ?tre d’aucun secours. Alors que Jessie allait r?pondre sur un ton narquois, son t?l?phone sonna. Elle baissa les yeux. C’?tait son amie Kat Gentry. Elle laissa se d?clencher la messagerie. – Bon, accepterais-tu de rencontrer Hannah une nouvelle fois ? demanda-t-elle. Pour voir si tu pourrais tirer des conclusions plus solides ? – J’accepte de la rencontrer, en supposant qu’elle soit d’accord, dit-il, mais cela ne signifie pas que je vais effectuer une grande d?couverte. En fin de compte, il est difficile de discerner si elle est juste une adolescente lunatique, une jeune adulte traumatis?e et ?motionnellement handicap?e ou les deux ? la fois. Un SMS s’afficha sur l’?cran du t?l?phone de Jessie. Kat disait : J’ai besoin de ton aide sur une affaire. On se retrouve ? Downtown Grounds ? 7 h 30 ? Jessie regarda quelle heure il ?tait. Il ?tait 7 h 10. Si Kat demandait ? retrouver Jessie si vite, ce dont elle avait besoin devait ?tre urgent. – Tu as oubli? une possibilit?, fit remarquer Jessie en tapant « OK » pour r?pondre ? son amie. – Laquelle ? demanda-t-il. – Hannah pourrait ?tre une sociopathe qui cache bien son jeu. CHAPITRE QUATRE Kat attendait d?j? dans le caf? noir de monde quand Jessie arriva. Avant m?me de s’asseoir, Jessie vit que son amie ?tait anxieuse. C’?tait inhabituel, ou du moins ces derniers temps. Katherine Gentry, Kat pour les intimes, ?tait en g?n?ral beaucoup plus v?h?mente. Comme elle avait ?t? directrice de la s?curit? pour un service de psychiatrie p?nitentiaire et, avant cela, Ranger de l’arm?e en Afghanistan, cette v?h?mence ?tait chez elle une sorte de trait caract?ristique. Cependant, quand elle avait ?t? licenci?e suite ? l’?vasion de Bolton Crutchfield et qu’elle s’?tait reconvertie en d?tective priv?e, elle avait sembl? se d?tendre beaucoup. De plus, r?cemment, quand elle avait commenc? ? sortir avec Mitch Connor, sh?rif adjoint d’une ville des montagnes situ?e ? deux heures environ, elle avait sembl? vraiment heureuse. Cet homme l’avait aid?e quand elle avait ?t? consultante sur un des cas de Jessie et, depuis, ils avaient ?t? ins?parables et avaient fait la navette pour passer des week-ends ensemble. Cependant, maintenant que Jessie avan?ait vers Kat en se faufilant dans la foule, elle retrouvait cette vieille appr?hension famili?re chez son amie. D’une fa?on ou d’une autre, la longue cicatrice qui traversait verticalement son visage ? partir de son ?il gauche, celle qu’elle avait eue lors d’un incident non pr?cis? dans un d?sert lointain, paraissait plus visible quand elle ?tait inqui?te. – Comment ?a va, Kat ? demanda bruyamment Jessie avant de prendre une gorg?e du caf? que son amie avait d?j? command? pour elle. Tu couches encore aussi souvent ? Elle sourit fac?tieusement quand plusieurs personnes tourn?rent la t?te et firent la grimace. Comme l’expression troubl?e de Kat ne disparut pas quand elle entendit cette taquinerie, Jessie comprit que l’heure devait ?tre grave. – J’ai besoin de ton aide, dit-elle sans pr?ambule. – OK, dit Jessie en devenant s?rieuse elle aussi. Que se passe-t-il ? Kat se permit de boire une gorg?e de son caf? avant de se lancer. – As-tu entendu dire que beaucoup de femmes ont ?t? enlev?es r?cemment dans les environs ? – Sans plus, r?pondit Jessie. Je sais que trois femmes ont ?t? kidnapp?es pendant le dernier mois, ? peu de chose pr?s. Elles se sont toutes ?vad?es. Comme ce n’est pas dans ma zone et qu’aucune de ces affaires n’a ?t? confi?e au Poste Central, je n’y ai pas fait tr?s attention. Jessie et Ryan travaillaient tous les deux pour le Poste Central de la Police de Los Angeles, dans le centre-ville. – J’ai une nouvelle cliente, dit Kat. Elle s’appelle Morgan Remar. C’est la deuxi?me femme qui a ?t? enlev?e. C’est arriv? il y a environ trois semaines et elle s’est enfuie apr?s cinq jours de d?tention. Elle a coop?r? avec la Section des Personnes Disparues du Poste du Pacifique. Cependant, au bout de deux semaines d’enqu?te, ils sont bredouilles. Au cours des deux derniers jours, ils n’ont vraiment pas ?t? tr?s r?actifs. Donc, elle m’a embauch?e. – Sans vouloir t’offenser, si l’incident s’est produit pr?s du Poste du Pacifique, pourquoi t’a-t-elle embauch?e ? – C’est une question tout ? fait pertinente, dit Kat. Elle travaille ? Venice mais habite ? c?t? et son mari travaille dans le centre-ville, ? juste quelques p?t?s de maison. En fait, je l’ai rencontr?e dans ce caf?-l? il y a environ trois mois et nous sommes devenues amies. Comme elle trouve que ?a n’avance pas, elle m’a demand? si je pouvais l’aider. – OK, raconte-moi ce que tu sais. Kat soupira profond?ment, comme si l’id?e d’expliquer tout ce qu’elle avait appris l’intimidait particuli?rement. – En bref, dit-elle finalement, la premi?re victime s’appelle Brenda Ferguson. Elle est m?re au foyer, a trente-six ans et a deux enfants de son deuxi?me mariage. Son mari est cadre dans l’industrie de la musique. Elle a ?t? enlev?e en milieu de matin?e, pendant qu’elle faisait du jogging sur une piste proche de sa maison de Brentwood. Apr?s avoir ?t? d?tenue pendant trois jours dans une cabane ? outils, elle a r?ussi ? s’?chapper. Jessie prenait rapidement des notes pendant que son amie parlait. – Est-ce que je vais trop vite ? demanda Kat. – Non. ?a va. Continue. – OK. La deuxi?me victime ?tait ma cliente, Morgan. Elle a vingt-neuf ans et habite dans le quartier de West Adams avec son mari, ? seulement quelques kilom?tres d’ici. Cependant, elle travaille dans un refuge pour sans-abris de Venice. Elle a ?t? enlev?e alors qu’elle venait de d?jeuner sur la promenade Boardwalk. Comme je l’ai dit, elle a ?t? d?tenue pendant cinq jours avant d’avoir pu s’?chapper. Il la d?tenait dans une vieille penderie. – Et la troisi?me femme ? – Elle s’appelle Jayne Castillo. Elle a trente-trois ans, elle est mari?e et elle habite dans le quartier de Mid-City. Elle a ?t? enlev?e sur le parking d’une ?picerie il y a une semaine et demi et elle s’est enfuie apr?s trois jours d’emprisonnement dans une benne ? ordures. – Est-ce que tu es entr?e en contact avec les deux autres femmes ? demanda Jessie. – J’ai essay?, dit Kat en se rem?morant ses tentatives d’un air d??u, mais je suis tomb?e sur des impasses. Elles refusent de parler. Les policiers refusent de parler. C’est pour cela que je t’ai appel?e. Je ne sais plus quoi faire. Morgan craint ?norm?ment que ce gars ne recommence, et moi, je ne peux pas la rassurer parce que je n’ai rien d?couvert depuis qu’elle m’a embauch?e. Jessie prit une autre gorg?e avant de poser sa question suivante. Elle savait o? Kat voulait en venir mais voulait r?fl?chir ? la r?ponse qu’elle allait donner. – Que puis-je faire pour toi ? demanda-t-elle finalement. Kat n’eut pas besoin qu’on l’encourage pour r?pondre. – Peux-tu contacter les inspecteurs qui s’occupent de ces affaires ? Ils seront peut-?tre plus communicatifs avec toi. Pour l’instant, je ne sais plus o? j’en suis. Jessie soupira. – Je peux essayer, dit-elle. Le probl?me, c’est que ces policiers sont tous dans d’autres postes. Ils seront peu enclins ? partager des informations de leurs affaires avec une profileuse de notre poste, vu que nous n’avons pas de victime dans cette affaire. Cependant, ?a ne co?te rien d’essayer. Je trouverai peut-?tre quelqu’un de sympathique. – Je sais que je demande beaucoup, reconnut Kat. Est-ce que tu es s?re que tu as le temps ? – Pas de probl?me, lui assura Jessie. En fait, ces temps-ci, on n’a pas beaucoup d’enqu?tes. Je termine les papiers sur une affaire de la semaine derni?re et je vais ?tre appel?e ? t?moigner dans une autre, mais je n’ai rien d’actif en ce moment. Bien s?r, cela signifie que le capitaine Decker peut m’attribuer une nouvelle affaire quand il le veut mais, pour l’instant, je peux essayer de faire avancer la tienne. – J’appr?cierais ?norm?ment. – Tu rigoles ? dit Jessie. Combien de fois m’as-tu aid?e ? r?soudre une affaire quand je ne voulais pas passer par la voie officielle ? C’est le moins que je puisse faire. – Merci, Jessie, dit Kat, qui eut l’air soulag?e pour la premi?re fois depuis le d?but de leur conversation. – Pas de probl?me. Cela dit, est-ce que je peux parler ? Morgan ? ?a m’aiderait vraiment de b?n?ficier d’informations de premi?re main. – Bien s?r, dit Kat. Elle est ? une conf?rence en dehors de la ville pour l’instant et elle ne reviendra que tard ce soir, mais je peux te pr?voir un rendez-vous pour demain. – Bonne id?e. Je vais voir ce que je peux d?couvrir entre temps, dit Jessie avant de prendre une autre grande gorg?e de caf?. Maintenant qu’on a parl? de ?a, j’ai une autre question. – Laquelle ? – Tu couches souvent ? Kat afficha finalement le sourire que Jessie avait esp?r? obtenir la premi?re fois qu’elle avait pos? la question. Elle rougit intens?ment. – Je m’occupe, dit-elle ?nigmatiquement. – Je m’en doute, dit Jessie pour la taquiner. – Et toi ? r?pliqua Kat en essayant de taquiner Jessie elle aussi. Comment ?a se passe avec Ryan ? Ce fut au tour de Jessie de rougir. – ?a se passe bien, dit-elle. On se met d’accord sur l’endroit o? on passe la nuit, mais c’est habituellement chez moi ? cause de Hannah. – Et ?a ne te g?ne pas de vivre dans le p?ch? avec une jeune fille impressionnable sous ton toit ? demanda Kat avec un sourire taquin aux l?vres. – Crois-moi, cette fille en a vu tellement que je ne crois pas qu’elle soit troubl?e que le petit copain de sa s?ur vienne passer la nuit chez elle. Je crois plut?t qu’elle trouve ?a rassurant. – On verra si elle sera si rassur?e quand vous tomberez tous dans le gouffre de Had?s, persista Kat tout en essayant de ne pas rire en le disant. – Tu trouves ?a vraiment dr?le, n’est-ce pas ? – T’as pas id?e. Malgr? ces taquineries, Jessie se permit d’appr?cier le moment. Pendant quelques secondes au moins, elle pouvait oublier qu’elle craignait que sa petite s?ur soit une sociopathe ou qu’elle ou son petit copain se fassent abattre au travail. Elle pouvait faire comme si elle avait une vie normale avec des probl?mes familiaux et relationnels normaux. Ensuite, le moment passa. CHAPITRE CINQ Jessie eut de la chance. Juste apr?s 8 heures du matin, quand elle entra dans la grande salle du Poste Central de la Police de Los Angeles dans le centre-ville en essayant de rester discr?te, il y avait beaucoup d’activit?. La brigade des m?urs avait men? un grand raid la nuit d’avant et d?mantel? un r?seau de prostitution important. Le poste tout entier ?tait rempli de prostitu?es, de prox?n?tes et de clients de prostitu?es. Par cons?quent, personne ne la remarqua quand elle se faufila jusqu’? son bureau. M?me Ryan, qui aidait un policier en uniforme ? ma?triser un client en col?re, ne la vit pas passer. De son c?t?, elle ne put s’emp?cher de le remarquer. M?me si cela faisait maintenant quelques mois qu’ils ?taient ensemble et m?me si elle connaissait intimement les contours de son corps, elle ne s’?tait jamais lass?e de son charme extr?me. Avec un m?tre quatre-vingts et un peu moins de quatre-vingt-dix kilos, il n’?tait pas physiquement imposant mais, comme elle le savait personnellement, il n’y avait pas un gramme de graisse sur son corps muscl? de trente-deux ans. Malgr? son torse cisel?, Ryan d?gageait une modestie et une chaleur humaine ?tonnantes pour un inspecteur v?t?ran sp?cialis? dans les homicides. Il souriait souvent et, comme ses cheveux noirs ?taient coup?s court, ils ne cachaient pas la gentillesse de ses yeux marron. Quand il parlait, la douceur de sa voix ne sugg?rait en rien qu’il ?tait l’inspecteur le plus connu de la Section Sp?ciale Homicides du poste, ou SSH, qui enqu?tait sur les affaires ? profil ?lev? ou suivies de pr?s par les m?dias, souvent avec plusieurs victimes et avec des tueurs en s?rie. Jessie se disait parfois que, comme il ?tait capable de faire ce travail tout en ayant une relation avec elle, on devrait lui d?cerner une m?daille sp?ciale. Jessie arr?ta de penser ? son petit copain, s’assit et sortit le dossier de l’affaire des femmes enlev?es. Il y avait peu d’informations et cela devait ?tre en grande partie parce que les femmes avaient toutes eu les yeux band?s pendant la plus grande partie de leur emprisonnement et n’avaient pas grand-chose ? r?v?ler ? la police. Apr?s s’?tre familiaris?e avec les ?v?nements autant que possible, elle d?cida d’appeler l’inspecteur principal qui s’occupait de l’affaire de Morgan Remar. D’abord, c’?tait l’affaire la plus importante pour Kat. Ensuite, l’inspecteur du Poste du Pacifique auquel on avait attribu? cette affaire, Ray Sands, avait un parcours exemplaire et la bonne r?putation d’un homme qui pr?f?rait r?soudre les affaires que suivre strictement la proc?dure. Il accepterait peut-?tre de l’aider. – Inspecteur Sands, dit-il en d?crochant avant la fin de la premi?re sonnerie. – Bonjour, inspecteur Sands, dit-elle aussi nonchalamment que possible. Je m’appelle Jessie Hunt. Je suis profileuse criminelle au Poste Central. Comment allez-vous ce matin ? – Je suis tr?s occup?, Mme Hunt. Que puis-je faire pour vous ? demanda-t-il, poli mais terre ? terre. – J’esp?rais pouvoir vous consulter sur une affaire sur laquelle vous travaillez ces temps-ci. – Quelle affaire ? demanda Sands d’un ton m?fiant. – L’enl?vement de Morgan Remar. J’esp?rais que vous pourriez m’aider ? ?lucider quelques myst?res. – En quoi cette affaire vous int?resse-t-elle, Mme Hunt ? J’ai entendu parler de vous. Je croyais que vous ?tiez sp?cialis?e dans les homicides, surtout avec tueurs en s?rie. – C’est exact, conc?da Jessie. D?cidant qu’elle aurait plus de chances d’arriver ? ses fins si elle se montrait franche, elle lui dit la v?rit?. – En fait, je m’int?resse ? cette affaire pour une amie, Katherine Gentry. Mme Remar l’a embauch?e comme d?tective priv?e et elle a eu du mal ? obtenir des informations sur la progression de l’affaire. – Oui. Je connais Mme Gentry, r?pondit-il d’un ton fatigu?. Elle a assur?ment ?t? … pers?v?rante. Je vais vous dire ce que je lui ai dit. ? l’heure actuelle, nous n’avons gu?re d’informations int?ressantes susceptibles d’?tre partag?es. Jessie eut l’impression que Sands ?tait un homme respectable mais comprit qu’il ne lui disait pas vraiment tout. – Inspecteur, me dites-vous que, au bout d’un mois et de trois enl?vements par ce qui semble ?tre le m?me coupable, vous n’avez pas de pistes exploitables ? Jessie n’avait pas pu cacher son scepticisme et Sands mit quelques secondes ? r?pondre. – ?coutez, Mme Hunt, dit-il tr?s lentement en pronon?ant distinctement chaque syllabe, vous ?mettez pas mal d’hypoth?ses. La premi?re est que ces affaires sont li?es. – Sugg?rez-vous qu’elles ne le sont pas ? demanda Jessie, ?tonn?e. – Nous ne le savons pas avec certitude, dit-il de mani?re peu convaincante. Tous les enl?vements se sont produits dans des juridictions diff?rentes. Toutes les femmes ont ?t? retrouv?es loin des endroits o? elles ont ?t? enlev?es. – Pourtant, elles ont toutes ?t? d?tenues ? peu pr?s le m?me nombre de jours avant de s’?chapper, r?pliqua Jessie. Elles ont toutes ?t? d?tenues dans des espaces restreints. Elles appartenaient toutes ? peu pr?s ? la m?me couche de la soci?t?. Vous ne pr?tendez quand m?me pas qu’il n’y a aucun lien ? – Non, admit-il, mais les inspecteurs qui enqu?tent sur les autres enl?vements ne sont pas tous de cet avis. De plus, comme je soup?onne que vous allez les appeler apr?s m’avoir parl?, je tiens ? pr?ciser que nous n’avons tir? aucune conclusion. Jessie soupira. Elle comprenait la prudence de Sands, mais c’?tait incroyablement frustrant. – ?coutez, inspecteur, je comprends. C’est politiquement sensible. De plus, m?me si vous ne me connaissez pas, sachez que Kat Gentry est une bonne amie et qu’elle essaie d’aider une jeune femme qui a tr?s peur. J’essaie juste de trouver quelques r?ponses susceptibles de la tranquilliser. – Vous vous imaginez que je ne sais pas que Morgan Remar a peur ? demanda Sands, qui eut l’air vraiment en col?re pour la premi?re fois. C’est moi qui l’ai interrog?e ? l’h?pital pendant que les docteurs lui greffaient de la peau et essayaient de r?parer la cheville qu’elle avait d?truite pour s’extraire de cette penderie ? coups de pied. C’est moi qui ai d? lui dire qu’il n’y avait aucune preuve exploitable ? l’endroit o? elle avait ?t? d?tenue. Cela fait deux semaines compl?tes que je travaille sur cette affaire et, tout ce temps-l?, mes coll?gues inspecteurs des postes de Mid-Wilshire et de West Los Angeles ne m’ont communiqu? aucune information. On ne m’a accord? un groupe de travail que ce matin. Je suis conscient de la situation, Mme Hunt. – Je suis d?sol?e, dit Jessie, consciente d’avoir gravement gaff?. Je ne voulais pas dire que cela ne vous int?ressait pas. Je … je suis d?sol?e. Sands resta muet. Elle l’entendit respirer lourdement, mais elle consid?ra que le fait qu’il n’ait pas raccroch? ?tait un bon signe. Avant qu’il ne le fasse, elle essaya de changer d’approche. – Vous avez dit qu’on vous a accord? un groupe de travail ce matin ? – Oui, marmonna-t-il. – Puis-je demander ce qui a provoqu? cela ? – Il y a eu un quatri?me enl?vement, dit-il. – Quoi ? – On a retrouv? la victime ? Griffith Park tard hier soir, dit Sands. Le mode op?ratoire ?tait le m?me mais, cette fois-ci, elle a ?t? d?tenue dans une cage pour chien pendant quatre jours. – Incroyable, marmonna Jessie ? voix basse. – Certes, convint-il. C’est ce dernier enl?vement qui a finalement pouss? les gens du quartier g?n?ral ? outrepasser les capitaines des autres postes et ? nous forcer ? mettre nos ressources en commun. Nous esp?rons ?tre disponibles cet apr?s-midi. – Qui est ? la t?te de cette ?quipe ? – Votre serviteur. – Pas ?tonnant que vous soyez aussi chatouilleux, dit-elle avant de se rendre compte qu’il risquait de ne pas interpr?ter sa r?ponse avec l’humour avec lequel elle l’avait formul?e. – Vous plaisantez ? Je suis au sommet de mon charme, dit-il, clairement pas du tout offens?. – OK. Tant que je vous ai dans une humeur que vous consid?rez bonne, puis-je vous poser une autre question insultante ? – Allez-y, dit-il. J’ai l’habitude, maintenant. – Quatre enl?vements et pas une seule piste sur l’identit? du ravisseur. Pourtant, toutes les femmes ont r?ussi ? s’?vader. Ne semble-t-il pas ?trange qu’un coupable aussi dou? pour enlever ces femmes soit ? ce point incapable de les garder ? – Effectivement, dit Sands sans d?velopper. – Vu votre h?sitation riche de sens, puis-je supposer que vous doutez autant que moi que ces femmes se soient vraiment « ?vad?es » toutes seules ? – Vous le pouvez, dit Sands. Bien que tout le monde ne soit pas d’accord avec moi, je crois tr?s fortement que cet homme, car nous savons que c’est un homme, a permis ? ses victimes de s’?chapper. – Qu’est-ce qui vous en rend si s?r ? demanda Jessie. – Vous avez bien remarqu? qu’il semble excessivement improbable que l’homme qui a captur? toutes ces femmes sans se faire attraper puisse ?tre aussi mauvais pour ce qui est de les retenir, mais il y a autre chose. – Quoi ? – Nous avons trouv? les endroits o? il d?tenait chaque femme. ? aucun de ces endroits il n’y a eu de traces d’ADN exploitable, d’empreintes digitales ou de preuves incriminantes de quelque sorte que ce soit. Il est difficile d’?tre aussi efficace quelles que soient les circonstances, comme vous le savez, mais presque impossible s’il est reparti l?-bas, a constat? que ses prisonni?res s’?taient ?vad?es et a d? nettoyer les lieux en toute h?te. – Sauf s’il les a laiss?es partir, dit Jessie. – C’est vrai, convint Sands. S’il leur a permis de s’?vader ? un moment de son choix, cela a d? lui donner le temps de nettoyer apr?s leur d?part. Je soup?onne qu’il a ?t? prudent d?s le moment o? il les a emmen?es dans leurs lieux de d?tention parce qu’il savait que ces lieux finiraient par ?tre d?couverts et m?ticuleusement fouill?s. – Pourquoi ferait-il ?a ? demanda Jessie. Pourquoi risquer de les laisser partir alors qu’elles pourraient l’identifier plus tard ? – N’oubliez pas qu’elles avaient les yeux band?s. – Pas quand il les a captur?es. – Non, conc?da-t-il, mais les trois premi?res victimes ?taient toutes certaines qu’il portait un d?guisement complexe. – Pourtant, elles pourraient ?valuer sa taille, son poids, son origine ethnique. Elles pourraient reconna?tre sa voix. – C’est vrai, dit Sands. – J’ai l’impression que quelque chose nous ?chappe, dit Jessie d’une voix songeuse. – Moi aussi, convint Sands. Malheureusement, je n’ai aucune id?e de ce que c’est. CHAPITRE SIX Jessie prenait un risque. Ce n’?tait pas parce qu’elle n’avait pas d’affaires en cours que le capitaine Decker appr?cierait qu’elle s’en aille ? Brentwood pour enqu?ter sur une affaire qui ne la concernait en rien, et pourtant, c’?tait exactement ce qu’elle faisait. Caroline Gidley, la victime d?couverte la veille au soir, ?tait inconsciente et incapable de parler. L’inspecteur Sands avait averti Jessie que Jayne Castillo, la troisi?me victime, ne voulait pas qu’on l’interroge. De plus, comme la cliente de Kat, Morgan Remar, n’?tait pas en ville pour l’instant, Jessie n’avait plus qu’une personne ? qui parler. Quand elle avait demand? ? Sands si ce serait une erreur d’essayer de parler ? la premi?re victime, Brenda Ferguson, il lui avait dit que les inspecteurs du poste de West Los Angeles, qui traitaient les affaires situ?es ? Brentwood, ne seraient pas contents, mais il n’avait pas non plus formellement demand? ? Jessie d’y renoncer. M?me si elle le connaissait tr?s peu, Jessie avait consid?r? que c’?tait la seule autorisation qu’elle obtiendrait jamais de lui. Ryan avait g?n?reusement accept? de s’arranger pour que, au poste, le capitaine Decker ne soit pas au courant de l’absence de Jessie. Juste avant de s’arr?ter devant la maison des Ferguson, elle l’avait appel?. – Comment ?a se passe l?-bas ? demanda-t-elle. – Decker est tellement occup? ? g?rer les suites du raid de la brigade des m?urs qu’il n’a m?me pas remarqu? ton absence. – Je ne sais pas si je dois me sentir soulag?e ou insult?e, r?pondit-elle. – Si ?a peut te consoler, tu me manques, dit Ryan. Confort?e par cette certitude, elle sortit de sa voiture et se dirigea vers la maison. Elle n’avait pas pr?venu Ferguson de sa venue de peur que la victime ne le dise aux inspecteurs assign?s ? l’affaire. De plus, elle avait souvent constat? qu’elle obtenait des informations plus utiles quand elle prenait par surprise un t?moin, un suspect ou m?me une victime. La surprise les emp?chait d’organiser leurs pens?es et de supprimer des informations utiles. La maison ?tait impressionnante, mais beaucoup moins tape-?-l’?il que certaines autres de la m?me rue bord?e d’arbres. De deux ?tages, elle ?tait de style espagnol et couvrait beaucoup de surface sur son grand terrain. Rien que la pelouse de devant aurait pu accueillir une seconde maison. Jessie frappa ? la porte et dut attendre une bonne minute avant qu’un homme de la trentaine ne vienne lui ouvrir avec une expression m?fiante. – Puis-je vous aider ? demanda-t-il prudemment. – Je l’esp?re. Je suppose que vous ?tes le mari de Mme Ferguson ? – Oui. Je suis Ty. – Bonjour, Ty, dit Jessie de sa voix la plus chaleureuse et la moins intimidante. Je m’appelle Jessie Hunt. Je suis profileuse criminelle pour la Police de Los Angeles. Je sais que Brenda a beaucoup souffert, mais j’esp?rais pouvoir lui parler bri?vement. J’essaie de cr?er un profil de l’homme qui l’a enlev?e et le dossier de l’affaire ne m’apprend pas grand-chose. Par respect pour ce qu’elle a subi, j’ai attendu autant que je l’ai pu, mais il me serait extr?mement utile de lui parler en chair et en os. Jessie n’?tait pas fi?re de se pr?senter en prof?rant des mensonges qui, bien qu’inoffensifs, ?taient quand m?me des mensonges, mais il lui fallait une porte d’entr?e dans l’affaire et celle-ci semblait ?tre la plus efficace. Ty ne lui claqua pas la porte au nez, mais il eut quand m?me l’air r?ticent. – ?coutez, dit-il doucement en regardant par-dessus son ?paule tout en parlant, je sais que vous ne faites que votre travail, mais Brenda en a d?j? trop subi. Elle n’a recommenc? ? dormir toute la nuit que ces quelques derniers jours. Je crains que votre intervention ne rouvre toutes ces blessures. Jessie sentait que son d?sir de prot?ger sa femme allait prendre le pas sur ses bonnes intentions et d?cida que le moment ?tait venu d’?tre plus directe. – Je ne peux pas vous promettre que ?a n’aura pas cet effet, Ty, mais j’essaie de d?couvrir qui est cet homme pour qu’il ne fasse plus de mal aux femmes. Je ne sais pas si vous le savez, mais une quatri?me victime a ?t? d?couverte hier, en fin de soir?e. – Non ! dit Ty en ?carquillant les yeux. – Si. Elle est ? l’h?pital, pour l’instant. Elle s’est gravement cass? une jambe en s’?vadant apr?s quatre jours pass?s dans une cage pour chien. Franchement, rien ne prouve que cet homme va s’arr?ter dans les jours qui viennent. J’esp?re que, avec l’aide de Brenda, nous pourrons le retrouver avant qu’il ne s’en prenne ? une cinqui?me femme. Ty avait encore l’air ind?cis, mais Jessie vit que, maintenant, il avait plut?t envie de la laisser entrer. Il se retourna ? nouveau vers le hall. – Attendez ici, dit-il finalement. Laissez-moi lui parler d’abord. Je pourrai peut-?tre la convaincre. – Merci, dit Jessie en entrant dans le vestibule. Ty disparut dans une pi?ce inconnue au bout du vestibule. Jessie entendit des murmures ?touff?s et agit?s pendant plusieurs minutes puis Ty passa finalement la t?te par la porte. – Entrez, appela-t-il. Veuillez fermer et verrouiller la porte derri?re vous. Jessie hocha la t?te, fit ce qu’on lui demandait puis partit dans le vestibule. Quand elle passa le coin, elle trouva Ty qui venait s’asseoir ? la table du petit d?jeuner ? c?t? d’une femme ronde aux cheveux fonc?s ? l’air ?puis? et aux yeux rouges. Elle n’avait pas l’air heureuse de recevoir quelqu’un. – Bonjour, Mme Ferguson, dit Jessie d’une voix ?raill?e. Merci d’avoir accept? de me parler. – Je n’ai accept? que parce que Ty m’a suppli? de le faire. Il m’a parl? de la quatri?me femme. Comment va-t-elle ? – Elle va survivre, lui dit Jessie. On l’a retrouv?e sur un chemin de terre dans Griffith Park avec une jambe cass?e et plusieurs autres blessures mais, d’apr?s ce que je crois savoir, elle sera capable de rentrer chez elle avant la fin de la semaine. – Est-ce qu’elle est mari?e ? A-t-elle des enfants ? – Je ne crois pas, dit Jessie. – Tant mieux. C’est d?j? assez grave d’avoir ? supporter ce genre d’?v?nement. En ce qui me concerne, le reste de la famille a souffert presque autant que moi. Ma fille vient dans notre chambre en pleurant presque toutes les nuits et mon fils a commenc? ? mouiller son lit. Ty g?re tout ?a et je vois bien qu’il est sur le point de craquer. – ?a va, ma ch?rie, dit Ty en lui serrant la main. Je vais bien. Quant aux enfants, ils iront mieux. Pense ? toi. Je crois que ?a pourra ?tre utile. Si Mme Hunt d?couvre un nouveau moyen d’identifier cet homme, ?a aidera tout le monde ? mieux dormir la nuit. – Croyez-vous que vous pourrez le faire, Mme Hunt ? – Appelez-moi Jessie, je vous prie. Avec votre aide, j’esp?re bien y arriver. Brenda la contempla de ses yeux fatigu?s et hocha la t?te. – Venez avec moi, Jessie, dit-elle. Je veux vous montrer quelque chose. Elle se leva sans dire un autre mot et quitta la pi?ce. Jessie la suivit en jetant un coup d’?il ? Ty qui, derri?re elle, haussa les ?paules et se leva. Brenda emmena Jessie dans le vestibule et s’arr?ta ? une biblioth?que qui se trouvait au milieu. Elle tendit la main et tira sur un livre ? la tranche rouge pos? ? hauteur de taille ? l’extr?mit? droite de l’?tag?re. Le livre sortit l?g?rement puis se remit en place avec un claquement. Jessie entendit un l?ger clic. Soudain, la biblioth?que recula comme une porte et d?voila un espace derri?re elle. Une lumi?re fluorescente un peu terne s’alluma au plafond et ils virent une pi?ce qui faisait ? peu pr?s la taille d’un petit bureau. Contre un mur, il y avait une petite causeuse. ? c?t? d’elle, il y avait deux chaises en bois. Ces trois meubles entouraient tous une petite table basse. Dans le coin, on voyait un minuscule r?frig?rateur. Mis ? part quelques magazines et quelques cahiers de coloriage avec leurs crayons, l’endroit n’offrait aucune distraction. Un t?l?phone filaire ? l’ancienne ?tait fix? ? un mur. Sur un autre mur, il y avait un grand poster avec la couverture de l’album Nevermind de Nirvana, sur laquelle un b?b? qui nageait sous l’eau tendait une main vers un billet d’un dollar. – C’est cool, dit Jessie en d?signant le poster parce qu’elle ne savait pas quoi dire d’autre. – Sans doute, dit Brenda. Nous l’avons utilis? parce qu’il est assez grand pour couvrir l’ouverture du tunnel que nous avons fait creuser sous la maison et qui m?ne ? la cour de devant. – OK, r?pondit Jessie, ?tonn?e par le ton inexpressif que Brenda avait employ? pour d?crire une situation aussi peu conventionnelle. – Je vous montre ?a parce que je voulais que vous compreniez ? quoi ressemble notre vie, maintenant. Apr?s mon retour ? la maison, j’ai demand? ? Ty de faire construire cette pi?ce de survie. Je ne sais pas si elle serait utile en cas d’urgence, mais je n’ai pas pu dormir plus de deux heures ? la suite avant qu’elle soit termin?e. – Je comprends, dit doucement Jessie. – Vraiment ? demanda Brenda d’un ton de d?fi. – Oui, vraiment, lui assura Jessie. Je ne vous ennuierai pas avec les d?tails, mais j’ai connu plusieurs harceleurs. J’ai fait refaire mon appartement pour y int?grer plusieurs mesures de s?curit? couramment utilis?es par les banques et les b?timents gouvernementaux. Ensuite, m?me apr?s ?limination des menaces imminentes contre ma s?curit?, j’ai conserv? ces mesures. Donc, je comprends votre d?marche. Jessie remarqua que, pour la premi?re fois, Brenda la regardait en l’envisageant comme alli?e potentielle. – Je suis d?sol?e pour ce qu’il vous est arriv?, dit-elle, et vous pouvez m’appeler Brenda. Jessie sourit. – Merci, Brenda. Vous voulez bien vous asseoir ? demanda-t-elle en d?signant la causeuse d’un hochement de t?te. – L?-dedans ? – Autant s’y habituer, n’est-ce pas ? dit Jessie. Brenda regarda son mari, qui n’avait pas dit un mot pendant tout ce temps. Il haussa ? nouveau les ?paules. – J’attendrai dans la cuisine pour que vous soyez tranquilles, toutes les deux. Apr?s son d?part, Brenda appuya sur un bouton qui se trouvait sur le mur et la porte se referma et se positionna avec un clic. Brenda d?signa un petit interrupteur qui semblait correspondre ? l’endroit o? le livre rouge ?tait sur l’?tag?re du dehors. On y voyait les inscriptions « Verrouill? » et « D?verrouill? ». – Cela sert ? ce que personne ne puisse acc?der ? cette pi?ce pendant que nous y sommes, m?me si les intrus savent ? quoi sert le livre, dit Brenda. – Bien vu, dit Jessie. Autrement, ce ne serait pas vraiment une pi?ce de survie, n’est-ce pas ? D?cidant de prendre l’initiative, elle se rendit ? la causeuse et s’assit. Brenda s’assit elle aussi mais sur une des chaises avoisinantes. – Bon, commen?a Jessie, je sais que vous avez parl? plusieurs fois aux policiers. J’ai lu le dossier. Donc, je vais essayer de ne pas trop r?p?ter leurs questions. En fait, je ne suis pas int?ress?e par les m?mes sortes de choses qu’eux. – Quelles choses vous int?ressent ? demanda Brenda en croisant et en d?croisant nerveusement les jambes. – D’apr?s les descriptions fournies par vous et les deuxi?me et troisi?me victimes, je sais que votre ravisseur portait des d?guisements complexes, notamment des perruques, des barbes et des proth?ses. Je sais aussi qu’il vous a band? les yeux ? toutes apr?s votre enl?vement initial. Donc, maintenant, je veux me concentrer plus sur sa voix. Est-ce que vous vous en souvenez ? – Je n’arrive pas ? me la sortir de la t?te, dit Brenda, m?me s’il ne parlait que tr?s peu. – Pouvez-vous d?crire son timbre ? demanda Jessie. ?tait-ce une voix grave ou aigu? ? Ou entre les deux ? – Entre les deux ; c’?tait une voix normale, de timbre moyen. – OK, dit Jessie. Avait-il un accent ? Avez-vous remarqu? quoi que ce soit qui y ressemblait ? Peut-?tre un ton nasillard ? Or un ton plus plat du Midwest ? Peut-?tre quelque chose qui vous rappelait New York ou la Nouvelle-Angleterre ? A-t-il utilis? des mots qu’on n’entend habituellement pas par ici ? – Je n’ai rien remarqu? d’inhabituel, dit Brenda en fron?ant les sourcils pour se concentrer. Je suis de Los Angeles et il me semblait avoir une voix normale. Donc, il est peut-?tre d’ici, lui aussi ? – C’est tout ? fait possible, dit Jessie de mani?re encourageante. Et son niveau de langue ? Utilisait-il beaucoup d’argot ou un anglais plus raffin? ? Vous semblait-il avoir beaucoup d’?ducation ? Brenda prit un moment pour fouiller sa m?moire. – Je ne me souviens pas qu’il ait parl? de mani?re raffin?e, mais il ne me semble pas non plus qu’il ait employ? beaucoup d’argot. C’?tait en grande majorit? une langue standard et directe. – Est-ce qu’il parlait avec une rapidit? ou une lenteur inhabituelle ? ? cette question, les yeux de Brenda s’illumin?rent. – Peut-?tre un peu plus lentement que d’habitude, r?pondit-elle. C’?tait comme s’il voulait ?tre s?r de dire exactement la bonne chose quand il parlait. Il ?tait tr?s mesur?. Est-ce que ?a vous aide ? – ?a pourrait, dit Jessie. Cherchons ailleurs. Avez-vous remarqu? une odeur particuli?re ? Brenda resta muette et rougit. – Que se passe-t-il ? demanda gentiment Jessie. Elle crut que Brenda n’allait pas r?pondre mais, apr?s plusieurs longues secondes, elle finit par le faire. – Pour ?tre honn?te, murmura-t-elle presque, je ne me souviens pas qu’il ait eu une odeur. Ce qu’il avait utilis? pour me faire perdre conscience quand il m’avait captur?e avait une odeur accablante. Apr?s ?a, je n’ai pu sentir que ma propre puanteur, d’abord la sueur et mes odeurs corporelles puis, plus tard, mes … mes propres excr?ments. Elle baissa les yeux et ne dit plus rien. – OK, passons ? autre chose, proposa rapidement Jessie. Et si on parlait de la fa?on dont il se comportait, plus g?n?ralement, quand vous ?tiez prisonni?re ? Au cours de la demi-heure qui suivit, Jessie apprit que l’homme ne se mettait jamais dans une col?re excessive mais qu’il s’irritait d?s qu’elle parlait de son mari ou de ses enfants. Brenda avait tr?s vite appris ? ne pas parler d’eux. L’homme ne riait jamais, mais il avait l’air plus heureux que d’habitude quand il d?posait sa nourriture et son bol d’eau dans la cabane ? outils ou quand il la lavait au jet d’eau. – Il semblait prendre plaisir ? me voir d?grad?e, dit Brenda ? Jessie. Il a dit que ?a faisait partie du processus de « purification ». Apr?s ?a, elle ?clata en sanglots et ne fut plus d’une tr?s grande utilit?. Jessie mit fin ? l’interrogatoire avant que la situation ne d?g?n?re compl?tement. Quand elles eurent termin?, les deux Ferguson emmen?rent Jessie ? la porte. Brenda avait l’air l?g?rement mieux que quand elles s’?taient rencontr?es. Quand ils sortirent, Brenda eut une question ? poser ? Jessie. – Croyez-vous que vous pourriez nous donner le nom des gens qui ont s?curis? votre appartement ? – Bien s?r, dit Jessie, submerg?e par la compassion. Je vous l’enverrai par SMS. Quand elle repartit ? sa voiture, elle r?fl?chit ? des quantit?s de variations alternatives sur l’identit? possible du ravisseur. Ce ne fut que quand elle fut juste ? c?t? de sa voiture qu’elle se rendit compte que tous ses pneus avaient ?t? crev?s. CHAPITRE SEPT Jessie ignora son inqui?tude soudaine et scruta les alentours pour y chercher quelque chose de louche. C’?tait une action ?tonnamment ?hont?e, au milieu de la journ?e, dans une rue calme d’un quartier cossu. Celui qui l’avait fait n’avait visiblement pas peur qu’on le surprenne. Jessie ne vit rien de louche. ? environ un demi-p?t? de maisons, dans la rue, il y avait un camion blanc face ? elle. Cependant, une seconde plus tard, elle vit deux hommes ?merger de l’arri?re en portant un grand sofa vers une maison voisine. Quelques moments plus tard, elle vit un policier ? moto tourner dans une rue voisine et s’?loigner d’elle. Il semblait mener une surveillance standard. ?tait-ce juste de la malchance qu’il n’ait pas ?t? dans le coin quand ses pneus avaient ?t? crev?s ? Ou y avait-il autre chose ? Elle ne voulait pas tirer cette derni?re conclusion mais ne put s’emp?cher de l’envisager. Seulement un mois auparavant, elle avait ?t? profond?ment impliqu?e dans une affaire qui avait mis ? jour un ?norme scandale de corruption dans la police. Cette op?ration avait men? ? l’arrestation de plus d’une dizaine d’agents, dont le directeur du Groupe d’Enqu?tes de la Police de Los Angeles et le sergent Hank Costabile du poste de Van Nuys du Bureau de la Vall?e. Pendant son enqu?te, Costabile les avaient menac?es subtilement puis, plus tard, ouvertement toutes les deux, elle et Hannah. Ce sabotage avait-il ?t? effectu? par un de ses compagnons pour se venger de l’incarc?ration de son copain ? Si tel ?tait le cas, pourquoi attendre un mois et faire quelque chose d’aussi al?atoire et mesquin ? Ou alors, ?tait-il possible que ce soit d’une fa?on ou d’une autre li? aux enl?vements ? Est-ce que le ravisseur surveillait la maison des Ferguson ? ?tait-ce sa fa?on de d?courager Jessie de poursuivre l’enqu?te ? Cela semblait peu probable, car elle doutait qu’il soit pr?sent dans ce quartier-l?. M?me s’il l’?tait, il n’aurait eu aucun moyen de savoir que Jessie, qui ?tait en civil, enqu?tait sur l’affaire. Quel que soit le coupable et son mobile, cela ne changeait rien au fait qu’elle avait besoin d’une d?panneuse. Pendant qu’elle l’attendait, elle appela Ryan pour l’informer aussi bien sur son interrogatoire que sur ses pneus crev?s. Elle lui fournit tous les d?tails en esp?rant qu’il penserait ? une chose qui lui aurait ?chapp?. – Ce pourrait juste ?tre une bande de gosses d?testables, proposa-t-il en parlant des pneus crev?s. – Peut-?tre, conc?da Jessie, mais on est au milieu d’une journ?e d’?cole. M?me si quelques gosses ont s?ch? les cours, pourquoi traverseraient-ils tout le quartier pour crever les pneus d’une seule voiture ? Ce vandalisme me para?t ?tre beaucoup plus concentr? sur une cible sp?cifique. – Tu as probablement raison, admit-il. As-tu eu plus de chance avec la victime du kidnapping ? – Un peu, dit Jessie. Malheureusement, ce qu’elle m’a dit sera plus utile quand nous aurons un suspect en t?te. Avant cela, ?a ne nous apporte pas grand-chose. As-tu des nouvelles ? – Pour ?tre honn?te, je me suis concentr? sur mon t?moignage, cet apr?s-midi. Si je n’avais pas ?a ? faire, je viendrais te chercher. – C’est tr?s gentil mais pas n?cessaire. Il te faudrait une heure pour arriver ici et je ne suis pas press?e. Quand j’aurai fait remplacer les pneus et que je serai de retour, il faudra juste que je relise les fichiers de l’affaire Olin. ? l’autre bout de la ligne, il y eut un moment de silence. Jessie se demanda ce qu’elle avait dit de mal. – Que se passe-t-il ? demanda-t-elle anxieusement. – Rien, dit-il. Je me disais juste que, quand tu pourrais repartir, il n’y aurait pas vraiment besoin que tu reviennes au poste. Decker est all? au quartier g?n?ral pour informer les huiles de ce qui s’est pass? lors de leur raid dans le milieu de la prostitution. Il ne reviendra pas avant plusieurs heures et, fait rare, tu as tr?s peu de travail, aujourd’hui. Tu devrais peut-?tre passer l’apr?s-midi avec Hannah sans que je joue la cinqui?me roue du carrosse. – Tu n’es pas la cinqui?me roue du carrosse, protesta-t-elle. – Tu sais ce que je veux dire. Je t’ai vue souvent, ces derniers temps. ?a pourrait vous donner l’occasion de passer un peu de temps entre filles. De plus, si Hannah d?cidait de profiter de l’occasion pour te r?v?ler quelque chose de personnel, ?a ne serait pas du temps perdu. Jessie fut ?tonn?e par cette suggestion. – Est-ce qu’elle t’a donn? l’impression qu’elle voulait le faire ? demanda-t-elle. Quelque chose lui avait-il ?chapp? ? – Les filles de dix-sept ans n’ont-elles pas toujours des exp?riences personnelles qu’elles gardent pour elles-m?mes, m?me si elles ne subissent pas toutes les m?mes choses que Hannah ? – Oui, dit Jessie. Je voulais juste m’assurer que tu ne faisais pas ?nigmatiquement allusion ? quelque chose de sp?cifique. – Non. Je sais seulement que Hannah est all?e voir la psychologue, la docteure Banane. – La docteure Lemmon, corrigea Jessie en essayant de ne pas rire. – D’accord, d’accord. Je savais que c’?tait un nom de fruit. Et puis, tu as aussi demand? ? Garland Moses de l’examiner. – Tu savais que c’?tait lui hier soir ? – Je suis un tr?s bon inspecteur. De plus, tu lui as attribu? une sonnerie sp?cifique et tu as dit « Bonjour, Garland » quand il a appel?. Donc, j’en suis s?r. – Donc, ?a n’a pas grand-chose ? voir avec tes capacit?s, n’est-ce pas ? dit-elle pour le taquiner. – De toute fa?on, r?pondit-il sans la laisser d?tourner la conversation, je me suis dit qu’elle pourrait peut-?tre appr?cier une occasion de bavarder avec une personne qui ne lui parle pas d’un point de vue professionnel, comme, tu sais, une grande s?ur. Jessie se rendit compte qu’il avait raison. Elles s’entendaient formidablement bien, ces derniers temps, elle et Hannah. Cependant, ? la plupart des moments o? elles pouvaient se distraire ensemble, Ryan ?tait l?. Il ?tait un excellent m?diateur, mais il pouvait aussi emp?cher involontairement Hannah d’aborder des sujets trop lourds avec Jessie. Si elles passaient un peu de temps entre s?urs, Hannah en viendrait peut-?tre ? s’ouvrir, en supposant qu’elle en ressente le besoin. – Ryan Hernandez, dit-elle, se sentant soudain joyeuse contre toute attente vu l’?tat de son v?hicule, tu n’es ni la personne la plus idiote ni la moins perspicace que je connaisse. – Euh … merci. – Tu as aussi un joli cul. Elle l’entendit s’?trangler sur la boisson dont il venait de prendre une gorg?e. Contente d’elle-m?me, elle raccrocha. * Hannah fut clairement et agr?ablement surprise quand Jessie alla la chercher directement ? l’?cole. Elle devint extr?mement enthousiaste quand elle apprit qu’elles allaient s’arr?ter acheter de la glace en retournant ? la maison. – Pourquoi ne travailles-tu pas ? finit-elle par demander ? contrec?ur quand elles command?rent leurs cornets dans une boutique proche de l’appartement. – Je ne suis pas occup?e pour l’instant, dit Jessie, et je voulais passer du temps avec toi. Tu sais, sans ce mec d?gueulasse. – D?gueulasse, ce n’est pas le premier mot qui me vient en t?te quand je pense ? ton petit ami, dit Hannah. – Fais attention, dit Jessie en faisant semblant de la r?primander. Nous ne sommes pas forc?es de partager tous nos sentiments d?s que nous les ressentons. Hannah sourit, visiblement amus?e d’avoir r?ussi ? embarrasser sa s?ur. – Je ne savais pas que les filles de tueurs en s?rie avaient la permission de partager des sentiments, dit-elle d’un air songeur. Jessie essaya de ne pas bondir trop avidement sur l’opportunit? qui se pr?sentait ? elle. – En th?orie, nous n’en avons pas le droit, r?pondit-elle s?chement. Selon la version officielle, nous sommes cens?es ?tre des automates froids et sans ?motion qui essaient pour la forme d’imiter le comportement des ?tres humains normaux. Arrives-tu bien ? suivre ces r?gles ? – Tr?s bien, en fait, r?pondit Hannah en jouant le jeu. ?a semble me venir tout naturellement. S’il existait une sorte de championnat professionnel, je crois que je serais une excellente participante. – Moi aussi, convint Jessie en l?chant son cornet de glace ? la menthe et aux p?pites de chocolat. Tu serais probablement la t?te de s?rie num?ro un du tournoi. Sans me vanter, je crois que je serais une tr?s bonne deuxi?me t?te de s?rie moi-m?me. – Tu rigoles ? demanda Hannah en avalant une grande quantit? de glace. Tu es au mieux une rempla?ante. – Pourquoi ? demanda Jessie. – Tu exprimes de l’affection pour les autres. Tu as des amiti?s sinc?res. Tu vis une vraie relation avec une personne ? laquelle tu sembles tenir. C’est presque comme si tu ?tais un ?tre humain normal. – Presque ? – Eh bien, soyons honn?te, Jessie, dit Hannah. Tu consid?res encore presque toutes tes interactions avec une personne comme une possibilit? de la profiler. Tu te plonges dans ton travail pour ?viter les communications difficiles dans ta vie personnelle. Tu te comportes comme une biche qui craint que tous ceux qu’elle rencontre soient des chasseurs envoy?s pour l’abattre. Donc, tu n’es pas compl?tement normale. – Ouah, dit Jessie, ? la fois impressionn?e et un peu perturb?e par la perspicacit? de sa s?ur. Tu devrais peut-?tre devenir profileuse. Rien ne t’?chappe. – Effectivement, ajouta Hannah, tu essaies aussi de minimiser les v?rit?s d?sagr?ables en formulant des commentaires narquois. Jessie sourit admirativement. – Bien vu, dit-elle. Si tu es aussi consciente de notre immaturit? ?motionnelle commune, est-ce que cela signifie que les s?ances avec la docteure Lemmon portent leurs fruits ? Hannah leva les yeux au ciel pour sugg?rer ? Jessie qu’elle trouvait que sa tentative de d?tournement de la conversation ?tait particuli?rement maladroite. – Cela signifie que je suis consciente de mes probl?mes, pas forc?ment que je suis capable de les r?soudre. Je veux dire, depuis combien de temps vas-tu la voir ? – Euh … Comme j’ai trente ans, maintenant, ?a fait presque dix ans, dit Jessie. – Et tu es encore tortur?e, signala Hannah. ?a ne me rend pas tr?s optimiste. Jessie ne put s’emp?cher de rire. – Tu ne m’as pas connue ? cette ?poque, dit-elle. Par rapport ? ce que j’?tais ? vingt ans, je suis l’image m?me d’une personne en bonne sant? mentale. Hannah sembla y r?fl?chir tout en prenant une bouch?e de son cornet. – Donc, tu dis que, dans dix ans, je pourrai moi aussi avoir un petit ami beaucoup trop beau pour moi ? demanda-t-elle. – Qui recourt aux commentaires narquois pour ?viter les v?rit?s ?motionnelles g?nantes, maintenant ? demanda Jessie. Hannah lui tira la langue. Jessie rit ? nouveau puis l?cha ? nouveau sa glace. Elle d?cida de ne plus insister. Hannah s’?tait plus ouverte qu’elle ne s’y ?tait attendue. Jessie ne voulait pas que cette conversation prenne une tournure parentale conventionnelle. De plus, elle consid?rait que, si Hannah acceptait d’admettre qu’elle ?tait vraiment en d?calage avec les autres, c’?tait un bon signe. Les inqui?tudes que partageaient Garland et la docteure Lemmon ?taient peut-?tre exag?r?es. Elle n’avait peut-?tre aucune raison de craindre constamment que sa demi-s?ur soit une tueuse en s?rie en cours de formation. Cette fille n’?tait peut-?tre qu’une adolescente qui avait ?t? connu l’enfer et essayait d’en trouver la sortie non sans maladresse. Regardant Hannah s’essuyer un filet de chocolat du menton, ce fut ce qu’elle d?cida de croire. Au moins pour le moment. CHAPITRE HUIT Morgan Remar ?tait ?puis?e. Son vol de retour de la conf?rence des Services Sociaux d’Austin ?tait arriv? en retard. Elle ?tait tellement fatigu?e qu’elle avait somnol? quand son mari, Ari, l’avait remmen?e de l’a?roport. Quand ils ?taient arriv?s dans leur maison du quartier de West Adams pr?s du centre-ville de Los Angeles, il avait ?t? plus de 23 h. Elle avait rendez-vous le lendemain matin avec Jessie Hunt, l’amie profileuse de Kat, et elle voulait passer une nuit de sommeil digne de ce nom avant. Bien s?r, cela avait ?t? presque impossible ces derniers temps. Depuis son ?vasion, qui remontait maintenant ? plus de deux semaines, elle se r?veillait au moins trois fois par nuit, parfois en criant, toujours en sueur. Elle ne pouvait s’emp?cher de sentir l’odeur de pin de la penderie dans laquelle elle avait ?t? d?tenue pendant cinq jours. Elle sursautait ? chaque fois qu’une porte claquait ou qu’une voiture klaxonnait. Elle craignait que revivre son exp?rience pour l’amie de Kat ne fasse qu’exacerber ces sympt?mes. Ils arriv?rent ? la maison et Ari se gara dans l’all?e. Aucun d’eux ne sortit de la voiture avant que la barri?re de s?curit? ne se soit referm?e derri?re eux. Elle avait ?t? fournie avec la maison quand ils l’avaient achet?e deux ans auparavant mais, comme cette maison vieillissante elle-m?me, qu’ils avaient r?nov?e lentement, la barri?re avait ?t? en mauvais ?tat. Le jour o? Morgan s’?tait ?vad?e, pendant qu’elle s’?tait remise de ses ?motions ? l’h?pital, elle avait suppli? Ari de faire r?parer cette barri?re. Quand elle ?tait rentr?e ? la maison, elle l’avait trouv?e en parfait ?tat de fonctionnement. Cela n’aurait pas d? la surprendre. Ari ?tait la personne la plus gentille et la plus g?n?reuse qu’elle ait jamais rencontr?e, exactement le contraire de son premier mari, qu’elle avait quitt? sans se sentir coupable. M?me avant ces ?v?nements r?cents, Ari avait fait preuve d’une patience impressionnante envers le caract?re de sa femme, qu’elle savait orageux. Depuis l’enl?vement, il avait quasiment ?t? un saint. Il l’avait emmen?e chez le psychologue, l’avait mass?e, avait pr?par? tous les repas et l’avait tenue contre lui pendant des heures. – Tu es r?veill?e ? demanda-t-il gentiment quand elle s’?tira sur le si?ge passager. – Oui, dit-elle en baillant. Elle avait ?tonnamment faim. Les cookies au sucre qu’on lui avait offerts dans l’avion n’avaient pas suffi. – Tu veux que je te pr?pare quelque chose ? proposa-t-il. – Non. Je sais que tu es ?puis?. Et puis, je suis une grande fille. Je peux me pr?parer un en-cas toute seule. – Vraiment ? dit-il d’un ton gentiment taquin. Elle fit malicieusement la grimace, sortit de la voiture et se rendit ? la porte lat?rale de la maison en boitant et en essayant de ne pas trop appuyer sur le grand pl?tre qu’elle avait ? la jambe gauche. Elle faisait semblant de ne pas y penser parce que, si elle y pensait, cela signifiait aussi qu’elle serait forc?e de se souvenir pourquoi elle l’avait. Or, elle ne voulait pas se souvenir de la mani?re dont elle avait d?fonc? la porte de penderie en bois que son ravisseur avait mal verrouill?e. Elle ne voulait pas se souvenir du son que sa cheville gauche avait produit quand elle s’?tait fendue et courb?e dans le mauvais sens lors du coup final qui avait ouvert la porte de la penderie. Elle repoussa cette pens?e. Quand Ari porta son sac dans la maison, elle sourit, peut-?tre pour la premi?re fois de toute la journ?e. C’?tait agr?able d’?tre de retour chez soi, avec le seul homme en lequel elle pouvait avoir confiance. C’?tait agr?able de savoir que, le lendemain, elle rencontrerait une personne qui, selon Kat, ferait forc?ment avancer l’enqu?te. Morgan avait parfaitement su qui ?tait Jessie Hunt avant que Kat l’ait mentionn?e. Cette femme avait dam? le pion ? deux tueurs en s?rie avant d’avoir trente ans. Elle avait ?chapp? ? la tentative d’assassinat de son propre mari, qui semblait ?tre cent fois pire que l’ex de Morgan. De plus, elle paraissait imperturbable en d?pit de son pass? tourment?, ou du moins pendant les interviews. Pour ?tre honn?te, Morgan ?tait un peu impressionn?e. Cependant, Kat lui avait assur? que Jessie ?tait accessible en tant que personne et qu’elle tenait ?norm?ment ? obtenir justice pour les victimes. Donc, elle allait la rencontrer, m?me si cela devait lui donner les pires cauchemars dans les jours qui suivraient. Cependant, tout cela se passerait demain. Ce soir, elle avait besoin d’un en-cas tardif. Pendant qu’elle se rendait ? la cuisine en boitant, Ari alla prendre une douche. Il ?tait courtier en marchandises et avait un rendez-vous ? 6 heures le lendemain avec l’?quipe de la C?te Est. Donc, il pr?voyait de se lever, de s’habiller et d’arriver t?t au bureau. Entendant l’eau se mettre ? couler dans la chambre principale au fond du couloir, Morgan fouilla dans le r?frig?rateur. Elle voulait quelque chose d’app?tissant, mais de pas trop lourd. Il y avait de la dinde en tranches, qu’elle d?cida de rouler pour en faire une tortilla avec un peu de moutarde ?pic?e. ?a devrait lui permettre de tenir jusqu’au matin. L’id?e d’aller travailler le lendemain apr?s avoir rencontr? Jessie lui inspirait un m?lange complexe d’enthousiasme et de terreur. La conf?rence s’?tait bien d?roul?e et elle ?tait impatiente de mettre en pratique certains des nouveaux programmes qu’elle avait d?couverts. Le refuge pour sans-abris o? elle travaillait ? Venice ?tait un pilier de la communaut?, mais il ?tait aussi lent ? adopter les nouvelles techniques d’entr?e en contact avec les populations ? risque. Pour une partie de la ville aussi styl?e et avant-garde, le programme de soins qu’ils employaient ?tait ?tonnamment traditionnel. M?me si elle ?tait enthousiaste ? l’id?e de proposer quelque chose de nouveau, elle craignait tout autant de revenir ? l’endroit o? elle avait ?t? enlev?e. Demain, elle y reviendrait pour la premi?re fois apr?s s’?tre remise ? la maison pendant les quelques derni?res semaines. Le refuge avait embauch? un vigile suppl?mentaire pour escorter le personnel entre le parking et le bureau, mais Morgan n’avait pas ?t? enlev?e ? cet endroit. Elle avait ?t? enlev?e pendant qu’elle revenait au bureau apr?s avoir d?jeun? sur la promenade du Venice Boardwalk, ? seulement quelques pas de la plage de Muscle Beach, c?l?bre pour sa fr?quentation assidue par les c?l?brit?s. M?me avec tous ces gens, apparemment, personne n’avait fait attention ? l’homme qui ?tait arriv? derri?re elle, avait appuy? sur son visage un tissu tremp? dans un produit chimique et l’avait jet?e, inconsciente, sur le si?ge arri?re d’un v?hicule gar? ? seulement quelques m?tres. Si ce n’avait ?t? pour le petit gar?on qui avait assist? ? ces ?v?nements pendant que sa m?re achetait des tee-shirts bon march? sur un ?tal en plein air de l’autre c?t? du Boardwalk, m?me ces d?tails seraient rest?s inconnus. Malheureusement, le gar?on, qui n’avait que cinq ans, avait ?t? si choqu? qu’il n’avait gu?re pu d?crire la sc?ne, sinon pour dire que l’homme ?tait blanc et la voiture bleue. Comme avec le souvenir de la penderie, Morgan essaya de se d?barrasser aussi de cette image. Elle avait tout planifi? ? plusieurs reprises avec le directeur du refuge. Dor?navant, elle emm?nerait son d?jeuner et elle mangerait au bureau. Quand elle arriverait au parking, elle appellerait la s?curit? et le vigile la retrouverait ? sa voiture et l’emm?nerait ? la porte de devant du refuge. Il ferait la m?me chose dans l’autre sens ? la fin de la journ?e. Morgan garderait la fonction de g?olocalisation de son t?l?phone activ?e tout le temps et appellerait Ari quand elle arriverait au travail et quand elle repartirait pour rentrer ? la maison. Elle esp?rait que, avec l’aide de Kat et de Jessie Hunt, la police attraperait cet homme et qu’elle pourrait reprendre une vie presque normale. Elle savait que trois autres femmes avaient subi la m?me ?preuve qu’elle, dont une qui s’?tait ?chapp?e la veille au soir. Elle ne voulait pas que d’autres femmes connaissent les m?mes souffrances. La r?union de demain serait l’?tape suivante qui pr?cipiterait la fin des agissements de leur ravisseur. Alors qu’elle posait les ingr?dients de son en-cas sur l’?lot de la cuisine, elle entendit un bruit m?tallique fort r?sonner ? l’ext?rieur. Tout son corps se figea sous la peur. Elle saisit un couteau de boucher dans le pr?sentoir pos? sur l’?lot, ?teignit la lumi?re de la cuisine, se rendit ? la porte lat?rale en tra?nant les pieds et alluma la lumi?re du porche. Ce qu’elle vit lui fit pousser un soupir de soulagement. Un raton-laveur essayait agressivement de s’introduire dans une de leurs poubelles verrouill?es. Il avait r?ussi ? introduire une patte dans l’ouverture minuscule entre la poubelle et son couvercle, mais il n’avait pas vraiment r?ussi ? aller plus loin. Quand la lumi?re s’alluma, il tourna prestement la t?te vers Morgan et elle aurait pu jurer avoir vu un air coupable lui passer bri?vement sur le visage avant qu’il descende de la poubelle d’un bond et se pr?cipite dans l’obscurit?. Elle rit silencieusement. Si un raton-laveur cambrioleur pouvait lui provoquer des palpitations cardiaques, il allait lui falloir un certain temps pour retrouver une vie ? peu pr?s normale. ? l’int?rieur, elle ralluma la lumi?re et retourna ? l’?lot pour pr?parer son en-cas. Cependant, quand elle posa le couteau et tendit le bras vers la dinde, elle remarqua que la tortilla avait disparu. J’aurais jur? l’avoir sortie. Elle se retourna vers le r?frig?rateur. ? ce moment-l?, elle remarqua les empreintes sales de ce qui ressemblait ? une botte. Ni Morgan ni Ari ne portaient de chaussures dans la maison. La sensation de peur gla?ante qui venait de la quitter revint soudain, comme si un ?norme poing gel? lui avait soudain enserr? tout le corps. Elle reprit le couteau de boucher. Quand elle jeta un coup d’?il au plan de travail, elle remarqua autre chose. Le petit ?conome avait disparu du bloc de couteaux. Elle commen?a ? appeler Ari, mais l’ombre jaillit du cellier derri?re elle et plaqua une main sur sa bouche juste avant qu’elle n’ait pu prononcer le nom. Elle essaya de se lib?rer, mais l’assaillant eut le temps d’enfoncer quatre fois l’?conome dans le bas de son dos avant qu’elle ne pense ? se servir de son couteau de boucher contre lui. Morgan haleta sous la main qui lui couvrait la bouche. Elle ne sut pas si elle avait touch? son ennemi, car la douleur et le choc l’englobaient trop pour qu’autre chose lui parvienne. Elle perdit le compte du nombre de fois qu’il enfon?a le petit couteau dans la peau tendre situ?e au-dessus de ses hanches. ? un moment, elle s’effondra au sol. Elle atterrit durement sur le carrelage de la cuisine et sentit son cr?ne y rebondir une fois avant de s’immobiliser. Elle ?tait ? plat ventre mais, comme elle avait les yeux ouverts, elle vit son agresseur placer d?licatement le couteau sur l’?lot avec ses mains gant?es. Alors, il se pencha et essuya la lame du couteau de boucher auquel elle s’accrochait encore. Elle ne voyait pas son visage. – Repens-toi, lui chuchota-t-il ? l’oreille. Alors qu’elle perdait rapidement conscience, Morgan reconnut la voix de son ravisseur et frissonna avec horreur. Il se redressa et baissa les yeux vers elle avec peu d’int?r?t avant de partir vers la porte lat?rale. Juste avant qu’il sorte et referme la porte derri?re lui, elle le vit porter sa tortilla ? la bouche et en prendre une grande bouch?e. Alors, il ferma la porte et partit. Trois minutes plus tard, Morgan mourut. CHAPITRE NEUF Jessie ?tait frustr?e. Elle savait qu’elle devrait probablement aller se coucher. Apr?s tout, il ?tait presque minuit et Ryan ?tait chez lui ce soir. Pourtant, elle n’?tait pas fatigu?e. Elle avait pos? les dossiers des quatre affaires sur le lit. Tout en ?coutant Hannah rire dans l’autre chambre en regardant un ?pisode de Top Chef, elle essayait de comprendre l’affaire. M?me si ces femmes avaient beaucoup de traits communs, il n’y avait pas assez de vraies similitudes et aucun mobile ?vident ne lui sautait aux yeux. Elles avaient toutes d’un peu moins de trente ans ? environ trente-cinq ans. Elles appartenaient toutes au moins ? la classe moyenne, parfois cossue, et habitaient dans de beaux quartiers. Cependant, elles n’avaient rien d’autre en commun. Aucune d’elles n’habitait dans le m?me quartier de la ville. Aucune d’elles n’avait ?t? trouv?e pr?s de l’endroit o? elle avait ?t? enlev?e ou pr?s des autres victimes. Trois d’entre elles ?taient mari?es, mais l’une d’elle, la victime la plus r?cente, ne l’?tait pas. Trois d’entre elles ?taient blanches, mais la troisi?me victime, Jayne Castillo, ?tait hispano-am?ricaine. L’une d’elles avait des enfants, mais pas les trois autres. Deux d’entre elles travaillaient dans des bureaux, l’une d’elles avait une entreprise ? domicile et la derni?re ?tait femme au foyer. Aucune n’avait de casier judiciaire. Jessie voulait avoir quelque chose de positif ? partager avec Morgan Remar quand elle la retrouverait le lendemain matin mais, pour l’instant, il n’y avait pas grand-chose. Elle esp?rait qu’une chose que Morgan lui dirait correspondrait peut-?tre ? ce que Brenda Ferguson lui avait dit aujourd’hui. Alors qu’elle se demandait si elle allait dire ? Hannah qu’il ?tait l’heure de se coucher, son t?l?phone sonna. C’?tait Ryan. – Je te manque ? demanda-t-elle. – Toujours, dit-il, mais ce n’est pas pour ?a que je t’appelle. On vient de m’assigner une affaire. Decker veut que tu t’en charges avec moi. Je vais au poste. Est-ce que je peux te r?cup?rer en route ? Je pourrai ?tre l? dans quinze minutes. – Bien s?r, dit-elle en commen?ant d?j? ? ranger les dossiers de toutes les victimes. C’est quelle affaire ? – Je ne sais pas encore grand-chose, juste qu’un homme a trouv? sa femme morte dans leur cuisine il y a moins d’une heure. Ils habitent ? West Adams. Elle avait presque trente ans. Elle a ?t? poignard?e plusieurs fois dans le dos avant de mourir d’h?morragie externe. – OK, dit Jessie. Je te retrouve devant dans quinze minutes. ?a me laissera le temps de prier Hannah d’aller dormir. – Bonne chance. – Merci. Comme elle regarde une ?mission de cuisine, je vais en avoir besoin. * Ils arriv?rent ? la maison ? minuit trente-cinq. La zone qui s’?tendait autour de la maison ?tait d?j? boucl?e et entour?e par quatre voitures de police, une ambulance et une camionnette de m?decin l?giste. Jessie et Ryan descendirent de leur voiture ? un demi-p?t? de maisons de distance et long?rent plusieurs manoirs vieux d’un si?cle avant d’atteindre la sc?ne de crime. Cette maison ?tait grande et impressionnante, elle aussi, mais elle ?tait en moins bon ?tat que les autres. Dans la cour de devant, une b?che et un tas de bois de construction sugg?raient que les propri?taires avaient essay? d’y rem?dier. Ryan montra son badge et un policier en uniforme souleva le cordon de police pour qu’ils puissent passer dessous et aller ? la porte d’entr?e. Ils crois?rent l’agent Pete Clark, policier v?t?ran avec une boule ? z?ro grise et des bras de figurine de super-h?ros. C?l?bre ? la section pour ?tre un homme qui va droit au but, il ne les d??ut pas. – Comment ?a va, Pete ? demanda Ryan quand ils le crois?rent au perron. – Alors que les Dodgers allaient entrer dans le treizi?me tour de batte, on m’a appel?, donc, je ne vais pas tr?s bien. Cette affaire m’a g?ch? la soir?e, en somme. – D?sol? que ce fichu meurtre t’ait emp?ch? de regarder ta partie de base-ball, r?pondit Ryan avec une compassion de fa?ade. Tu veux bien nous expliquer ce qui s’est pass? ici ? – Pas de probl?me, dit Clark, passant en mode professionnel sans s’offenser aucunement de l’ironie de Ryan. Suivez-moi. Avant d’entrer dans la maison, Jessie prit le temps de rassembler ses pens?es. Tout ce qu’elle allait voir pourrait devenir un indice qui lui permettrait de comprendre l’?tat d’esprit de l’assassin. Elle entra en ?cartant toute pens?e de demi-s?urs troubl?es et de femmes enlev?es. Quand Clark les emmena dans le hall en marchant lourdement sur le plancher affaiss? et irr?gulier, il les mit au courant. – La victime est une femme de vingt-neuf ans, mari?e, sans enfants. Son mari venait de la remmener de l’a?roport international de Los Angeles suite ? une conf?rence qui avait eu lieu hors de la ville. Il est all? se doucher pendant qu’elle se pr?parait un en-cas. Quand il est sorti de la douche, il l’a trouv?e morte sur le sol de la cuisine. Elle avait ?t? poignard?e onze fois dans le bas du dos. La nourriture ?tait encore sur l’?lot de la cuisine, avec un ?conome couvert de sang. Elle tenait un couteau de boucher, mais il semble qu’elle n’ait pas eu la possibilit? de s’en servir. Ils arriv?rent dans la cuisine, o? un autre agent leur donna des chaussons ? mettre par-dessus leurs chaussures. Jessie vit la victime allong?e face contre terre de l’autre c?t? de l’?lot. Elle avait la t?te d?tourn?e d’eux, vers la porte. Elle avait un ?norme pl?tre sur la jambe gauche. Le pl?tre ?tait tach? de sang. – Au sol, nous avons trouv? des empreintes de bottes qui menaient ? l’all?e, ajouta Clark. Le mari dit qu’ils ne portaient jamais de chaussures dans la maison. Donc, les empreintes sont en cours d’analyse ; on n’a pas encore les r?sultats. L’?quipe de la sc?ne de crime dit aussi que la poign?e de l’?conome a ?t? essuy?e et qu’ils ne croient donc pas qu’ils vont pouvoir trouver quelque chose dessus. – Qui est la victime ? demanda Ryan. – C’est ?a le plus fou, r?pondit Clark. C’est une des femmes kidnapp?es qui se sont ?chapp?es r?cemment. Elle s’appelait Morgan Remar. Jessie tendit machinalement la main pour s’appuyer contre l’encadrement de la porte. Ryan se tourna vers elle, non moins choqu?. – En ?tes-vous s?r ? demanda-t-il ? Clark. – Oui. Son mari nous a dit qu’elle se sentait finalement assez bien pour repartir travailler demain pour la premi?re fois depuis son enl?vement. C’est vraiment une honte. Quand elle fut s?re de pouvoir rester debout sans assistance, Jessie contourna l’?lot pour voir clairement le visage de la victime. Malgr? le visage bleu p?le et les yeux marron vides et vitreux, Jessie reconnut la femme qu’elle avait vue sur les photos du dossier, m?me si ses cheveux marron clair ?taient beaucoup plus courts maintenant parce qu’on les lui avait coup?s ? l’h?pital. C’?tait bien la femme qu’elle devait retrouver le lendemain. – Y a-t-il des traces de vol ? demanda-t-elle doucement, ?tonn?e d’entendre sa propre voix. A-t-on pris quelque chose ? Des objets de valeur ? Son sac ? main ? – Pour autant que nous sachions, rien, dit Clark. – O? est le mari ? demanda Ryan. – Il est dans la chambre. Il est vraiment secou?. Pour moi, il est sous le choc. Les m?decins veulent l’emmener ? l’h?pital, mais il ne veut partir que quand ils auront emmen? le corps de sa femme. Il dit qu’il ne peut pas la laisser ici. – Savons-nous s’il a un casier judiciaire ? demanda Ryan. Jessie r?pondit avant que Clark ne le puisse. – Il n’en a pas, dit-elle. Il a ?t? arr?t? pour une bagarre dans un bar pr?s du campus quand il ?tait ?tudiant de premier cycle ? l’universit? de Californie ? Los Angeles mais, plus tard, les poursuites ont ?t? abandonn?es. – Comment le savez-vous, Hunt ? demanda Clark, stup?fait. – Je fournis ? une amie d?tective priv?e des services de consultant pour l’affaire d’enl?vement, dit-elle. En fait, j’ai lu le dossier de Morgan ce soir. Je sais tout sur le parcours scolaire des deux Remar, sur leur rencontre, je connais leur date de mariage et je sais combien de temps ils ont exerc? leur profession. Je savais m?me qu’ils habitaient ? West Adams. Pourtant, je n’avais pas fait le lien. – Pourquoi l’aurais-tu fait ? demanda Ryan. Je veux dire, il y avait combien de chances que ce soit la m?me victime ? – C’est ? creuser, marmonna Jessie plus pour elle-m?me que pour Ryan. – Que dites-vous ? lui demanda Clark d’un air sceptique. Celui qui l’a kidnapp?e serait revenu finir le boulot ? ?a ne ressemble pas ? son mode op?ratoire, d’apr?s ce que j’ai vu. – Vous avez raison, admit Jessie. ?a n’y ressemble pas. Cela pourrait n’?tre qu’une co?ncidence, une terrible malchance. – Ou alors, ajouta Ryan, c’est peut-?tre que M. Remar a d?cid? de profiter de la situation pour se d?barrasser de sa femme. Avec son enl?vement, il aurait eu le moyen id?al de faire accuser quelqu’un d’autre. Nous devrions lui parler avant qu’il ait le temps de se remettre. – Allez-y, dit Clark. Le corps ne sera pas emport? avant au moins vingt minutes. Comme il ne veut pas bouger avant ce moment-l?, ?a vous donne l’occasion id?ale. Il les emmena vers la chambre principale, o? Ari Remar ?tait assis sur le rebord du lit, vo?t?, la t?te dans les mains. Il perdait ses cheveux et avait d?cid? de ne pas le cacher mais tout simplement de se faire raser la t?te ; il lui restait donc un tout petit peu de cheveux au sommet et ? l’arri?re de la t?te. Il avait l’air fragile et pitoyable dans son tee-shirt blanc et son short, les v?tements qu’il avait apparemment mis apr?s s’?tre douch?. Jessie l’imagina entrer dans la cuisine en esp?rant convaincre sa femme de venir au lit apr?s une longue journ?e au cours de laquelle elle avait essay? de se d?tendre pour pouvoir repartir travailler pour la premi?re fois le lendemain. Cependant, soudain, une autre image lui vint en t?te, une image qu’elle ne pouvait pas ignorer. Elle se tourna vers Clark. – Est-ce que quelqu’un a v?rifi? la douche ? demanda-t-elle. – Que voulez-vous dire ? demanda-t-il. – Est-ce que l’?quipe de la sc?ne de crime a v?rifi? s’il y a des r?sidus de sang dans le bac de la douche, dans la grille d’?vacuation ou dans les tuyaux dessous ? – Je vais voir, dit Clark. – Je vous en prie, insista-t-elle. Je suppose qu’ils vont aussi v?rifier la poubelle pour voir s’il y a des v?tements tach?s dedans. Êîíåö îçíàêîìèòåëüíîãî ôðàãìåíòà. Òåêñò ïðåäîñòàâëåí ÎÎÎ «ËèòÐåñ». Ïðî÷èòàéòå ýòó êíèãó öåëèêîì, êóïèâ ïîëíóþ ëåãàëüíóþ âåðñèþ (https://www.litres.ru/pages/biblio_book/?art=63590891&lfrom=688855901) íà ËèòÐåñ. Áåçîïàñíî îïëàòèòü êíèãó ìîæíî áàíêîâñêîé êàðòîé Visa, MasterCard, Maestro, ñî ñ÷åòà ìîáèëüíîãî òåëåôîíà, ñ ïëàòåæíîãî òåðìèíàëà, â ñàëîíå ÌÒÑ èëè Ñâÿçíîé, ÷åðåç PayPal, WebMoney, ßíäåêñ.Äåíüãè, QIWI Êîøåëåê, áîíóñíûìè êàðòàìè èëè äðóãèì óäîáíûì Âàì ñïîñîáîì.
Íàø ëèòåðàòóðíûé æóðíàë Ëó÷øåå ìåñòî äëÿ ðàçìåùåíèÿ ñâîèõ ïðîèçâåäåíèé ìîëîäûìè àâòîðàìè, ïîýòàìè; äëÿ ðåàëèçàöèè ñâîèõ òâîð÷åñêèõ èäåé è äëÿ òîãî, ÷òîáû âàøè ïðîèçâåäåíèÿ ñòàëè ïîïóëÿðíûìè è ÷èòàåìûìè. Åñëè âû, íåèçâåñòíûé ñîâðåìåííûé ïîýò èëè çàèíòåðåñîâàííûé ÷èòàòåëü - Âàñ æä¸ò íàø ëèòåðàòóðíûé æóðíàë.