×òî æå åñòü ó ìåíÿ? Äûðû â äðàíûõ êàðìàíàõ, Òðè ìîðùèíû íà ëáó, Äà èñò¸ðòûé ïÿòàê... Íî íå æàëêî íè äíÿ- Ìíå ñóäüáîþ ïðèäàííûõ, Õîòü ïîðîé ÿ æèâó Ïîïîäàÿ â ïðîñàê. Âñ¸ ÷òî åñòü ó ìåíÿ: Ñîâåñòü, ÷åñòü è óìåíüå. ß îòäàì íå ñêóïÿñü- Ïðîñòî òàê çà ïóñòÿê. Çà ïîñòåëü ó îãíÿ, Äîáðîòó áåç ñòåñíåíüÿ. È çà òî, ÷òî ïðîñòÿñü, Íå çàáûòü ìíå íè êàê... Âñ¸ ÷

Le Visage du Meurtre

Le Visage du Meurtre Blake Pierce Les Myst?res de Zoe Prime #2 « UN CHEF-D’?UVRE DU GENRE THRILLER ET ENQU?TE. Blake Pierce a merveilleusement construit des personnages ayant un charact?re psychologique si bien d?crit que l’on sent ce qui se passe dans leurs esprits, on suit leurs peurs et l’on se r?jouit de leur succ?s. Plein de rebondissements, ce livre vous tiendra ?veill?s jusqu’? la derni?re page. » –-Books and Movie Reviews, Roberto Mattos (re Sans Laisser de Traces) LE VISAGE DU MEURTRE est le tome #2 d’une nouvelle s?rie thriller FBI de l’auteur ? succ?s selon USA Today, Blake Pierce, dont le bestseller Sans Laisser de Traces (Tome 1) (t?l?chargement gratuit) a re?u plus de 1000 critiques cinq ?toiles. L’Agent Sp?cial FBI Zoe Prime souffre d’une maladie rare qui lui conf?re aussi un talent unique : elle voit le monde ? travers le prisme des chiffres. Des chiffres qui la tourmentent, la rendent incapable de comprendre les gens, et lui laissent une vie sentimentale rat?e – mais ils lui permettent ?galement de voir des sch?mas qu’aucun autre agent du FBI ne peut voir. Zoe garde ce secret pour elle, honteuse, de peur que ses coll?gues ne l’apprennent. Lorsque des femmes sont retrouv?es assassin?es aux abords de Washington, leurs corps marqu?s de num?ros myst?rieux, le FBI, perplexe, fait appel ? l’Agent Sp?cial Zoe Prime pour d?chiffrer l’?nigme math?matique et trouver le tueur en s?rie. Pourtant, les chiffres n’ont aucun sens. Constituent-ils un sch?ma ? Une formule ? Ou n’ont-ils aucun sens ? Pour Zoe, affect?e par ses probl?mes personnels, le temps est un luxe qu’elle n’a pas, tandis que d’autres corps s’accumulent et que tous les yeux se tournent vers elle pour r?soudre une ?quation qui, peut-?tre, est insoluble. Attrapera-t-elle le tueur ? temps ? Un thriller plein d’action et de suspense, LE VISAGE DU MEURTRE est le tome #2 d’une nouvelle s?rie fascinante qui vous fera tourner les pages jusqu’? tard dans la nuit. Le tome #3 de la s?rie – LE VISAGE DE LA PEUR —est ?galement disponible en pr?-commande. Blake Pierce LE VISAGE DU MEURTRE LE VISAGE DU MEURTRE (LES MYST?RES DE ZOE PRIME – TOME 2) B L A K E   P I E R C E Blake Pierce Blake Pierce a ?t? couronn? meilleur auteur et bestseller d'apr?s USA Today pour Les Enqu?tes de RILEY PAIGE – seize tomes (? suivre), la S?rie Myst?re MACKENZIE WHITE – treize tomes (? suivre) ; Les Enqu?tes d'AVERY BLACK – six tomes ; Les Enqu?tes de KERI LOCKE – cinq tomes ; LES ORIGINES DE RILEY PAIGE – cinq tomes (? suivre) ; la S?rie Myst?re KATE WISE – six tomes (? suivre) ; la S?rie Thriller Psychologique CHLOE FINE – cinq tomes (? suivre) ; la S?rie Thriller Psychologique JESSIE HUNT – cinq tomes (? suivre) ; la S?rie Thriller Psychologique FILLE AU PAIR – deux tomes (? suivre) et Les Enqu?tes de ZOE PRIME – deux tomes (? suivre). Lecteur passionn?, fan de thriller et romans ? suspense depuis son plus jeune ?ge, Blake adore vous lire, rendez-vous sur www.blakepierceauthor.com – Restons en contact ! Copyright © 2020 de Blake Pierce. Tous droits r?serv?s. Sauf autorisation en vertu de la loi am?ricaine sur le droit d’auteur de 1976, aucune partie de cette publication ne peut ?tre reproduite, distribu?e ou transmise sous quelque forme ou par quelque moyen que ce soit, ou conserv?e dans une base de donn?es ou un syst?me d’extraction, sans l’autorisation pr?alable de l’auteur. Ce livre ?lectronique est ? destination de votre usage personnel uniquement. Ce livre ?lectronique ne peut ?tre revendu ou donn? ? des tiers. Si vous souhaitez partager ce livre avec un tiers, veuillez acheter un exemplaire suppl?mentaire pour chaque destinataire. Si vous lisez ce livre et ne l’avez pas achet?, ou s’il n’a pas ?t? achet? pour votre usage personnel, veuillez le retourner et acheter votre propre exemplaire. Nous vous remercions de respecter le travail acharn? de cet auteur. Ceci est une ?uvre de fiction. Les noms, personnages, entreprises, organisations, lieux, ?v?nements et incidents sont soit le produit de l’imagination de l’auteur, soit utilis?s de mani?re fictionnelle. Toute ressemblance avec des personnes existantes ou ayant exit? est purement fortuite. Image de la veste Copyright Tavarius, utilis?e sous licence de Shutterstock.com. LIVRES PAR BLAKE PIERCE LES MYST?RES DE AD?LE SHARP LAISS? POUR MORT (Volume 1) CONDAMN? ? FUIR (Volume 2) CONDAMN? ? SE CACHER (Volume 3) LA FILLE AU PAIR PRESQUE DISPARUE (Livre 1) PRESQUE PERDUE (Livre 2) PRESQUE MORTE (Livre 3) LES MYST?RES DE ZOE PRIME LE VISAGE DE LA MORT (Tome 1) LE VISAGE DU MEURTRE (Tome 2) LE VISAGE DE LA PEUR (Tome 3) S?RIE SUSPENSE PSYCHOLOGIQUE JESSIE HUNT LA FEMME PARFAITE (Volume 1) LE QUARTIER ID?AL (Volume 2) LA MAISON ID?ALE (Volume 3) LE SOURIRE ID?ALE (Volume 4) LE MENSONGE ID?ALE (Volume 5) LE LOOK IDEAL (Volume 6) S?RIE SUSPENSE PSYCHOLOGIQUE CHLOE FINE LA MAISON D’? C?T? (Volume 1) LE MENSONGE D’UN VOISIN (Volume 2) VOIE SANS ISSUE (Volume 3) LE VOISIN SILENCIEUX (Volume 4) DE RETOUR ? LA MAISON (Volume 5) S?RIE MYST?RE KATE WISE SI ELLE SAVAIT (Volume 1) SI ELLE VOYAIT (Volume 2) SI ELLE COURAIT (Volume 3) SI ELLE SE CACHAIT (Volume 4) SI ELLE S’ENFUYAIT (Volume 5) SI ELLE CRAIGNAIT (Volume 6) LES ORIGINES DE RILEY PAIGE SOUS SURVEILLANCE (Tome 1) ATTENDRE (Tome 2) PIEGE MORTEL (Tome 3) ESCAPADE MEURTRIERE (Tome 4) LA TRAQUE (Tome 5) LES ENQU?TES DE RILEY PAIGE SANS LAISSER DE TRACES (Tome 1) R?ACTION EN CHA?NE (Tome 2) LA QUEUE ENTRE LES JAMBES (Tome 3) LES PENDULES ? L’HEURE (Tome 4) QUI VA ? LA CHASSE (Tome 5) ? VOTRE SANT? (Tome 6) DE SAC ET DE CORDE (Tome 7) UN PLAT QUI SE MANGE FROID (Tome 8) SANS COUP F?RIR (Tome 9) ? TOUT JAMAIS (Tome 10) LE GRAIN DE SABLE (Tome 11) LE TRAIN EN MARCHE (Tome 12) PI?G?E (Tome 13) LE R?VEIL (Tome 14) BANNI (Tome 15) MANQUE (Tome 16) UNE NOUVELLE DE LA S?RIE RILEY PAIGE R?SOLU S?RIE MYST?RE MACKENZIE WHITE AVANT QU’IL NE TUE (Volume 1) AVANT QU’IL NE VOIE (Volume 2) AVANT QU’IL NE CONVOITE (Volume 3) AVANT QU’IL NE PRENNE (Volume 4) AVANT QU’IL N’AIT BESOIN (Volume 5) AVANT QU’IL NE RESSENTE (Volume 6) AVANT QU’IL NE P?CHE (Volume 7) AVANT QU’IL NE CHASSE (Volume 8) AVANT QU’IL NE TRAQUE (Volume 9) AVANT QU’IL NE LANGUISSE (Volume 10) AVANT QU’IL NE FAILLISSE (Volume 11) AVANT QU’IL NE JALOUSE (Volume 12) AVANT QU’IL NE HARC?LE (Volume 13) LES ENQU?TES D’AVERY BLACK RAISON DE TUER (Tome 1) RAISON DE COURIR (Tome2) RAISON DE SE CACHER (Tome 3) RAISON DE CRAINDRE (Tome 4) RAISON DE SAUVER (Tome 5) RAISON DE REDOUTER (Tome 6) LES ENQUETES DE KERI LOCKE UN MAUVAIS PRESSENTIMENT (Tome 1) DE MAUVAIS AUGURE (Tome 2) L’OMBRE DU MAL (Tome 3) JEUX MACABRES (Tome 4) LUEUR D’ESPOIR (Tome 5) PROLOGUE Le professeur Ralph Henderson soupira, se frotta l’ar?te du nez et fouilla dans la poche de son manteau pour trouver ses cl?s de voiture. Ce fut une longue soir?e pass?e ? corriger des contr?les d’anglais et, soit ses ?tudiants devenaient de plus en plus stupides, soit il ?tait de plus en plus fatigu? par son job. Il avait h?te de s’installer dans son lit pour la nuit avec un petit verre de whisky et un classique. Le parking de Georgetown ?tait presque vide. La plupart des autres enseignants avait eu la pr?sence d’esprit de rentrer bien avant. Il faisait un temps frisquet et maussade ; la lumi?re des n?ons ?lectriques vacillait au-dessus de sa t?te au fur et ? mesure que les papillons de nuit p?n?traient ? l’int?rieur avec une intention suicidaire. Henderson coupa ? travers les places vides, prenant un raccourci vers sa voiture. Il caressa bri?vement l’id?e de s’arr?ter quelque part sur le chemin et prendre un caf? ? emporter. Ou serait-il mieux tout simplement de rentrer le plus vite possible au chaud et en s?curit? ? son domicile ? Ses pas r?sonn?rent ?trangement dans le parking, le plafond et le sol en ciment projetant les sons dans tous les sens. C’?tait pendant de telles nuits que le parking se transformait en une toute autre b?te. Un endroit o? des types louches pourraient r?der dans l’ombre, pr?ts ? bondir. Le genre de r?flexion dont on ne peut pas se d?barrasser, m?me lorsqu’on s’est r?p?t? plusieurs fois qu’on est un adulte et qu’on ne doit plus avoir peur du noir. Cela dit, il y avait de bonnes raisons d’?tre nerveux ce soir-l?. Le campus bourdonnait de nouvelles d’un crime qui avait eu lieu juste-ici, sous leurs nez. Un ?tudiant qu’Henderson avait connu. C’?tait peut-?tre ? cause de cela que ses poils se h?riss?rent sur sa nuque lorsqu’il traversa le garage et pourquoi il n’arr?ta pas de jeter des regards furtifs, les yeux ?carquill?s, vers les ombres, essayant de voir si personne ne s’y cachait. Il essaya de se changer les id?es. Il avait bien plus de choses auxquelles penser. Il y avait un jeune qu’il avait d? expulser de sa classe car il avait encore ?chou? ? un contr?le. C’?tait tellement frustrant d’enseigner ; voir ces jeunes sans trop de potentiel se laisser entra?ner dans des soir?es et ne pas prendre leurs ?tudes au s?rieux. Ce fut avec regret qu’Henderson dut le recaler, mais il estimait sa d?cision justifi?e apr?s avoir re?u un courriel de l’?tudiant. Plein de m?chancet?, le courriel ?tait ? la limite de la menace. Apparemment, le jeune n’avait pas appr?ci? d’?tre expuls? et voulait s’assurer qu’Henderson le savait. Comme si un tel geste allait lui permettre de r?int?grer le cours. Ha ! Le jeune avait beaucoup ? apprendre sur la vie et comment les gens r?agissaient ? la fa?on de les traiter. Henderson atteignit la voiture et se battit avec ses cl?s, ses doigts gros et lents d’avoir ?crit autant de commentaires lorsqu’il avait not? les ?tudiants. Il s’en voulut, alors qu’un tremblement s’empara de ses mains, redoubl? par l’isolement du parking pendant la nuit. C’?tait ridicule de sa part. Il ?tait adulte, bon sang, et il traversait ce parking au grand jour sans h?sitation. D’ailleurs, se dit-il d’un air sombre, si quelqu’un le suivait, ce serait cet ?tudiant en col?re. Et il n’?tait pas assez intelligent pour traquer un professeur dans le noir sur un parking. Il ?tait le genre de gamin qui envoyait des courriels m?chants et laissait des traces. Vraiment rien ? craindre. Henderson le signalerait au doyen demain, et ce serait tout. C’?tait quoi ce bruit ? Un pas ? Quelque chose n’allait pas. Il avait chass? de son esprit ses peurs tout ce temps, mais maintenant il n’?tait plus rassur?. Le picotement dans la nuque d’Henderson s’amplifia, tel un pressentiment, mais avant qu’il n’ait pu se retourner, sa t?te frappa violemment la vitre de la voiture. Henderson eut ? peine le temps d’encaisser le coup et la douleur submergeante venant de son nez que la main derri?re sa t?te le fracassa de nouveau sur le c?t? de la voiture. Abasourdi par le choc et la blessure, son corps se ramollit et il glissa. Il essaya de se retourner l?g?rement tandis que sa serviette vola par terre, mais il fut incapable de parer le coup suivant, ni celui d’apr?s. Sa t?te, sa tempe, le haut de l’orbite, sa m?choire juste en-dessous de l’oreille frapp?rent le ch?ssis rouge, encore et encore. Il ressentit les blessures avec un certain d?tachement li? au choc. Le craquement d’un os. La pens?e aux contusions en train de fleurir sur son visage, puis les coupures et les ?corchures, puis quelque chose de plus s?rieux. Tout ce qu’il pouvait se dire, b?tement, c’?tait que son visage allait ?tre ab?m?. Ce fut tout ce ? quoi il eut le temps de penser avant que tout soit fini, de toute ?vidence. La main rel?cha sa prise et Henderson tomba lourdement au sol, heurtant son ?paule pendant la chute. Il ne le sentit presque pas, compar? au reste. Il ?tait d?sormais suffisamment contorsionn? pour retourner sa t?te ?tourdie et observer, malgr? sa vision troubl?e. Peut-?tre ? cause des coups. Peut-?tre ? cause du sang qui coulait sur ses yeux. Peut-?tre parce que son orbite devait ?tre cass?e, au mieux. C’?tait qui ?  Une silhouette floue, juste un chuchotement, comme si un fant?me se tenait au-dessus de lui et non pas un homme. Mais c’?tait un homme. Cela devrait ?tre un homme. Si seulement il pouvait distinguer qui ; mais, comme le sable qui glisse entre les doigts, la connaissance d’Henderson le quittait et il ne pouvait plus lutter contre. Il savait que c’?tait presque fini. Tout devenait noir autour de lui, pendant que la forme brumeuse le regardait en silence. L’ombre s’?tendit au-dessus de lui et redressa sa t?te une derni?re fois et l’?crasa contre le ciment ; un impact qu’Henderson ressentit ? peine avant de s’?crouler t?te en avant dans l’obscurit?. La t?che ?tait accomplie. Il n’allait plus jamais se r?veiller. CHAPITRE UN Zoe dessina des sillons sur l’accoudoir du fauteuil en cuir, observant comme leur motif r?v?lait le passage du temps, autant de mains et de bras diff?rents qui s’?taient pos?s ? cet endroit pr?cis. Elle ne put pas se d?cider si cela ?tait r?confortant, une preuve d’exp?rience, ou tout simplement d?go?tant. Qui sait quelle sorte de microbes se cachaient dans ce tissu ? « Zoe ? » l’appela la Dr. Lauren Monk depuis un fauteuil tout aussi confortable situ? face ? elle. Zoe leva des yeux coupables. « Pardon. Il fallait que je r?ponde ? ?a ? » La Dr. Monk soupira, tapotant son stylo sur un calepin qu’elle tenait dans sa main. Malgr? la pr?sence de l’enregistreur qui archivait toutes leurs s?ances, il semblait que la Dr. Monk ?tait encore une adepte des m?thodes traditionnelles. « Changeons de cap un moment, dit-elle. Nous avons eu quelques s?ances ensemble, n’est-ce pas, Zoe ? Je constate que tu as du mal parfois avec les rep?res sociaux. » Ah. ?a. Zoe haussa les ?paules, feignant un air indiff?rent. « Je ne comprends pas toujours la mani?re dont les gens r?agissent. – Ou la mani?re dont ils attendent que tu r?agisses ? » Zoe haussa ? nouveau les ?paules, son regard se d?pla?ant vers la fen?tre. Puis elle se donna mentalement une claque ; elle ?tait cens?e prendre part activement ? ces s?ances et non pas se comporter comme une adolescente difficile. « Ma logique est diff?rente de leur logique. – Pourquoi penses-tu que c’est ainsi ? » Zoe savait pourquoi elle ?tait comme elle ?tait, ou au moins elle pensait le savoir. Les chiffres. Les chiffres qui se trouvaient partout o? elle regardait, ? tout moment de la journ?e. Ils lui disaient m?me ? l’instant quelle correction avaient les lunettes de la Dr. Monk (? peine suffisante pour n?cessiter aucune aide), qu’il y avait un millim?tre de poussi?re sur les cadres des certificats accroch?s au mur mais un quart de millim?tre seulement sur le dipl?me en psychologie (indiquant un sentiment de fiert? plus fort pour cette r?ussite que pour les autres) et que la Dr. Monk avait ?crit exactement sept mots durant leur conversation. Elle voulait le dire, ou du moins une partie d’elle le souhaitait. Elle n’avait toujours pas avou? ? la Dr. Monk qu’elle poss?dait un talent que personne d’autre ne semblait avoir. Personne, ? part un criminel en s?rie occasionnel, si elle en jugeait d’apr?s l’affaire sur laquelle elle avait travaill? il y a environ un mois. Mais il y avait encore une partie d’elle, toujours la partie la plus forte, qui ne pouvait pas supporter d’avouer quoi que ce soit. « Je suis juste n?e comme ?a, » dit Zoe. La Dr. Monk acquies?a d’un signe de t?te, mais ne nota rien. Apparemment, ceci n’?tait pas une r?ponse assez pertinente. « Que ressens-tu quand tu passes ? c?t? de ces codes sociaux ? Cela te d?range ? » C’?tait peut-?tre le fait qu’elles avaient eu suffisamment de s?ances ensemble pour que la g?ne initiale disparaisse. C’?tait peut-?tre la libert? de parler ? quelqu’un avec qui on n’a pas de v?ritable lien professionnel ou personnel. De toute fa?on, les l?vres de Zoe l?ch?rent la v?rit? que sa t?te avait gard? cach?e jusqu’? pr?sent, sans son autorisation consciente. « Shelley trouve que c’est tellement facile. » Zoe s’en voulut tout de suite. Pourquoi avait-elle dit cela ? Maintenant, elles allaient passer le reste de la s?ance ? creuser cette jalousie qu’elle ressentait envers Shelley, au lieu de travailler sur les vrais probl?mes. Jusqu’? cet instant, elle n’avait pas vraiment r?alis? que l’envie ?tait l?. « Agent Shelley Rose, » dit la Dr. Monk en v?rifiant ses notes d’un apr?s-midi pr?c?dent dans son cabinet. « Tu es beaucoup plus ? l’aise avec elle qu’avec tes partenaires ant?rieurs, tu me l’as indiqu?e auparavant. Mais tu es jalouse d’elle. Peux-tu m’en parler davantage ? » Zoe inspira. Bien-s?r qu’elle pouvait, bien qu’elle n’en e?t pas envie. H?sitante, elle regarda ses doigts, tout en pensant qu’il ?tait mieux de se lancer, tout simplement. « Shelley est dou?e avec les gens. Elle leur fait admettre des choses. Et ils l’aiment. Pas que les suspects. Tout le monde. – Penses-tu que les gens ne t’aiment pas, Zoe ? » Zoe avait pris une posture incommode. Tout ?tait de sa faute. Elle n’aurait pas d? dire une chose pareille. Admettre une faiblesse ?tait une invitation ? ce que quelqu’un la creuse. C’?tait pour cette raison qu’elle n’avait pas encore parl? de chiffres. M?me si cette th?rapeute avait ?t? conseill?e par la Dr. Applewhite, son ami le plus proche et mentor, cela ne voulait pas dire que Zoe pouvait lui confier son secret le plus intime et le plus sombre. « Je n’ai pas beaucoup d’amis. Mes partenaires demandent g?n?ralement leur transfert, admit-elle ? la place. – Penses-tu que cela est li? ? ta difficult? avec les codes de la soci?t? ? » La femme posait une question ?vidente. « ?a, et d’autres choses. – Quelles choses ? » La question ?vidente. Zoe grogna int?rieurement. Elle s’?tait pi?g?e toute seule. « Mon boulot est difficile. Je suis souvent partie. Il n’y a pas beaucoup de temps pour prendre racine. » La Dr. Monk acquies?a d’un air pensif. Elle souriait d’une mani?re encourageante, comme si Zoe allait r?ellement d?boucher sur quelque chose. La partie d’elle qui d?sirait l’attention positive et l’affection qu’elle n’avait jamais re?ues de sa m?re en ?tait ravie, m?me si elle ne le souhaitait pas. ?tre en th?rapie n’avait eu pour effet que de r?v?ler ses d?fauts. « Et Shelley ? A-t-elle des racines ? » Zoe acquies?a d’un hochement de t?te, tout en d?glutissant. « Elle a un mari et une jeune fille, Amelia. Elle parle beaucoup d’elle. » La Dr. Monk posa le stylo contre ses l?vres et l’y tapota trois fois de fa?on entendue. « Tu d?sires une famille ? toi. » Zoe leva soudainement les yeux, puis se rappela ne pas ?tre surprise qu’un th?rapeute puisse discerner les pens?es les plus authentiques qui se cachent derri?re tout ce que l’on raconte. « Oui, » dit-elle simplement. Il n’y avait pas de raison de nier. « Mais j’en suis tr?s loin. – Quand nous nous sommes rencontr?es pour notre premi?re s?ance, tu m’avais dit que tu avais eu un rendez-vous. » Zoe remarqua que la Dr. Monk n’avait pas eu ? consulter ses notes pour dire cela. « Il t’a contact?e, n’est-ce pas ? As-tu r?pondu ? » Zoe fit non de la t?te. « Il m’a envoy? quelques emails et a essay? de m’appeler. Je n’ai pas r?pondu. – Pourquoi ? » Zoe haussa les ?paules. Elle ne pouvait pas dire exactement pourquoi. G?n?e, elle toucha quelques m?ches de ses cheveux bruns qu’elle portait coup?s court, plus par commodit? que par go?t. Il y avait chez elle beaucoup de choses qui n’?tait peut-?tre pas attirantes de mani?re classique et elle le savait, m?me si elle ne saisissait pas v?ritablement comment les autres la percevaient. « Peut-?tre parce que la premi?re rencontre a ?t? tr?s g?nante. J’avais l’esprit ailleurs. Je ne pouvais pas me concentrer sur ce qu’il racontait. J’ai ?t? ennuyante. – Mais il n’a pas pens? cela de toi, n’est-ce pas ? Ce… ? – John. – Ce John, il semble ?tre int?ress?. Il cherche toujours ? te contacter. C’est bon signe. » Zoe acquies?a d’un signe de t?te. Elle ne pouvait plus rien dire. La Dr. Monk avait raison, m?me si elle ne voulait pas l’admettre. « Laisse-moi te dire ce que je vois, » continua la Dr. Monk. « Tu m’as d?clar? que Shelley a la vie dont tu r?ves. Elle est heureuse, mari?e avec une enfant, elle s’?panouit dans sa carri?re, elle a des comp?tences que tu n’as pas. Nous serons toujours jaloux de ceux qui peuvent faire ce que nous ne pouvons pas. C’est la nature humaine. L’important, c’est que tu ne te laisses pas ronger par cela et que tu te concentres sur les choses que tu peux accomplir. » Elle attendit que Zoe acquiesce de nouveau, lui indiquant qu’elle ?coutait, avant de continuer. « Les choses n’arrivent pas d’elles-m?mes. Ou pour le dire autrement, il est peu probable que tu te maries si tu ne sors pas. Je te conseille d’appeler John et de sortir de nouveau avec lui. Peut-?tre que cela se passera mal. Peut-?tre que cela va tr?s bien se passer. La seule fa?on de savoir, c’est d’essayer. – Vous pensez que je devrais me marier avec John ? dit-elle en fron?ant les sourcils. – Je pense que tu devrais sortir de nouveau avec lui. » La Dr. Monk sourit. « Et si cela ne marche pas, tu devrais sortir avec quelqu’un d’autre. C’est ainsi que l’on atteint ses objectifs. Petit ? petit. » Zoe n’?tait pas tout ? fait convaincue, mais elle acquies?a tout de m?me. De plus, elle avait quelque chose d’important ? r?gler maintenant. « Je pense que c’est la fin de notre s?ance. » La Dr. Monk rit. « C’est ma r?plique, » dit-elle en se levant pour accompagner Zoe ? la porte. « Et ne crois pas que je suis facilement distraite. La prochaine fois, nous reviendrons ? ce probl?me de rep?res sociaux et de perception diff?rente des autres. Nous irons au fond des choses, m?me si tu n’es pas pr?te ? te livrer ? moi. » En sortant du cabinet, Zoe ?vita le regard de sa th?rapeute, ne voulant pas r?v?ler qu’elle esp?rait sinc?rement que la Dr. Monk oublierait. CHAPITRE DEUX Au moins, le d?jeuner ?tait quelque chose dont Zoe pouvait s’enthousiasmer. Cela faisait longtemps qu’elle n’avait pas pu voir son mentor en personne et elle avait attendu le rendez-vous avec impatience. L’id?e que quelque chose de bien l’attendait apr?s l’avait aid?e ? tenir durant la s?ance de th?rapie. La Dr. Francesca Applewhite, une professeur de math?matiques qui avait travaill? ? l’universit? de Zoe, s’est av?r?e ?tre l’une des meilleures rencontres que Zoe avaient eues dans sa vie. ? l’?poque, encore adolescente et compl?tement d?pass?e par l’ambiance de la r?sidence universitaire, elle fut sceptique ? accepter encore un rendez-vous avec un sp?cialiste. Mais il se trouva que la docteur la comprenait totalement. Elle vit que Zoe avait une aptitude sp?ciale qui n?cessitait d’?tre nourrie. Elles commenc?rent avec des cours particuliers destin?s ? ?lever ses comp?tences ? un autre niveau acad?mique. Tout le reste d?coula de cela. « Docteur, » salua Zoe lorsqu’elle atteignit leur table et se laissa tomber sur une chaise libre. Jugeant par la tasse de caf? ? moiti? vide et le livre de poche ?corn? qu’elle tenait dans ses mains, la Dr. Applewhite devait s?rement ?tre l? depuis un bon moment. Zoe ne put s’emp?cher de remarquer les reflets gris qui gagnaient, m?che apr?s m?che, ses cheveux autrefois bruns ; un contraste frappant avec la version de la docteur dont elle se souvenait lors de leur premi?re rencontre. La Dr. Applewhite glissa un signet entre les pages et posa le livre de c?t?, puis leva ses yeux en souriant. « Mon ?tudiante pr?f?r?e. Comment le Bureau se comporte avec toi ? » Elle avait une bonne raison de lui poser cette question. Apr?s tout, ce fut sur ses conseils que Zoe entama une carri?re dans les forces de l’ordre. Apr?s que sa coll?gue – une des professeurs de math de Zoe – les avait mises en contact, la vie enti?re de Zoe avait chang?. Elle savait exactement qui remercier pour cela. « Bien. Ma nouvelle partenaire va bien, » dit Zoe. Elle prit le menu et le balaya du regard mais sans r?el besoin. Elle savait d?j? ce qu’elle allait commander. Un rapide coup d’?il sur les dimensions des colonnes et des lignes du menu lui sugg?ra que rien de nouveau n’avait ?t? ajout?, et elles se retrouvaient toujours ici pour d?jeuner. La Dr. Applewhite se pencha pour faire signe au serveur et, tandis qu’elle le regardait s’approcher, Zoe observa la docteur. Elle se souvint de leur premier rendez-vous. La fa?on dont la Dr. Applewhite s’?tait v?ritablement int?ress?e ? ce qu’elle avait ? dire, l’une des rares personnes dans sa vie qui l’aient vraiment ?cout?e. Cette femme plus ?g?e avait pris quelques kilos en plus depuis, mais elle n’avait pas perdu une once de la compassion qu’elle avait t?moign?e envers une jeune femme qui n’avait aucune id?e de sa place dans le monde. Leur relation s’?tait d?velopp?e au fil du temps. Zoe fut lente ? lui faire confiance, ? s’ouvrir ? elle. Mais elle finit un jour par prendre le risque et ? lui avouer son secret ; ? tout lui raconter sur les chiffres. Ce ne fut pas facile. Apr?s tant d’ann?es ? entendre sa m?re lui dire que ses aptitudes lui avaient ?t? donn?es par le diable, les r mots rest?rent souvent coinc?s dans sa bouche. Mais la Dr. Applewhite se montra enthousiaste plut?t qu’horrifi?e d’en conna?tre davantage sur les aptitudes de Zoe. C’est ? partir de ce moment que leurs liens ne firent que se renforcer. « Et la Dr. Monk ? », demanda la Dr. Appelwhite, les yeux brillants, apr?s que Zoe eut pass? sa commande. « Elle m’a racont? tu avais suivi mon conseil. » Zoe ne put s’emp?cher de rire. « Vous me surveillez ? – Je dois toujours garder un ?il sur mes pr?f?r?s, » r?pondit la Dr. Applewhite en riant. C’?tait leur blague ? elles. La Dr. Applewhite ne devrait pas, bien s?r, avoir de pr?f?r?s. Mais ? bien des ?gards, Zoe l’avait aid?e dans sa carri?re tout autant que la Dr. Applewhite avait lanc? Zoe dans la sienne. La Dr. Applewhite avait fini par se sp?cialiser dans l’?tude de la synesth?sie appliqu?e en math?matiques et aujourd’hui, elle formait d’autres personnes qui avaient les m?mes aptitudes que Zoe. Plus ou moins, en tout cas. « Les s?ances se passent bien, admit Zoe. La Dr. Monk a des observations int?ressantes. Je comprends pourquoi vous l’appr?ciez. – Elle a une tr?s bonne r?putation. As-tu fait des progr?s dont tu pourrais me parler ? Ou est-ce trop personnel ? » Zoe haussa les ?paules tout en examinant les deux pouces d’eau au fond du vase qui se trouvait sur leur table et qui ne suffiraient pas ? abreuver bien longtemps les deux chrysanth?mes. Ses calculs mentaux du temps qu’il faudrait pour qu’elles se fanent totalement l’amus?rent assez pour qu’elle s’autorise de dire ce qui la pr?occupait. « Elle a dit que je devrais sortir plus. » La Dr. Applewhite sourit affectueusement, sa propre alliance scintillant ? la lumi?re du soleil lorsqu’elle porta la tasse de caf? vers ses l?vres. « Elle pourrait avoir raison. – Je ne pense vraiment pas que ?a soit la solution ? tous mes probl?mes, » soupira Zoe, rapprochant de sa bouche la tasse de caf? fumante apport?e par le serveur. « Peut-?tre pas ? tous, mais ? quelques-uns, » r?pondit s?rieusement cette fois-ci la Dr. Applewhite. « Je ne dis pas que tu dois te sentir mal d’?tre qui tu es. Tu es op?rationnelle – plus que ?a. Tu l’as transform? dans un atout dans ton travail. Les autres ne sont pas aussi capables que toi. Je m’inqui?te seulement pour toi. Vraiment, tu sais. » Zoe hocha la t?te. « J’appr?cie, » dit-elle. En y r?fl?chissant bien, elle se rendit compte que la Dr. Applewhite ?tait la seule personne au monde ? se soucier v?ritablement d’elle. Cela la rassura, d’avoir au moins une personne. Avant m?me d’avoir eu le temps de terminer sa pens?e et de prendre au s?rieux la recommandation d’appeler John, son portable sonna dans sa poche. Zoe le saisit et d?crocha en voyant appara?tre le nom de Shelley sur l’?cran. « Agent Special Zoe Prime. – Salut, Z. J’esp?re que tu ne fais rien de beau en ce moment. » Zoe poussa un soupir, baissant les yeux sur son assiette ? moiti? finie. Ce n’?tait pas comme si elle avait pu savourer son plat, ayant la t?te ailleurs. « Je devine que nous avons une nouvelle affaire. – Je te rejoins QG dans trente minutes. Le chef dit que c’est une grosse affaire. » Zoe s’excusa en souriant ? la Dr. Applewhite, mais la docteur lui faisait d?j? signe de partir. « File faire ton devoir, Agent. Mais il y a une derni?re chose que je dois te dire… » La Dr. Applewhite h?sita, tout en inspirant. Elle semblait r?ticente ? parler, mais elle finit par se lancer, les yeux baiss?s en direction de l’assiette ? moiti? finie de Zoe : « Quelqu’un de mon groupe de recherche – un autre synesth?te. On pensait qu’il allait mieux mais…  Je suis d?sol?e de le dire, mais il s’est tu? la semaine derni?re. Sans un groupe de soutien, si ce n’est moi, il avait du mal. Les ?tres humains ont besoin d’avoir d’autres ?tres humains autour d’eux pour les ?pauler ?motionnellement. On en a tous besoin. M?me ceux qui pensent un peu autrement. » Zoe s’arr?ta, et fixant du regard sa tasse de caf? et les quelques millim?tres d’espace entre le caf? et le bord de la tasse, elle s’enfon?a dans sa chaise. Elle n’?tait jamais all?e ? la rencontre d’aucun des membres du « groupe de recherche » de la Dr. Applewhite – les sujets d’exp?rience, comme les appelait Zoe dans sa t?te quand elle ?tait m?chante – mais tout de m?me, c’?tait dur ? entendre. Quelqu’un comme elle qui avait voulu mourir pour la seule et unique raison qu’il ?tait exactement comme elle. C’?tait quelque chose de bien difficile ? avaler. Elle prit machinalement son sac et s’?loigna sans vraiment regarder autour d’elle. Dans sa t?te, elle r?ordonnait ses pens?es, se rappelant les commentaires de la Dr. Monk. Travaille vers tes objectifs. Petit ? petit. Qu’avait-elle dans sa vie, en fait ? Une mentor qui ?tait la personne la plus proche d’une figure maternelle. Une partenaire, Shelley, qui incarnait ce qu’on pourrait d?signer comme une amie. Deux chats, Euler et Pythagore et, bien qu’elle les aim?t tous les deux, elle savait que c’?tait dans leur nature de chats de s’en sortir si elle disparaissait et ils vivraient avec quelqu’un d’autre. Une carri?re qui semblait ?tre plus instable qu’ascendante, m?me si actuellement, c’?tait plut?t pas mal. Un petit appartement qu’elle pouvait qualifier de « chez soi ». Et une aptitude, ou un ?tat, ou peu importe le terme, qui la rendait tellement diff?rente qu’il poussait les gens comme elle ? se suicider. C’?tait une pens?e qui donnait ? r?fl?chir. CHAPITRE TROIS Zoe marcha ? grands pas le long des couloirs de l’immense b?timent du QG FBI ? Washington, DC, en direction de la salle de r?union o? Shelley avait dit qu’elle allait l’attendre. Ce genre de b?timents rassurait Zoe : construit il y a bien longtemps mais avec suffisamment d’organisation et de logique pour qu’il soit facile de se rep?rer et se d?placer ? chaque ?tage. Le b?timent J. Edgar Hoover avait ?t? construit ? dessein. M?me si de l’ext?rieur, il ?tait carr? et gris, le genre d’architecture que les gens qualifient d’horreur, la composition g?om?trique, monolithique ?tait ce que Zoe aimait le plus. Les couloirs bifurquaient exactement de la m?me mani?re, quel que soit l’endroit d’o? l’on sortait de l’ascenseur, et les pi?ces ?taient num?rot?es selon un ordre logique. La pi?ce 406, naturellement, ?tait la sixi?me porte devant laquelle on d?bouchait en s’arr?tant au quatri?me ?tage. Ceci ?tait particuli?rement appr?ciable. Tous les b?timents n’?taient pas cr??s ?gaux. Bien entendu, Shelley attendait d?j? dans la salle de r?union, ?tudiant des notes et des photographies couleur dispos?es ? intervalles r?guliers le long d’une table de r?union. Elle leva les yeux et sourit quand Zoe entra. Zoe avait du mal ? comprendre comment Shelley, avec un jeune enfant ? la maison et sans ?tre particuli?rement avantag?e par la distance depuis la maison, avait pu arriver avant elle au QG. Non seulement cela, mais comment pouvait-elle ?tre si bien habill?e, dans un ensemble qui ?pousait ? merveille ses formes rondes mais sveltes, tout en mettant en valeur le galbe de ses hanches, sa taille et ses seins, sans une seule trace de la salet? habituelle ? laquelle on pourrait s’attendre au contact d’un enfant. Comment pouvait-elle m?me ?tre si bien maquill?e, avec sa bouche subtilement r?hauss?e d’une touche de rouge ? l?vres rose et ses cheveux blonds proprement nou?s en un ?l?gant chignon. Elle y parvenait pourtant. Leur chef, l’Agent Sp?cial Superviseur Leo Maitland, se tenait debout ? l’avant de la pi?ce, attendant avec l’impatience d’un jaguar pr?t ? bondir sur sa proie. C’?tait un v?t?ran de l’arm?e, avec l’allure d’un soldat et qui, apr?s une carri?re aur?ol?e de succ?s de grade en grade, rentra chez lui pour rejoindre les forces de l’ordre. C’?tait il y a quinze ans, mais les cheveux grisonnants sur ses tempes n’indiquaient en rien qu’il n’?tait plus le guerrier qu’il fut ? l’?poque. Il mesurait un m?tre quatre-vingt-dix, avec un tour de poitrine de cent-quatorze centim?tres et des biceps de trente-huit centim?tres qui se contractaient encore aux plis de son uniforme. « Ah, Agent Sp?cial Prime, » dit-il. « Bienvenue. J’ai transmis les notes d’informations ? votre partenaire. Asseyez-vous, s’il vous plait, et parcourez-les. » Zoe suivit l’ordre et s’assit, posant un gobelet de caf? devant Shelley. C’?tait devenu une de leurs habitudes. Zoe apportait le caf? et Shelley menait les conversations courtoises n?cessaires tout au long d’une affaire. Chacune s’occupait de quelque chose qu’elle pouvait g?rer. « L’Agent Sp?cial Rose a toutes les informations, mais je vais vous en donner un aper?u. On a d?j? deux morts sur le dos, et ceci a l’air d’?tre une affaire locale, donc vous ne devriez pas avoir ? vous d?placer. » Maitland croisa ses bras sur son torse, ce qui fit se tendre le tissu de son costume autour des ?paules. « La presse locale va nous mettre la pression, sachant que l’une des victimes ?tait tr?s en vue dans la communaut?. Vous vous doutez certainement de l’urgence d’?viter un troisi?me meurtre et de nous pr?munir de ce que les journalistes ne nous collent pas l’?tiquette « criminel en s?rie ». » Zoe acquies?a. Ce genre de reportage pouvait d?clencher l’hyst?rie et contribuer ? entraver l’affaire. Cela pouvait ?galement faire diffuser les nouvelles plus loin – et cela voulait dire faire face ? encore plus de presse nationale, voire m?me internationale. Les agents FBI avaient l’habitude d’?tre confront?s avec des situations tr?s stressantes, mais cela ne voulait pas dire qu’elles ?taient d?sir?es. En particulier par Zoe, qui aurait compt? les microphones et ?tudi? les longueurs des c?bles des cam?ras de t?l?vision plut?t que de se concentrer sur son discours lors de la conf?rence de presse. « Vu votre retard… » continua Maitland. Zoe sentit sa bouche s’ouvrir, pr?te ? protester, mais elle la referma bien serr?e. Elle s’?tait organis?e pour prendre cette matin?e pour son brunch, r?cup?rant ainsi un peu de ses nombreuses heures suppl?mentaires de travail non-pay?es. Elle n’?tait pratiquement pas en retard. Mais on ne se disputait pas avec l’Agent Sp?cial Responsable du B?timent J. Edgar Hoover. « J’ai d?j? d?brief? votre partenaire. Je vais la laisser vous donner les d?tails. ?tant donn? votre inclination pour les math?matiques, nous avons consid?r? que cette affaire correspondra ? vos aptitudes. Ne me d?cevez pas. » Maitland quitta la pi?ce d’un pas altier, sans se retourner. Tandis qu’il sortait de la salle, Zoe constata que sa main s’?garait imm?diatement vers sa poche et elle comprit que la bosse de trois millim?tres d’?paisseur devait ?tre un portable. C’?tait quelqu’un de tr?s occup?, avec beaucoup d’appels ? passer et d’autres instructions ? donner. Il ?tait peu probable qu’elles allaient le voir beaucoup avant la cl?ture de l’affaire – sauf si elles foiraient, auquel cas il ?tait susceptible de d?bouler avec l’effet d’une tonne de briques. ?tant donn? les mensurations de Maitland, et sachant qu’une tonne correspond ? mille kilos, il n’?quivalait pas r?ellement ? une tonne de briques. Plut?t un dixi?me de cette valeur. « Deux victimes, » dit Shelley, attirant l’attention de Zoe sans aucune formule de politesse banale pour d?marrer la conversation. Elle commen?ait ? mieux conna?tre Zoe et elle dut se rendre compte que, jusqu’? pr?sent, ce genre de commentaires n’avait aucun impact positif sur leur relation. Zoe avait remarqu? une baisse du bavardage d’au moins soixante-dix pour cent depuis qu’elles avaient commenc? ? travailler ensemble. « Les deux victimes dans notre propre jardin. La zone m?tropolitaine de DC. – J’esp?re qu’aucune des deux victimes n’a ?t? retrouv?e litt?ralement dans nos jardins. En tant qu’agents f?d?raux, tu penses qu’on s’en serait rendu compte. » Une ?tincelle ?claira les yeux de Shelley alors qu’elle donnait un petit coup de coude ? Zoe. « C’?tait une vraie blague ?a ? Qu’y a-t-il dans ce caf? ? – J’ai vu une ancienne amie ce matin. Je pense que ?a m’a mise de bonne humeur. – Alors je regrette de la briser. » Shelley lui indiqua les dossiers des deux victimes, soigneusement dispos?s et d?lib?r?ment s?par?s. « C’est la premi?re victime, il y a de cela une semaine environ. C’?tait un jeune ?tudiant retrouv? sur le terrain du campus de Georgetown. Sa t?te a ?t? d?fonc?e avec un objet lourd – les m?decins-l?gaux disent que c’?tait probablement un b?ton. – Six jours, murmura Zoe, son regard parcourant le dossier. Elle prit ses informations : taille un m?tre quatre-vingt-trois, quatre-vingt-un kilos, vingt-trois ans. « Oui, pardon. » De toute ?vidence, Shelley avait encore du mal avec les exigences de pr?cision que Zoe attendait, m?me si elles se comprenaient facilement ? d’autres ?gards. « La seconde victime a ?t? retrouv?e hier soir. Un professeur d’Anglais de Georgetown, sa t?te fracass?e ? plusieurs reprises contre le c?t? de sa voiture jusqu’? ce que des dommages cr?niens irr?m?diables lui furent inflig?s. – L’Universit? est un lien. – Non seulement. » Shelley fouilla les photos et en sortit des clich?s pris en plong?e et qui montraient enti?rement la sc?ne du crime. « Tous les deux ont eu leurs chemises d?chir?es – et je veux dire, d?chir?es avec une certaine violence. Il semblerait que le fait de tuer n’?tait pas suffisant pour rassasier la rage du criminel. Ensuite il y a ces… bref, regarde toi-m?me. » Zoe arracha presque les photos des mains de Shelley. Elle avait d?j? commenc? ? reconnaitre la forme des marques gribouill?es sur les torses des deux hommes, et un examen plus attentif le confirma. Les deux avaient ?t? orn?s d’?quations math?matiques complexes – tellement complexes que Zoe tira une chaise et s’affala dessus sans les quitter des yeux. « A-t-on montr? cela ? des t?moins ?ventuels ? Amis, membres du corps professoral, ?tudiants ? – En ce qui concerne la premi?re victime, oui. La police locale a montr? la photo. Fortement recadr?e sur l’?quation uniquement, bien s?r. Ils viennent de finir de faire circuler l’autre clich? ce matin, mais on peut encore trouver quelques pistes, je suppose. – Et ? » Shelley haussa les ?paules. « Personne ne sait ce que ?a veut dire. » Zoe savait tr?s bien que le d?partement de math?matiques de Georgetown ?tait un vivier de professionnels et si ceux-ci n’?taient pas capable de la d?chiffrer, alors il s’agissait d’une ?quation s?rieuse. « On dirait des math?matiques quantiques. – C’est ce qu’une partie des professeurs a dit. Mais ils ne se rappellent pas l’avoir vue avant, ni avoir travaill? avec. » Zoe continua ? fixer l’?quation, son cerveau bouillonnant devant les symboles complexes, les chiffres et les lettres, essayant de trouver au moins une entr?e dans le sch?ma. « Quelles autres pistes avons-nous ? » Shelley passa au crible encore quelques pages. « Je me suis arr?t?e l? quand tu es arriv?e. Attends… les colocs et amis de l’?tudiant ont tous ?t? interrog?s, ainsi que sa famille et le personnel enseignant. Il a ?t? retrouv? dans un endroit du campus qui n’?tait pas surveill? par les cam?ras, pile dans un angle mort. – Pratique, » dit Zoe en soupirant. Elle souhaitait qu’au moins une fois, ils tombent sur une affaire commise au vu et au su de t?moins ou enregistr?e par une cam?ra. ?videmment, on n’appelait pas le FBI pour celles qui ?taient faciles ? r?soudre. « Quant au professeur, il parait qu’il y avait des cam?ras seulement ? l’entr?e du parking. Tellement de gens y entrent et en sortent durant la journ?e, et on n’a aucun visuel sur l’une des sorties pi?tons. Rien de suspect enregistr? par la cam?ra. – Absolument aucune piste, » nota Zoe, appuyant son menton dans la paume de sa main tandis qu’elle analysait l’?quation pour la ?ni?me fois. Lentement, rapidement, cela ne changeait rien. L’?quation ne ressemblait ? rien de ce qu’elle avait d?j? vu. Bien au-dessus du niveau qu’elle avait ?tudi? pendant ses ann?es de fac. Elle passa ? l’autre, celle du professeur. C’?tait pareil. Que signifiait tout cela ? « Que veux-tu faire d’abord ? » demanda Shelley, en achevant sa propre analyse des dossiers. « Attends une seconde. » Zoe n’avait m?me pas pris soin de v?rifier les renseignements sur la deuxi?me victime, mais il restait encore du temps pour cela. Elle sortit son calepin et son stylo et commen?a ? ?crire, griffonnant des marques rapides et nettes sur la page tandis qu’elle commen?ait ? esquisser une analyse pr?liminaire. Des lettres grecques, des traits, des crochets, des triangles invers?s – tous les symboles des math?matiques quantiques avaient un sens ?quivalent qui pouvait r?v?ler un chiffre. M divis? par t” moins t’, un divis? par s’, puis additionn? ? un divis? par s”, et ainsi de suite, afin de retrouver la valeur de B qui ensuite pourrait ?tre r?ins?r?e dans une autre ligne de l’?quation pour d?terminer la valeur d’une autre inconnue. Les corr?lations d?marr?rent assez facilement. Si la valeur de M ?tait ?gale ? la valeur de r’, alors les deux premi?res lignes de l’?quations auraient du sens ; mais la troisi?me ligne perturbait le tout et semblait donner une toute autre valeur ? M. D’accord ; elle le fit d’une autre fa?on. Peut-?tre que M ?tait effectivement le double de la valeur de r’, ce qui avait encore assez de sens dans ce cas et faisait marcher la troisi?me ligne – mais d?s la sixi?me ligne, la valeur de M devait atteindre z?ro et ici, encore une fois, cela n’avait plus de sens. Quand Zoe leva de nouveaux ses yeux, elle n’eut aucune d’id?e du temps pass?. ? un moment, Shelley avait d? s’assoir devant elle et balayait quelque chose sur l’?cran de son portable. « ?a n’a pas de sens, » annon?a Zoe. Shelley leva la t?te, haussant un sourcil soigneusement dessin?. « Tu n’y arrives pas ? » Les l?vres de Zoe se pinc?rent avant de se r?soudre ? l’admettre. « Je n’y arrive pas encore, » dit-elle. « On manque peut-?tre d’indices. C’est tout ce qu’on a ? Il n’y avait rien d’?crit sur leur dos ou sur leurs bras, ou quelque part ailleurs ? – Je n’en sais pas plus que toi, » dit Shelley. « Je me suis renseign?e sur le prof. Rien ne ressort de son pass? acad?mique, ni de ce que j’ai pu voir de la vie personnelle qu’il s’?tait construite en ligne. – Rev?rifie les photos, » sugg?ra Zoe tout en lui en passant un paquet et en prenant elle-m?me quelques-unes. Elle se pencha sur toutes les d?tails des clich?s, ses yeux analysant les angles des os, le degr? de torsion d’une jambe lors de la mort, la longueur des d?chirures de leur chemise contre la r?sistance du tissu et de la couture. Elle ne trouva aucune connexion nulle part. Ni dans leur taille, ni dans leur poids, ni dans leur ?ge – et aucune indication que de l’encre avait ?t? taillad?e ailleurs sur leur peau. Ce qui ?tait inqui?tant, bien s?r, fut le fait que plus on avait d’informations, plus les sch?mas math?matiques devenaient facilement pr?dictibles. Deux chiffres pouvaient sembler sans rapport, avec un nombre de possibilit?s entre eux, trop pour se d?cider sur une piste d?finitive. Trois nombres, et bien, cela pourrait en rendre un autre plus compr?hensible, d?marrer une formule. Mais cela n?cessitait encore un meurtre. Et elles n’en voulaient certainement pas d’autre. « Je n’ai rien, » dit Shelley, secouant la t?te. « On ?change, » sugg?ra Zoe en passant son paquet de photos ? Shelley et prenant le sien ? la place. « La seule chose de remarquable est l’angle de l’impact ? la t?te de la premi?re victime. L’agresseur ?tait un peu plus petit, peut-?tre un m?tre soixante-quinze. » Et puis, c’?tait pareil. Le m?me vide frustrant. Aucune trace d’encre sur les v?tements, aucune suite des chiffres en-dessous du tissu, rien ? proximit?. Les places de parking n’?taient pas num?rot?es et il n’y avait pas de num?rotation non plus ni sur les murs, ni sur les piliers en b?ton qui soutenaient le plafond, ni sur l’herbe pr?s de laquelle l’?tudiant avait ?t? retrouv?. Rien. Zoe renon?a, secouant sa t?te. « J’ai besoin de voir le corps du professeur, » dit-elle. « C’est la seule mani?re de trouver quelque chose d’autre en dehors de ce que nous avons d?j? appris des photos. – Parfait, » dit Shelley. C’?tait possible qu’elle f?t sarcastique ; Zoe avait toujours du mal ? faire la distinction. « Alors, allons jeter un coup d’?il de plus pr?s sur un mec mort. » CHAPITRE QUATRE Zoe tapota ses doigts sur le volant, jetant un coup d’?il vers Shelley alors qu’elles se dirigeaient vers le coroner du coin. Il y avait quelque chose au sujet de cette affaire qui la d?rangeait d?j? et il fallait qu’elle exprime les doutes qui s’immis?aient dans sa t?te avant qu’ils ne deviennent obsessionnels. « C’est dr?le que Maitland ait su que je voudrais travailler sur une affaire li?e aux maths. Je ne lui ai jamais racont? que j’aimais travailler avec des chiffres. » Shelley s’?claircit l?g?rement la gorge, ?vitant de croiser le regard de Zoe. « Eh bien, je nous ai propos?es pour celle-ci. J’en ai juste entendu parler, et le chef a ?t? d’accord que nous nous en occupions. » Zoe dig?ra la nouvelle un instant. D’habitude, elle n’obtenait pas de son boss des choses seulement parce qu’elle les demandait. « Juste comme ?a ? Tu n’as pas eu ? le convaincre ? » Shelley enroula autour de ses doigts le sautoir qu’elle portait, encore et encore, une fl?che en or d?cor?e d’un diamant qu’elle avait h?rit?e de sa grand-m?re. « Je lui ai dit que, comme tu ?tais tr?s dou?e en math?matiques, on pourrait profiter d’un meilleur d?part que personne d’autre. » Zoe r?sista ? l’envie de piler et maintint la voiture stable et fluide. Elle se concentra sur la route jusqu’? ce que le bouillonnement dans sa t?te s’estomp?t, et elle parla distinctement et calmement. « Tu as dit que j’?tais dou?e en math ? – C’est tout ce que j’ai dit, je te jure. Je ne lui ai pas dit la v?rit?. Je ne lui ai pas parl? de, tu sais, ce que tu peux faire. » Shelley sembla d?sol?e, mais cela ne suffit pas pour faire dispara?tre le grondement dans les oreilles de Zoe. Dou?e en math. C’?tait proche de la v?rit?, trop proche pour se sentir ? l’aise. C’?tait presqu’un aveu. Elle s’?tait peut-?tre gravement tromp?e en faisant confiance ? Shelley de ne pas divulguer son secret. Mais sa partenaire avait jur? maintes fois qu’elle n’allait jamais le r?v?ler ? qui que ce soit sans l’accord de Zoe. M?me si techniquement, elle ne l’avait encore jamais fait, c’?tait risqu?. Trop risqu?. « ?coute, ce n’est pas grave, n’est-ce pas ? » demanda Shelley. Sa voix prit un ton plus ?lev? maintenant. « Je suis vraiment d?sol?e si tu ne voulais pas que je dise cela, mais ce n’est qu’un petit d?tail de ce que sont les choses. Pas toute la situation. Et tu sais ? N’importe qui peut ?tre dou? en math. ?a ne te rend pas si diff?rente que ?a. » Zoe grin?a ses dents et resserra ses doigts autour du volant, tellement fort que le rev?tement en caoutchouc ?mit un bruit sourd. « Ce n’?tait pas ? toi de leur dire ?a. – J’ai juste – je n’ai pas pens? que c’?tait si grave d’en dire autant. » Shelley poussa un soupir, s’enfon?ant sur l’appuie-t?te du si?ge passager. « J’ai foir?, je comprends maintenant. Je suis d?sol?e. Mais apr?s avoir r?solu notre grosse affaire dans le Kansas, ils se seraient rendu compte par eux m?me que tu es dou?e avec les chiffres. Je sais que je ne peux le dire ? personne, et je ne vais pas le faire, mais je ne comprends pas pourquoi tu sens le besoin de le cacher. » Zoe serra ses dents. Bien s?r que Shelley ne comprenait pas. Shelley n’?tait pas l?. Elle ne dut pas prier toute la nuit ? c?t? du lit sur le sol froid tandis que sa m?re hurlait et pr?chait sur le don du diable. Elle ne fut pas r?primand?e ? l’?cole ? cause de son inattention, elle ne fut pas ridiculis?e et ostracis?e par les autres enfants ? cause des choses troublantes qu’elle pouvait deviner sur eux, uniquement en les regardant. Elle n’avait pas ?t? l? pour chaque relation rat?e que Zoe avait endur?e, incomprise encore et encore, ne se retrouvant avec rien d’autre que l’?tiquette « folle » et le c?ur ? nouveau bris?. « C’est mon secret de le dire, ou pas, si je le souhaite, » dit-elle cat?goriquement une fois que son c?ur b?tit suffisamment lentement pour qu’elle puisse prononcer les choses au lieu de les cracher, et Shelley eut l’intelligence de ne pas r?pondre. Elles se gar?rent devant le bureau du coroner et Zoe claqua la porte de la voiture derri?re elle, se dirigeant d’un pas raide vers l’entr?e. Puis elle s’arr?ta. Cela ne servirait ? rien de proc?der ? l’examen avec ce genre d’?nergie pesant sur elle. Elle devait l’oublier, la ranger dans un coin de sa t?te et y revenir plus tard. Pour l’instant elle devait ?tre professionnelle. Le coroner, une femme mince, de type asiatique, environ la quarantaine avec des yeux per?ants et des cheveux coup?s au carr? lui arrivant ? hauteur du menton, ?tait imposante. Elle leur montra le corps du professeur et garda respectueusement ses distances tandis qu’elles proc?d?rent ? l’examen. Allong? nu sur le brancard m?tallique ? roulettes, l’homme n’?tait rien de plus que de la viande blanche. En retirant le drap, il ?tait difficile pour Zoe de faire le lien entre ce gros morceau de chair morte et l’homme qu’il avait ?t?, et de maintenir ce lien connect?. Son humanit? l’avait quitt?. Elle pouvait encore la percevoir sur les bouts des doigts jaunis qui trahissaient une d?pendance ? la nicotine et sur la petite marque d’un centim?tre au-dessus de son oreille gauche o? il avait port? pendant des ann?es des lunettes mal ajust?es. Mais l’essence, l’?tre, tout ce qui avait rempli et anim? autrefois ce corps avait disparu. C’?tait mieux ainsi. Les gens la d?concertaient. Ils cachaient leur vraie nature derri?re des mots et des gestes qu’elle ne pouvait pas toujours comprendre. Mais les corps ne mentent pas. Ils ?taient ce qu’ils ?taient, ni plus, ni moins. Ce n’?tait donc pas plus mal qu’il ait perdu son visage. ?cras? ? l’int?rieur. Son nez ?tait r?duit ? un plan totalement lisse du visage, les bosses et les courbes ?tant d?sormais enfonc?es ? l’int?rieur de son cr?ne. Le c?t? droit de la t?te ?tait bris? et ?cras? lui-aussi, portant les traces manifestes de l’impact. Personne n’aurait pu survivre ? cela. Il avait m?me perdu l’un de ses yeux. L’?quation ?tait l?, sur son torse, ?crite obliquement du haut de sa poitrine jusqu’en-dessous de son nombril. Tout ?tait pareil que sur les photos – l’int?gralit? de l’extrait avait ?t? captur?e avec exactitude. Portant des gants blancs jetables inconfortables, Zoe retourna chacun de ses bras et jambes, et le souleva m?me sur le c?t? avec l’aide de Shelley. Elles ne d?cel?rent nulle part des traces d’encre, ou du moins une marque qui aurait pu ?tre la pi?ce manquante de l’?quation. « Ils n’ont rien oubli?, » dit Shelley ? haute voix, confirmant la frustration grandissante qui s’accumulait dans la t?te de Zoe. « L’autre corps. » Zoe se retourna vers le coroner. « Nous avons besoin de voir l’?tudiant aussi. » Le coroner haussa les ?paules, d’une mani?re sugg?rant qu’elle pensait que c’?tait inutile, et se dirigea vers un autre casier de l’armoire m?tallique qui servait de derni?re demeure provisoire. Elle tira dessus, le tiroir s’ouvrant dans un fort grincement de m?tal contre m?tal, et elle recula pour leur permettre d’acc?der au r?sidant. L’?tudiant paraissait encore plus jeune que sur les photos, ainsi allong? sur le plateau m?tallique froid, avec tout le sang drain? hors de ses joues et la couleur avec. Le sommet de sa t?te ?tait un carnage, ouvert et ?cras? vers l’int?rieur. Il ?tait respectueusement couvert d’un drap, mais le respect n’?tait dans ce cas-l? qu’un obstacle pour Zoe. Zoe s’approcha et le tira sur le c?t?, notant la r?ticence de Shelley ? faire cela. Durant une longue seconde, Zoe le fixa du regard, incapable de comprendre ce qu’elle voyait. Puis elle se demanda s’ils n’avaient pas sorti le mauvais corps, mais elle reconnut son visage d’apr?s les photos de la sc?ne de crime. Finalement, le doute r?gna et elle se tourna vers le coroner en lui lan?ant un regard si noir que l’autre femme dut reculer. « O? sont les ?quations ? » demanda Zoe d’un ton bas et lisse, assez mena?ant pour pr?venir quiconque de la rage qui se cachait derri?re. « Eh bien, nous avons effectu? l’autopsie, » b?gaya le coroner, en cherchant une table m?tallique derri?re elle pour se maintenir. « Nous lavons toujours les corps afin d’effectuer l’autopsie. – Vous avez effac? les preuves. » Shelley s’approcha et posa gentiment sa main sur le bras de Zoe, peut-?tre pour l‘inviter ? se calmer. Zoe l’ignora. Elle bouillonnait, chaque muscle dans son corps pr?t ? exploser en une tornade d’?nergie et ? balancer quelque chose contre le mur. Peut-?tre contre le coroner. La seule raison pour laquelle elle ne le fit pas ?tait que c’?tait ?videmment contraire au code d?ontologique. Comment auraient-ils tol?r? quelque chose de pareil ? « Qui a autoris? le nettoyage ? » demanda Shelley d’une voix calme et pos?e. Elle avan?a l?g?rement devant Zoe, comme pour la prot?ger. Le coroner fouilla dans ses papiers, toujours b?gayant, le visage devenu p?le. Zoe ne pouvait plus le supporter. Elle sortit pr?cipitamment de la pi?ce avec un grognement guttural, et claqua la porte derri?re elle pour couronner le tout. Mais la porte ?tant battante, le mouvement perdit un peu de son effet, contribuant tout de m?me ? rel?cher une partie de la tension accumul?e dans son corps. Shelley la rejoignit quelques minutes plus tard, la trouvant faisant les cent pas au bout du couloir. « Il faudrait qu’on leur fasse un rapport pour avoir manipul? les preuves, » dit Zoe une fois que Shelley fut assez proche pour l’entendre. « Ils ont agi dans les limites de leurs pr?rogatives, » soupira Shelley, haussant les ?paules. « Le photographe a consid?r? qu’ils avaient tout pris. Il va falloir leur faire confiance. – Ils devraient quand m?me ?tre punis. Ils n’ont pas de bon sens ? C’?tait ?videmment une preuve. Et les enqu?teurs principaux n’avaient m?me pas encore vu le corps ! – Bon, ? vrai dire, c’?tait une affaire locale quand ils ont effectu? l’autopsie, et non une f?d?rale. Ce qui est fait est fait. On n’a qu’? travailler avec ce qu’on a. » Shelley ?tait rationnelle ; trop rationnelle. Zoe n’aimait pas cela. Elle voulait une justification pour la frustration qu’elle ressentait, bon sang, un sentiment commun entre les deux. Elle d?testait qu’on la fasse se sentir comme ?tant la folle de service, avec son probl?me. Les choses mal faites ?taient un probl?me. Les gens ?taient cens?s faire le boulot pour lequel ils ?taient pay?s. C’?tait ainsi que la soci?t? fonctionnait. « Une chose pareille aurait d? leur para?tre d’une importance ?vidente, » dit Zoe, essayant dans une derni?re tentative de communiquer un faux sentiment de rage ? Shelley. Cela ne marcha pas. « Nous devons avancer de toute fa?on, » dit Shelley en sortant et jetant un coup d’?il derri?re elle pour s’assurer que Zoe la suivait. « Devrions-nous aller parler avec la femme du professeur ? » Zoe acquies?a d’un signe de t?te, capitulant. Elle exag?rait peut-?tre. On lui avait dit qu’elle pouvait le faire de temps ? autre. Dans cette affaire, il y avait bien plus ? d?couvrir que les simples preuves physiques sur les corps. Bien s?r, le c?t? math?matique ?tait captivant, de m?me que de cibler une universit? renomm?e. Mais il y avait toujours une autre version ? entendre de la part des familles des victimes, les personnes qui les avaient connues. Peut-?tre que Mme Henderson pouvait les aider ? mieux comprendre la mort de son mari – et ? refermer cette enqu?te frustrante le plus vite possible. CHAPITRE CINQ Shelley prit le volant, un ?v?nement rare quand elle se d?pla?ait avec sa partenaire. Shelley savait que normalement, Zoe avait le mal des transports, mais aujourd’hui elle ?tait tellement pr?occup?e par ses ?quations qu’elle semblait ? peine remarquer les routes qui se succ?daient rapidement. Elle ne s’?tait m?me pas agripp?e ? sa ceinture, sa fa?on ? elle de manifester son inconfort. Shelley lui jeta un coup d’?il ? chaque fois qu’elle en avait l’occasion –aux carrefours ou arr?t?e dans les bouchons. Ce que Zoe griffonnait fr?n?tiquement sur plusieurs pages de son calepin n’avait aucun sens pour elle. Cela aurait tr?s bien pu ?tre des hi?roglyphes. Zoe avait un r?el talent en mati?re de chiffres, mais il y avait ?galement d’autres aspects li?s ? cela. Une obsession tenace pouvait parfois s’emparer d’elle, comme ? pr?sent. Autant Shelley aurait voulu l’aider, elle n’avait aucune id?e de ce qu’il fallait faire – et Zoe n’allait pas le lui dire. Et elle ?tait ainsi bien souvent. Silencieuse, renferm?e. Shelley avait entendu des histoires sur ses anciens partenaires et il n’?tait pas difficile d’en d?duire que Zoe avait peut-?tre renonc? depuis bien longtemps ? confier ses pens?es aux autres. Zoe avait l’habitude de travailler seule. C’?tait sa fa?on de fonctionner. Shelley allait changer cela. Seulement, cela risquait de prendre un bon moment. Cependant, elle devait continuer ? la motiver et ? lui rappeler de partager ses pens?es. Peut-?tre pas seulement ? propos des math?matiques. Shelley pouvait lui faire confiance de travailler l?-dessus toute seule. Le professeur d’anglais avait habit? de l’autre c?t? de la ville, dans l’une des banlieues chics avec ces maison blanches dot?es de vastes pelouses et des cl?tures blanches assorties. Shelley gara la voiture devant, coupa le moteur et attendit que Zoe s’en rende compte. Elle ne leva m?me pas la t?te. Il y avait des moments o? Shelley sentait qu’elle devait marcher sur la pointe des pieds autour de Zoe – de la consid?rer avec pr?caution. Avec des pincettes. Ce qui ?tait assez ironique, sachant que Shelley passait tout son temps ? ?tre un parent ? la maison. Plus d’une fois, elle eut l’impression de faire la m?me chose au travail, bien que Zoe f?t la plus ?g?e entre elles. « Nous y sommes, » dit Shelley doucement, ne voulant pas interrompre Zoe en plein milieu de ses calculs. Le stylo de Zoe se figea et elle leva enfin son regard. Elle semblait surprise de se retrouver ailleurs que sur le parking du bureau m?dico-l?gal. « Je dois juste finir… » Shelley leva un sourcil. « Z, est-ce que ?a va te prendre encore deux minutes pour finir ? Sinon, ce serait mieux d’aller parler ? la femme du professeur et reprendre l’?quation plus tard. » Zoe poussa un profond soupir, mais elle semblait ?tre d’accord. Elle rangea son calepin dans une poche et descendit de la voiture, ce que Shelley interpr?ta comme un signal ? faire de m?me. Elle r?visa son pr?c?dent jugement ; g?rer Zoe n’?tait pas exactement pareil que g?rer un enfant. Plut?t un adolescent parfois bourru. Mme Henderson semblait les attendre, ou du moins attendre quelqu’un. Elle ?tait bien habill?e dans une robe fonc?e ? fleurs, les couleurs ternes ?voquant ce qu’elle ?tait en train de vivre. Ses yeux ?taient cern?s de rouge, mais grands ouverts et per?ants, not?rent en quelques instants Shelley et Zoe d?s leur rencontre sur le seuil de la porte. « Je suis l’Agent Sp?cial Shelley Rose et voici l’Agent Sp?cial Zoe Prime. Nous souhaiterions entrer et parler de votre mari, Mme Henderson. » La femme fit un signe de t?te, les invitant ? entrer, tout en s’?cartant afin de fermer la porte derri?re elles. La maison ?tait meubl?e dans un style classique discret, tout en bois sombre, des coussins confortables et des couvertures. Mme Henderson les conduisit dans un coin salon, o? Shelley accepta volontiers le caf? qui lui avait ?t? offert, ainsi qu’? Zoe. « Elle le prend tr?s bien, » chuchota Shelley, jetant un coup d’?il tout autour de leur nouvel environnement. Il ?tait bien rang?, aucun objet d?plac?. Pas de poussi?re ni sur la table basse en marbre, ni sur le buffet fonc? surcharg? de pense-b?tes et de babioles. Quelques morceaux de fruits frais se trouvaient dans un bol poli au milieu de la table. Cela ressemblait davantage ? un plateau de t?l?vision qu’? une maison habit?e pour de vrai. Peut-?tre que la fa?on pour Mme Henderson de vivre son deuil ?tait de nettoyer et ranger la maison, pr?te ? recevoir. Cela n’aurait pas ?t? totalement ?trange. Shelley l’avait d?j? vu. C’?tait li? ? la n?gation – l’id?e selon laquelle, si elle s’assurait que tout ?tait parfait, son mari pourrait rentrer par la porte. La charge de travail reportait aussi le deuil. Une photographie encadr?e ?tait pos?e sur la chemin?e – le professeur et sa femme ? une ?poque plus heureuse. Shelley la regarda et essaya de ne pas voir le d?sastre terrifiant auquel avait ?t? r?duite la t?te du professeur. « Dix-sept figurines, » marmonna Zoe. Shelley suivit son regard en direction du buffet et sut que Zoe faisait ce qu’elle faisait toujours : chercher des chiffres. Dans ce cas, pourtant, elles avaient d?j? pris un autre sens. Elle cherchait un indice qui pouvait faire avancer les ?quations. La maitresse de la maison revint apr?s seulement quelques minutes, portant un plateau charg? de trois tasses de caf? chaud. Le d?licat mod?le de la tasse en porcelaine de Mme Henderson contrastait avec la simplicit? pratique des deux autres. Deux personnalit?s s’exer?ant sur le contenu d’une maison. Peut-?tre un message indiquant que les visiteurs qu’elle recevait aujourd’hui n’?taient pas dignes de la meilleure porcelaine. « Cela a d? ?tre un vrai choc pour vous, » dit Shelley tout en levant sa tasse et soufflant doucement la surface du caf? avant de le siroter. Ces questions ou affirmations, ouvertes et chaleureuses, encourageaient souvent le d?voilement de plus d’information. Le genre d’information auquel on n’aurait m?me pas pens? autrement. « Oh, oui, » soupira profond?ment Mme Henderson, s’installant de nouveau dans le fauteuil qui devait ?tre sa place habituelle. « J’ai encore du mal ? y croire. Mon Ralph, parti juste comme ?a. Et si violemment, en plus. Je ne peux pas comprendre. – Pouvez-vous penser ? la raison qui se cache derri?re le niveau de violence, Mme Henderson ? » La femme ?g?e ferma un instant ses yeux, une main s’agitant jusqu’? son front. Elle ?tait encore orn?e d’une alliance simple en or, aux c?t?s d’un m?lange plus ?labor?, compos? de petits diamants. Peut-?tre la bague de fian?ailles, vieilles de plusieurs d?cennies. « Au d?part, j’ai cru qu’ils avaient voulu voler quelque chose. Sa voiture ou son porte-monnaie. Mais la police a dit que rien ne manquait. – Les psychologues nous disent que l’on y retrouve les traces d’une grande rage. Le genre de rage qui, et bien, vient habituellement du fait de conna?tre personnellement la victime. Y a-t-il quelqu’un auquel vous penseriez ? Quelqu’un qui pourrait ?tre f?ch? contre votre mari, assez pour vouloir lui faire mal ? » Un mouchoir brod? vint tamponner ses yeux, sa main annel?e se levant pour balayer une m?che de ses cheveux ch?tain clair. « Je ne peux pas l’imaginer. Je veux dire, Ralph ?tait – c’?tait Ralph. Il n’aurait pas fait de mal ? une mouche. Il s’entendait bien avec ses coll?gues, il ?tait appr?ci? par les ?tudiants. Nous avons quelques amis dans le quartier qui venaient chez nous pour le d?ner de temps en temps. Il ne s’?tait jamais disput? avec des inconnus. Il n’y avait rien de controvers? ? son sujet. Tout le monde l’aimait ! – D’accord, donc pas d’ennemis connus, » dit Shelley, faisant des signes de t?te de mani?re encourageante m?me si elle se sentit frustr?e par la r?ponse. Il ?tait toujours mieux de savoir vers o? aller ensuite. « Tout au long de sa carri?re, vous pensez ? Il n’a jamais eu d’ennuis ? » Mme Henderson renifla, haussant ses ?paules. « Et bien, il y avait toujours un petit quelque chose, » dit-elle, bien que sa voix indiqu?t qu’elle pensait que cela ?tait insignifiant. « Il ?tait professeur. Il y avait des ?tudiants qui n’?taient pas d’accord avec leurs notes. Ou ceux qui ?taient recal?s car ils n’avaient pas particip? aux cours, ou n’avaient pas rendu leurs essais ? temps. Ils pensent tous qu’ils m?ritent un traitement sp?cial. Mais c’est normal. Cela fait partie du boulot. Personne ne tuerait pour une note, n’est-ce pas ? » Shelley remarqua que Mme Henderson posait vraiment la question – elle cherchait ? ?tre rassur?e. Malheureusement, Shelley savait qu’elle ne pouvait pas le faire. Les gens tuaient pour toutes sortes de raisons. Il n’y avait pas toujours de logique derri?re. Parfois, ce n’?tait que la goutte d’eau qui les faisait craquer, en plus du reste. C’?tait peut-?tre une id?e qui m?ritait d’?tre explor?e. Un jeune riche g?t?, ? qui on a tout donn? dans la vie, qui commence soudainement ? ?chouer pour la premi?re fois ? Qui p?te les plombs, guid? par le sentiment d’impunit? ? Ou un ?tudiant sans le sou n’ayant plus de raison de vivre – parents r?cemment d?c?d?s, largu? par sa copine, licenci? de son boulot ? mi-temps et puis une mauvaise note pour couronner le tout ? C’?tait quelque chose ? consid?rer en tout cas. « Esp?rons que non, » s’aventura-t-elle avec un l?ger sourire qui avait pour but d’exprimer sa compassion. « Vous rappelez-vous autre chose d’inhabituel qui aurait pu se passer au cours des derniers jours ou semaines – voire ces derniers mois ? » Mme Henderson secoua la t?te, tamponnant de nouveau ses yeux. « J’y ai pens?, encore et encore. Tout ?tait tout simplement… normal. C’est pour cela que ?a a ?t? si choquant. Totalement ? l’improviste. Je ne sais absolument pas pourquoi quelqu’un aurait voulu faire du mal ? mon Ralph. » La femme devenait de plus en plus boulevers?e. Il ?tait peut-?tre plus prudent de terminer l’interrogatoire et la laisser tranquille. « Y a-t-il quelque chose d’autre que vous pourriez nous dire – vraiment rien d’autre ? Cela peut ne pas vous para?tre important, mais la moindre information est une autre pi?ce du puzzle. » Mme Henderson secoua sa t?te, d’un air impuissant. « D’accord, une derni?re question. Vous souvenez-vous avoir entendu votre mari parler d’un ?tudiant qui s’appelle Cole Davidson ? – Pas avant que son nom soit dans les journaux, » dit Mme Henderson. « Le pauvre gar?on. Vous pensez… vous pensez qu’ils soient li?s ? Ils doivent l’?tre, n’est-ce pas ? Deux meurtres en si peu de temps ? – Ce n’est pas utile pour nous d’?mettre des hypoth?ses ? ce stade. » Shelley but une derni?re gorg?e de son caf?, regrettant de devoir abandonner la moiti? de ce que fut une bonne tasse de caf?. « Mais nous resterons en contact, si nous pouvons vous en dire davantage. » Shelley se leva, puis h?sita tandis que Zoe la rejoignit. « Mme Henderson, avez-vous quelqu’un pour vous tenir compagnie aujourd’hui ? » Elle acquies?a doucement d’un signe de t?te, tout en se levant pour les accompagner ? la porte. « Ma fille a pris un vol. Elle devrait ?tre ? la maison ce soir. » Cela r?conforta Shelley. Laisser une femme seule avec son deuil la perturbait toujours, peu importe le nombre de familles qu’elle avait d?j? interrog?es. « Alors nous restons en contact, Mme Henderson. En attendant, essayez de vous reposer un peu. » Une fois de retour dans la voiture, Zoe sortit tout de suite son calepin et commen?a ? griffonner de nouveau. Shelley se demanda si elle avait ?cout? un seul mot de l’interrogatoire ou si elle l’avait imm?diatement ignor?, le consid?rant inutile, et avait pass? tout ce temps ? penser aux chiffres. Quoi qu’il en f?t, Shelley ne pouvait pas se f?cher. ? pr?sent, les ?quations ?taient la seule vraie piste qu’elles avaient. Sur le chemin de retour, Shelley ne put s’emp?cher de s’inqui?ter du fait qu’elles ne trouveraient plus rien d’important qui pourrait r?soudre l’affaire. Avec Zoe tellement pr?occup?e par les chiffres, c’?tait ? Shelley de trouver quelque chose d’autre qui ferait une diff?rence. Le probl?me ?tait de savoir o? chercher. CHAPITRE SIX Zoe d?testa chaque seconde du temps perdu ? traverser le b?timent, du parking jusqu’? la salle qu’elles avaient r?serv? pour leur enqu?te. Une distance d’environ cinq cents pas qui aurait pu ?tre pass?e ? travailler. Aussi agr?able que cela pouvait l’?tre de travailler sur quelque chose qui s’?tait pass? dans leur propre jardin, comme l’avait dit Shelley, Zoe commen?ait d?j? ? ?tre irrit?e. Les ?quations refusaient de lui r?v?ler leurs secrets, restant ferm?es et opaques. D?s qu’elles atteignirent la table, Zoe s’assit et reprit ses notes, essayant de reprendre chaque ?l?ment de l’?quation du professeur, ?tape par ?tape. Apr?s tout, la sienne ?tait celle qu’elles avaient vue en vrai, celle dont elles pouvaient ?tre s?res qu’elle ?tait compl?te. « Je vais v?rifier son compte email de l’Universit?, » annon?a Shelley, tout en jetant son sac sur une chaise et en en sortant son portable. « Est-ce n?cessaire ? » demanda Zoe en plissant son nez. Il n’y avait pas de raison ? se pr?cipiter vers de ce genre de piste. La r?ponse ?tait dans les ?quations et non pas dans la vie personnelle du professeur. C’?tait forc?ment ainsi. Il n’y avait aucun lien entre Cole Davidson et ce professeur d’anglais, si ce n’est les ?quations. « Je ne suis pas dou?e en maths, donc je ne peux pas t’aider ? d?chiffrer les ?quations cette fois-ci », souligna Shelley. « Quelque chose que Mme Henderson a dit me fait r?fl?chir. Il peut toujours s’agir d’un ?tudiant. Quelqu’un qui s’est senti offens? en quelque sorte. Il est possible que beaucoup de personnes du campus aient aussi bien connu Cole que le Professeur Henderson. Zoe h?sita, retenant ses objections sur le bout de sa langue. Elle trouvait que c’?tait une perte de temps de se mettre ? fouiller dans les emails d’un homme mort. Mais qu’importe ? Shelley avait raison – elle ne pouvait pas l’aider avec les ?quations. Et c’?tait peut-?tre le moment que Zoe lui fasse confiance pour analyser les choses ? sa mani?re. Il serait peut-?tre bien aussi pour Zoe que l’affaire soit r?solue gr?ce ? un email m?content plut?t que par les chiffres. Apr?s que Shelley ait fait remarquer ? leur sup?rieurs hi?rarchiques le talent de Zoe pour les math?matiques, Zoe ne se donnait plus vraiment de mal ? le prouver. D’ailleurs, ce serait mieux si cela pouvait passer cela pour de la confiance d?plac?e de la part de sa partenaire. Mais, bien s?r, pas si cela compromettait l’affaire. Arr?ter le criminel ?tait toujours la chose la plus importante. Zoe reporta son attention sur les ?quations tandis que Shelley appela l’Universit? pour obtenir l’acc?s dont elle avait besoin. Le probl?me ?tait qu’elle ?tait all?e aussi loin qu’elle le pouvait – avec les deux. Certes, il y avait toujours la possibilit? que l’on ait oubli? quelque chose sur le corps de l’?tudiant, mais elles avaient v?rifi? le professeur elles-m?mes. Alors, qu’est-ce qui lui ?chappait ? Il y avait encore une possibilit?, bien s?r : qu’elle n’?tait tout simplement pas suffisamment dou?e pour la r?soudre. Il y avait une diff?rence entre ?tre capable de voir les chiffres – distances, dimensions, angles – et ?tre capable de r?soudre des probl?mes de math?matiques quantiques. Cela n?cessitait d’autres aptitudes que certaines personnes d?veloppaient durant toute une vie. Zoe avait un don, mais elle l’avait mis au profit de la traque des criminels, pas ? l’?tude des math?matiques. Ce qui fit germer une nouvelle id?e dans sa t?te. Elle se leva, quittant Shelley encore au t?l?phone avec un r?ceptionniste, et porta une liasse de photographie au bout du couloir, en direction de l’ascenseur. Deux ?tages plus haut, un couloir identique ? celui qu’elle venait de quitter – exception faite que les pi?ces ? cet ?tage transpiraient davantage le pouvoir. Zoe prit sa respiration avant de frapper ? la porte de son chef. Combien de fois fut-elle convoqu?e ici pour se faire r?primander d’avoir encore perdu un partenaire ou d’avoir d?charg? son arme ? Mais ce n’?tait pas l’un de ces moments et une fois convi?e, elle entra en essayant de ne pas ?tre nerveuse. Avec son corps imposant et sa musculature plus large que la moyenne, il ?tait facile de comprendre pourquoi l’Agent Superviseur Maitland pouvait ?tre intimidant sur le terrain. Les criminels l’auraient tois? avant de s’enfuir. Zoe s’effor?a de ne pas faire de m?me. « Monsieur, » dit-elle, h?sitant sur le seuil de la porte. Maitland leva les yeux de ses papiers, puis continua ? gribouiller sa signature en bas d’une demande. « Allez-y, Agent Sp?cial Prime. Ne restez pas dans le couloir toute la journ?e. » Zoe s’avan?a, laissant la porte se refermer derri?re elle avec un peu de r?ticence. Pourtant, elle redressa ses ?paules et lui fit face, le dos droit comme elle se sentait toujours le devoir de se maintenir en sa pr?sence. « Monsieur, il s’agit de l’affaire sur laquelle nous travaillons l’Agent Sp?cial Rose et moi. L’?tudiant et le professeur, retrouv?s avec des ?quations ?crites sur leur corps. » Malgr? le grand nombre de dossiers qui devait forc?ment passer par le bureau de Washington, Maitland n’h?sita pas. « Je connais l’affaire. De quoi avez-vous besoin ? – Les ?quations sont tr?s complexes, » dit Zoe, ayant l’impression d’?tre une rat?e en avouant simplement qu’elles l’?taient trop pour elle. Pourtant, il le fallait. Fixant du regard tout ce qui ?tait bien rang? dans un angle de quatre-vingt-dix degr?s sur le bureau de Maitland, au lieu de scruter sa r?action, elle alla de l’avant. « Je pense que nous devrions faire appel ? un expert en la mati?re. Quelqu’un qui pourrait travailler sur les ?quations de fa?on professionnelle. » Maitland acquies?a d’un signe de t?te, puis s’arr?ta d’?crire, comprenant qu’elle avait fini. « Pensez-vous ? quelqu’un en particulier ? L’Agent Sp?cial Rose nous a rappel? que vous aviez ?tudi? les math?matiques par le pass?. – Oui, monsieur. – Bien. » Maitland retourna ? sa paperasse, sans lui porter davantage attention. « Autorisation accord?e. Retournez-moi le formulaire au plus vite. – Oui, monsieur. » Zoe fit demi-tour et s’enfuit presque, ravie d’avoir obtenu un r?sultat aussi positif. En aucune mani?re elle n’allait tra?ner et risquer qu’il change d’avis. Il y avait du travail ? faire – et quelqu’un de tr?s important ? mettre sur l’affaire. *** Zoe attendit impatiemment, observant sa mentor examiner les images. « Elle sont…troublantes. » La Dr. Applewhite secoua sa t?te, coin?ant sa l?vre inf?rieure entre ses dents durant trois secondes, tandis qu’elle glissait la photo ? l’arri?re du paquet qu’elle tenait ? la main, et examina la suivante. « Parfois j’oublie que tu dois regarder ce genre de choses jour apr?s jour. Cela doit peser lourd. » Zoe haussa les ?paules. « Les morts sont morts. C’est de ne pas r?soudre les affaires qui me d?range. – Et celle-ci, tu n’as pas encore pu la r?soudre. » Ce n’?tait pas une question. Zoe avait d?j? annonc? ? la docteur qu’elle avait besoin d’aide. La Dr. Applewhite savait que c’?tait une affaire en cours et qu’elle avait d? solliciter la permission pour qu’elles puissent ne serait-ce qu’avoir cette conversation. Elle comprit ?galement que le temps ?tait compt?. Au fil des heures, il devenait de moins en moins probable qu’ils allaient retrouver le coupable. Le probl?me avec les homicides est que les premi?res vingt-quatre heures sont essentielles. Tout le monde le savait. Vingt-quatre heures sans une arrestation et on commen?ait ? ?voluer en terrain min?. Le genre d’affaires qui allait se transformer en ?pisodes d‘?missions t?l?vis?es de fin de soir?e. L’?tudiant ?tait mort depuis bien plus de quarante-huit heures. « J’ai besoin de savoir ce que ?a veut dire, » expliqua Zoe. « ? pr?sent, c’est la seule piste que nous avons. Il ne semble pas y avoir de lien entre le professeur et l’?tudiant, au-del? de l’endroit o? ils ont ?t? trouv?s. Pas de t?moin, pas d’enregistrement sur les cam?ras de surveillance. Nous devons comprendre quel genre de message le tueur essaie de transmettre si nous voulons l’arr?ter. » La Dr. Applewhite fron?a les sourcils en regardant les photos et les posa ? c?t? des notes de Zoe pour revoir les calculs que Zoe avait d?j? faits. « Ton raisonnement me semble solide, » dit-elle apr?s un certain temps. « Je ne vois pas d’autre possibilit? que tu n’aies pas d?j? explor?es. C’est tr?s avanc? – au-del? m?me du niveau auquel je travaille. » Zoe sentit son c?ur chavirer dans sa poitrine. Elle ?tait certaine, tellement certaine que la Dr. Applewhite aurait les r?ponses. D?sormais, il semblait que ces espoirs ?taient an?antis. Elle pensait d?j? ? d’autres alternatives, essayant de trouver quoi dire ? Shelley, lorsque la Dr. Applewhite parla de nouveau. « Je connais des gens qui pourraient t’aider, » dit-elle. « Des professeurs. Quelques math?maticiens qui travaillent dans d’autres domaines. Si je pouvais leur montrer cela, je pourrais aller plus loin avec. C’est le genre de d?fi que tous adorent, alors nous allons forc?ment avoir quelques esprits brillants ? nos c?t?s. » Zoe acquies?a d’un signe de t?te. « ?a nous rendrait service. » La Dr. Applewhite d?gagea son carr? grisonnant derri?re une oreille et leva les yeux, fixant maintenant Zoe avec ce m?me regard curieux. « Comment t’en sors-tu avec celle-ci ? Ce n’est pas souvent qu’un probl?me de maths surgit et te laisse perplexe. » Zoe envisagea un instant mentir, mais rel?cha ensuite ses ?paules. « Un peu comme une rat?e. C’est mon point fort. Je devrais au moins pouvoir trouver la solution. Si je ne peux pas, qui va le faire au FBI ? » Venant de la bouche de quelqu’un d’autre, cela aurait pu para?tre de la vantardise. Pour Zoe, c’?tait purement factuel. Les analystes et leurs semblables passaient toute la journ?e ? travailler avec des chiffres, mais ils n’avaient pas cette compr?hension instinctive qu’elle poss?dait. Ils ne pouvaient pas regarder une ?quation sur une page et voir la r?ponse aussi clairement que si elle ?tait ?crite ? c?t?. Du moins, c’?tait ainsi pour elle d’habitude. Celle-ci ?tait diff?rente. « On ne peut pas attendre que tu r?solves tout. Aucun agent FBI, dans toute l’histoire du Bureau, n’a eu un taux d’affaires r?solues de 100%. » Zoe esquissa un sourire p?le. « Je suis s?re qu’il a eu des pr?c?dents. Des agents qui ont ?t? tu?s ou qui sont partis ? la retraite juste avant la r?solution de leur premi?re affaire, par exemple. » La Dr. Applewhite leva ses yeux au ciel. « Il n’y a que toi pour trouver une faille. ?coute, je vais passer quelques coups de fil et soumettre ces ?quations ? certains de mes coll?gues. Je ne leur dirai pas de quoi il s’agit – juste que c’est urgent et que c’est un gros d?fi. Cela devrait les intriguer suffisamment pour les faire travailler dessus. Je te pr?viendrai si quelqu’un fait une d?couverte. – Ou toute autre chose, aussi, » lan?a Zoe, rapidement. « Si quelqu’un trouve une erreur ou la trace qu’il manque quelque chose. Nous n’avons pas pu v?rifier int?gralement le premier corps pour v?rifier si le photographe avait rat? un ?l?ment. Gardez ? l’esprit que nous ne savons pas non plus s’il s’agit d’une seule ?quation ou de deux probl?mes s?par?s. – Entendu. » La Dr. Applewhite reposa les photographies sur le bureau devant elle, cinq centim?tres vers la droite, ? proximit? de son ordinateur portable. Un geste qui rassura Zoe de son intention de commencer ? travailler dessus d?s que possible. « Maintenant, qu’en est-il des recommandations de la Dr. Monk ? As-tu repens? au… » La sonnerie du t?l?phone de Zoe retentit dans sa poche, accompagn?e d’un fort vrombissement. Sauv?e par le gong, pensa-t-elle tout en affichant une grimace d’excuse, et r?pondit. « Agent Sp?cial Prime. – Z, c’est moi. J’ai trouv? une piste dans les mails du professeur. – J’arrive, » lui dit Zoe, raccrochant et bondissant de sa chaise en saluant sa mentor d’un signe de t?te. Quoi que ce fut, cela devait ?tre plus prometteur que le vide qu’elles avaient d?j?. CHAPITRE SEPT Zoe gara la voiture sur le parking du campus. ? cette heure du soir, avec la nuit qui tombe vite, le parking ?tait bien rempli – les voitures appartenaient aux ?tudiants qui vivaient dans les diff?rentes r?sidences et appartements dispers?s tout autour. Chacune affichait un permis universitaire coll? sur leur pare-brise. Zoe avait quelque chose de mieux – une vignette FBI. « Relis-le-moi ? » demanda Zoe. Elle ?tait toujours intrigu?e par la th?orie de Shelley. ?tre en col?re pour une note baiss?e ?tait une chose, mais ?tre assez en col?re pour tuer ? Shelley afficha le mail sur son t?l?phone, sans m?me un soupir de d’agacement, ce qui ?tait ? mettre ? son cr?dit. Elle avait sauvegard? une capture d’?cran et l’amena comme preuve – preuve dont elles auraient besoin si elles allaient la confronter ? l’?tudiant qui l’avait envoy?. « « Professeur, » » lut-elle. « « Je n’arrive pas ? croire que vous m’ayez recal?. Genre, t’es s?rieux ? Je me suis donn? ? fond pour cet examen et vous avez juste d?cid? de me virer du cours ! Les profs sont cens?s aider et accompagner. Un putain de merci. Vous ?tes le pire des professeurs que je n’ai jamais eu, j’esp?re que vous serez vir?. Je ne suis pas le seul ? vous ha?r. Vous allez en prendre pour votre grade, si jamais le doyen ?coute nos plaintes. Essayez de bien dormir cette nuit, connard. » » Zoe regardait dans le vide lorsque Shelley eut fini. Elle l’avait d?j? entendu ? plusieurs reprises auparavant et cette fois-ci n’allait pas lui faire changer d’opinion. C’?tait tout simplement de la fanfaronnade d’?tudiant. Des menaces faites ? sa carri?re, pas ? sa vie. Sans compter que l’?l?ve concern? ?tudiait l’anglais, pas les math?matiques. Ce n’?tait pas un lien suffisamment ?tabli. Comment cet ?tudiant ? peine instruit aurait-il pu ?crire des ?quations complexes ? Assez complexes pour laisser les experts perplexes. De plus, m?me si ce jeune ?tait en col?re contre son professeur, cela n’expliquait absolument pas pourquoi il se serait attaqu? ? la premi?re victime – l’?tudiant. « Et bien ? » demanda Shelley. Zoe se rendit compte qu’elle ?tait rest?e silencieuse, incapable de r?agir ? la lecture de Shelley. Elle hausa alors les ?paules. « ?a m’a l’air d’?tre rien. – Allez, Z ! Il menace directement le professeur, » dit Shelley. « Et cette allusion ? d’autres ?tudiants m?contents – et s’il en connaissait d’autres qui auraient pu le faire ? Il faut au moins le ramener pour l’interroger. » Zoe regarda avec insistance le campus sombre, ses bras crois?s au-dessus de sa poitrine, devant le volant. « Si tu le dis. » Ce n’?tait clairement pas la r?ponse ? laquelle Shelley s’attendait, puisqu’elle ?mit un raclement ?nerv? du fond de sa gorge et se retourna. Son t?l?phone vibra presque au m?me moment et elle baissa les yeux pour lire le message. « Je viens de recevoir un courriel de la secr?taire du d?partement des admissions. Elle m’a envoy? l’emploi du temps de Jones. – Jones ? », interrompit Zoe. Cette fois-ci, Shelley soupira vraiment et leva les yeux au ciel. « Jensen Jones, l’?tudiant que nous sommes venues voir. Je sais que tu ne penses pas qu’il soit une piste s?rieuse, mais j’ai cru qu’au moins tu faisais attention. » Zoe haussa de nouveau les ?paules, ne lui offrant aucune excuse. Elle avait quelque chose de mieux, des choses plus importantes sur lesquelles se concentrer. Les ?quations. Le fait qu’elle ne s’approchait toujours pas de la solution. L’attente que les contacts de la Dr. Applewhite jettent un coup d’?il dessus et la rappellent ensuite ?tait une agonie. « Peu importe, voil? ce qui est important. Jones prenait aussi un cours de physique. Et devine qui se trouve ?tre l’?tudiant instructeur ? ces cours ? » Zoe la fixa du regard, sto?que. Elle n’allait pas jouer ce jeu-l?. Shelley continua sans se d?courager. « Cole Davidson. C’est-?-dire, la premi?re victime. Jones a un lien personnel avec les deux victimes. – Mais il ne prend pas de cours de math. » Zoe ne put plus s’en emp?cher. Elle refusa de croire que les ?quations ?taient al?atoires, rien que du gribouillage destin? ? les distraire. Elles devaient jouer un r?le essentiel dans cette affaire. C’?tait certain. Dans le cas contraire, Zoe ne serait pas aussi utile ? cette affaire qu’elle le pensait et tout cela ne serait qu’un cas ordinaire et ennuyeux. Pourquoi cette ?ventualit? la d?rangeait autant, elle ne put pas le dire vraiment. Tout ce qu’elle savait c’?tait qu’elle avait besoin de r?soudre les ?quations, et que les ?quations ?taient la cl?. « ?coute, je sais que tu peux faire valoir de ta sup?riorit? hi?rarchique si tu veux. Tu es l’agent senior. Mais je ne veux pas me retrouver avec une affaire non-r?solue et ne pas pouvoir dire que nous avons remu? ciel et terre. Je vais l’interroger, » dit Shelley d’un ton d?termin? en ouvrant la porte et sortant de la voiture. Zoe se figea un instant, puis soupira et ouvrit sa porte. En fin de compte, elles ?taient partenaires. Elles travaillaient ensemble. M?me si Zoe ne croyait en aucun cas que cela fut un besoin vital, elle ?tait pourtant cens?e soutenir sa partenaire. Elle allait donc le faire. Elle rattrapa Shelley qui marchait ? grandes enjamb?es ? travers le campus, quelques minutes plus tard. Une ?nergie cr?pitante se d?gageait de l’autre femme, une col?re qui se h?rissait comme les ?pines sur un porc-?pic. Zoe ?tait habitu?e ? cette sensation. Elle provoquait toujours de la rage chez les autres, le plus souvent quand elle n’arrivait pas ? comprendre ce qu’elle avait fait de mal. Au moins cette fois-ci, elle le savait. « J’accepte ta piste, » dit Zoe. « Si tu sens que ce gamin va nous donner quelque chose, je te soutiendrai. » Les pas de Shelley ralentirent un peu avant qu’elle ne poursuive sa course. « Merci, » dit-elle un peu trop poliment. Zoe comprit qu’elle ?tait contrari?e, mais pourquoi ? Elle avait donn? ? Shelley ce qu’elle voulait, non ? De telles questions devaient ?tre remises ? plus tard, ou de pr?f?rence ? jamais, puisqu’elles arriv?rent devant un immeuble juste en dehors du campus. Shelley ferma l’application cartographique de son portable gr?ce ? laquelle Zoe avait d?duit qu’elles devaient ?tre arriv?es. Elle savait aussi, en ?tant seulement l? dans la rue, que la musique qui retentissait par les fen?tres, bien que celles-ci soient ferm?es, ?tait au-dessus de la limite sonore autoris?e par la ville pendant la nuit. Un ?tudiant d’? peine dix-neuf ans sortit en titubant tandis qu’elles s’approchaient de l’entr?e. Il avait un gobelet rouge ? la main et ses mains bataillaient avec une cigarette. Quand il leva la t?te et vit les deux femmes se dirigeant vers lui, ses yeux s’?carquill?rent de fa?on presque comique. Les trente millilitres de liquide dans son gobelet furent projet?s par-dessus son ?paule et atterrir dans des buissons et il s’?loigna rapidement, serrant le r?ceptacle en plastique d?sormais vide, comme si sa vie d?pendait du fait de le tenir ? port?e d’elles. « Soir?e, » dit Zoe en reconnaissant pas mal de signes. Zoe sortit de nouveau son portable et afficha la photo de Jensen Jones prise lors de son inscription ? l’universit?. Il ?tait jeune, assez propre. Cheveux ch?tains, un large nez, des yeux marron. Rien de sp?cial. Ce qui ?tait mauvais signe, ? cause de ce que Shelley allait dire ensuite. « Il va falloir le surveiller de pr?s. Je suppose que la plupart entre eux vont se disperser et s’enfuir d?s que nous serons l?. Nous avons manifestement l’air d’?tre des agents FBI, ou au moins des flics. On devrait peut-?tre l’attraper s’il essaie de s’?chapper. – Organiser une soir?e juste apr?s avoir tu? deux personnes ? » demanda Zoe. « Est-ce consid?r? comme une r?action normale ? – Pas normale, non, mais c’est d?j? arriv?, » dit Shelley. « Je pourrais te citer quelques cas mais ce serait probablement plus efficace de l’attraper et s’en assurer. – Apr?s toi, » sugg?ra Zoe tout en faisant un geste vers la porte. Shelley inspira profond?ment comme si elle se pr?parait, puis fit un signe de t?te. « Allons-y. » Le bruit ?tait encore plus fort derri?re la porte de l’immeuble. Pour compliquer leur recherche, il y avait trois portes ouvertes rien qu’au rez-de-chauss?e – les r?sidents de chaque appartement ouvrant leurs espaces pour constituer un nouveau coin de la f?te. Le bruit s’?tait r?pandu dans le couloir, dans les escaliers et – ? en juger au moins par le nombre d'adolescents qui se d?pla?aient dans toutes les directions – dans chaque appartement de l'immeuble. L’apparition de Zoe et Shelley ne fut pas imm?diatement remarqu?e. Deux ?tudiants les virent et s’esquiv?rent par la porte, sans doute cherchant ? s’?loigner le plus possible des ennuis. C’est alors que la pire des choses se produisit : un des jeunes, un sportif d’un m?tre quatre-vingts, avec une carrure de quaterback, se mit ? crier, paniqu?. « Les flics sont l? ! » L’appel se propagea comme une train?e de poudre dans tout l’immeuble et l’affolement commen?a ? s’installer. Il ?tait inutile d’essayer de rester incognito. Zoe chercha son badge dans la poche int?rieure de sa veste et le brandit dans l’air. « FBI. Cette f?te est finie. Maintenant ! » L’effet fut imm?diat et palpable. Trente ?tudiants coururent devant elle en une succession rapide, tous venant des studios de l’?tage en-dessous. La rumeur se r?pandit ? l’?tage aussi, et des gens descendirent bruyamment, renversant leurs bi?res sur le tapis alors qu’ils tr?buchaient et tombaient. Zoe attendit dans le hall d’entr?e tandis que Shelley p?n?tra dans chacune des trois chambres au rez-de-chauss?e, faisant ainsi sortir encore d’autres ?tudiants. M?me depuis l’endroit o? elle se tenait, sans faire de tentative pour attraper les ?tudiants qui continuaient de courir ? c?t? d’elle, Zoe put voir que l’endroit ?tait en d?sordre. Des gobelets rouges froiss?s, de la nourriture et des boissons renvers?es, et sans doute des traces occasionnelles de vomi, recouvraient toutes les surfaces visibles. C’en fut une grosse – une de ces f?tes l?gendaires dont les jeunes allaient parler pendant des mois. Dommage qu’elles durent l’arr?ter. Zoe ne put pas dire qu’elle ressentit une sorte de nostalgie d?plac?e pour eux. En g?n?ral, elle ?tait rarement invit?e aux soir?es, et c’?tait encore plus rare qu’elle y aille. ? l’?poque, comme maintenant, ce genre de f?te ?tait trop ?crasant. Le bruit, les gens dans tous les sens, l’intoxication et la tentation de l’alcool interdit – et, ? juger par les odeurs ambiantes, d’autres substances aussi. Gr?ce ? ses ann?es d'exp?rience, ce fut encore tout ce que pouvait faire Zoe pour se concentrer sur les visages de ceux qui passaient en courant ? c?t? d’elle. Elle chercha en chacun d’entre eux le jeune sur la photo, mais bien qu’il y e?t plein des quasi-correspondances, aucun d’entre eux n’?tait le vrai Jensen Jones. Elle se sentit comme une pierre au milieu d’une rivi?re, submerg?e par le courant. Il y avait plein de choses int?ressantes qui capt?rent son attention, des visions et des formes et des signes, mais ils passaient si vite qu’elle avait ? peine le temps de les enregistrer avant qu’ils ne disparaissent. Shelley resurgit de la troisi?me chambre tout en secouant la t?te. Zoe regarda vers les escaliers au moment o? quelqu’un les descendit ? toute vitesse. Une jeune femme portant une collection de douze bouchons de bouteilles, tous ficel?s ensemble autour de son cou, cliquetant les uns contre les autres, tandis qu’elle courait. « L? ! » cria Shelley. Zoe d?tacha trop tard son attention de la fille, n’apercevant seulement encore qu’une silhouette floue lui passant ? c?t?. De la fa?on dont Shelley pointa son doigt, Zoe sut que cela devait ?tre leur type. Elle jura ? voix basse – il avait d?j? pass? par la porte. Elle retourna les talons et lui courut apr?s, tout en le gardant en vue tandis qu’il s’?loignait. Il mesurait un m?tre quatre-vingts, une carrure athl?tique, les muscles de ses mollets se contractant ais?ment alors que ses bras montaient et descendaient. Jeune, en forme, et visiblement coureur confirm?. Zoe fit ? peine cinq pas avant de r?aliser qu’elle n’aurait pas la moindre chance de l’attraper. Dans sa t?te, le campus d?roula devant elle comme une carte, topographie et angles d’inclinaison inclus. Il sillonna vers la gauche, en se dirigeant vers un groupe de petits b?timents qui dessinaient la limite du campus. Derri?re se trouvait une cl?ture, construite pour marquer la fronti?re entre l’Universit? et la ville autour. Zoe r?fl?chit plus vite qu’elle ne courut. Son chemin devait forc?ment se courber le long de la ligne de la cl?ture, avant d’atteindre une ouverture et une porte destin?e aux pi?tons. Et seulement s’il avait pris sa carte d’?tudiant, ce dont elle savait d?j? qu’il aurait besoin pour sortir ? cet endroit-l?, tout pr?s de quelques immeubles de l’Universit?. « Ne le l?che pas ! » cria-t-elle par-dessus son ?paule en regardant du coin de l’?il Shelley s’?loigner vers la droite. ? cette vitesse, il pouvait toujours lui ?chapper. Mais elle pouvait traverser une distance plus courte dans le m?me temps et, estimant ses kilom?tres ? l’heure avec les siens, elle sut qu’elle pouvait le rattraper ? la porte. Mais uniquement si elle coupait directement ? travers une cour ouverte le long d’un couloir ?troit entre deux b?timents et puis directement ? travers le parking derri?re eux. Et si personne ne lui coupait le chemin. Zoe poussa plus fortement sur ses bras et ses jambes, acc?l?rant m?me quand elle crut atteindre ses limites, luttant contre l’air frais de la nuit qui infiltrait ses poumons. Ce n’?tait pas souvent ces jours-ci qu’elle devait relever un v?ritable d?fi athl?tique. Et elle n’?tait pas aussi jeune que lui. Mais elle prit sur elle, avec l’intention de s’assurer qu’elle y arriverait ? temps, m?me s’il y devait rencontrer un obstacle sur son chemin. Elle passa la cour en un clin d’?il, puis ce ne fut qu’un sprint ? travers le couloir, l’espace ?troit ?tant heureusement d?pourvu d’obstacles qui auraient pu lui bloquer le passage. Le sol sous ses pieds se transforma en la sensation dure et remuante du bitume, punissant ses pieds d’avoir choisi de mettre des chaussures de ville ? la place de baskets. Zoe ne pouvait toujours pas voir la cl?ture de l’autre c?t? des b?timents, mais elle put apercevoir la porte. Elle s’y pr?cipita, dans une nouvelle pouss?e d’adr?naline. Si elle n’y arrivait pas ? temps… CHAPITRE HUIT Il n’y avait pas de temps ? perdre. Zoe donna un dernier et intense effort, amenant son corps au-del? de son point critique naturel. Le c?ur et les pieds de Zoe battaient ? l’unisson ? travers le parking et elle s’arr?ta brusquement lorsque son corps entra en collision avec un autre. Elle tendit ses bras instinctivement pour l’immobiliser, et poussa Jensen Jones contre une cl?ture de trois m?tres de haut pour qu’il ne puisse pas se servir de son puissant gabarit pour s’?chapper. Shelley n’eut que quelques instants de retard. Elle ?tait fortement essouffl?e et avait le visage rouge avec des m?ches de cheveux d?passant de son chignon, mais elle ?tait l?. Elle aida Zoe ? lui passer une paire de menottes aux poignets, derri?re son dos, tandis qu’elles lui lanc?rent, tout en haletant, des avertissements sur le fait de fuir les forces de l’ordre et le droit de l’interroger. Il ne fit que balancer sa t?te, tout en essayant de reprendre son souffle lui aussi. Zoe sentit tout son corps se r?veiller. L’air et la lumi?re avaient combl? les espaces entre ses articulations, et d?gourdir ses muscles depuis longtemps endormis lui procurait une sensation merveilleuse. Il y avait aussi, bien s?r, la douleur, particuli?rement dans les chevilles qui n’avaient nullement appr?ci? les secousses ? travers le parking. Globalement, elle se sentit tr?s bien. Il y avait quelque chose dans le fait de courir apr?s quelqu’un, les cheveux au vent – et que l’on gagnait. *** L’immeuble paraissait diff?rent ? Zoe maintenant qu’il n’y avait plus personne sauf elle, Shelley et Jensen. Les invit?s s’?taient dispers?s aux quatre vents et les r?sidents avec eux. Ils allaient sans doute invoquer le d?ni plausible. Zoe fouilla l’appartement o? logeait Jensen Jones et respira treize gobelets encore pleins d’un liquide qui n’?tait assur?ment pas de l’eau, et v?rifia quatre cendriers. Shelley fit assoir le jeune sur un canap? dans la pi?ce ouverte, tra?nant une chaise de salle ? manger pour s’asseoir devant lui. Il n’y restait plus beaucoup d’options pour s’asseoir au propre, alors Zoe choisit de rester debout et d’errer. Malgr? son ?bri?t? ?vidente, le jeune n’?tait pas assez perdu pour ne pas comprendre ce qui lui arrivait. Au contraire, il semblait s’?tre dessaoul? plut?t bien apr?s l’encha?nement de sa course et la r?v?lation qu’elles ?taient du FBI et non pas de la police locale. Êîíåö îçíàêîìèòåëüíîãî ôðàãìåíòà. Òåêñò ïðåäîñòàâëåí ÎÎÎ «ËèòÐåñ». Ïðî÷èòàéòå ýòó êíèãó öåëèêîì, êóïèâ ïîëíóþ ëåãàëüíóþ âåðñèþ (https://www.litres.ru/pages/biblio_book/?art=56037713&lfrom=688855901) íà ËèòÐåñ. Áåçîïàñíî îïëàòèòü êíèãó ìîæíî áàíêîâñêîé êàðòîé Visa, MasterCard, Maestro, ñî ñ÷åòà ìîáèëüíîãî òåëåôîíà, ñ ïëàòåæíîãî òåðìèíàëà, â ñàëîíå ÌÒÑ èëè Ñâÿçíîé, ÷åðåç PayPal, WebMoney, ßíäåêñ.Äåíüãè, QIWI Êîøåëåê, áîíóñíûìè êàðòàìè èëè äðóãèì óäîáíûì Âàì ñïîñîáîì.
Íàø ëèòåðàòóðíûé æóðíàë Ëó÷øåå ìåñòî äëÿ ðàçìåùåíèÿ ñâîèõ ïðîèçâåäåíèé ìîëîäûìè àâòîðàìè, ïîýòàìè; äëÿ ðåàëèçàöèè ñâîèõ òâîð÷åñêèõ èäåé è äëÿ òîãî, ÷òîáû âàøè ïðîèçâåäåíèÿ ñòàëè ïîïóëÿðíûìè è ÷èòàåìûìè. Åñëè âû, íåèçâåñòíûé ñîâðåìåííûé ïîýò èëè çàèíòåðåñîâàííûé ÷èòàòåëü - Âàñ æä¸ò íàø ëèòåðàòóðíûé æóðíàë.