*** Òâîåé Ëóíû çåëåíûå öâåòû… Ìîåé Ëóíû áåñïå÷íûå ðóëàäû, Êàê ñâåòëÿ÷êè ãîðÿò èç òåìíîòû,  ëèñòàõ âèøíåâûõ ñóìðà÷íîãî ñàäà. Òâîåé Ëóíû ïå÷àëüíûé êàðàâàí, Áðåäóùèé â äàëü, òðîïîþ íåâåçåíüÿ. Ìîåé Ëóíû áåçäîííûé îêåàí, È Áðèãàíòèíà – âåðà è ñïàñåíüå. Òâîåé Ëóíû – ïå÷àëüíîå «Ïðîñòè» Ìîåé Ëóíû - äîâåð÷èâîå «Çäðàâñòâóé!» È íàøè ïàðàëëåëüíûå ïóòè… È Ç

Les Plus T?m?raires

Les Plus T?m?raires Morgan Rice « Morgan Rice a recommenc? ! Gr?ce ? un panel impressionnant de personnages, l’auteur nous livre un autre monde magique. LES PLUS M?RITANTS regorge d’intrigues, de trahisons, d’amiti?s inattendues et de tous les bons ingr?dients pour une lecture savoureuse. D?bordant d’action, vous serez captiv?s par ce livre. »—Books and Movie Reviews, Roberto MattosMorgan Rice, l’auteure ? succ?s n°1 de LA QU?TE DES H?ROS (un t?l?chargement gratuit avec plus de 1 000 notes ? cinq ?toiles), nous offre une nouvelle s?rie de fantasy captivante. Dans LES PLUS T?M?RAIRES, le tome final ?pique de la s?rie Le Fil de L’?p?e, Royce se retrouve transform? apr?s s’?tre regard? dans le miroir magique. A-t-il gagn? le don de la sagesse ultime ? Ou est-il devenu fou ?Le miroir r?v?le de nombreux secrets et Royce finit par se diriger vers la cachette de son p?re. Va-t-il le rencontrer pour la premi?re fois ? La romance tragique entre Genevi?ve et Royce atteint enfin son paroxysme, prenant un tour surprenant qui changera ? jamais leur vie ? tous les deux.Et survient alors la bataille ?pique contre les arm?es du roi, une bataille d?terminante, scellant le destin des terres et du roi.LES PLUS T?M?RAIRES d?peint un conte ?pique qui parle d’amis et d’amants, de chevaliers et d’honneur, de trahison, de destin?e et d’amour. Un conte sur les valeurs nous faisant d?couvrir un monde de fantasy que toutes et tous pourront adorer.Rendez-vous sur www.morganricebooks.com pour conna?tre les dates de publication de la prochaine s?rie de fantasy de Morgan. LES PLUS T?M?RAIRES (LE FIL DE L’?P?E—TOME 4) MORGAN RICE ? propos de Morgan Rice Ecrivain prolifique et auteur ? succ?s, Morgan Rice a d?j? sign? de sa plume une s?rie de fantasy ?pique en dix-sept tomes, L’ANNEAU DU SORCIER ; une s?rie de bit-lit en douze tomes, MEMOIRES D'UN VAMPIRE ; un thriller post-apocalyptique en cours d’?criture, LA TRILOGIE DES RESCAP?S ; une autre s?rie de fantasy ?pique en six tomes, ROIS ET SORCIERS ; une s?rie de fantasy ?pique en cours d’?criture, DE COURONNES ET DE GLOIRE en huit tomes ; une s?rie de fantasy ?pique UN TRONE POUR DES SOEURS en huit tomes ; une nouvelle s?rie de science-fiction en quatre tomes, LES CHRONIQUES DE L’INVASION ; une nouvelle s?rie de fantasy, OLIVER BLUE ? L’ECOLE DES PROPH?TES, en quatre tomes et une nouvelle s?rie, LE FIL DE L’?P?E, en trois tomes. Morgan adore recevoir de vos nouvelles. N’h?sitez pas ? visiter son site web www.morganricebooks.com (http://www.morganricebooks.com/) pour vous inscrire ? la newsletter, recevoir un livre gratuit, des infos exclusives et des cadeaux, t?l?charger l’appli gratuite, vous connecter sur Facebook et Twitter et rester en contact ! Des ?loges pour les romans de Morgan Rice « Si vous avez perdu go?t ? la vie en refermant la derni?re page de L’ANNEAU DU SORCIER, rassurez-vous. Dans LE R?VEIL DES DRAGONS, Morgan Rice jette les bases de ce qui promet d’?tre une autre formidable s?rie, dans un univers peupl? de trolls et de dragons, o? l’on parle du courage, de l’honneur, de la magie et du destin. Les personnages, solides et int?ressants, nous donnent envie de les suivre, page apr?s page. Un indispensable pour tout bon lecteur de fantasy. » —Books and Movie Reviews, Roberto Mattos « Un roman de fantasy plein d’action et d’aventures, qui plaira aux fans de Morgan Rice, ainsi qu’? ceux de ERAGON de Christopher Paolini… Les amateurs de litt?rature jeunesse vont le d?vorer. » —The Wanderer, A Literary Journal (? propos du R?veil des Dragons) « Epop?e de fantasy pleine d’entrain, ? l’intrigue prenante et saupoudr?e d’un soup?on de myst?re… Une s?rie pour des lecteurs ? la recherche d’aventures. Les protagonistes et l’action tissent une vigoureuse ?pop?e qui se focalise principalement sur l’?volution de Thor. Enfant r?veur, il devient peu ? peu un jeune adulte dou? pour la survie… Et ce n’est que le d?but de ce qui promet d’?tre une s?rie ?pique pour jeunes adultes. » —Midwest Book Review (D. Donovan, Critiques d’eBooks) « L’ANNEAU DU SORCIER a tous les ingr?dients d’un succ?s imm?diat : des intrigues, du myst?re, de vaillants chevaliers et des relations qui s’?panouissent entre les c?urs bris?s, les complots et les trahisons. Ce roman vous occupera pendant des heures et satisfera toutes les tranches d’?ge. Un indispensable pour tout bon lecteur de fantasy. » —Books and Movie Reviews, Roberto Mattos « Dans ce premier tome de la s?rie L’ANNEAU DU SORCIER, nous faisons la connaissance de Thorgrin McLoed, dit « Thor ». ? quatorze ans, il r?ve de rejoindre la L?gion, c’est-?-dire l’arm?e de guerriers d’?lite qui prot?ge le royaume… Le style de Rice est efficace et l’histoire prometteuse. » —Publishers Weekly Livres par Morgan Rice OLIVER BLUE A L’ECOLE DES PROPH?TES LA FABRIQUE MAGIQUE (Tome 1) L’ORBE DE KANDRA (Tome 2) LES OBSIDIENNES (Tome 3) LE SCEPTRE DE FEU (Tome 4) LES CHRONIQUES DE L’INVASION ATTAQUE EXTRATERRESTRE (Tome 1) ARRIV?E (Tome 2) ASCENSION (Tome 3) RETOUR (Tome 4) LE FIL DE L’?P?E LES PLUS M?RITANTS (Tome 1) LES PLUS VAILLANTS (Tome 2) LES DESTIN?S (Tome 3) LES PLUS T?M?RAIRES (Tome 4) UN TR?NE POUR DES S?URS UN TR?NE POUR DES S?URS (Tome 1) UNE COUR DE VOLEURS (Tome 2) UNE CHANSON POUR DES ORPHELINES (Tome 3) UN CHANT FUN?BRE POUR DES PRINCES (Tome 4) UN JOYAU POUR LA COUR (Tome 5) UN BAISER POUR DES REINES (Tome 6) UNE COURONNE POUR DES ASSASSINS (Tome 7) UNE ?TREINTE POUR DES H?RITI?RES (Tome 8) DE COURONNES ET DE GLOIRE ESCLAVE, GUERRI?RE, REINE (Tome 1) CANAILLE, PRISONNI?RE, PRINCESSE (Tome 2) CHEVALIER, H?RITIER, PRINCE (Tome 3) REBELLE, PION, ROI (Tome 4) SOLDAT, FR?RE, SORCIER (Tome 5) H?RO?NE, TRA?TRESSE, FILLE (Tome 6) SOUVERAIN, RIVALE, EXIL?E (Tome 7) VAINQUEUR, VAINCU, FILS (Tome 8) ROIS ET SORCIERS LE R?VEIL DES DRAGONS (Tome 1) LE R?VEIL DU VAILLANT (Tome 2) LE POIDS DE L’HONNEUR (Tome 3) UNE FORGE DE BRAVOURE (Tome 4) UN ROYAUME D’OMBRES (Tome 5) LA NUIT DES BRAVES (Tome 6) L’ANNEAU DU SORCIER LA QU?TE DES H?ROS (Tome 1) LA MARCHE DES ROIS (Tome 2) LE DESTIN DES DRAGONS (Tome 3) UN CRI D’HONNEUR (Tome 4) UNE PROMESSE DE GLOIRE (Tome 5) UN PRIX DE COURAGE (Tome 6) UN RITE D’?P?ES (Tome 7) UNE CONCESSION D’ARMES (Tome 8) UN CIEL ENSORCELE (Tome 9) UNE MER DE BOUCLIERS (Tome 10) UN R?GNE DE FER (Tome 11) UNE TERRE DE FEU (Tome 12) UNE LOI DE REINES (Tome 13) LE SERMENT DES FR?RES (Tome 14) UN R?VE DE MORTELS (Tome 15) UNE JOUTE DE CHEVALIERS (Tome 16) LE DON DU COMBAT (Tome 17) TRILOGIE DES RESCAP?S ARENE UN: LA CHASSE AUX ESCLAVES (Tome 1) DEUXIEME ARENE (Tome 2) AR?NE TROIS (Tome 3) LES VAMPIRES D?CHUS AVANT L’AUBE (Tome 1) MEMOIRES D'UN VAMPIRE TRANSFORMATION (Tome 1) ADORATION (Tome 2) TRAHISON (Tome 3) PREDESTINATION (Tome 4) D?SIR (Tome 5) FIAN?AILLES (Tome 6) SERMENT (Tome 7) TROUV?E (Tome 8) REN?E (Tome 9) ARDEMMENT D?SIR?E (Tome 10) SOUMISE AU DESTIN (Tome 11) OBSESSION (Tome 12) Saviez-vous que j’ai ?crit plusieurs s?ries ? Si vous n’avez pas encore lu toutes mes s?ries, cliquez sur les images ci-dessous afin de t?l?charger le premier tome ! (http://www.morganricebooks.com/) Vous voulez des livres en cadeau ? Inscrivez-vous ? la newsletter de Morgan Rice et recevez 4 livres, 3 cartes, 1 appli gratuite, 1 jeu, 1 bande dessin?e et des exclusivit?s ! Pour vous inscrire : www.morganricebooks.com (http://www.morganricebooks.com/) Copyright © 2019 par Morgan Rice Tous droits r?serv?s. Sauf d?rogations autoris?es par la Loi des ?tats-Unis sur le droit d’auteur de 1976, aucune partie de cette publication ne peut ?tre reproduite, distribu?e ou transmise sous quelque forme que ce soit ou par quelque moyen que ce soit, ou stock?e dans une base de donn?es ou syst?me de r?cup?ration, sans l’autorisation pr?alable de l’auteur. Ce livre ?lectronique est r?serv? sous licence ? votre seule jouissance personnelle. Ce livre ?lectronique ne saurait ?tre revendu ou offert ? d’autres personnes. Si vous voulez partager ce livre avec une tierce personne, veuillez en acheter un exemplaire suppl?mentaire par destinataire. Si vous lisez ce livre sans l’avoir achet? ou s’il n’a pas ?t? achet? pour votre seule utilisation personnelle, vous ?tes pri? de le renvoyer et d’acheter votre exemplaire personnel. Merci de respecter le difficile travail de cet auteur. Il s’agit d’une ?uvre de fiction. Les noms, les personnages, les entreprises, les organisations, les lieux, les ?v?nements et les incidents sont le fruit de l’imagination de l’auteur ou sont utilis?s dans un but fictionnel. Toute ressemblance avec des personnes r?elles, vivantes ou mortes, n’est que pure co?ncidence. Image de couverture : Copyright Amir Bajrich, utilis?e en vertu d’une licence accord?e par Shutterstock.com. TABLE DES MATI?RES CHAPITRE UN (#u685a436b-847f-58e4-9b4f-893f03c31d1f) CHAPITRE DEUX (#ua501fbaa-65fd-5356-a5f8-4e69b905fa04) CHAPITRE TROIS (#u74bdd9f5-0134-53f2-a849-da40216b657a) CHAPITRE QUATRE (#ueb67847d-88e3-59ff-9f09-30caa7126445) CHAPITRE CINQ (#ucf8fc35b-4989-5f25-a033-ce0b2f43df2d) CHAPITRE SIX (#ub8673040-834b-5be4-a2b5-7f6e2690052c) CHAPITRE SEPT (#uacc1aa68-bac8-56f1-9e22-ee4a85a03c02) CHAPITRE HUIT (#u1120231a-0ff3-5858-bb5c-4ee6834be56b) CHAPITRE NEUF (#litres_trial_promo) CHAPITRE DIX (#litres_trial_promo) CHAPITRE ONZE (#litres_trial_promo) CHAPITRE DOUZE (#litres_trial_promo) CHAPITRE TREIZE (#litres_trial_promo) CHAPITRE QUATORZE (#litres_trial_promo) CHAPITRE QUINZE (#litres_trial_promo) CHAPITRE SEIZE (#litres_trial_promo) CHAPITRE DIX-SEPT (#litres_trial_promo) CHAPITRE DIX-HUIT (#litres_trial_promo) CHAPITRE DIX-NEUF (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT ET UN (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT-DEUX (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT-TROIS (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT-QUATRE (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT-CINQ (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT-SIX (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT-SEPT (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT-HUIT (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT-NEUF (#litres_trial_promo) CHAPITRE TRENTE (#litres_trial_promo) CHAPITRE TRENTE ET UN (#litres_trial_promo) CHAPITRE TRENTE-DEUX (#litres_trial_promo) CHAPITRE TRENTE-TROIS (#litres_trial_promo) ?PILOGUE (#litres_trial_promo) CHAPITRE UN Royce regardait dans le miroir de la Sagesse, et pendant les premiers instants, rien de plus que le simple reflet du monde n’y apparut. Il vit la forme effondr?e de la premi?re des Sept ?les, le flot des vagues autour du bateau, ses compagnons Marc, Neave, Matilde, Ember le faucon et Gwylim le bhargir semblable ? un loup. Il lui fut impossible de comprendre pourquoi Dust avait tant hurl? en y regardant son reflet, ni pourquoi son p?re avait tent? de le dissuader de l’utiliser, ou pourquoi il avait rendu fou Barihash, dans sa grotte sous le volcan. Il ne semblait ?tre qu’un miroir ordinaire. — Royce, est-ce vraiment une bonne id?e ? demanda Mark plus loin dans le bateau. Son ami semblait inquiet, et Royce en comprenait les raisons. Ils avaient tous travers? tant de choses, et les dangers des Sept ?les s’?taient av?r?s redoutables. Mark avait au moins une nouvelle cicatrice de ce p?riple, tandis que les cendres de l’?le recouvraient ses cheveux fonc?s. Neave et Matilde ?taient assises au milieu du bateau, contr?lant la voile entre elles. Royce pouvait les voir dans le miroir, la fille Picti aux cheveux fonc?s et tatou?e de couleur pastel, les cheveux roux de Matilde emm?l?s de ce qui aurait pu ?tre le sang d’un des nombreux combats qu’ils avaient men?s. Dans le miroir, Royce crut apercevoir une image l’espace d’un instant : toutes les deux dans une petite ferme quelque part… Royce continua ? regarder, d?termin? ? voir tout ce que le miroir lui montrerait. Gwylim aboya un avertissement, mais Royce ignora le bhargir. Il avait besoin de savoir… il devait savoir ce qui ?tait arriv? ? son p?re. Au moment o? le miroir commen?a ? se connecter ? lui, le monde entier se mit au point, le reflet du verre s’?tendit de telle sorte qu’il engloba tout le champ de vision de Royce. En regardant le monde dans le miroir, il put voir chaque brin d’herbe sur les rivages lointains, comprendre chaque mouvement des courants qui mena?aient de tirer le bateau dans diverses directions. Presque sans y penser, Royce s’approcha de la barre, appliquant une petite correction de cap qui les fit ?viter un endroit o? des r?cifs attendaient juste sous les vagues. — Pourquoi as-tu fait ?a ? demanda Mark. Royce ouvrit la bouche pour parler des r?cifs, mais alors qu’il le fit, il sentit sa liaison avec le miroir lui ?chapper, les motifs du destin trop complexes pour les retenir et les partager ? la fois, la nature m?me de ces r?v?lations les rendaient impossibles ? expliquer. Royce garda le silence, d?termin? ? continuer sa recherche. Royce comprenait ? pr?sent comment le Miroir de la Sagesse pouvait faire perdre la raison aux hommes. Les alternatives lui traversaient l’esprit comme les roches qui tombaient du volcan dont ils s’?loignaient de plus en plus ? chaque instant. M?me ces roches avaient un panel de destin?es, Royce percevant comment chaque souffle de vent ou chaque secousse de la terre pouvait influer l?g?rement sur leurs trajectoires. — Et ce ne sont que des pierres ! s’exclama Royce en continuant ? fixer le miroir. Il y avait l? une sorte de clart? et de concentration qu’il n’avait jamais connues auparavant, mais qui mena?ait de le submerger s’il n’y pr?tait pas garde. Il y avait tellement ? voir dans le miroir qu’il ?tait presque impossible de se concentrer sur quelque chose en particulier, et Royce devait encore et encore recentrer son attention sur ce qu’il voulait voir. Le vol des oiseaux parvint ? le distraire un moment, puis le jeu de la lumi?re du soleil sur les vagues. Chacune d’elles renfermait tellement de secrets, et le simple fait d’en avoir appris l’existence donnait ? Royce l’impression que son cerveau risquait d’?clater. Il voyait toutes les possibilit?s et essayait de les r?duire ? celles qui comptaient ; c’?tait comme essayer de choisir un seul arbre dans une for?t, dans toute son immensit?. — Montre-moi le combat ? venir, demanda Royce au miroir. Montre-moi ce que je dois faire. Montre-moi mon p?re. Il regarda alors, et pendant un instant, l’horreur mena?a de l’accabler, de le faire crier de d?sespoir comme l’avait fait Dust. Il vit alors toutes les raisons pour lesquelles Dust l’avait poursuivi. Il vit la mort qui allait suivre dans les batailles, la fa?on dont la guerre pourrait durer encore et encore. Royce vit le combat contre le roi Carris entra?ner tout le royaume dans une guerre civile sanglante, et les morts innombrables qui pourraient suivre. Il vit une potentielle victoire, et sa tentative de faire du royaume un endroit meilleur, mais Royce vit ?galement toutes les fa?ons dont cela pourrait mal tourner. Il reconnut des courtisans v?naux, contempla un fils avec Genevi?ve qui allait grandir et… — Non, dit Royce, secouant la t?te, se for?ant ? regarder plus clairement. Il devait se rappeler que c’?tait ainsi que le miroir fonctionnait : il ne montrait pas une ligne fixe, mais simplement les cons?quences des actions. Il pouvait voir des chemins obscurs, des chemins pav?s de morts, mais il pouvait aussi voir que le monde pourrait ?tre bien diff?rent. Il ?tait moins un voyant auscultant des entrailles ? la recherche de r?ponses qu’un navigateur, essayant de choisir un chemin bas? sur une centaine de cartes. — Nous devrions l’?loigner de cette chose, dit Matilde, sa voix semblant lointaine, m?me si elle parvint ? Royce ? cet instant tr?s clairement comme le moindre des murmures de la mer. — Non, dit Royce, en levant une main. Le miroir lui avait appris que ce serait suffisant pour l’arr?ter. Des moments si proches ?taient faciles ? voir, trop peu de d?cisions composaient les ramifications de ces possibles. — Non, j’ai besoin de comprendre, insista Royce. — Laisse-le, dit Neave. La pierre a chant? pour lui et il a travers? le pont jusqu’? la tour. Si quelqu’un peut faire plier la vieille magie ? sa volont?, c’est bien lui. Royce faillit en rire, mais il n’en fit rien, parce qu’il avait vu que ses amis le croiraient fou. Il ne s’agissait pas de plier le miroir ? sa volont?, c’?tait l’erreur que bien d’autres avant lui avaient faite. Ce n’?tait pas une question de volont?, mais de clart?, de possibilit?. Barihash avait c?d? ? la malice, Dust avait recul? de terreur, mais Royce voyait tout autant de belles possibilit?s. —Peut-?tre que c’est cela, murmura Royce. C’est un miroir, alors peut-?tre qu’il ne renvoie que ce qu’on lui apporte ? — Royce, appela Mark. Royce ne leva pas les yeux vers son ami, parce qu’? ce moment-l?, il y avait trop de choses ? voir. Royce, nous allons diriger le bateau pour rentrer chez nous. Fais-moi signe que tu m’entends. Bien s?r que Royce pouvait l’entendre ; pourquoi n’en serait-il pas capable ? Royce fit un signe de t?te, mais s’immobilisa ensuite, parce que m?me ce petit mouvement semblait faire onduler certaines des possibilit?s qui s’offraient ? lui, et Royce avait besoin de toutes ces possibilit?s s’il voulait leur montrer la voie ? suivre. — Que se passera-t-il si les choses continuent ainsi ? demanda Royce au miroir, en essayant de transformer les pens?es vagues qu’il avait en une question ; en essayant de se concentrer. La r?ponse ? sa question se refl?ta dans le verre. Il vit des gens mourir par centaines, par milliers. Il vit le sang couler en abondance, dans une guerre qui semblait sans fin. Il cherchait un moyen de gagner cette guerre, regardant sans cesse dans le miroir, m?me si chaque tentative semblait ?tre pire que la pr?c?dente. Il se vit, ses amis et lui, et les gens venus le soutenir, mourir de cent fa?ons diff?rentes, et plus encore. Tant de possibilit?s semblaient mener ? la mort. Ce qu’il ressentait pour Genevi?ve semblait faire partie du probl?me. L’amour qu’il ressentait, et les choses qu’il ?tait pr?t ? faire pour elle, semblaient ?loigner Royce de ce qui devait ?tre fait. Les chemins qui le conduisaient ? elle semblaient ?galement mener ? de plus grandes douleurs. Malgr? cela, Royce ne pouvait s’emp?cher de les envisager. — J’ai besoin de trouver un destin o? personnes ne meure, insista-t-il. Il reconcentra son esprit dans le miroir, m?me s’il sentait que sa conscience commen?ait ? lentement s’effilocher. Il restait si peu de destins heureux. Ils ressemblaient ? une mince collection de fils d’argent qui traversaient un monde o?, partout ailleurs, r?gnait l’obscurit?. Le probl?me ?tait simple : des gens comme Altfor et sa famille, comme le roi Carris, feraient n’importe quoi pour conserver le pouvoir. Quel espoir y avait-il qu’ils abandonnent cette emprise sans une bataille qui entra?nerait tous les autres avec eux ? Cette possibilit? ?tait si mince que Royce doutait qu’elle existe r?ellement. Il pouvait voir les ?l?ments qui la composaient, cependant, les d?cisions qui s’imbriquaient les unes avec les autres, si nombreuses que ce serait presque un miracle qu’elles finissent par concorder. Mais il pouvait voir d’o? tout cela partait. Il avait besoin de trouver son p?re. — Mais o? ? murmura Royce. Il imaginait ses amis le d?visager, pensant qu’il devait avoir l’air fou. Il les aper?ut bri?vement, regardant de l’autre c?t? du bateau, leurs regards suspicieux. ? quoi pensaient-ils ? Que pr?paraient-ils ? Royce retint son esprit ? temps. ?tait-ce ainsi que tout avait commenc? pour Barihash ? La facilit? de voir tant de choses ?tait-elle suffisante pour pousser quelqu’un ? la folie ? Se for?ant ? se concentrer, Royce poussa son attention sur son p?re, essayant de voir o? il ?tait all? quand il avait quitt? l’?le. Il concentra toute son ?nergie pour ce faire, le reflet du miroir semblant s’?loigner de cette seule chose pour s’enrouler dans une multitude de possibilit?s. Royce les parcourut comme un homme dans une temp?te de neige, essayant d’y voir au travers. La lucidit? vacilla en lui, et il r?alisa qu’il savait d?j? o? son p?re ?tait all?. Il y avait des papiers parmi les affaires de son p?re, d?chir?s en morceaux et que Royce avait entraper?u pendant quelques instants. Il y avait eu des mots sur eux, et maintenant Royce savait ce qu’ils voulaient dire, o? ils voulaient l’amener. Royce put tout contempler dans son ensemble, tout ce qu’il devait faire. Il leva les yeux du miroir. ? son grand ?tonnement, il faisait nuit, les ?toiles brillaient, le clair de lune se refl?tait sur l’eau, et les Sept ?les n’?taient plus qu’un point ? l’horizon. — Est-ce que ?a va ? demanda Mark, l’air inquiet. Presque imm?diatement, tous les d?tails merveilleux que Royce avait vus dans le miroir commenc?rent ? s’estomper. Le r?seau complexe de choix et de d?cisions ?tait trop complexe pour pouvoir le retenir bien longtemps. — Je sais o? nous devons aller, dit Royce. Il se saisit de la barre, la man?uvra pour mettre leur embarcation sur un nouveau cap. Il savait aussi s?rement qu’il pouvait voir la lune que c’?tait la bonne direction et que son p?re ?tait devant lui. — Qu’est-ce que tu fais ? demanda Matilde. Royce n’avait pas les mots pour l’expliquer, ou plut?t si, mais le fait d’essayer de les formuler mena?ait de faire dispara?tre ce qu’il avait vu. Il voulait partager ce qu’il savait avec ses compagnons, mais leur dire risquerait d’alt?rer ce qui devait arriver. — C’est l?-bas que nous devons aller, dit-il. Mon p?re… Je sais o? il se trouve. — Tu es s?r ? s’inqui?ta Mark. Nous pensions qu’il serait dans les Sept ?les. — Je… Royce ne pouvait pas l’expliquer. Il en ?tait incapable. Tu me fais confiance, Mark ? — Tu le sais bien, r?pondit Mark. Autour de lui, les autres hoch?rent la t?te, l’un apr?s l’autre. — Alors, il faut qu’on aille par-l?, insista Royce. S’il vous pla?t. Pendant un moment, il redouta une dispute, peut-?tre essaieraient-ils de retourner le bateau vers le royaume, pr?textant qu’il avait ?t? poss?d? par le miroir. Mais tous sembl?rent respecter sa d?cision, attendant que le bateau poursuive sa route. Ils repartaient ? la recherche de son p?re, mais cette fois-ci, Royce savait pr?cis?ment o? le trouver. CHAPITRE DEUX Dust errait sur l’?le pendant que le chaos r?gnait tout autour de lui, ne comprenant qu’? peine ce qui se passait. Le feu surgissait partout o? il posait le pied, et il ne semblait pas s’en pr?occuper. Il errait en titubant, d?tach? de tout ce chaos, les rochers s’?croulant autour de lui, toute l’?le implosant dans le genre d’entropie en laquelle Dust n’aurait jamais cru avant de regarder dans le miroir. — J’avais tort, murmura-t-il tout en marchant. Tellement tort. Autrefois, il avait cru en un monde o? les pr?tres savaient tout et avaient gard? le destin sur un unique chemin choisi. Puis, il avait ?t? si s?r de pouvoir lui-m?me choisir ce chemin. Il avait vu les horreurs ? venir, et il avait vu la mort n?cessaire pour y mettre fin. Dust ne savait plus quoi penser. Il tr?bucha, tandis que des rochers d?valaient droit sur lui. Dust ne prit pas la peine de les esquiver, mais aucun ne le percuta, un soup?on d’intuition guidant ses pieds au bon endroit. — Comment ? demanda-t-il. Comment peut-on en comprendre l’immensit? ? Il comprenait maintenant pourquoi le miroir ?tait r?put? pour priver les hommes de leur raison, m?me si personne ne lui avait dit. C’?tait une des choses qu’il avait vues. Il avait tout vu, et cet ensemble de visions ?tait trop lourd ? porter pour un seul esprit. Il en avait vu autant que dans la fum?e des pr?tres, et une infinit? d’autres choses encore. La lave ?clata pr?s de Dust, presque amorphe. Il se retourna pour y faire face, ses yeux n’y voyant ? peine. Il ?tait presque aveugle ? ce genre de choses alors qu’il pouvait voir tout ce qui pouvait ?tre, avait ?t?, et ne serait jamais, le tout formant un enchev?trement de possibles qu’il lui ?tait impossible de d?m?ler. — J’ai tant fait, dit-il en grimpant au-dessus d’un monticule d’obsidienne sans m?me sentir les pierres lui entailler les paumes. Je pensais… Il pouvait voir exactement ce qu’il avait pens?. D’abord, il avait pens? que les pr?tres ?taient dans le vrai, il leur avait donc ob?it sans rien remettre en question. Il avait fait ce que les signes semblaient sugg?rer, m?me quand cela signifiait tuer des gens qui n’avaient pas ?t? ses ennemis, qui n’auraient jamais ?t? une menace pour lui. M?me alors qu’il avait d?couvert les manigances des pr?tres, il avait fait des choix qui avaient bless? des innocents. Il avait maudit un anneau pour semer le chaos. Il ?tait venu chasser Royce… — Je m?rite de mourir, confessa Dust. Je le m?rite. Il se mit ? tituber, r?fl?chissant ? la meilleure fa?on de le faire, essayant de trouver ce qu’il devrait faire. Il errait dans un champ de pierre vitrifi?es pas des si?cles d’activit? volcanique, sans se soucier des blessures qu’elles lui infligeaient. Du coin de l’?il, il vit quelque chose courir vers lui. Dust se retourna sans y penser, ?vitant un coup de lance dirig? droit vers son c?ur. Une sorte d’homme-l?zard lui sifflait dessus, brandissant sa lance pour un nouveau coup. Dust s’approcha de la cr?ature, lui ?crasa simplement la gorge de ses doigts raidis. Elle recula en vacillant, en haletant, et Dust fondit sur elle, poignardant son c?ur avec un couteau, ? pr?sent si pr?s d’elle qu’il pouvait sentir la chaleur de son sang sur lui. C’?tait la seule chose qu’il pouvait ressentir ? ce moment-l?. Alors que la b?te tombait, Dust se maudissait de s’?tre d?fendu. Il aurait pu rester immobile ? ce moment-l? ; il aurait pu laisser la cr?ature le tuer comme il le m?ritait pour tout ce qu’il avait fait. — Tu peux encore le faire, se rassura Dust. Il regarda le couteau dans ses mains, l’?clat du soleil sur son bord presque envo?tant malgr? le sang noir qui l’enduisait maintenant. Il serait si facile de passer la lame ? travers sa propre gorge, ou ? travers les endroits d’o? il ?tait si facile de faire jaillir le sang. L’aspirant Angarthim avec lequel il s’?tait entra?n? l’avait d?j? fait auparavant, lorsque les efforts des pr?tres les avaient rendus fous. Si ce n’?tait pas par le fer de ses lames, une centaine d’autres fa?ons de mourir s’offrait ? lui. Il pouvait s’en remettre ? la violence des homme-l?zards, ou se jeter d’une falaise. Il pouvait se tenir sur le chemin d’un rocher qui tombait, ou marcher droit dans un lac de lave. Il pouvait m?me simplement rester l? o? il ?tait. Sur une ?le comme celle-ci, il ?tait plus difficile de continuer ? vivre que de mourir, et pourtant Dust r?ussissait ? survivre. Il marchait encore, et durant son errance, il essayait de donner un sens ? tout ce qu’il avait vu, mais il n’y avait aucun sens ? cela. Il avait jadis pens? pouvoir choisir une voie pure et v?ritable du destin, mais ? la place, il se retrouva ?cras? par ce choix, s’?talant dans un r?seau incommensurable de possibilit?s, tant et si bien que rien ni personne ne pouvait assurer que telle ou telle chose arriverait bel et bien. Il revoyait tout ce qu’il avait vu auparavant, la lumi?re ?manant de Royce, l’obscurit? et le sang qui le suivraient, mais Dust avait ?galement entraper?u toutes les voies o? ce funeste destin ne s’accomplirait pas et o? la lumi?re perdurerait ensuite. Il avait appris de sa propre libert?, au prix de l’oubli de celle de tous les autres ?tres peuplant le monde. L’espoir l’avait abandonn?. — Espoir ? demanda Dust ? haute voix. Quel espoir y a-t-il ici, sur une ?le retournant ? la mer ? Quel espoir y a-t-il de d?faire ce que j’ai fait ? Il connaissait d?j? la r?ponse. Il avait vu un moment plus puissant que ceux qu’il avait vus dans la fum?e des pr?tres, plus certain, plus crucial. Il avait vu une bataille, et une silhouette en armure brillante, brandissant une ?p?e de cristal avec une habilet? presque impossible. Il avait vu cette silhouette se d?tacher du reste, et il avait r?alis? que ce moment ?tait celui qui comptait r?ellement. Dust regarda autour de lui et se rendit compte qu’il avait atteint la c?te. Il y avait l? un bateau qui n’?tait pas le sien, mais il ?tait l?ger, et il avait des rames, il lui fut facile de le mettre ? l’eau pendant que derri?re lui toute l’?le s’effondrait. Il sauta dans le bateau, regardant le ciel, essayant de d?cider quoi faire ensuite ; mais en r?alit?, Dust savait d?j? ce qu’il avait ? faire. Il s’assit, regarda l’?le qu’il avait d?pass?e pour venir sur celle-ci, et r?fl?chit ? ce qu’il faudrait pour sauver le monde. Il commen?a ? ramer. Alors qu’il tirait sur ses rames, il consid?rait le plus grand danger de sa prochaine ?tape : un ennemi qui semblait si bien prot?g? qu’il lui serait impossible de le vaincre, ne serait-ce qu’essayer lui serait probablement fatal. Mais Dust n’en avait cure, il avait soif de destruction. Et si c’?tait la sienne qui advenait, il l’accueillerait bien volontiers. — Non, se reprit-il, pas avant d’avoir fait ce que j’ai ? faire. Quant ? r?ussir ce qu’il se pr?parait ? faire, il trouverait bien un moyen. Il ?tait Angarthim, avec toute la formation qui l’accompagnait. Il en ?tait peut-?tre le seul capable. Il pouvait se glisser en silence sur l’?le, et… — Cela ne marchera pas, dit Dust. Un coup d’?il sur les nuages au-dessus de l’?le qu’il visait lui avait confirm? cela. Ils ?taient remplis de signes de mort et de promesse de tr?pas. Il pourrait tenter une approche furtive, mais il ?chouerait, et il mourrait. Il devait trouver un autre moyen. Dust laissa ? pr?sent le bateau d?river, sachant que les courants l’emm?neraient sur l’?le o? il voulait se rendre. Prenant l’une de ses rames et son couteau le plus solide, il se mit ? la sculpter. Il pourra utiliser l’autre s’il survivait ? ce qui l’attendait. Il travaillait le bois de ses mains habiles, retirant copeau par copeau de la mati?re ? sa rame pour lui donner une nouvelle forme, une nouvelle destination. Alors que le courant le portait tranquillement vers l’?le, Dust affinait son ?uvre ? la mani?re d’un ?b?niste, transformant sa rame en quelque chose de presque aussi pointu que les lames qu’il transportait, un javelot l?ger, ?quilibr? et mortel. Prenant un sac de sa ceinture, Dust m?langea son contenu avec de l’eau de mer, puis plongea la pointe de sa nouvelle lance dans la mixture, le bois sifflant au contact de la potion qu’il avait produite. Il se d?barrassa du sac dans l’eau, trop dangereux ? toucher maintenant que la poudre avait ?t? mouill?e. Il s’approcha du rivage, et d?j?, Dust pouvait sentir l’attraction de l’?le, dans l’odeur enivrante et douce qui semblait remplir chaque pore de sa peau, lui donnant envie de s’approcher. Elle sortit bient?t de la for?t, la plus belle femme que Dust ait jamais vue, bien qu’une partie de son esprit voyait au m?me moment le vrai visage au-del? de l’ensorcellement. Il voyait une femme qui ?tait tout ce qu’il avait toujours voulu, et pouvait en m?me temps voir ses griffes monstrueuses. Il lan?a son javelot. Il fendit les airs, et elle se tordit, aussi vite qu’un serpent, si bien que son lancer ne l’effleura qu’? peine. La pointe lui d?chirant n?anmoins la peau, Dust ne pouvait qu’esp?rer que le poison commence son travail. Mais la cr?ature n’?tait pas tomb?e. Au lieu de cela, l’odeur autour de Dust s’intensifia, et il ressentit le besoin d’avancer plus vite, de plonger dans l’eau et tra?ner son bateau sur la plage. Elle ?tait l? ? attendre, et d?sormais si proche, il r?alisa que c’?tait lui qu’elle attendait. Sa pr?sence ?tait insupportable, car sa beaut? ?tait douloureuse ? contempler. Il aurait n?anmoins tout fait pour elle ? ce moment-l?. N’importe quoi. — Je suis Lethe, dit-elle, d’une voix douce comme le miel. Comment te nomme-t-on ? — Dust, r?pondit-il. — Et tu m’aimes, Dust ? — Je vous aime, reconnut Dust. Lethe s’approcha de lui, les bras ouverts, sa beaut? compl?te, parfaite, absolue. — Tu pensais vraiment que ta petite lance ridicule me tuerait ? demanda-t-elle. Sa bouche ?tait ouverte dans un sourire ? la fois beau et d?voilant beaucoup trop de dents. — Non, admit Dust. — Non ? dit Lethe, comme prise par surprise. — Le poison de ma lance n’?tait pas mortel. Je n’avais rien qui puisse vous tuer. Mais j’ai des choses qui peuvent vous affaiblir. — M’affaiblir ? sa voix ?tait maintenant emplie de crainte. — Je vous aime, mais je suis Angarthim, et nous pouvons tuer ce que nous aimons si le destin l’exige. Dust la frappa avec un couteau, la lame lui transper?a la gorge. Elle n’eut m?me pas le temps de crier avant de tomber. Dust lui avait procur? une mort aussi indolore que possible, quelle meilleure preuve d’amour aurait-il pu lui montrer ? Il s’agenouilla et pleura de douleur. Il pleura ? la fois ? cause de ce qu’il avait perdu avec Lethe, et parce qu’il devait encore ?tre le tueur qu’on avait fait de lui, un peu plus longtemps encore. Une ?ternit? sembla passer avant que Dust ne se sente assez fort pour se relever et reprendre son chemin ? travers l’?le. L’endroit semblait maintenant diff?rent, aussi mort que la cr?ature qui l’avait dirig?, sans vie et silencieux alors Dust le parcourait. Il trouva ce qu’il ?tait venu chercher un peu plus loin, pr?s d’une cabane, jet?e dans une pile comme un objet de peu d’importance. Dust devina qu’elle n’avait eu aucune importance face ? l’amour de Lethe. Il prit l’?p?e de cristal et la d?gaina juste assez longtemps pour admirer l’?clat de sa lame au clair de lune avant de la ranger ? nouveau. Il l’enveloppa dans l’armure, prit le tout et rebroussa chemin vers son bateau. Il lui fallut une heure pour se confectionner une nouvelle rame, une heure de plus pour r?colter des fruits et de l’eau fra?che dans la for?t. Dust empila ses provisions dans le bateau et reprit la mer. Il commen?a ? ramer pour retourner sur le continent, sachant que le destin l’attendait, lui, Royce, eux tous. CHAPITRE TROIS Genevi?ve trouvait que la vie ? la cour du roi ?tait tr?s diff?rente de la vie au palais du p?re d’Altfor. D’une part, les gens la regardaient d?sormais avec le respect qu’exigeait son statut de noble, plut?t que la piti? ou le m?pris dont elle avait eu droit lorsqu’elle n’?tait qu’une paysanne enlev?e. D’autre part, il y avait ici un sentiment constant de danger, en effet le moindre faux pas pouvait la faire tuer. — Les hommes de Lord Ber seront-ils l? avant la derni?re offensive contre l’ennemi ? s’exasp?ra le roi Carris en direction d’un de ses conseillers. Il s’?tait lev? de son tr?ne pour faire les cent pas dans la largeur de la salle d’audience o? il discutait des plans. — Nous n’avons encore aucune nouvelle, mon roi, r?pondit l’homme. — Ce qui veut dire qu’il n’a nullement l’intention de venir jusqu’ici, s’enflamma le roi Carris. Il attend de voir qui l’emportera. Nos chances sont-elles si mauvaises ? — Non, mon roi, jura l’homme. Dois-je lui envoyer d’autres messages ? — Un seul, pr?cisa le roi. Faites-lui savoir que s’il ne rejoint pas mon arm?e ? temps, je le tuerai, lui, sa famille, et tous ceux qui le soutiendront. C’est un combat contre les ren?gats ; s’il n’est pas avec moi dans ce combat, alors il est mon ennemi. — Tout de suite, dit l’homme. D’autres conseillers et messagers ?taient venus, chacun avec un fragment de nouvelles sur le conflit ? venir. Un seigneur s’avan?a et s’agenouilla. — Mon roi, dit-il. Je suis Sir Verris de Yall. J’ai amen? 300 hommes avec moi pour servir dans votre arm?e. — Et je vous en remercie, Sir Verris, dit le roi. Vous serez r?compens?. Votre place sera avec la force qui frappera par le nord. Genevi?ve se tenait ? l’arri?re de la foule, essayant de retenir les noms et le nombres des troupes alors que les hommes venaient pr?ter serment ? la cause du roi. Elle aurait tout ?crit pour ?tre certaine de ne rien oublier, mais quelqu’un aurait pu la surprendre. Altfor l’aurait surprise. Il se tenait debout vers l’avant de la salle, o? tout le monde pouvait le voir, le plus pr?s possible du roi. Malgr? tout, ses yeux semblaient suivre Genevi?ve, la mettant au d?fi de commettre une erreur dans le jeu dangereux qu’elle jouait. — Jani va bient?t revenir, se murmura Genevi?ve. Je me souviendrai de tout d’ici son retour. Elle devait esp?rer que l’espionne qui travaillait pour sa s?ur ait rejoint Sheila. Avec l’information que Genevi?ve avait envoy?e, peut-?tre que Royce serait capable de gagner sans tous les morts que la bataille ? venir promettait. Genevi?ve avait d?j? envoy? des informations sur l’assaut maritime qui viendrait du nord. Elle esp?rait maintenant pouvoir trouver quelque chose qui les aiderait ? gagner en minimisant les combats. — Parlez-moi de notre flottille, dit le roi Carris. Un homme portant des v?tements luxueux de marins s’avan?a, exhibant des bijoux qui semblaient ?tre le butin de douzaines de rapines diff?rentes. — Nous sommes pr?ts ? transporter vos forces, mon roi. D?s que nous serons pay?s. — L’argent sort de mon tr?sor en ce moment m?me, promit le roi Carris. Genevi?ve se demanda s’il n’y avait pas un moyen de saboter cette livraison. Si elle pouvait transmettre cette information ? Sheila, il serait alors possible de faire en sorte que l’argent soit vol?, ou du moins retard?. Elle ?tait sur le point de trouver une excuse pour quitter la salle quand elle se figea, sentant une vague de froid se r?pandre ? travers elle. Ce n’?tait pas le genre de froid qui avait quelque chose ? voir avec le la temp?rature de la pi?ce, cependant. Genevi?ve avait plut?t l’impression que quelque chose murmurait ? son ?me, et elle se retourna machinalement vers la porte. Tout le monde dans la salle avait fait la m?me chose, se d?pla?ant de concert pour faire face aux personnages qui faisaient leur entr?e. Il y en avait une douzaine, ? la peau grise et ? la t?te ras?e, bien que plusieurs d’entre eux portaient des barbes, des cha?nes dor?es enroul?es autour de leur cr?ne, ou des tatouages de symboles mystiques. Ils portaient des toges gris fonc?, certaines avec les capuchons relev?s, et la plupart d’entre eux regardaient autour de la pi?ce avec des yeux per?ants. Celui qui ?tait ? leur t?te ?tait assez ?g? pour qu’il doive marcher avec l’aide d’un b?ton, en s’appuyant sur lui ? chaque pas. Ses yeux crois?rent ceux de Genevi?ve l’espace d’un instant, et elle en frissonna de terreur. — Qui ?tes-vous ? demanda le roi Carris. Et pourquoi ?tes-vous ici, dans ma cour ? — Nous sommes les pr?tres de l’Angarthim, dit leur chef. Nous voyons tout ce qui doit ?tre, et nous envoyons l’Angarthim pour nous assurer que tout se passe comme il se doit. Je suis Justinius, le pr?tre sup?rieur. — Cela ne me dit toujours pas pourquoi vous ?tes l?, dit le roi Carris. Ou pourquoi je ne devrais pas vous faire tuer. — Nous sommes ici parce que votre cause est la n?tre, roi Carris, dit Justinius. Le gar?on nomm? Royce ne doit jamais devenir roi. — Vous avez travers? la mer pour me dire cela ? demanda le roi, et Genevi?ve pensa un instant qu’il pourrait r?agir avec toute la col?re qu’elle avait vue auparavant, lorsqu’il avait lui-m?me tu? des prisonniers. — Nous avons regard? vers l’avenir, et nous avons vu la destruction de notre ordre dans l’ascension de Royce comme roi, dit Justinius. S’il avait peur du roi Carris, il ne laissait pas para?tre. — Nous avons envoy? un de nos Angarthim pour le tuer, reprit l’ancien, mais il nous a abandonn?. — Alors vous ?tes des bons ? rien ? demanda le roi Carris. L’air ondula, et ? ce moment, Genevi?ve eut l’impression que quelque chose se tenait ? c?t? d’elle ; quelque chose avec des griffes, des dents et affam?. Elle eut besoin de tout son courage pour ne pas crier. Beaucoup dans l’audience n’eurent pas la m?me ma?trise. Plusieurs avaient tir? leurs ?p?es, et un homme s’?tait ?croul?, serrant sa poitrine. Aussi soudainement qu’elle ?tait arriv?e, la vision des cr?atures s’estompa, laissant les pr?tres de l’Angarthim immobiles, leurs regards emplis de d?sir de mort. — Nous ne sommes pas impuissants, reprit Justinius. Le moment venu, nous vous apporterons ce pouvoir. Il se d?pla?a pour se tenir aux c?t?s du roi sans attendre que l’on l’y autorise, tandis que les autres formaient une ligne au premier rang des nobles. Personne n’essaya de protester. Genevi?ve pensa que cela avait conclu l’audience du roi, mais elle vit celui-ci s’efforcer de se ressaisir. — Quoi d’autre ? demanda-t-il. Quelles sont les autres nouvelles ? Quelles nouvelles de mes ennemis ? Un messager s’avan?a, visiblement tremblant. — Nous avons des nouvelles de Royce, mon roi, annon?a-t-il. Il va de village en village, ralliant les gens du peuple ? sa cause. Ils le consid?rent comme l’ancien roi revenu. — Alors ce sont des imb?ciles, jugea Carris. Et qu’est-ce que Royce essaie de rallier dans les villages ? Une arm?e de fermiers ? Les nobles rirent, mais pas tous. Certains d’entre eux comprenaient ?videmment que le nombre allait compter, et Genevi?ve, au moins, savait ? quel point les gens allaient se battre pour prot?ger leur maison. — Pourtant, le savoir reste utile, ajouta le roi Carris. Cela m’indiquera quels villages sont remplis de tra?tres, lesquels doivent ?tre d?truits et lesquels peuvent ?tre r?compens?s pour leur loyaut?. Il regarda autour de lui. — Nul doute qu’il s’agit d’un combat, non seulement contre un usurpateur, mais pour notre mode de vie tout entier. Il y a des ann?es, nous nous sommes battus pour renverser Philip, et ce qu’il avait construit. Nous nous sommes battus contre un monde o? un homme pouvait pr?tendre ? la royaut? ? cause d’un diktat de la magie, plut?t que gr?ce ? la convenance apprise d?s la naissance par un vrai noble. Est-ce que l’un d’entre vous y revenir ? Le voulez-vous ? Alors que les nobles rugissaient, Genevi?ve commen?a ? voir comment le roi Carris avait r?ussi ? acc?der au tr?ne. Il avait le charisme pour ?mouvoir les gens, et la duret? pour tuer ceux qui s’opposaient ? lui. C’?tait une combinaison dangereuse. — Maintenant, allez, dit le roi Carris. Et… — Mon roi, l’interrompit Altfor. Il y a encore une chose. — De quoi s’agit-il, duc Altfor ? demanda le roi. Genevi?ve remarqua son mari s’enorgueillir ? la mention de son titre. Elle se demandait s’il avait remarqu? l’impatience du roi. — Un cadeau est arriv? pour vous, mon roi, dit Altfor. De la part du Seigneur Aversham. Je l’ai rencontr? ? la porte. — Quel cadeau ? Altfor fit un geste vers la porte. Alors qu’elle s’ouvrait, le c?ur de Genevi?ve se serra. Ce n’?tait pas une troupe de pr?tres, ce n’?tait pas la peur mortelle qui ?tait venue avec l’Angarthim. C’?tait bien pire que cela. Moira s’avan?a, avec un noble et une escorte de chevaliers. Ils poussaient une silhouette devant eux, ligot?e et meurtrie, et Genevi?ve reconnut Garet instantan?ment. Il tr?bucha, et l’un des chevaliers lui donna un coup de pied, l’envoyant s’affaler sur le sol. L’homme ? la t?te de la procession s’acquitta d’une r?v?rence au roi. — Votre Majest?. — Seigneur Aversham, que m’apportez-vous l? ? — Je suis venu vous offrir ce que Dame Moira m’a elle-m?me apport?, dit Lord Aversham. Les doigts de Genevi?ve se mirent ? trembler lorsqu’il invita Moira ? avancer. Une partie d’elle voulait se pr?cipiter et ?trangler son amie d’autrefois pour tout ce qu’elle avait fait. C’?tait… c’?tait pire que ce qu’elle lui avait fait vivre jusque-l?. — C’est le fr?re de Royce, se r?jouit Altfor. Ou au moins un des gar?ons avec qui il a ?t? ?lev?. Il cherchait ? subvertir les seigneurs ? la cause de Royce. Seule la ruse de Moira l’a amen? ? Lord Aversham, qui vous est loyal. — Comme vous, vous l’?tes, Altfor, dit le roi Carris. Je vous en remercie. Et vous aussi, Dame Moira. Maintenant, gardes… emmenez ce gar?on et mettez-lui les cha?nes. Je veux apprendre tout ce qu’il sait. — Je ne vous dirai rien, protesta Garet. — Oh si, tu le feras, promit le roi Carris. Une fois que les tisons sont appliqu?s sur la chair, les langues se d?lient assez rapidement. Les gardes intervinrent pour attraper Garet. Ils l’emmen?rent, malgr? sa r?sistance, et Genevi?ve fut submerg?e de tristesse ? devoir le regarder ainsi. Cela lui fut plus douloureux encore de voir la fa?on dont Altfor s’?tait d?plac? vers Moira, mettant un bras autour d’elle comme si Genevi?ve n’?tait pas l?. Altfor fixa Genevi?ve, et sourit cruellement, sachant clairement quel effet son comportement avait sur elle. Genevi?ve lutta pour ne montrer aucune r?action, malgr? la fa?on dont son sang bouillait. Elle quitta la salle, mais ? la m?me allure que les autres nobles prenant ?galement cong?, en s’assurant de ne pas courir, de ne pas bousculer tous ceux qui la pr?c?daient pour gagner l’ext?rieur du ch?teau. Quand elle y arriva, cependant, elle prit de grandes inspirations, essayant de ne pas crier en r?action ? tout ce qui venait de se passer. Les horreurs que les pr?tres avaient inflig?es avaient ?t? horribles, mais voir Garet ainsi malmen?, avait ?t? bien pire. Genevi?ve comprenait sa pr?sence ici, pourquoi elle avait choisi de rester avec la cour du roi alors qu’elle aurait pu fuir avec sa s?ur ? Fallsport. Elle avait esp?r? pouvoir se rendre utile ici pour changer les choses, et ? pr?sent elle avait trouv? une t?che qui allait bien au-del? de l’espionnage. Elle pouvait sauver Garet, elle devait le faire. Si elle pouvait l’atteindre, elle pourrait essayer de trouver un moyen de le faire sortir du donjon. Si elle pouvait sauver le fr?re de Royce, alors peut-?tre, peut-?tre seulement, cela suffirait ? compenser tout le reste. Et si elle pouvait trouver un moyen de tuer Moira dans le m?me temps, alors cette action approcherait de la perfection. CHAPITRE QUATRE — Il n’y a rien par ici, Royce, insista Mark. Mais Royce secoua la t?te. Il ne pouvait pas expliquer tout ce qu’il avait vu sans risquer de le changer, mais il savait que la direction ?tait bonne. Il posa la main sur le sac contenant le miroir, se sentant rassur? par son contact. — On va dans la bonne direction, lui assura Royce. — Explique-nous un peu comment tu peux en ?tre si s?r, demanda Mark. — Je… ne peux pas, h?sita Royce. S’il te pla?t, tu dois me faire confiance. Il lan?a un regard suppliant ? Matilde et Neave. Je sais que c’est dur, mais je sais ce que je fais. — Ce serait plus rassurant s’il y avait au moins une terre ? l’horizon, dit Matilde, en faisant un geste pour pr?senter l’?tendue de la mer qui les entourait. Je ne veux pas d?river jusqu’? ce que nous mourions tous de faim, Royce. Gwylim aboya ce qui aurait pu ?tre son accord sur ce point. — On pourra toujours te manger si la faim se fait trop sentir, ajouta Neave. Royce mit un moment ? r?aliser que sa proposition n’?tait qu’une plaisanterie. Elle se tourna vers Royce. — Si tu dis que nous sommes sur la bonne route… tu dois avoir raison. Royce lui en fut reconnaissant, surtout qu’il ?tait bien conscient que la jeune Picti aurait pu ?num?rer tous les moments o? il s’?tait gravement tromp?. Royce les avait d?j? conduits sur une fausse piste, trouvant le miroir mais pas son p?re. Et si c’?tait encore le cas ? Et si le miroir ne lui avait pas montr? la v?rit? ? Ce sentiment le rongeait pendant qu’ils continuaient ? naviguer ; Royce savait combien de gens s’?taient ?gar?s en en voyant trop, en prenant les possibilit?s pour des certitudes. Barihash avait d?truit toute une ville ? cause de cela. Royce pourrait tout aussi bien mener ses amis ? la mort. Cette possibilit? lui donna envie de rebrousser chemin. Il voulait que les autres soient en s?curit?, qu’ils fassent ce qu’il fallait pour eux et pour le royaume, mais les choses qu’il avait vues le poussaient ? avancer. Si ce n’?tait le vaste champ de possibilit?s et de nuances qu’il avait vu dans le miroir, il pouvait toujours s’en tenir ? la ligne principale, se souvenir du chemin qu’il devrait emprunter. Il regarda ? travers les yeux d’Ember, le faucon planant autour du bateau, et au loin, il crut distinguer une minuscule tache verte. — L?, dit-il. Il y a une ?le l?-bas ! Les autres sembl?rent se r?jouir de cette nouvelle, Mark corrigea un peu le cap du bateau, Matilde et Neave attendant avec impatience que le vent fasse avancer leur bateau. Gwylim s’approcha de l’avant du bateau, la cr?ature semblable ? un loup se tenant l?, pareille ? une figure de proue. Bient?t, il leur fut possible de voir l’?le au loin, m?me sans l’aide d’Ember. Elle ?tait petite par rapport aux Sept ?les qu’ils avaient laiss?es derri?re eux, mais elle semblait luxuriante et couverte d’arbres, la faisant ressembler ? un joyau vert sortant de la mer. C’?tait assez plat, l’int?rieur de l’?le disparaissant au milieu des arbres, il ?tait impossible d’en voir beaucoup plus depuis le bateau. Au fur et ? mesure qu’ils s’approchaient, Royce pouvait apercevoir des plages de sable dor?, bordant la lisi?re de la for?t comme le blanc autour d’un ?il couleur ?meraude. — Esp?rons ne pas croiser de sorci?re en chaleur ou de l?zards arm?s cette fois-ci, remarqua Matilde. Neave haussa les ?paules. — Si je me souviens bien, Lethe semblait ? ton go?t. — Ce n’est pas le moment de se disputer, dit Royce. Mais tu as raison, restons sur nos gardes. Il envoya Ember sur la plage, utilisant le faucon comme ?claireur, voulant s’assurer qu’il ne conduisait pas ses amis dans un autre endroit dangereux. Il aurait pu regarder dans le miroir, mais c’?tait une option beaucoup plus dangereuse ; il avait besoin de voir ce qui ?tait, et non ce qui pourrait ?tre. ? travers ses yeux, il vit que les arbres formaient une sorte d’anneau entourant une immense clairi?re qui composait le c?ur de l’?le. Il y aper?ut tout un troupeau de cerfs blancs en train de pa?tre, et il semblait qu’un cerf observait Ember passer, ses bois majestueux suivant le vol de l’oiseau qui passait. ? pr?sent, Royce savait sans l’ombre d’un doute qu’il ?tait ? l’endroit promis par le miroir. Cela signifiait aussi qu’il savait ce qu’il devait faire ensuite. — Nous sommes au bon endroit, dit-il. Je dois y aller seul. — Seul ? s’inqui?ta Mark, l’incr?dulit? dans sa voix ?tait ?vidente. Apr?s que nous ayons fait tout ce chemin ensemble, tu veux y aller seul ? — Il le faut, insista Royce. Je… Une fois de plus, il sentit que le fil incertain du destin mena?ait de changer. S’il l’expliquait, il ne savait pas comment, mais cela chamboulerait tout ce qu’il avait vu. — … je ne peux pas en expliquer les raisons, mais je dois me rendre sur cette ?le sans vous. — Tu sais de quoi ?a a l’air ? demanda Matilde. — ?a a l’air absurde, je sais, en convint Royce. — Non, Royce, r?pondit-elle. On dirait que tu ne nous fais pas confiance. — Je vous confierais ma vie sans h?siter, retorqua Royce, et quand je le pourrai, je vous expliquerai, mais pas maintenant. — Et donc tu dois aller seul sur une ?le, avec ton ?p?e d’obsidienne comme seule protection ? r?suma Neave. Il ?tait clair qu’elle d?sapprouvait autant que les autres. — Je pense… Je crois que je peux emmener Gwylim et Ember avec moi, ajouta Royce. L’avenir potentiel ne semblait pas ?tre affect? par la perspective de leur pr?sence. S’il vous pla?t, vous ?tes venus jusqu’ici en me faisant confiance. Accordez m’en juste un peu plus. — D’accord, dit Mark, en soupirant, mais je n’aime pas ?a. Ils man?uvr?rent le bateau le plus pr?s possible de la rive sans y accoster, puis ils jet?rent une petite ancre pour le maintenir en place. Royce v?rifia qu’il avait son ?p?e et tout ce dont il avait besoin, tandis que Gwylim se d?pla?ait ? ses c?t?s. La pr?sence du bhargir lui prodiguait un sentiment de puissance et de s?curit? qui rassurait Royce. Ember avait survol? l’?le, d?crivant des cercles ? la recherche du moindre danger. Royce pla?a le miroir dans un sac de velours qu’il portait en bandouli?re. — Je reviendrai d?s que possible, promit Royce. Royce descendit du bateau, ? quelques encablures du rivage. C’?tait peu profond, l’eau ne lui arrivant qu’? la taille, mais il avan?a tout de m?me prudemment alors qu’il se dirigeait vers la terre ferme. Il y avait toujours le risque que des cr?atures sauvages peuplent ces eaux, ou des trous cach?s, ou encore des coraux ac?r?s. Royce entendit les ?claboussures lorsque Gwylim plongea dans l’eau et le bhargir nagea jusqu’? pouvoir marcher ? ses c?t?s. Ils se dirig?rent vers la plage, les vagues clapotant doucement sur le rivage. En regardant en arri?re, Royce put voir ses amis toujours dans le bateau, patients mais visiblement inquiets. Il savait qu’il devrait ?tre rapide, s’il s’attardait trop longtemps, ils viendraient le chercher pour s’assurer qu’il allait bien. Il p?n?tra la for?t avec Ember toujours au-dessus de lui, empruntant ses yeux de temps en temps pour s’assurer qu’il prenait bien la bonne direction. La canop?e ?tait assez mince pour que Royce puisse se distinguer entre les arbres. Il s’enfon?a plus profond?ment vers l’int?rieur de l’?le, se dirigeant vers l’endroit o? elle s’ouvrait sur la clairi?re centrale. Parmi les arbres, il reconnut beaucoup de plantes famili?res : des fruits et des racines comestibles laissant deviner que quelqu’un pouvait vivre sur cette ?le aussi longtemps qu’il le souhaitait sans avoir ? la quitter. Royce entendit le bruit d’un cours d’eau proche et en s’y rendant, il trouva de l’eau jaillissant de rochers couverts de mousse. Plus que cela, il d?couvrit un petit seau rudimentaire plac? ? c?t?, ?videmment con?u pour recueillir de l’eau. Peut-?tre l’?uvre de son p?re ? Royce osa s’abandonner ? l’espoir alors qu’il ?mergeait des arbres pour s’aventurer dans la vaste clairi?re herbeuse. L’herbe ?tait courte, cons?quence de la pr?sence du troupeau de cerfs, alors qu’il y avait des endroits o? il n’y en avait pas du tout, remplac?e par de grandes dalles de roche, marqu?es de symboles et de signes taill?s ? leurs surfaces. La plupart des cerfs se dispers?rent, courant pour gagner la protection des arbres. Un seul ?tait rest? : un cerf plus grand que les autres, ses bois magnifiques, sa fourrure blanche brillant au soleil. Il se cabra, s’acquittant d’un grognement, puis se dirigea en direction des arbres pour rejoindre les autres. Si Royce n’avait pas ?t? persuad? ?tre au bon endroit avant, il le serait ? pr?sent. Maintenant qu’il ?tait dans la grande clairi?re du c?ur de l’?le, Royce pouvait voir la cabane qui y avait ?t? construite, abrit?e au milieu des arbres ? la lisi?re. Elle ?tait de construction relativement simple, mais elle avait l’air solide, construite ? partir de troncs d’arbres abattus, coup?s et assembl?s par des mains qui savaient clairement ce qu’elles faisaient. Royce se dirigea vers cette hutte, pensant que celui qu’il ?tait venu chercher ne pouvait que s’y trouver. Il traversa la clairi?re, passa devant les dalles de pierre, et s’arr?ta un moment, observant les symboles qui y ?taient trac?s. Il y trouva les paroles de ceux qui avaient disparus, et quelque chose dans ces ?critures sembla r?sonner profond?ment en lui. Quelques restes de la lucidit? que lui avait apport?e le miroir lui indiquaient qu’il s’agissait d’histoire dans l’ancienne langue au sujet de ses anc?tres, rois et reines pour qui les pierres avaient chant? et dont les royaumes ?taient remplis de magie. Royce se rendit ? la hutte. Elle ?tait sobre, mais quelqu’un avait commenc? ? sculpter des ornements dans le bois, travaillant avec une longue lame ou peut-?tre une hache habilement mani?e. Royce regarda ces sculptures, qui semblaient raconter l’histoire d’un homme qui avait travers? la mer, regard? dans un miroir, et… Royce entendit Gwylim grogner derri?re lui, et il se tourna juste ? temps pour voir une hache arriver droit sur son visage. Royce se jeta de c?t?, et l’arme se ficha dans le bois, se lib?rant ensuite alors qu’un grand homme aux cheveux hirsutes et ? la barbe plus sauvage encore l’arracha. — Carris m’a-t-il enfin trouv? et envoy? un assassin ? demanda l’homme, amor?ant un autre coup. Royce esquiva en arri?re, ne l’?vitant que de justesse. Il tira l’?p?e d’obsidienne, parant le coup suivant, trouvant la force de l’?loigner ? peine de sa t?te. De son c?t?, Gwylim grognait, semblant sur le point de bondir ? tout moment. — Non, Gwylim, ne fais pas ?a, ordonna Royce. Cette distraction lui co?ta presque la vie, car son ennemi le frappa ? l’estomac avec le manche de la hache, puis la redressa pour un coup mortel. Royce roula, la hache frappant la terre l? o? il avait ?t?. — P?re, s’il vous pla?t, cria Royce. Il jeta sa lame d’obsidienne au loin, voulant lui faire comprendre qu’il n’?tait pas l? pour se battre. — Me prendrais-tu pour un sot ? demanda son p?re. Ne crois-tu pas que tes pr?d?cesseurs ont d?j? tent? de se faire passer pour tous ceux que j’aime ? Pr?vois-tu de m’?treindre pour mieux me poignarder ? J’ai donn? ? mon fils un collier avec mon sceau pour que je le reconnaisse. Est-ce que tu l’as ? Non ? C’est bien ce que je pensais ! Il s’avan?a, sa hache relev?e, et pendant un instant, Royce craignit que la magie du miroir ne l’ait rendu aussi fou que Barihash, persuad? de voir des ennemis partout autour de lui. Royce leva la main dans l’espoir que son p?re soit encore un homme assez bon pour le reconna?tre, au moins. Son p?re se figea en regardant les paumes de Royce, et il fallut une seconde ? ce dernier pour r?aliser ce qu’il regardait : la cicatrice du symbole ; souvenir de l’?poque o? enfant, il avait saisi le collier au milieu des flammes. Son p?re sembla s’adoucir et laissa tomber sa hache. — Toi… c’est mon symbole. C’est le collier que je t’ai donn?. Tu es mon fils. Royce sourit. — Bonjour, P?re. CHAPITRE CINQ Royce se tenait l?, la paume tendue, et l’homme ? l’air sauvage recula. — Royce ? C’est toi ? — Oui, P?re, dit Royce en partageant sa surprise et son incr?dulit?. Apr?s tout ce qu’il avait fait pour le retrouver, son p?re ?tait bien l?. Cet homme sauvage, avec une barbe si longue qu’elle lui fr?lait le nombril, ?tait son p?re, ?tait le roi. C’?tait difficile ? croire, mais Royce savait que c’?tait pourtant vrai. Il pouvait le voir ? la similitude de leurs traits, mais c’?tait plus que cela. Son p?re portait une chevali?re avec les armoiries royales, et bien que ses v?tements aient ?t? us?s et blanchis par le soleil, Royce pouvait encore en voir la noblesse. — C’est toi. C’est… Son p?re se pr?cipita sur lui, l’embrassant, le serrant fort dans ses bras. — J’ai attendu si longtemps ce jour. Sa voix semblait s?che et craquel?e, comme s’il n’avait pas parl? depuis longtemps. Il semblait ne se rappeler des mots qu’avec difficult?. — Tu es s?r... tu es s?r d’?tre toi ? Que tu n’es pas un r?ve ? C’?tait le genre de question qui ne pouvait venir que de quelqu’un trop longtemps tourment? par la solitude. — Non, cela n’a pas d’importance. C’est bien toi. Je l’ai vu ! J’ai tout vu ! D?s que j’ai rencontr? ta m?re il y a si longtemps, j’esp?rais tant te voir apr?s toutes ces ann?es. Royce serra son p?re dans ses bras. Il y avait tant de questions qu’il voulait lui poser, tant de choses qu’il voulait lui dire. — Tu vois les pierres ? demanda son p?re, avec l’orgueil d’un homme qui voulait montrer le peu qu’il avait. L’histoire de tes anc?tres, Royce. Il fit le tour de la hutte, jusqu’? un endroit o? une autre section de pierre reposait, fendue et compos?e de morceaux s?par?s. C’?tait le d?but d’une autre histoire. — J’ai essay? d’ajouter ma propre vie ? la leur, dit le roi Philippe. Sur une ?le comme celle-ci, il est facile de trouver le temps de le faire. Je leur ai parl?, mais ils n’ont pas r?pondu. Je ne voulais pas oublier comment parler. — Mais pourquoi venir ici ? demanda Royce. — J’ai regard? dans le miroir, r?pondit son p?re en haussant les ?paules. C’?tait une r?ponse sans l’?tre. Pour n’importe qui d’autre, cela n’aurait pas eu de sens, mais Royce avait aussi regard?. Il pouvait comprendre qu’il fallait faire certaines choses sans les expliquer. — Il y a des choses qu’on ne peut pas dire, devina Royce. Son p?re hocha la t?te. S’?loignant de lui, il se dirigea vers Gwylim, se penchant vers lui, non pas comme un homme le ferait avec un chien, mais comme il l’aurait fait avec un homme assis sur le sol. Il tendit le bras et Ember vint se poser dessus. — Ce sont d’?tranges compagnons que tu as trouv?s, mon fils, dit-il. L’outil d’une sorci?re et une chose qui n’a pas toujours ?t? un loup. — Ils ne sont pas les seuls, dit Royce. Mes amis sont toujours dans le bateau. — Et s’ils ?taient venus sur l’?le, je ne me serais pas montr?, dit son p?re. Je me serais gliss? derri?re toi et vol? ton bateau pour m’?chapper. Royce hocha la t?te, parce qu’il connaissait ce passage. Il l’avait vu dans le miroir. — Pourquoi es-tu parti ? demanda-t-il. Pourquoi es-tu venu ici ? — Je devais partir, sinon ils m’auraient tu?, r?pondit son p?re. Et ils t’auraient tu? ?galement. Je suis venu ici parce que cet endroit ?tait le n?tre, celui de notre famille. — Et tu m’as laiss? une piste parce que tu savais que je partirais ? ta recherche, dit Royce. — Je ne suis pas s?r, expliqua son p?re. C’est dur de s’en tenir aux choses dans le miroir. Je me souviens l’avoir fait, mais toutes les raisons, et tout ce ? quoi elles pourraient mener… tu as regard? dans le miroir, m?me si je t’avais dit de ne pas le faire. — Je l’ai fait, dit Royce. Tu avais d? voir que je le ferais. Son p?re sourit, comme si Royce n’avait pas tout saisi. — Cela ne marche pas ainsi. — J’ai vu des choses, dit Royce. J’ai vu la fa?on dont cela doit se passer. Il faut que tu reviennes. Le roi doit revenir pour que toute cette folie prenne fin. Le sourire de son p?re se transforma alors en un rire qui r?sonna dans l’espace ouvert de la clairi?re, dispersant les quelques cerfs qui avaient commenc? ? y revenir. — Cela ne marche pas non plus ainsi, dit son p?re. — Alors comment ?a marche ? s’aga?a Royce. — Le miroir ne te donne pas la sagesse, il te montre les possibilit?s, dit son p?re. Il y en a tellement qu’il est impossible de toutes les retenir. Ton esprit en choisit quelques-unes, mais ce que tu obtiens, c’est ce que tu y apportes. Barihash, cette chose l?-bas, devait avoir des soup?ons avant qu’il ne regarde, alors il n’a eu d’yeux que pour les possibilit?s alimentant sa suspicion. Cela prenait tout son sens pour Royce. Il avait vu ces possibilit?s, il avait ?t? capable de commencer ? les saisir. Il avait choisi la seule voie qui pourrait fonctionner, et aujourd’hui encore, il s’en ?tait rendu compte, alors que les autres choix auraient ?t? impossibles. — Il y avait un… homme, dit Royce. Je lui ai montr? le miroir juste avant qu’il ne me tue et il… s’est arr?t?. Il m’a suppli? de le tuer. — L’homme gris, dit son p?re. L’Angarthim. Il n’en dit pas plus pendant un instant, luttant manifestement pour trouver les mots. — Quelle est la chose la plus horrible que tu puisses montrer ? un homme qui toute sa vie a ?t? tromp? ? Tu peux lui montrer la v?rit?. Et quelles possibilit?s son esprit lui aura-t-il montr?es, lui ? qui on a cach? tant de choses auparavant ? Royce n’arrivait pas ? l’imaginer. Plus que cela, il ne voulait pas l’imaginer, parce qu’il y avait d?j? trop de possibilit?s dans sa t?te sans avoir ? s’encombrer de plus. Il avait vu ce qui pouvait arriver s’il s’y prenait mal ici, toutes les fa?ons dont le monde pouvait sombrer dans l’obscurit? et le sang, dans la mort et l’horreur. Il devait s’accrocher ? la voie qu’il avait choisie parmi toutes les possibilit?s, le seul moyen pour que cela se passe bien. — Pourquoi ne suis-je pas devenu fou ? demanda Royce. — Parce que tu es assez fort pour voir les choses telles qu’elles sont, dit son p?re. Ou parce que tu as ?t? assez fort pour te retirer avant qu’il ne soit trop tard. J’ai moi-m?me eu un aper?u. J’aurais pu me battre contre Barihash pour en apprendre plus, mais je savais que je ne pourrais jamais tout contenir. — J’ai tu? Barihash, dit Royce. Il ressentit un soup?on de culpabilit? en l’admettant ? son p?re. Mais son p?re hocha la t?te. — Bien. Parfois, le mal doit ?tre combattu. Il n’?tait plus que douleur, haine et suspicion, il ne pouvait rien apporter d’autre que de la souffrance au monde. Il en va de m?me pour le roi Carris et la guerre ? venir. Il y aura de la violence, mais elle est parfois n?cessaire. Royce le comprenait, il le savait. Il s’?tait battu contre le vieux duc pour exactement les m?mes raisons, contre Altfor et son oncle et contre tous ceux qui les avaient attaqu?s. Il esp?rait pouvoir tout am?liorer si seulement il pouvait les vaincre. D?sormais, les possibilit?s que son cerveau ne pouvait ? peine contenir sugg?raient qu’il devait y avoir davantage. La lucidit? que le miroir lui avait apport?e, la capacit? de regarder le monde et de le comprendre, lui avait montr? qu’il faudrait plus que la violence. L’invoquer elle seule n’entra?nerait que des ann?es de mort. Bien s?r, l’?quilibre n?cessitait qu’ils ne se battent pas du tout ; les choses continueraient comme elles ?taient, avec toute la cruaut? qui en r?sulterait. Le chemin entre ces deux choses ?tait si ?troit qu’il ressemblait ? une corde tendue au-dessus d’un pr?cipice, un danger bien r?el en dessous. — J’ai d?j? travers? des pr?cipices, dit Royce pour lui-m?me. — Que dis-tu ? demanda son p?re. — J’essaie juste de savoir quoi faire ensuite, r?pondit-il. M?me avec tout ce que le miroir m’a montr?, j’ai encore beaucoup ? faire. — Le miroir ne te dit pas ce que tu dois faire, r?p?ta son p?re. C’est l’erreur la plus dangereuse qui soit. Tu as encore le choix. Tu as toujours le choix. Comme tout le monde. C’?tait plus logique que Royce ne l’aurait cru. Il ne voulait pas d?truire les choix des gens qui l’accompagnaient ; ni m?me leur demander de se fier ? lui pour venir ici, il ne les aurait pas forc?s ? le faire, il n’avait pu qu’esp?rer qu’ils lui fassent assez confiance pour l’accompagner. Il avait autre chose ? demander. — P?re, dit-il, je t’ai cherch? de l’autre c?t? de la mer. J’ai trouv? le miroir dans les Sept ?les, mais je te cherchais. Je suis venu ici parce que je voulais retrouver mon p?re, et parce que je crois que le royaume a besoin de son roi. Son p?re resta un instant silencieux, puis il secoua la t?te. — Je ne suis pas s?r de pouvoir le faire, Royce. La d?ception qui traversa Royce ? ce moment-l? fut absolue. — Mais je suis all? si loin ! Il pouvait entendre la douleur dans sa propre voix, et cela se refl?ta sur le visage de son p?re. — J’ai regard? dans le miroir, dit son p?re. Je me suis vu ici, sans retour possible au royaume. — Mais c’?tait il y a si longtemps, dit Royce. Les choses ont chang?, P?re. — Tu sais qu’il y a des choses que je ne peux pas dire, r?pondit son p?re en secouant la t?te. Des choses qu’il avait vues, devina Royce. Mais cela lui donna une id?e. Il attrapa le sac ? c?t? de lui. — Veux-tu encore regarder ? demanda-t-il. Il lui tendit le miroir. — Tu connais les dangers que cela implique, dit son p?re, visiblement inquiet. Un homme ne devrait pas regarder trop souvent, ? cause de tous les bouleversements que cela peut engendrer. — S’il te pla?t, supplia Royce. Son p?re h?sita, puis hocha la t?te. Lentement, prudemment, il regarda dans le miroir. Il sembla le regarder une ?ternit?, si longtemps en fait que Royce pensa ? l’en ?loigner, ? le couvrir pour qu’il n’ait plus ? le regarder. Finalement, son p?re ferma les yeux. — Il semble que le royaume aura son roi, dit son p?re, avec une expression que Royce ne sut pas d?chiffrer. Elle laissait entendre qu’il avait vu plus de choses encore que Royce. — Et tu auras ton p?re ? tes c?t?s, conclut-il. Cette partie, au moins, permit ? Royce de reprendre son souffle. — Alors tu retourneras au royaume avec mes amis et moi ? demanda Royce, osant ? peine esp?rer. — Je le ferai, promit son p?re. Il disparut un moment dans la cabane, ramassant un petit sac d’affaires presque identique ? celui que Royce avait trouv? sur la premi?re des Sept ?les. C’?tait tout ce qu’il voulait emporter avec lui. — Je n’ai ni ton armure ni ton ?p?e, dit Royce. Je les ai perdues dans les Sept ?les. — Cela n’a pas de sens, dit son p?re. J’ai vu… non, comme je l’ai dit, cela ne marche pas comme ainsi. Royce savait qu’il ne devait pas lui demander ce qu’il avait vu, mais il lui fut difficile de ne pas s’en inqui?ter alors qu’ils partaient ? travers les arbres ? l’or?e de l’?le. Il lui ?tait ?galement difficile de ne pas s’?tonner d’avoir finalement retrouv? son p?re. L’homme qui ?tait parti si longtemps auparavant ?tait ici, marchant ? ses c?t?s avec Gwylim pendant qu’Ember voltigeait ? travers les arbres. La marche jusqu’? la plage ne sembla pas aussi longue que le voyage vers l’int?rieur de l’?le. Ils couvrirent la distance rapidement, et bient?t, ils regard?rent fixement l’endroit o? le bateau avait jet? l’ancre. Ses amis ?taient toujours l? ? attendre alors que Royce et son p?re arriv?rent, mais ils vinrent ? leur rencontre lorsqu’ils r?alis?rent que Royce ?tait accompagn?. Ils se pr?cipit?rent sur la plage, se tenant l?, dans l’expectative. — Une Picti, une paysanne et un combattant de l’?le Rouge ? dit son p?re. — Mes amis, r?pondit Royce. Il y avait aussi un chevalier, mais Sir Bolis s’est sacrifi? dans les Sept ?les, pour notre salut ? tous. Il s’avan?a vers eux, pr?t ? les pr?senter un ? un. — Mes amis, voici mon p?re, le roi Philippe, le roi l?gitime. Nous l’avons enfin trouv?. Ses amis r?agirent avec une d?f?rence surprenante. Mark s’inclina, Matilde fit la r?v?rence et m?me Neave fit un signe de t?te respectueux. — P?re, voici Mark. Il m’a aid? ? survivre ? l’?le Rouge, et c’est mon meilleur ami. Son p?re lui prit la main. — Un homme qui a sauv? la vie de mon fils m?rite toute ma gratitude. — Il a sauv? la mienne plus souvent encore, r?pondit Mark. Royce se d?pla?a le long de la ligne. — Voici Matilde, qui fait partie de la r?sistance ? la domination de l’ancien duc depuis presque le d?but. Elle est plus f?roce qu’elle n’en a l’air. — Vraiment ? dit son p?re en regardant Matilde. Je dirais que tu as d?j? l’air assez f?roce. Je serai heureux de me battre ? tes c?t?s. — Merci, Votre Majest?, dit Matilde, l’air ravie. — Et toi ? dit son p?re, se tournant vers Neave. — Neave, Votre Majest?, dit-elle, avec une note de respect ? laquelle Royce ne s’attendait pas. — Les Pictis m?ritent une meilleure place dans le royaume que ce que j’ai pu leur donner. Ils respectent la magie du monde d’une mani?re aujourd’hui oubli?e. Si tu es ici, cela signifie-t-il que ta tribu se bat aux c?t?s de mon fils ? — Oui, confirma Neave. Il a fait chanter la pierre de gu?rison. D’autres se joindront ?galement ? votre cause. — On dirait que tu as pr?par? toute une arm?e, conclut le p?re de Royce. Royce hocha la t?te. — Nous y travaillons. D’ici notre retour, j’esp?re que mes fr?res en auront rassembl? assez pour affronter le roi Carris. Mais il nous faut un symbole. Nous avons besoin du roi l?gitime. Nous avons besoin de toi. — Je suis avec toi, promit son p?re. Il se dirigea vers le bateau. Mais nous avons encore un long chemin ? parcourir et un dur combat ? livrer une fois l?-bas. CHAPITRE SIX Genevi?ve se faufila dans le ch?teau au petit matin, effray?e ? chaque pas, sachant qu’elle prenait un risque simplement en d?ambulant dans les couloirs. Si Altfor r?alisait qu’elle ?tait ici, alors m?me l’enfant qu’elle portait ne saurait la prot?ger, mais il avait quitt? leur chambre avant elle, et Genevi?ve avait devin? qu’il ?tait parti rejoindre Moira. — Je vais la tuer, dit Genevi?ve, bien qu’elle conn?t ses appr?hensions ? tuer qui que ce soit de sang-froid. Sa m?saventure avec Altfor lui avait bien prouv?, lorsqu’elle s’?tait trouv?e incapable de le poignarder alors m?me qu’elle en avait eu l’occasion. — Je trouverai quelque chose, se promit Genevi?ve, de la m?me fa?on qu’elle l’avait fait quand il s’agissait d’Altfor. Si elle ne pouvait pas le faire directement, elle aiderait ? tous les faire tomber indirectement, puis elle veillerait ? ce qu’ils soient ex?cut?s pour leurs crimes. Ils le m?ritaient, ils m?ritaient bien pire encore. Elle d?testait davantage Moira, si c’?tait possible, qu’Altfor. Altfor n’avait jamais pr?tendu ?tre son ami ; il l’avait trahi comme Genevi?ve s’?tait attendue qu’il la trahisse. Moira, quant ? elle, avait connu la m?me situation qu’elle, mari?e ? un autre fils du duc et plong?e dans un monde dont elle n’aurait jamais d? faire partie. Elle aurait d? ?tre l’alli?e de Genevi?ve, son amie. Au lieu de cela, elle s’?tait rapproch?e d’Altfor, et avait trahi Genevi?ve. Elle avait fait bien pire quand elle avait livr? Garet aux forces du roi. Au moins Genevi?ve pourrait commencer ? s’occuper de cela. Elle continua d’avancer, se d?pla?ant en douceur d’une cachette ? une autre, essayant de donner l’impression qu’elle vaquait ? ses occupations, qu’elle partait pour des affaires l?gitimes. Il ?tait inutile de se faufiler dans un b?timent fortifi? bient?t en temps de guerre, o? trop de gens circulaient et o? la crainte des espions ?tait trop forte pour esp?rer passer inaper?ue. Le mieux que Genevi?ve pouvait esp?rer, c’?tait de donner l’impression qu’elle ne fasse rien d’inhabituel. Elle approchait des cellules, sachant que son trajet jusque-l? avait ?t? la partie la plus facile. Les gens ne se formaliseraient pas par sa pr?sence partout ailleurs dans le donjon, et n’oseraient de toute fa?on pas interroger la noble ?pouse du nouvel ami du roi, mais Genevi?ve doutait que cela puisse fonctionner devant les portes des cellules. Elle se tenait maintenant face ? l’entr?e, o? un grand garde ?tait assis sur un tabouret, les cl?s ? la ceinture et une ?p?e ? la hanche. Genevi?ve devait trouver un moyen de l’?loigner de cette porte, et ? ce moment-l?, rien ne lui vint. Qu’est-ce qui pourrait bien faire bouger un homme ? qui l’on avait ordonn? de rester ? son poste ? La r?ponse ?tait ?videmment que rien n’y parviendrait. Il n’y avait aucun moyen subtil de le faire, aucun moyen de le distraire de son poste discr?tement et de se glisser derri?re lui. La seule option ?tait la plus directe, et si elle la choisissait, ses intentions deviendraient ?videntes. Elle n’aurait plus aucune chance de pouvoir rester dans ce ch?teau. Genevi?ve ?tait-elle vraiment pr?te ? tout abandonner et ? fuir, alors qu’elle avait peut-?tre encore une chance d’en savoir plus afin d’aider ? gagner cette guerre. — Et qu’arrivera-t-il ? Garet si je ne fais rien ? se murmura-t-elle. Elle connaissait aussi la r?ponse ? cette question. Elle avait vu ce que le roi ?tait capable de faire subir ? ses opposants, et ne doutait pas qu’il pensait ce qu’il avait dit au sujet de la torture. Elle devait faire sortir le fr?re de Royce, m?me si cela compromettait sa position actuelle. Ce serait peut-?tre m?me ? son avantage. Genevi?ve pourrait rejoindre les forces de Royce si elle ramenait Garet. Ce serait la preuve qu’elle ?tait de leur c?t?, et Royce pourrait enfin comprendre qu’elle se souciait de leur sort. — Rien ne m’est plus important, dit Genevi?ve ? voix basse. Elle s’avan?a alors vers le garde ? la porte des oubliettes. Il la regarda avec la lenteur paresseuse d’un homme qui n’avait nullement l’intention de bouger s’il n’avait pas ? le faire. — Qu’est-ce que vous voulez ? demanda-t-il. — Que voulez-vous ma Dame, le corrigea Genevi?ve en adoptant la voix la plus hautaine dont elle ?tait capable. Qu’est-ce qui t’a fait croire que nous ?tions ?gaux ? Il lui ?tait assez facile de para?tre suffisante : elle n’avait qu’? penser ? la fa?on dont Altfor aurait agi. Cela suffit ? ?largir les yeux du garde sous l’effet de la peur, ou du moins de la surprise. — Rien, ma Dame. Pardonnez-moi, ma Dame. — Tais-toi et ouvre-moi la porte, dit Genevi?ve. Je viens voir un des prisonniers. — Je suis d?sol?, ma Dame, dit le garde. Mais je ne dois laisser entrer personne pour voir les prisonniers. Pas sans la permission du… — Du roi ? interrompit Genevi?ve. Elle arbora le sourire le plus m?prisant possible. Le roi qui en ce moment m?me est le plus proche ami de mon mari ? Le roi avec qui j’ai parl? plus de fois la veille que tu ne le pourras de ton vivant ? — Ma Dame, implora l’homme. Il se leva, mais sembla quand m?me h?siter. — Je veux parler ? l’un des prisonniers, dit Genevi?ve. Le nouveau, Garet, c’est tout. Je n’ai ni l’intention de me livrer ? la torture, ni d’exiger que tu l’escortes ? la porte pour le lib?rer. Je veux lui parler. Il me conna?t et il m’en dira bien plus qu’? n’importe qui d’autre. Penses-tu que le roi voudra entendre que tu as fait obstacle ? quelque chose visant ? nous obtenir des informations ? Genevi?ve pouvait voir la peur sur le visage de l’homme. Elle ressentit une sorte de pouvoir ? son expression, et dans ce que de simples mots ?taient capables d’accomplir. Il se h?ta de s’approcher de la porte, de la d?verrouiller ? l’aide d’une cl?, puis d’une autre, soulevant une lourde barre avant d’ouvrir la lourde porte pour r?v?ler les profondeurs sombres qui s’y trouvaient. Il y avait une bougie sur un support pr?s de la porte. Le gardien la souleva et l’offrit ? Genevi?ve. Elle la prit, s’approchant de l’homme, assez pr?s pour qu’elle puisse sentir son haleine f?tide. Assez pr?s pour que sa main puisse attraper son trousseau de cl?s. — Qu’est-ce que vous… — Je vais devoir entrer dans la cellule avec lui, dit Genevi?ve. Je sortirai quand j’aurai fini. ? moins que tu n’y voies une objection ? Il ?tait ?vident qu’il avait plusieurs, mais il n’osa pas en faire part. — Il est dans la cellule du fond, ma Dame. Genevi?ve le d?passa avant qu’il n’ait le courage de dire quoi que ce soit. Elle se mit en route dans les profondeurs des oubliettes, se d?pla?ant rapidement, sachant qu’elle n’aurait qu’un temps limit? avant que le garde ne se rende compte qu’il devrait probablement v?rifier si elle ?tait effectivement autoris?e ? descendre ici. Bient?t, il penserait ? demander au roi ; il le voulait probablement d?j? ; et Genevi?ve ne pouvait qu’esp?rer que cela lui prenne le plus longtemps possible avant qu’il n’ait le courage d’abandonner son poste pour le faire. Genevi?ve descendit dans les oubliettes, par un escalier sinueux et glissant, dans des endroits couverts de moisissure, alors qu’elle ?tait s?re d’entendre de l’eau s’?goutter quelque part pr?s d’elle. Elle entendait plus que cela ?galement : des cris venaient de quelque part plus fond, et elle esp?ra qu’il ne s’agissait pas de ceux de Garet. Genevi?ve ne voyait rien au-del? du petit cercle de lumi?re que la bougie lui offrait. La lumi?re ?tait sombre et vacillante, et ne lui permettait de voir que quelques m?tres de couloir de pierre. Il y avait des portes de chaque c?t?, en ch?ne et avec des trappes de fer plac?es ? hauteur des yeux pour que le ge?lier puisse surveiller les prisonniers. Il y avait probablement des prisonniers dans plusieurs des cellules, et une partie d’elle-m?me souhaitait pouvoir tous les lib?rer, mais elle savait qu’il n’y aurait aucun moyen de le faire. Elle pourrait peut-?tre faire sortir Garet, surtout si elle pouvait trouver un endroit pour se cacher avec lui jusqu’au retour du messager de sa s?ur. Il n’y avait cependant aucune chance qu’elle puisse faire sortir autant de prisonniers de cet endroit. Elle se rendit jusqu’? la derni?re cellule, soulag?e de ne pas avoir eu ? chercher dans chacune d’entre elles pour essayer de trouver Garet. Genevi?ve n’?tait pas s?re de pouvoir supporter de voir toutes les personnes qu’ils avaient captur?es et tortur?es. Elle fut bient?t devant la derni?re cellule du couloir, levant sa bougie pour regarder par le vasistas. Sa lumi?re n’?tait pas suffisante pour voir les choses clairement, mais elle pouvait voir qu’il y avait bien quelqu’un, ?clair? un peu plus par la lumi?re entrant par l’ouverture si ?troite. Il ?tait blotti, ? moiti? envelopp? dans une cape que Genevi?ve pensait ?tre celle de Garet. C’?tait suffisant pour faire na?tre l’espoir dans son c?ur. — Garet ? appela-t-elle. Garet, c’est Genevi?ve. Il ne r?pondit pas, mais ni lui ni ses fr?res n’avaient voulu lui parler quand elle ?tait retourn?e les voir dans le ch?teau du vieux duc. Ils pensaient qu’elle les avait trahis, qu’elle avait trahi Royce. Garet pensait probablement qu’elle ?tait l? pour le compte d’Altfor. — Garet, s’il te pla?t, parle-moi. Je peux t’aider. Genevi?ve fouilla dans les cl?s qu’elle avait prises au gardien. Il lui fallut plusieurs tentatives pour trouver la bonne, et pour entendre le d?clic de la serrure quand la porte se d?verrouilla. Genevi?ve entra dans la cellule, esp?rant que Garet verrait qu’elle ?tait seule ; esp?rant qu’il serait pr?t ? essayer de s’?chapper m?me s’il ne croyait pas encore qu’elle ?tait l? pour l’aider. — Garet, je sais que tu penses que je suis du c?t? d’Altfor, mais ce n’est pas le cas, dit Genevi?ve. Je suis l? pour t’aider toi. Je suis l? pour t’aider ? t’?chapper. Pourtant, aucune r?ponse ne se fit entendre de la part de la silhouette blottie dans un coin. Genevi?ve esp?rait que ce n’?tait d? ? ce qu’ils avaient fait endurer ? Garet ici ; qu’ils ne l’avaient pas tortur? au point de le rendre muet. — Garet, s’il te pla?t, supplia Genevi?ve. Je suis de ton c?t?. Je veux te sortir de l?. Je sais que beaucoup de mes actes peuvent laisser penser que je soutiens Altfor, mais je peux te promettre que j’ai fait tout cela parce que j’aime Royce. Je lui ai m?me envoy? des messages pour lui parler des plans d’Altfor. Sais-tu qu’il a l’intention de feindre une attaque par le sud, alors qu’il enverra une arm?e par le nord ? bord de navires ? — Oui, r?pondit la silhouette, ce mot suffit ? lui seul ? glacer le sang de Genevi?ve dans ses veines. Elle connaissait cette voix, et ce n’?tait pas celle de Garet. L’homme se leva, laissant tomber son manteau. Altfor se tenait l? dans la p?nombre, son sourire le rendant plus mal?fique encore ? la faible lueur de la bougie. — J’ai pens? que tu pourrais faire ?a, dit-il, avan?ant sur elle. Genevi?ve fut tellement stup?faite qu’elle ne r?agit m?me pas quand il lui arracha les cl?s des mains. — J’ai pens? que la pr?sence du gar?on pourrait t’amener ? exposer tes vraies intentions, me donner une excuse pour enfin faire ce que je voulais. Genevi?ve connaissait la nature de ses menaces, et instantan?ment son esprit se tourna vers le seul bouclier qu’elle pensait avoir. — Je suis ta femme. — Une femme amoureuse de mon ennemi ! rugit Altfor. Et aussi une tra?tresse. ?tre une femme de noble ne te prot?gera plus. — Je porte ton enfant, souligna Genevi?ve. — Oui, dit Altfor. C’est vrai. Il la d?passa jusqu’? la porte, la franchit et disparut avant que Genevi?ve ne puisse r?agir. Son visage r?apparut par le judas. — Je d?ciderai quoi faire de toi plus tard, dit-il. J’attendrai peut-?tre que tu donnes naissance ? mon enfant et que tu te fasses ex?cuter. Peut-?tre que je ne le ferai pas. Sois certaine en tout cas, Genevi?ve, que tu paieras tes actes de ta vie. CHAPITRE SEPT Alors qu’ils naviguaient, Royce appr?ciait le sentiment d’espoir qui r?gnait sur le bateau. Ils avaient retrouv? son p?re, le miroir ?tait dans son sac au fond du bateau, et ils se dirigeaient ? pr?sent vers leurs foyers. Ils avaient r?alis? ce qu’ils avaient entrepris de faire, malgr? toutes les ?preuves que les Sept ?les avaient mis sur leur route. S’ils avaient ?t? capables d’en arriver jusqu’ici, ils pourraient certainement r?aliser tout ce qui ?tait encore n?cessaire. — C’est vraiment le roi, chuchota Mark ? Royce en regardant son p?re, dont le regard se perdait au-del? des vagues. Son ami avait l’air impressionn? et semblait suivre chaque mouvement du roi Philippe, comme s’il attendait des instructions. — Et mon p?re, dit Royce. Pour lui, c’?tait le plus important. — Ton p?re, le roi, accepta Mark. Je suis d?sol?, je sais de quoi j’ai l’air, et tu as accompli ton lot d’exploits, mais je te connais. — Et avec le temps, tu conna?tras ?galement mon p?re, lui assura Royce. Il voulait lui aussi mieux le conna?tre. Apr?s avoir v?cu si longtemps s?par?s, ils avaient beaucoup ? rattraper. Royce voulait savoir tout ce que son p?re avait fait depuis son d?part et voulait en savoir plus sur le genre d’homme qu’il ?tait. Il commen?a ? avancer en direction de son p?re. Il passa devant Matilde et Neave, assises au milieu de l’embarcation. Toutes les deux semblaient se chamailler ? propos d’exploits pass?s de l’ancien roi. — Je te le dis, dit Matilde. C’?tait un grand h?ros. Il a combattu les nobles. — C’?tait un noble, r?pondit Neave, ensuite il a perdu contre les nobles. — Il a combattu des monstres. — Nous aussi, nous avons combattu des monstres, souligna Neave. — Il chassait les bandits pour garder les routes s?res. — Certains d’entre eux ?taient Pictis. — C’est de cela qu’il s’agit ? Tu ne l’aimes pas parce qu’il a combattu les Pictis ? J’ai aussi combattu ton peuple. Je t’ai battue, souviens-toi. — Tout va bien ? demanda Royce, avant que la querelle ne s’intensifie. Il ?tait toujours difficile de dire avec ces deux-l? si elles se disputaient vraiment ou non. — Neave ne pense pas que ton p?re soit quelqu’un qui vaille la peine d’?tre suivi, dit Matilde. — C’est toi qui penses qu’on devrait le suivre aveugl?ment, sans r?fl?chir, nuan?a Neave en secouant la t?te. — Neave ? dit Royce en fron?ant les sourcils. La jeune Picti avait-elle un probl?me avec le retour de son p?re ? — Je suis contente que nous l’ayons trouv?, dit Neave, et je sais qu’il sera utile dans les batailles ? venir, mais Mark et Matilde le regardent comme… c’est presque aussi malsain que la fa?on dont nous avons tous regard? Lethe. Pas de question, pas de r?flexion, juste de l’admiration. — Parce que le roi l?gitime a ?t? retrouv? ! insista Matilde. Que veux-tu de plus ? Je croyais que les Pictis suivaient toujours ceux qui pouvaient r?v?ler les signes magiques. — Ceux qui peuvent faire chanter les pierres et faire r?pondre la vieille magie ont notre respect, convint Neave. Mais nous ne les suivons pas aveugl?ment. Parfois, quelqu’un doit diriger, mais cela ne veut pas dire que nous suivons sans r?fl?chir, sans poser de questions, sans d?cider par nous-m?mes ce qui est juste. — Le retour de mon p?re posera-t-il un probl?me aux Pictis ? lui demanda Royce. — Je ne sais pas, admit Neave. C’est un homme qui a fait beaucoup de choses impressionnantes, mais c’est aussi lui qui a abandonn? le royaume au roi Carris et ? ses nobles. Il aurait pu nous rendre notre place dans le monde, et il ne l’a pas fait. Il aurait pu faire plus. — Peut-?tre qu’il le fera cette fois-ci, sugg?ra Royce. — Peut-?tre, supposa Neave. En tout cas, je continuerai ? te suivre. Je t’ai entendu faire chanter les pierres, au moins, et tu m’as prouv? ta r?solution ? faire ce qui est juste, Royce. Royce fut submerg? de fiert?, satisfait d’avoir gagn? la confiance de Neave apr?s tout ce qu’ils avaient travers?. C’?tait peut-?tre m?me une bonne chose que quelqu’un soit moins impressionn? par son p?re que Mark et Matilde ne semblaient l’?tre, cela aiderait ? garder du recul sur les ?v?nements, ? s’assurer qu’ils empruntaient cette voie pour les bonnes raisons. ? pr?sent, il finit de remonter le bateau, rejoignant son p?re assis ? la proue, surveillant leur progression avec Gwylim ? ses c?t?s. Il semblait presque que son p?re discutait de quelque chose avec la b?te semblable ? un loup ; Gwylim penchait la t?te comme s’il le comprenait alors que son p?re parlait. — Si je peux te ramener ? ce que tu ?tais, je le ferai, dit son p?re. Mais tu dois ?galement conna?tre les dangers que cela engendrerait. Sans ta peau, il se pourrait que tu sois pi?g?, mais tu resterais puissant. — P?re ? dit Royce, en se rapprochant. Son p?re se retourna et lui sourit. — C’est si bon de t’entendre m’appeler ainsi. Je viens de discuter de projets avec notre ami ici pr?sent. — Et tu crois qu’il a tout compris ? demanda Royce. C’?tait si ?trange de parler ? une cr?ature si semblable ? un loup. — Comprends-tu ce qu’est un bhargir, Royce ? demanda son p?re. Un homme capable de rev?tir la peau d’une b?te impr?gn?e de magie et de se transformer. Une chose ancienne, et une chose puissante. Une cr?ature comme lui peut gu?rir des blessures dont il souffre, combattre les ennemis les plus f?roces, puis retourner au camp comme l’homme qu’il ?tait. Sauf que celui-ci en est incapable. Royce hocha la t?te. Il l’avait compris. Malgr? tout, il ?tait parfois difficile de ne pas consid?rer Gwylim autrement que comme la cr?ature dont il avait l’apparence. — Tu as des compagnons ?tranges et puissants, remarqua son p?re, en faisant un geste vers Ember qui volait en cercle. Tu devrais bient?t parler ? ta sorci?re, car j’aimerais savoir ce qu’elle compte faire ensuite. Quant ? moi… puis-je emprunter ton ?p?e un instant ? — Elle est ? toi, si tu le veux, dit Royce. Il prit la lame d’obsidienne de sa ceinture et la tendit presque avec r?v?rence. Son p?re secoua la t?te. — Je ne compte pas la garder. Vivre seul depuis si longtemps m’a appris quelques techniques, cependant, et je pense que je peux aider ? am?liorer cette lame. — L’am?liorer ? demanda Royce. — Un guerrier devrait avoir une bonne ?p?e, dit son p?re. Va parler avec ta sorci?re. Je ferai ce que je peux de mon c?t?. Royce voulut expliquer ? son p?re que ce n’?tait pas si facile ; que Lori ne lui apparaissait que rarement, quand bon lui semblait. Son p?re avait l’air toutefois si confiant que Royce concentra ses sens vers Ember, appelant Lori par la m?me occasion. Il eut la vision d’un espace ext?rieur, au milieu d’un ensemble de pierres anciennes. Un feu allum? au centre br?lait lentement, aliment? avec de la tourbe, mais avec quelque chose d’autre qui pr?tait aux extr?mit?s des flammes des teintes vertes et violettes. Royce se sentit marcher dans ce d?cor et se diriger vers la lumi?re du feu. — J’esp?rais que tu viendrais, dit Lori en le regardant. Viens, Royce, assieds-toi pr?s du feu. Dis-moi ce qui se passe. — L’ignorez-vous donc ? s’?tonna Royce. Il avan?a pour s’asseoir pr?s du feu, ? un endroit o? une pierre basse servait de si?ge. Royce pouvait ? la fois la sentir et ne pas la sentir, pr?sente et absente, tout ? la fois. — Oui, dit Lori, et Royce put voir l’ampleur de l’inqui?tude de la sorci?re. C’est bien l? le probl?me. Elle jeta quelque chose dans le feu, la couleur des flammes changeant encore une fois, le foyer br?lant soudain de la chaleur orange d’une forge. — Regarde dans le feu, Royce, et dis-moi ce que tu vois. Royce ob?it et fixa les flammes, regardant de plus en plus profond?ment, supposant que s’il regardait assez profond?ment, des visions de ce qui allait arriver lui appara?traient. Compar? aux nombreuses possibilit?s du miroir, c’?tait une m?thode grossi?re, mais Royce serait ravi d’avoir des conseils. — Je… je ne vois que des flammes, avoua Royce apr?s quelques minutes. — C’est le probl?me, r?p?ta Lori. Moi aussi. Je devrais voir plus, j’en ai vu plus, mais d?s le moment o? tu as regard? dans le miroir, je n’ai pu voir que des bribes des choses ? venir. — Vous dites que le miroir interf?re avec les autres magies ? demanda Royce, pensant ? celui-ci bien en s?curit? dans leur bateau. — Peut-?tre, dit Lori en haussant les ?paules. Ou peut-?tre que le fait qu’il t’ait tant montr? rend mes pr?dictions moins certaines. — Le fait de ne rien voir peut ?tre d?concertant, reconnut Royce, mais ce n’est pas forc?ment un probl?me. J’ai regard? dans le miroir. J’ai vu… M?me ici, m?me ainsi, il savait qu’il ne pouvait pas r?v?ler exactement ce qu’il avait vu, et Lori levait d?j? la main pour l’arr?ter. — Non, dit-elle. L’avenir est trop fragile. Tu le traites comme un plastron d’acier, alors qu’il s’agit d’un fil de soie. Sois plus prudent, Royce. D?sormais, l’inqui?tude dans sa voix s’?tait transform?e en peur pure et simple. — Lori, dit Royce, je sais que vous ne voyez rien, mais cela ne veut pas dire pour autant qu’il y a un probl?me. — Je n’ai pas dit que je ne voyais rien, pr?cisa Lori. Je te l’ai dit, j’ai encore des bribes, et ces visions ?parses sont toutes faites de noirceur et de sang. Je vois de la violence, Royce, partout o? je regarde. Royce secoua la t?te. — C’est une possibilit?, mais ce n’est pas la seule. J’ai trouv? mon p?re. Nous reviendrons, et le peuple le suivra. Ils verront le vrai roi revenir, et tout le monde comprendra que les choses ont chang?. Avec de la chance, m?me le roi Carris se retirera et s’enfuira. Lori ?clata de rire ? ces paroles. — J’oublie parfois combien tu es jeune, Royce, ou peut-?tre combien moi, je suis vieille. Tout le monde n’a pas vu… ce que tu as bien pu voir. Tout le monde n’a pas gagn? sa sagesse directement d’un miroir, ou ta certitude que ton p?re est le roi parfait. Les gens ne se prosterneront pas devant lui simplement parce qu’il est de retour. — J’esp?re que vous vous trompez, dit Royce. Lori sourit, mais d’un sourire h?sitant. — Moi aussi, Royce. Moi aussi, je l’esp?re. L’image d’elle pr?s du feu s’estompa, et Royce se retrouva dans le bateau avec les autres. ? sa grande surprise, le soleil avait travers? le ciel pendant qu’il discutait avec la sorci?re ; beaucoup plus loin qu’il n’aurait d? le faire en un temps qui lui avait sembl? si court. — Tu es r?veill?, dit Matilde. C’est bien. Je crois qu’on se rapproche du rivage et qu’il va bient?t falloir ramer. — Tu ne veux pas ?tre celle qui le fera, la taquina Royce. — Apr?s toutes ces aventures dans les Sept ?les ? Matilde secoua la t?te. Je te laisse faire. Royce ?tait heureux que les tensions avec Neave semblaient s’?tre dissip?es pour le moment. Il alla vers son p?re, qui ?tait encore assis ? la proue du bateau, travaillant sur l’?p?e d’obsidienne. Royce la reconnut ? peine. Son p?re en avait travaill? les surfaces, transformant l’arme en quelque chose de lisse, tranchant et mortel. Il avait envelopp? la poign?e avec du cuir, utilis? du bois au-dessus pour former une garde. Il semblait ?tre en train d’ins?rer quelque chose dans cette garde, et il fallut un moment ? Royce pour reconna?tre… — Ta chevali?re ? s’?tonna Royce. Son p?re acquies?a de la t?te, finissant de l’enfoncer dans une rainure parfaitement taill?e ? cet effet. — Ce n’est pas grand-chose, mais je voulais que cette lame soit quelque chose de personnel, quelque chose qui ne pourra jamais ?tre que la tienne, dit son p?re. — C’est parfait, dit Royce en lui prenant la lame. Il essaya la lame, et il appr?cia les ajustements que son p?re avait faits. Elle ?tait plus l?g?re ? pr?sent, l’?quilibre ?tait affin?, la lame siffla dans les airs quand Royce ex?cuta quelques mouvements. Elle n’avait pas la perfection brillante de l’?p?e de cristal, mais elle avait gagn? ses lettres de noblesse, et Royce la maniait ais?ment. Il se tint c?te ? c?te avec son p?re, la main du roi Philippe reposant sur son ?paule pendant qu’ils regardaient vers le royaume. Bient?t, la ligne sombre de la c?te commen?a ? se dessiner et Royce regarda son p?re. — Nous rentrons chez nous, promit-il. — En effet, approuva son p?re. La lutte pour pouvoir y rester va commencer. CHAPITRE HUIT Olivia ignorait pourquoi le besoin de trouver Genevi?ve l’attirait si fortement vers le sud. Le bon sens lui avait dict? de rester avec les forces de son p?re, en s?curit? au c?ur d’un millier d’hommes d’armes, plut?t que de chevaucher jusqu’ici avec seulement trois de ceux-ci. Haam, Wells et William avaient l’air nerveux ? l’id?e de s’aventurer ainsi dans des contr?es encore sous le contr?le du roi Carris, mais Olivia les avait choisis pour la prot?ger en partie parce qu’ils n’allaient pas essayer de la dissuader de faire ce qu’elle voulait, ce qu’elle avait besoin de faire. Elle devait trouver Genevi?ve ; Olivia n’en connaissait pas les raisons, mais elle le devait. — ?tes-vous s?re qu’il soit prudent d’?tre si loin des forces de votre p?re, ma Dame ? demanda Haam. Olivia savait qu’il ne faisait qu’exprimer les pr?occupations des autres. Elle ne lui en voulut m?me pas. C’?tait un endroit dangereux pour eux tous. — Vous ?tes l? pour me prot?ger, leur dit-elle, je ne risque donc rien. Ces mots les firent se redresser instantan?ment avec fiert?. Ces trois-l? n’?taient pas des chevaliers, et la diff?rence ?tait ?vidente. Leurs armures avaient connu maintes batailles et avaient ?t? probablement reconstitu?es ? partir d’une douzaine diff?rentes, leurs chevaux ?tant plus aptes ? tirer une charrue qu’? charger sur un champ de bataille. Leurs armes ?taient simples et fonctionnelles, et leur nervosit? ?tait ?vidente, regardant autour d’eux au moindre bruit venant des bas-c?t?s de la route alors qu’ils continuaient vers le sud. — Mais c’est encore loin ? demanda William, alors qu’ils arrivaient ? un carrefour. Ils s’arr?t?rent, essayant de deviner quelle direction prendre. — On devrait songer ? faire demi-tour, proposa Haam. Olivia s’agitait sur son destrier, distraite, jouant avec la bague que Royce lui avait donn?e lors de leurs fian?ailles ; la bague de sa famille, mais aussi le symbole de leur amour. Elle la caressait, et ce faisant, elle pensait ? Genevi?ve. Elle pensait ? la fa?on dont cette autre femme avait regard? le ch?teau et ? l’importance qu’elle avait manifestement pour Royce. — Nous continuerons autant que n?cessaire jusqu’? ce que nous la trouvions, d?cida Olivia. Je pense qu’elle se dirige vers le campement du roi. Nous devons l’atteindre avant qu’elle n’y arrive. — Et si nous n’y arrivons pas ? demanda Wells. Olivia haussa les ?paules, mais seulement parce qu’elle savait qu’elle ne pouvait pas dire ce qu’elle pensait : que si n?cessaire, elle abattrait n’importe quel mur, trouverait un chemin ? travers n’importe quelle arm?e, pour atteindre Genevi?ve. Elle ?tait devenue son obsession, une id?e fixe qui ne voulait pas dispara?tre. Olivia savait qu’elle ne trouverait pas le bonheur avec Royce, tant la situation avec Genevi?ve ?tait trouble, sachant qu’elle ?prouvait encore des sentiments pour lui. Elle avait besoin de la trouver. — Genevi?ve aura rejoint Altfor, dit Olivia en esquivant la question. Altfor est avec le roi Carris, donc on sait o? elle se rend. Cela nous laisse une chance de la rattraper avant qu’elle n’y arrive. — Je l’esp?re, dit Wells, mais nous devons r?fl?chir ? nous fixer une limite. Jusqu’o? faudra-t-il aller avant de rebrousser chemin ? — Nous irons aussi loin qu’il le faudra, dit Olivia, d’une d?termination absolue. ? ce moment-l?, elle savait qu’elle suivrait Genevi?ve au milieu d’un feu ardent s’il le fallait. — Et nous perdons notre temps ici alors que nous pourrions avancer. Chaque moment o? nous restons ici ? h?siter est un moment o? elle s’?loigne de nous. Olivia reprit la route dans la direction o?, d’apr?s leurs informations, ?tait situ?e la cour du roi Carris, talonnant son cheval au galop. Elle se fichait que les autres r?ussissent ? suivre ou non. Leurs chevaux se pr?cipit?rent ? c?t? du sien, et de loin, ils ressemblaient probablement ? une noble dame chevauchant avec son escorte de chevaliers. Finalement, ils travers?rent des peuplements d’arbres, puis mont?rent au sommet d’une colline. De l?-haut, Olivia put voir l’arm?e du roi Carris se d?ployer en contrebas, banni?re apr?s banni?re, alors que des nobles s’?taient joints ? lui pour exprimer leur soutien. Il y avait des milliers d’hommes, des soldats et des chevaliers, des archers et des lanciers. Les nobles et les chevaliers avaient leurs tentes s?par?es des autres, chacun avec leur petit cercle de serviteurs et de valets. Au c?ur de toute cette agitation se trouvait un donjon, solide et imposant. Instinctivement, Olivia savait que Genevi?ve y serait. Altfor y serait all? pour trouver le roi, et Genevi?ve y serait all?e pour trouver Altfor. Elle ?tait peut-?tre rest?e un peu dans le camp alentour, mais Olivia devinait que cela n’aurait ?t? que peu de temps. Elle aurait march? en direction des portes, se frayant un chemin… …comme elle l’avait fait au ch?teau d’Olivia. C’?tait peut-?tre ce qui l’avait pouss?e ? vouloir retrouver Genevi?ve. Elle savait que quelqu’un qui s’?tait pr?sent?e de cette mani?re, exigeant de voir Royce, ne s’arr?terait pas l?. Elle n’abandonnerait jamais sur un ?chec. Elle frotta de nouveau la bague qu’elle portait… — J’y vais, d?clara Olivia en faisant avancer son cheval une fois de plus. Haam s’y opposa, saisissant les r?nes du cheval. — Ma Dame, vous n’irez pas l?-bas, dit-il. — Tu n’as pas ? me dire ce que je dois ou ne dois pas faire, r?pondit Olivia, surprise de sa propre fa?on de parler. Je dois le faire. J’ai besoin de… — Nous devons rentrer chez nous, s’exclama William. Nous sommes all?s trop loin. Nous sommes aux portes du camp ennemi ! — Tu peux rentrer chez toi si tu veux, grin?a Olivia. Elle descendit de cheval, se dirigeant vers le donjon. Je trouverai un moyen d’y parvenir. — Non, dit Wells. C’est du suicide. William et lui descendirent de cheval et s’empar?rent d’Olivia, l’emp?chant d’aller plus loin. Elle se retint de se d?battre afin de se lib?rer et de s’enfuir l?-bas. Elle devait trouver Genevi?ve... quoi qu’il en co?te. Êîíåö îçíàêîìèòåëüíîãî ôðàãìåíòà. Òåêñò ïðåäîñòàâëåí ÎÎÎ «ËèòÐåñ». Ïðî÷èòàéòå ýòó êíèãó öåëèêîì, êóïèâ ïîëíóþ ëåãàëüíóþ âåðñèþ (https://www.litres.ru/pages/biblio_book/?art=51923938&lfrom=688855901) íà ËèòÐåñ. Áåçîïàñíî îïëàòèòü êíèãó ìîæíî áàíêîâñêîé êàðòîé Visa, MasterCard, Maestro, ñî ñ÷åòà ìîáèëüíîãî òåëåôîíà, ñ ïëàòåæíîãî òåðìèíàëà, â ñàëîíå ÌÒÑ èëè Ñâÿçíîé, ÷åðåç PayPal, WebMoney, ßíäåêñ.Äåíüãè, QIWI Êîøåëåê, áîíóñíûìè êàðòàìè èëè äðóãèì óäîáíûì Âàì ñïîñîáîì.
Íàø ëèòåðàòóðíûé æóðíàë Ëó÷øåå ìåñòî äëÿ ðàçìåùåíèÿ ñâîèõ ïðîèçâåäåíèé ìîëîäûìè àâòîðàìè, ïîýòàìè; äëÿ ðåàëèçàöèè ñâîèõ òâîð÷åñêèõ èäåé è äëÿ òîãî, ÷òîáû âàøè ïðîèçâåäåíèÿ ñòàëè ïîïóëÿðíûìè è ÷èòàåìûìè. Åñëè âû, íåèçâåñòíûé ñîâðåìåííûé ïîýò èëè çàèíòåðåñîâàííûé ÷èòàòåëü - Âàñ æä¸ò íàø ëèòåðàòóðíûé æóðíàë.