Íåäàâíî ÿ ïðîñíóëñÿ óòðîì òèõèì, À â ãîëîâå – íàñòîé÷èâàÿ ìûñëü: Îòíûíå äîëæåí ÿ ïèñàòü ñòèõè. È òàê íàïîëíèòü ñìûñëîì ñâîþ æèçíü! ß ïåðâûì äåëîì ê çåðêàëó ïîø¸ë, ×òîá óáåäèòüñÿ â âåðíîñòè ðåøåíüÿ. Âçãëÿä çàòóìàíåí.  ïðîôèëü – ïðÿì îðåë! Òèïè÷íûé âèä ïîýòà, áåç ñîìíåíüÿ. Òàê òùàòåëüíî òî÷èë êàðàíäàøè, Çàäóì÷èâî ñèäåë â êðàñèâîé ïîçå. Êîãäà äóøà

Le Destin Des Dragons

Le Destin Des Dragons Morgan Rice L'anneau Du Sorcier #3 L'ANNEAU DU SORCIER a tous les ingr?dients d'un succ?s imm?diat : des intrigues, des contre-intrigues, du myst?re, de vaillants chevaliers et des relations en plein ?panouissement qui d?bordent de c?urs bris?s, de tromperies et de trahisons. Ce roman vous distraira pendant des heures et satisfera toutes les tranches d'?ge. A ajouter ? la biblioth?que permanente de tous les lecteurs d'heroic fantasy. Books and Movie Reviews, Roberto MattosLE DESTIN DES DRAGONS (Tome n°3 de l'Anneau du Sorcier) nous emm?ne plus loin dans l'initiation guerri?re ?pique de Thor, qui traverse la Mer de Feu vers l'?le des Brumes du dragon. C'est un endroit sans piti? o? se trouvent les meilleurs guerriers du monde, et les pouvoirs et les capacit?s de Thor s'accroissent au cours de son entra?nement. Ses amiti?s s'enrichissent elles aussi, car lui et ses amis affrontent des adversit?s ensemble, au-del? ce qu'ils auraient pu imaginer. Cependant, quand ils se retrouvent en conflit avec des monstres inimaginables, la s?ance d'entra?nement des Cent se transforme vite en histoire de vie ou de mort. Tous n'y survivront pas. En chemin, les r?ves de Thor et ses myst?rieuses rencontres avec Argon continueront ? le tracasser, ? le pousser ? essayer d'en apprendre plus sur son identit?, sur l'identit? de sa m?re et sur la source de ses pouvoirs. Quelle est sa destin?e ? Dans le royaume de l'Anneau, la situation a beaucoup empir?. Quand Kendrick est emprisonn?, Gwendolyn se rend compte que c'est ? elle d'essayer de le sauver, de sauver l'Anneau en renversant son fr?re Gareth. Elle recherche des indices sur l'identit? de l'assassin de son p?re en compagnie de son fr?re Godfrey et, au fur et ? mesure, ils vont devenir beaucoup plus proches l'un de l'autre, unis par leur cause. Cependant, Gwendolyn se retrouve en danger de mort quand son enqu?te la m?ne trop loin, et elle risque d'?tre d?pass?e par les ?v?nements. Gareth essaie de manier l'?p?e de la Dynastie et apprend ce qu'?tre Roi signifie. Il s'enivre de pouvoir et en abuse. Il r?gne impitoyablement et devient parano?aque. A mesure que l'?tau de resserre sur l'assassin du roi, les McCloud poursuivent leurs attaques dans l'Anneau et la Cour du Roi se retrouve dans une position de plus en plus pr?caire. Gwendolyn se languit de Thor, a envie qu'ils soient ensemble, que leur amour prenne son envol. Cependant, les forces qui s'y opposent sont telles qu'on peut douter que cela se produise un jour. Thor survivra-t-il aux Cent ? La Cour du Roi va-t-elle s'effondrer ? Trouvera-t-on l'assassin de MacGil ? Gwendolyn finira-t-elle avec Thor ? Et Thor finira-t-il par apprendre le secret de sa destin?e ? Avec sa cr?ation de mondes et sa caract?risation sophistiqu?es, LE DESTIN DES DRAGONS est un conte ?pique avec amis et amants, rivaux et pr?tendants, chevaliers et dragons, intrigues et machinations politiques, avec passage ? l'?ge adulte, c?urs bris?s, tromperies, ambition et trahisons. C'est un conte avec de l'honneur et du courage, du destin et de la sorcellerie. C'est une histoire d'heroic fantasy qui nous emm?ne dans un monde que nous n'oublierons jamais et qui satisfera toutes les tranches d'?ge et tous les sexes. Les tomes n°4 – n°17 de la s?rie sont aussi disponibles ! Ce livre a retenu mon attention d?s le d?but et ne l'a pas laiss?e retomber … Cette histoire est une aventure surprenante qui file ? cent ? l'heure et d?borde d'action d?s les premi?res pages. On ne s'y ennuie pas un seul moment. Paranormal Romance Guild {? propos de Transform?e}Bourr? d'action, d'amour, d'aventure et de suspense. Emparez-vous de ce livre et retombez amoureuse. vampirebooksite. com (? propos de Transform?e) Morgan Rice Le Destin Des Dragons (Tome N 3 De L'anneau Du Sorcier) Morgan Rice Morgan Rice est l'auteur ? succ?s n°1 et l'auteur ? succ?s chez USA Aujourd'hui de la s?rie d'?pop?es fantastiques L'ANNEAU DU SORCIER, qui contient dix-sept tomes, de la s?rie ? succ?s n°1 SOUVENIRS D'UNE VAMPIRE, qui contient onze tomes (pour l'instant), de la s?rie ? succ?s n°1 LA TRILOGIE DES RESCAP?S, thriller post-apocalyptique qui contient deux tomes (pour l'instant) et de la nouvelle s?rie d'?pop?es fantastiques ROIS ET SORCIERS. Les livres de Morgan sont disponibles en ?dition audio et papier, et des traductions sont disponibles en plus de 25 langues. TRANSFORMATION (Livre #1 M?moires d'un Vampire),  ARENE UN: LA CHASSE AUX ESCLAVES (Livre #1 de la Trilogie des Rescap?s),  LE REVEIL DES DRAGONS (le tome 1 de Rois et Sorciers) et LA QU?TE DES H?ROS (le tome 1 de l'Anneau Du Sorcier) sont tous disponibles en t?l?chargement gratuit! Morgan adore recevoir de vos nouvelles, donc, n'h?sitez pas ? visiter www.morganricebooks.com pour vous inscrire sur la liste de distribution, recevoir un livre gratuit, recevoir des cadeaux gratuits, t?l?charger l'appli gratuite, lire les derni?res nouvelles exclusives, vous connecter ? Facebook et ? Twitter, et rester en contact ! S?lection d'Acclamations pour Morgan Rice “Livre fantastique plein d'entrain qui int?gre un soup?on de myst?re et de complot dans son intrigue. Toute l'histoire de La Qu?te des H?ros porte sur la recherche du courage et la d?finition d'un but de vie qui m?ne ? la croissance, la maturit? et l'excellence … Pour ceux qui recherchent des aventures fantastiques substantielles, les protagonistes, les techniques et l'action fournissent une vigoureuse s?rie de rencontres qui se focalisent efficacement sur l'?volution de Thor d'un enfant r?veur ? un jeune adulte confront? ? d'impossibles conditions de survie … Et ce n'est que le d?but de ce qui promet d'?tre une s?rie ?pique pour jeunes adultes.” --Midwest Book Review (D. Donovan, Critique d'eBooks) “L'ANNEAU DU SORCIER a tous les ingr?dients d'un succ?s imm?diat : des intrigues, des contre-intrigues, du myst?re, de vaillants chevaliers et des relations en plein ?panouissement qui d?bordent de c?urs bris?s, de tromperies et de trahisons. Ce roman vous distraira pendant des heures et satisfera toutes les tranches d'?ge. A ajouter ? la biblioth?que permanente de tous les lecteurs d'heroic fantasy.” –-Books and Movie Reviews, Roberto Mattos “La distrayante fantaisie ?pique de Rice [L'ANNEAU DU SORCIER] comprend des traits classiques du genre : un cadre puissant, fortement inspir? par l’?cosse ancienne et son histoire, et un bon sens des intrigues de cour.” –Kirkus Reviews “J'ai ador? la fa?on dont Morgan Rice a cr?? le personnage de Thor et le monde dans lequel il vivait. Le paysage et les cr?atures qui le hantaient ?taient tr?s bien d?crits … J'ai appr?ci? [l'intrigue]. Elle ?tait courte et charmante … Il y avait juste la bonne quantit? de personnages secondaires, ce qui fait que je ne m'y suis pas perdue. Il y avait des aventures et des moments d?chirants, mais l'action d?crite n'?tait pas exag?r?ment grotesque. Le livre serait parfait pour un lecteur adolescent … Il contient les pr?mices de quelque chose de remarquable …” --San Francisco Book Review “Dans ce premier tome, bourr? d'action, de la fantaisie ?pique de la s?rie de l'Anneau du Sorcier (qui contient actuellement 14 tomes), Rice pr?sente aux lecteurs Thorgrin "Thor" McLeod, 14 ans. Son r?ve est de faire partie de la L?gion d'Argent, les chevaliers d'?lite qui servent le roi … L'?criture de Rice est consistante et les pr?misses intrigantes.” --Publishers Weekly “[LA QU?TE DES H?ROS] est rapide et facile ? lire. Les chapitres se terminent d'une fa?on qui vous poussent ? lire la suite du livre et vous ?tent l'envie de le poser. Il y a des fautes de frappe dans le livre et des confusions sur certains noms mais cela ne d?tourne pas le lecteur de l'histoire dans son ensemble. La fin du livre m'a donn? envie de me procurer imm?diatement le tome suivant et c'est ce que j'ai fait. Les neuf tomes de la s?rie de l'Anneau du Sorcier peuvent tous s'acheter d?s maintenant sur la boutique Kindle et, actuellement, vous pouvez commencer par La Qu?te des H?ros, qui est en t?l?chargement gratuit sur cette plate-forme ! Si vous recherchez quelque chose de rapide et d'amusant ? lire pendant que vous ?tes en vacances, ce livre fera parfaitement l'affaire.” --FantasyOnline.net Livres par Morgan Rice ROIS ET SORCIERS LE REVEIL DES DRAGONS (Tome 1) LE REVEIL DES BRAVES (Tome 2) L'ANNEAU DU SORCIER LA QU?TE DES HEROS (Tome n 1) LA MARCHE DES ROIS (Tome n 2) LE DESTIN DES DRAGONS (Tome n 3) UN CRI D'HONNEUR (Tome n 4) UNE PROMESSE DE GLOIRE (Tome n 5) UNE VALEUREUSE CHARGE (Tome n 6) UN RITE D'EPEES (Tome n 7) UNE CONCESSION D'ARMES (Tome n 8) UN CIEL DE CHARMES (Tome n 9) UNE MER DE BOUCLIERS (Tome n 10) LE REGNE DE L'ACIER (Tome n 11) UNE TERRE DE FEU (Tome n 12) LE REGNE DES REINES (Tome n 13) LE SERMENT DES FRERES (Tome n 14) UN REVE DE MORTELS (Tome n 15) UNE JOUTE DE CHEVALIERS (Tome n 16) LE DON DE LA BATAILLE (Tome n 17) LA TRILOGIE DES RESCAPES ARENE UN: SLAVERSUNNERS (Tome n 1) ARENE DEUX (Tome n 2) SOUVENIRS D'UNE VAMPIRE TRANSFORMEE (Tome n 1) AIMEE (Tome n 2) TRAHIE (Tome n 3) PREDESTINEE (Tome n 4) DESIREE (Tome n 5) FIANCEE (Tome n 6) VOUEE (Tome n 7) TROUVEE (Tome n 8) RENEE (Tome n 9) ARDEMMENT DESIREE (Tome n 10) SOUMISE AU DESTIN (Tome n 11) ?coutez la s?rie de L'ANNEAU DU SORCIER en format livre audio ! Copyright © 2013 par Morgan Rice Tous droits r?serv?s. Sauf d?rogations autoris?es par la Loi ?tats-unienne sur le droit d'auteur de 1976, aucune partie de cette publication ne peut ?tre reproduite, distribu?e ou transmise sous quelque forme que ce soit ou par quelque moyen que ce soit, ou stock?e dans une base de donn?es ou syst?me de r?cup?ration, sans l'autorisation pr?alable de l'auteur. Ce livre ?lectronique est r?serv? sous licence ? votre seule jouissance personnelle. Ce livre ?lectronique ne saurait ?tre revendu ou offert ? d'autres gens. Si vous voulez partager ce livre avec une autre personne, veuillez en acheter un exemplaire suppl?mentaire par destinataire. Si vous lisez ce livre sans l'avoir achet?, ou s'il n'a pas ?t? achet? pour votre seule utilisation personnelle, alors, veuillez le renvoyer et acheter votre exemplaire personnel. Merci de respecter le difficile travail de cet auteur. Il s'agit d'une ?uvre de fiction. Les noms, les personnages, les entreprises, les organisations, les lieux, les ?v?nements et les incidents sont le fruit de l'imagination de l'auteur ou sont utilis?s dans un but fictionnel. Toute ressemblance avec des personnes r?elles, vivantes ou mortes, n'est que pure co?ncidence. Image de couverture : Copyright Bob Orsillo, utilis?e en vertu d'une licence accord?e par Shutterstock.com. “Ne vous mettez pas entre le dragon et sa fureur.”     —William Shakespeare     Le Roi Lear CHAPITRE UN Le Roi McCloud chargea en d?valant la pente, traversant les Highlands, p?n?trant dans la partie MacGil de l’Anneau. Des centaines d’hommes le suivaient comme si leur vie en d?pendait pendant que son cheval d?valait la montagne. Il tendit le bras en arri?re, leva son fouet et l’abattit  violemment sur le flanc du cheval, qui n’avait pas besoin d’?tre pouss?, mais le roi aimait jouer du fouet. Il aimait faire souffrir les animaux. La vue qui s’offrait ? McCloud le faisait presque saliver : un village MacGil idyllique, les hommes aux champs et sans armes, leurs femmes ? la maison en train d’?tendre le linge sur les fils, peu v?tues en cette chaleur estivale. Les portes des maisons ?taient ouvertes, les poules se promenaient librement, les chaudrons ?taient d?j? au feu pour le repas du soir. Il pensa aux ravages qu’il s’appr?tait ? faire, au butin qu’il allait amasser, aux femmes qu’il allait d?shonorer, et son sourire s’?largit. Il sentait presque l’odeur du sang qu’il ?tait sur le point de faire couler. Ils charg?rent encore et encore, les pas de leurs chevaux grondant comme le tonnerre et faisant ?cho dans la campagne enti?re et ce n’est qu’alors que quelqu’un les remarqua : la vigie du village, un pi?tre substitut de soldat, un adolescent tenant une lance qui sursauta et se tourna dans leur direction au bruit de leur approche. McCloud le fixa dans le blanc des yeux, vit la peur et la panique s’emparer de son visage; dans cet avant-poste paisible, le gar?on n’avait probablement jamais vu une bataille de sa vie. Et il n’y ?tait absolument pas pr?par?. McCloud ne perdit pas de temps : il voulait ?tre le premier ? tuer, comme toujours sur un champ de bataille. Ses hommes prenaient garde ? ne pas ? lui ?ter ce privil?ge. Il fouetta ? nouveau son cheval jusqu’? ce que ce dernier se mette ? hurler et ? acc?l?rer, se d?tachant du gros de la troupe. Il brandit la lance de son a?eul, un lourd objet en fer, s’inclina en arri?re et la lan?a. Comme toujours, il atteignit son objectif : le gar?on s’?tait tout juste retourn? quand la lance se planta dans son dos, le transper?a et alla se planter dans un arbre avec un sifflement, le gar?on embroch? dessus. Du sang jaillit de son dos et cela suffit ? combler McCloud. McCloud laissa ?chapper un cri de joie alors qu’ils continuaient de charger vers la porte du village sur les terres des MacGil, au travers des champs de ma?s qui se balan?aient au gr? du vent et arrivaient ? hauteur des cuisses de son cheval. C’?tait presque un jour trop beau, un tableau trop plaisant pour la d?vastation qu’ils s’appr?taient ? r?pandre. Ils lanc?rent l’assaut par la porte non prot?g?e du village, dont l’emplacement ? la p?riph?rie de l’Anneau ?tait d’autant plus idiot ?tant donn? la proximit? des Highlands. Ils auraient d? s’y attendre, pensa avec m?pris McCloud alors qu’il faisait voler sa hache et abattait un panneau en bois portant le nom du village. Il trouverait bient?t un nouveau nom. Ses hommes p?n?tr?rent dans l’enceinte et partout autour de lui s’?lev?rent des cris de femmes, d’enfants, de vieillards et de quiconque se trouvait chez lui dans ce coin paum?. Il s’agissait peut-?tre d’une centaine de malchanceux mais McCloud ?tait bien d?cid? ? les faire tous payer. Il brandit sa hache au-dessus de la t?te et se concentra sur une femme en particulier qui lui tournait le dos et qui essayait de sauver sa vie en courant vers la s?curit? de sa maison. Cela ne devait pas se passer ainsi. Comme McCloud l’avait esp?r?, sa hache se planta dans l’arri?re de son mollet et elle s’effondra en hurlant. Il n’avait pas cherch? ? l’abattre : il voulait seulement la mutiler. Il cherchait ? la capturer vivante en vue des plaisirs qu’il prendrait avec elle par la suite. Il l’avait bien choisie : une femme aux longs cheveux blonds en libert? et aux hanches ?troites, ?g?e d’? peine plus de dix-huit ans. Elle serait sienne. Et quand il en aurait fini avec elle, peut-?tre la tuerait-il. Ou peut-?tre pas; peut-?tre en ferait-il son esclave. Arrivant ? sa hauteur, il hurla de joie en sautant de son cheval avant qu'il se soit arr?t? et, quand il lui tomba dessus, il la plaqua au sol. Ils roul?rent dans la poussi?re et, en sentant l’impact du sol, il se mit ? sourire et savoura le plaisir d’?tre en vie. Finalement, la vie avait ? nouveau un sens. CHAPITRE DEUX Dans la Salle des Armes, entour? d’une douzaine de ses fr?res, tous membres aguerris de l'Argent, Kendrick ?tait dans l’?il du cyclone. Il faisait face ? Darloc, le commandant de la garde royale envoy? accomplir une mission malheureuse. A quoi Darloc s’attendait-il donc ? Avait-il vraiment cru pouvoir arriver fi?rement dans la Salle des Armes et arr?ter Kendrick devant tous ses fr?res d’armes, lui, le favori de la famille royale ? Croyait-il r?ellement que les autres resteraient sans r?agir et le laisseraient faire ? Il avait grandement sous-estim? la loyaut? de l'Argent envers Kendrick. M?me si Darloc s’?tait pr?sent? avec des accusations l?gitimes en vue de son accusation, ce qui ?tait loin d’?tre le cas, Kendrick doutait tr?s franchement que ses fr?res l’auraient laiss? l’emmener. Ils ?taient loyaux pour la vie et loyaux jusqu’? la mort. C’?tait le principe de l'Argent. Il r?agirait de la m?me fa?on si l’un de ses fr?res ?tait menac?. Apr?s tout, ils s’?taient entra?n?s et avaient combattu ensemble toute leur vie. Alors que les membres de l'Argent dirigeaient leurs armes vers la petite dizaine de gardes royaux qui, de moins en moins ? l’aise, bougeaient nerveusement sur place, Kendrick sentait que la tension devenait palpable dans le silence pesant. Ils devaient savoir que cela se finirait par un massacre si l’un d’entre eux tentait de d?gainer son ?p?e, chose que, sagement, aucun d’entre eux ne fit. Ils rest?rent immobiles et attendirent les ordres de leur commandant, Darloc. Darloc d?glutit, nerveux. Il comprit que sa mission ?tait vou?e ? l’?chec. “Il semblerait que tu ne sois pas venu avec suffisamment d’hommes”, r?pondit Kendrick avec calme et en souriant. “Une dizaine de Gardes du Roi contre une centaine de membres de l'Argent. Votre cause est perdue d’avance.” Darloc rougit puis devint livide. Il s’?claircit la gorge. “Mon Seigneur, nous servons tous le m?me royaume. Je ne cherche pas ? me battre contre vous. Vous avez raison : nous ne pouvons gagner ce combat. Si vous nous le demandez, nous nous en irons et retournerons aupr?s du Roi. “Cependant, vous savez que Gareth enverra encore plus d’hommes apr?s vous. D’autres hommes. Et vous savez o? cela nous m?nera. Vous les tuerez peut-?tre tous, mais souhaitez-vous vraiment vous retrouver avec le sang de vos fr?res sur les mains ? Voulez-vous r?ellement d?clencher une guerre civile ? Vos hommes sont pr?ts ? risquer leur vie et ? tuer n’importe qui pour vous. Cependant, est-ce juste pour eux ?” Kendrick regarda autour de lui en y r?fl?chissant. Darloc avait raison. Il ne souhaitait voir aucun de ses hommes bless? rien que pour sa propre personne. Il ressentit un ?crasant besoin de les prot?ger de tout carnage, quel qu’en soit le prix ? payer pour lui. Bien que Gareth soit un homme atroce et un mauvais souverain, Kendrick ne souhaitait pas la guerre civile, du moins pas en son nom. Il y avait d’autres alternatives; comme il l’avait appris, la confrontation directe n’?tait pas toujours la m?thode la plus efficace. Kendrick tendit la main vers l’?p?e de son ami Atme et lui fit baisser son arme. Il se retourna et fit face aux autres membres de l'Argent. Il leur ?tait immens?ment reconnaissant d’?tre venus ? son secours. “Mes fr?res de l'Argent !” d?clara-t-il. “Je suis tr?s touch? par votre geste et je vous assure que cela n’est pas en vain. Vous me connaissez tous et vous savez que je n’ai rien ? voir avec la mort de mon p?re, votre pr?c?dent roi. Et lorsque je trouverai son meurtrier, dont je pense conna?tre l’identit? vu la nature de ces actes, je serai le premier ? r?clamer vengeance. On m’accuse ici ? tort. Cela ?tant dit, je ne souhaite pas ?tre l’?l?ment d?clencheur d’une guerre civile. Je vous prie de baisser vos armes. Je vais me rendre dans le calme. Un membre de l’Anneau ne devrait jamais avoir ? se battre contre un autre. Si justice existe, alors, la v?rit? ?clatera et je vous reviendrai sous peu.” Lentement et ? contrec?ur, le groupe de l'Argent baissa ses armes et Kendrick se dirigea vers Darloc. Accompagn? de Darloc, Kendrick se dirigea vers la porte entour? par la Garde Royale. Droit, Kendrick marchait fi?rement au milieu. Darloc n’essaya pas de lui passer les cha?nes, peut-?tre par respect, ou par peur, ou parce qu’il le savait innocent. Kendrick se rendrait lui-m?me vers sa nouvelle prison. Cependant, il ne c?derait pas facilement. D’une fa?on ou d’une autre, il laverait son nom de tout soup?on, il serait lib?r? du cachot et il tuerait le meurtrier de son p?re. M?me s’il s’agissait de son propre fr?re. CHAPITRE TROIS Son fr?re Godfrey ? ses c?t?s, Gwendolyn se trouvait dans les entrailles du ch?teau et regardait fixement Steffen, qui se tenait debout et bougeait nerveusement en se tordant les mains. C’?tait un dr?le de personnage, pas seulement ? cause de sa difformit?, son dos tordu et bossu, mais ?galement parce qu’il semblait habit? par une ?nergie nerveuse. Ses yeux avaient l'air d'?tre sans cesse en mouvement, ses mains serr?es l’une contre l’autre comme s’il ?tait rong? par le remord. Il se balan?ait d’un pied sur l’autre, fredonnant pour lui-m?me d’une voix grave. Gwen se dit que toutes ces ann?es d’isolement ici-bas l’avaient clairement transform? en un ?trange personnage. Gwen attendait avec impatience qu’il s’ouvre, qu’il lui r?v?le ce qui ?tait arriv? ? son p?re. Cependant, les secondes devinrent des minutes, la sueur s’accumula dans les sourcils de Steffen, ses balancements devinrent plus spectaculaires mais rien ne vint. Il n’y avait qu’un silence pesant ponctu? de ses fredonnements. Gwen commen?ait ? se liqu?fier sous l’effet des feux rugissants trop proches en ce jour d’?t?. Elle souhaitait en finir avec tout ceci, quitter cet endroit et ne jamais y revenir. Elle scrutait Steffen en tentant de d?chiffrer son expression, de d?couvrir ce qui se tramait dans son esprit. Il leur avait promis de leur r?v?ler quelque chose mais ?tait devenu silencieux. Alors qu’elle l’examinait, il semblait avoir chang? d’avis. A l’?vidence il avait peur, cachait quelque chose. Steffen s’?claircit enfin la gorge. “Quelque chose est tomb? dans la glissi?re cette nuit-l?, je le reconnais”, commen?a-t-il en ?vitant tout contact direct des yeux, son regard errant sur le sol, “mais je ne suis pas s?r de ce que c’?tait. Quelque chose en m?tal. Nous avons pris le pot de chambre cette nuit-l? et j’ai entendu quelque chose tomber dans la rivi?re. Quelque chose de diff?rent. Donc”, dit-il en s’?claircissant la gorge ? plusieurs reprises tout en se tordant les mains, “vous voyez, quoique cela puisse ?tre, cela a ?t? emport? par le courant.” “En es-tu s?r ?” demanda Godfrey. Steffen approuva vigoureusement de la t?te. Gwen et Godfrey ?chang?rent un regard. “As-tu vu ce que c’?tait, au moins ?” insista Godfrey. Steffen secoua la t?te. “Cependant, tu as parl? d’un poignard. Comment sais-tu qu’il s’agissait d’un poignard si tu ne l’as pas vu ?” demanda Gwen. Elle ?tait certaine qu’il mentait mais elle ne savait pas pourquoi. Steffen se racla la gorge. “J’ai dit ?a parce que j’ai pens? qu’il s’agissait d’un poignard”, r?pondit-il. “C’?tait petit et en m?tal. Qu’est-ce que cela aurait pu ?tre d’autre ?” “Cependant, as-tu regard? au fond du pot ?” demanda Godfrey. “Apr?s l’avoir vid? ? Peut-?tre que l'objet ?tait encore au fond du pot.” Steffen secoua la t?te. “J’ai regard? au fond”, dit-il. “Je le fais toujours. Et il n’y avait rien. Vide. Quel que soit cet objet, il a ?t? emport?. Je l’ai vu partir ? la d?rive.” “Si c’?tait du m?tal, comment pouvait-il flotter ?” demanda Gwen. Steffen se racla la gorge et haussa les ?paules. “La rivi?re est myst?rieuse”, r?pondit-il. “Les courants sont puissants. ” Gwen lan?a un regard sceptique vers Godfrey et son expression lui dit que lui non plus ne croyait pas Steffen. Gwen commen?ait ? perdre patience. A pr?sent, elle ?tait ?galement d?concert?e. Steffen ?tait sur le point de leur r?v?ler quelque chose comme il l’avait promis mais il semblait avoir soudainement chang? d’avis. Gwen fit un pas vers lui et le fusilla du regard, sentant que cet homme avait quelque chose ? cacher. Elle prit son visage le plus dur et faisant cela, sentit la force de son p?re monter en elle. Elle ?tait d?termin?e ? d?couvrir ce qu’il savait, surtout si cela pouvait l’aider ? trouver le meurtrier de son p?re. “Tu mens !” dit-elle d’une voix glaciale, sa force la surprenant elle-m?me. “Sais-tu quel est le ch?timent pour avoir menti ? un membre de la famille royale ?” Steffen se tordit les mains et bondit presque sur place, jetant bri?vement un ?il vers elle avant de d?tourner le regard. “Je suis d?sol?”, dit-il. “Je suis d?sol?. S’il vous pla?t, je n’en sais pas plus.” “Tu nous as demand? si tu pourrais ?viter la prison en nous r?v?lant ce que tu sais”, dit-elle. “Cependant, tu ne nous as rien dit. Pourquoi poser une telle question si tu n’as rien ? nous dire ?” Steffen se passa la langue sur les l?vres tout en gardant le regard vers le sol. “Je… Je… hum”, commen?a-t-il avant de s’arr?ter. Il s’?claircit la gorge. “J’avais peur … d’avoir des ennuis pour n’avoir pas racont? qu’un objet ?tait tomb? de la glissi?re. C’est tout. Je suis d?sol?. Je ne sais pas ce que c’?tait. Et maintenant, il a disparu.” Gwen plissa les yeux, fixa cet ?trange personnage en essayant de percer son myst?re. “Qu’est-il exactement arriv? ? ton ma?tre ?” demanda-t-elle pour ne pas le laisser s’en tirer aussi facilement. “On nous a dit qu’il avait disparu. Et que tu as quelque chose ? voir avec sa disparition.” Steffen secoua la t?te ? plusieurs reprises. “Il est parti”, r?pondit Steffen. “C’est tout ce que je sais. Je suis d?sol?. Je ne sais rien d’utile pour vous.” Soudain, un vacarme retentissant traversa la pi?ce et ils se retourn?rent pour voir des d?chets d?valer la chute et s’?craser dans le gros pot de chambre. Steffen se retourna et courut vers le pot. Il se mit ? c?t? et le regarda se remplir avec les d?chets des chambres sup?rieures. Gwen se retourna vers Godfrey et le regarda. Ce dernier lui rendit son regard. Il semblait tout aussi d?concert? qu’elle. “Quoi qu’il cache”, dit-elle, “il ne le r?v?lera pas.” “Nous pourrions le faire emprisonner”, d?clara Godfrey. “ ?a le ferait peut-?tre parler.” Gwen secoua la t?te. “?a ne marchera pas. Pas avec lui. Il est terroris?, ?a se voit. Je pense que c'est en lien avec son ma?tre. A l’?vidence, quelque chose le tourmente mais je ne pense pas que cela ait un lien avec la mort de notre p?re. Je pense qu’il sait quelque chose qui pourrait nous ?tre utile mais j’ai l’impression que nous n’obtiendrons rien en l’acculant.” “Qu’allons-nous faire, alors ?” demanda Godfrey. Gwen resta plant?e l?, pensive. Elle se souvint d’une amie, lorsqu’elle ?tait petite, qu'on avait surprise ? mentir. Elle se souvint que ses parents avaient fait tout leur possible pour la forcer ? parler, mais sans r?sultat. Ce n’?tait que des semaines plus tard, lorsqu’on l’avait enfin laiss?e tranquille, qu’elle avait volontairement d?cid? d’en parler et de tout raconter. Gwen percevait que la m?me ?nergie ?manait de Steffen. L’acculer ne ferait que le pousser ? se refermer sur lui-m?me. Il avait besoin d’espace pour se confesser selon son bon gr?. “Laissons-lui du temps”, d?cida-t-elle. “Cherchons ailleurs. Voyons ce que nous pouvons trouver et revenons vers lui lorsque nous aurons plus d’?l?ments. Je pense qu’il finira par parler mais qu'il n’est pas encore pr?t.” Gwen se retourna vers lui et le regarda, de l’autre c?t? de la pi?ce, tout absorb? par l’examen les d?chets remplissant le chaudron. Elle ?tait persuad?e qu’il les m?nerait au meurtrier de leur p?re. Elle ne savait pas comment mais elle en ?tait s?re. Elle se demanda quels secrets renfermaient les m?andres de son esprit. Gwen pensa que c’?tait d?cid?ment un ?trange personnage. Tr?s ?trange, en effet. CHAPITRE QUATRE Thor chercha ? respirer tout en essayant de repousser l’eau qui tentait de p?n?trer dans ses yeux, son nez et sa bouche et qui s’abattait en trombes tout autour de lui. Apr?s avoir gliss? sur le bateau, il avait finalement r?ussi ? s’accrocher ? la balustrade en bois et il s’y agrippait de toutes ses forces tandis que l’eau cherchait implacablement ? le faire l?cher. Tous ses muscles tremblaient et il ne savait pas combien de temps il pourrait encore tenir. Tout autour de lui, ses fr?res faisaient de m?me et se cramponnaient de toutes leurs forces ? ce qu’ils pouvaient trouver pour ?viter d’?tre emport?s par les eaux. D’une fa?on ou d’une autre, ils y arriv?rent. Le bruit ?tait assourdissant et il ?tait impossible de voir au-del? de quelques m?tres devant soi. Ils avaient beau ?tre en ?t?, la pluie ?tait particuli?rement froide et l’eau le transper?a d’un frisson que son corps ne put r?primer. Kolk ?tait debout parmi eux, les fusillant du regard, les mains sur les hanches. En apparence imperm?able au mur de pluie, il aboyait des ordres. “RETOURNEZ A VOS PLACES !” hurla-t-il. “RAMEZ !” Kolk lui-m?me prit place et commen?a ? ramer. En quelques instants, les gar?ons gliss?rent et ramp?rent sur le pont en direction des bancs. Le c?ur de Thor martelait dans sa poitrine lorsqu’il l?cha prise et se d?battit pour traverser le pont. A l’int?rieur de sa chemise, Krohn g?mit lorsque Thor glissa et s’?crasa lourdement sur le pont. Il rampa le reste de la distance et se retrouva bient?t ? sa place. “ATTACHE-TOI !” hurla Kolk. Thor baissa les yeux, vit les cordes ? n?uds qui se trouvaient derri?re son banc et comprit alors quelle pouvait ?tre leur utilit? : il se baissa et s'en attacha une au poignet, s’arrimant au banc et ? la rame. Cela fonctionna. Il arr?ta de glisser et put rapidement ramer ? nouveau. Tout autour de lui, les gar?ons reprenaient les rames. Reece prit place en face de Thor, qui sentit que le bateau recommen?ait ? se d?placer. En quelques minutes, le rideau de pluie s'?claircit devant eux. Thor continua de ramer, la peau encore br?lante de cette ?trange pluie et le moindre muscle de son corps endolori. Le bruit de la pluie s’estompa et Thor commen?a ? sentir que la pluie devenait plus l?g?re. En quelques instants, ils se retrouv?rent sous un ciel bleu. Thor regarda autour de lui, abasourdi : tout ?tait sec et lumineux. C’?tait la chose la plus ?trange qu’il ait jamais vue : la moiti? du bateau se trouvait sous un soleil radieux et ?clatant tandis que l’autre moiti? subissait un d?luge pendant qu'ils achevaient leur travers?e du mur de pluie. Enfin, tout le bateau se retrouva sous un beau ciel bleu et sous un soleil qui les assommait de sa chaleur. Tout ?tait silencieux, ? pr?sent. Le mur de pluie avait rapidement disparu et tous ses fr?res d’armes se regardaient les uns les autres, stup?faits. C’?tait comme s’ils avaient travers? un rideau pour p?n?trer dans un autre monde. “REPOS ! ” cria Kolk. Tout autour de Thor, les gar?ons abandonn?rent leurs rames avec un grognement collectif de soulagement, haletants, cherchant ? reprendre leur souffle. Thor fit de m?me, sentant chacun de ses muscles trembler, soulag? de pouvoir faire une pause. Tandis que le bateau d?rivait sur ces nouvelles eaux, il se laissa aller en cherchant ? reprendre son souffle et en essayant de d?tendre ses muscles endoloris. Thor se ressaisit enfin et se redressa pour regarder autour de lui. Il baissa les yeux vers l’eau et vit qu’elle avait chang? de couleur : elle ?tait ? pr?sent d’une couleur rouge l?g?rement brillante. Ils se trouvaient maintenant sur une nouvelle mer. “La Mer des Dragons”, d?clara Reece derri?re lui tout en regardant la mer, ?merveill?. “On dit qu’elle est rouge du sang de ses victimes.” Thor continuait ? regarder. A certains endroits, on voyait des bulles et, au loin, d’?tranges b?tes venaient faire surface avant de replonger. Aucune d’entre elles ne s’attardait suffisamment longtemps pour qu’il puisse bien les observer mais il n’avait pas du tout envie d’essayer de se pencher pour mieux voir. Thor se retourna et prit la mesure de son nouvel environnement, d?sorient?. Ici, de ce c?t? du mur de pluie, tout semblait tellement diff?rent, tellement ?tranger. Il flottait m?me une sorte de brume rouge l?g?re dans l'air, au ras de l’eau. Scrutant l’horizon, il remarqua une douzaine de petites ?les ?parpill?es comme des pierres ? l’horizon. Une forte brise se leva et Kolk s’avan?a en aboyant : “HISSEZ LES VOILES !” Thor passa brusquement ? l’action avec les autres gar?ons. Il attrapa les cordes et hissa les voiles pour profiter de la brise. Les voiles se d?ploy?rent et une bourrasque de vent les gonfla. Thor sentit le bateau se d?placer ? une vitesse surprenante et ils mirent cap sur les ?les. Le bateau naviguait gentiment sur de grosses vagues d?ferlantes qui surgissaient de nulle part. Thor se fraya un passage jusqu’? la proue, s’accouda ? la balustrade et regarda les alentours. Reece le rejoignit et O’Connor fit de m?me. Ils se tenaient c?te ? c?te et Thor regarda la cha?ne d’?les qui se rapprochait rapidement. Ils rest?rent ainsi, silencieux, pendant de longs moments. Thor savourait avec d?lectation les brises humides tandis que son corps se d?tendait. Finalement, Thor comprit qu’ils se dirigeaient vers une ?le en particulier. Elle devint de plus en plus grande et un frisson parcourut Thor lorsqu’il comprit que c'?tait leur destination. “L’?le des Brumes”, laissa ?chapper Reece, admiratif. Thor ?tait ?bahi. Sa forme se fit plus nette. Elle ?tait rocheuse, escarp?e et nue. Elle s’?tendait sur plusieurs kilom?tres dans chaque direction, longue et ?troite, en forme de fer ? cheval. Les grosses vagues qui venaient s’?craser sur ses rivages grondaient malgr? la distance et formaient de grands jets d’?cume en s’?crasant sur les ?normes rochers. Une minuscule bande de terre se trouvait derri?re les rochers, au pied d’une gigantesque falaise qui se dressait droit vers le ciel. Thor ne voyait pas bien comment leur bateau pourrait accoster en s?curit?. Venant renforcer l’?tranget? de l’endroit, une brume rouge?tre flottait sur l’?le comme une sorte de ros?e luisant dans la lumi?re du soleil. Cela donnait une impression de mauvais augure. Thor sentait que quelque chose d'inhumain et de surnaturel hantait cet endroit. “On dit que cet endroit est vieux de plusieurs millions d’ann?es”, ajouta O’Connor. “Cet endroit serait plus vieux que l’Anneau. Plus vieux m?me que l’Empire.” “Cet endroit appartient aux dragons”, rench?rit Elden en rejoignant Reece. Alors que Thor observait l’?le, le second soleil disparut soudain du ciel. Subitement, le jour ensoleill? et radieux devint coucher de soleil et le ciel se para de couleurs rouges et violac?es. Thor n’arrivait pas ? y croire : il n’avait jamais vu le soleil se d?placer aussi rapidement. Il se demanda quelles autres choses pouvaient encore ?tre diff?rentes dans cette partie du monde. “Est-ce qu’un dragon vit sur cette ?le ?” demanda Thor. Elden secoua la t?te. “Non. J’ai entendu dire qu’il n’habite pas loin. On dit que la brume rouge na?t du souffle du dragon. Il respire la nuit sur une ?le voisine et c’est le vent qui la transporte et enveloppe l’?le durant le jour.” Thor entendit soudain un bruit. Au d?but, on aurait dit un grondement, comme de l’orage, suffisamment long et puissant pour faire trembler le bateau. Encore cach? dans sa chemise, Krohn se ratatina et g?mit. Comme Thor, les autres se retourn?rent et regard?rent au loin. Quelque part ? l’horizon, il lui sembla apercevoir le contour incertain de flammes qui l?ch?rent le soleil couchant puis disparurent en laissant place ? une fum?e noire comme celle d’un volcan en ?ruption. “Le Dragon”, dit Reece. “Nous sommes sur son territoire, ? pr?sent.” Thor d?glutit, pensif. “Mais comment pouvons-nous ?tre en s?curit? ici ?” demanda O’Connor. “Vous n’?tes en s?curit? nulle part”, r?pondit une voix retentissante. Thor se retourna et d?couvrit Kolk qui, debout et les mains sur les hanches, regardait l’horizon par-dessus leurs ?paules. “C’est l’engagement des Cent Jours : vivre avec le risque de p?rir chaque jour qui passe. Ceci n’est pas un exercice. Le dragon vit tout pr?s d’ici et rien ne pourra l’emp?cher d’attaquer. Normalement, il ne devrait pas nous attaquer car il garde jalousement son tr?sor sur son ?le et les dragons n’aiment pas laisser leur tr?sor sans surveillance. Cependant, vous entendrez ses grondements et verrez ses flammes la nuit. Et si nous l’irritons d’une quelconque fa?on, je ne peux vous garantir ce qu’il adviendra de nous.” Thor entendit un autre grondement sourd, aper?ut un nouvel embrasement ? l’horizon et observa les vagues s’?craser sur l’?le tandis qu’ils s’approchaient de l’?le. Il leva les yeux vers les falaises abruptes, qui ?taient un v?ritable mur de roches, et se demanda comment ils allaient faire pour atteindre le sommet et rejoindre la partie plate et aride. “Le probl?me, c'est que je ne vois aucun lieu o? accoster avec le bateau”, dit Thor. “Ce serait trop facile”, r?pondit Kolk. “Dans ce cas, comment allons-nous prendre pied sur l’?le ?” questionna O’Connor. Kolk fit un sourire machiav?lique. “Tu sais nager”, dit-il. L’espace d’un instant, Thor se demanda s’il plaisantait, mais, d’apr?s son expression, il comprit rapidement que tel n’?tait pas le cas. Thor d?glutit. “A la nage ?” r?pondit en ?cho Reece, abasourdi. “Ces eaux grouillent de cr?atures !” s’?cria Elden. “Oh, c'est le cadet de vos soucis !” continua Kolk. “Les courants ici sont tra?tres, ces tourbillons vous aspireront, ces vagues vous ?craseront sur ces rochers escarp?s, l’eau est chaude et, si vous parvenez ? ces rochers, il vous faudra trouver un moyen d’escalader ces falaises afin d’atteindre la terre aride. Si les cr?atures de la mer ne vous attrapent pas avant, bien s?r. Bienvenue dans votre nouvelle maison.” Thor se tint l?, parmi les autres, comme p?trifi?, accoud? ? la balustrade et regardant les eaux ?cumeuses en dessous de lui. L’eau tourbillonnait sous ses yeux comme un ?tre vivant. Le courant s’intensifiait ? chaque instant en agitant le bateau. Il ?tait difficile de garder son ?quilibre. En dessous, les eaux s’agitaient, remuaient ce rouge brillant qui semblait renfermer le sang de l’enfer m?me et, pire que tout, en y regardant de plus pr?s, Thor se rendit compte que des monstres des mers faisaient surface tous les quelques m?tres en faisant claquer leurs dents avant de replonger. Leur bateau jeta soudainement l’ancre tr?s loin du rivage et Thor eut du mal ? avaler sa salive. Il leva les yeux vers les rochers qui encerclaient l’?le et se demanda comment ils pourraient bien faire pour les atteindre. Le bruit des vagues se renfor?a et les for?a ? crier pour se faire comprendre. Quelques petites barques furent mises ? l’eau et les commandants les emmen?rent ? bonne distance du navire, ? une trentaine de m?tres du bateau. Cela ne leur faciliterait pas la t?che : il leur faudrait nager pour les atteindre. Rien qu’? cette pens?e, le ventre de Thor se noua. “SAUTEZ !” cria Kolk. Pour la premi?re fois, Thor eut peur. Il se demanda si cela le diminuait en tant que membre de la L?gion, en tant que guerrier. Il savait bien que les guerriers ne devaient jamais se laisser gagner par la peur mais il lui fallut reconna?tre que, l?, il avait vraiment peur. Il d?testait ?a et souhaitait de tout c?ur qu’il puisse en ?tre autrement. Pourtant, il ?tait terrifi?. En regardant autour de lui, Thor vit les visages horrifi?s des autres gar?ons et se sentit mieux. Tout autour de lui, les gar?ons se pressaient ? la balustrade en fixant les eaux, fig?s par la peur. Un gar?on en particulier semblait tellement terrifi? qu’il en tremblait. Il s’agissait du gar?on du jour des boucliers, celui qui avait eu peur et que l’on avait forc? ? faire des tours de piste. Kolk dut s’en rendre compte car il traversa le bateau en se dirigeant droit sur lui. Kolk ne semblait pas d?rang? par le vent puissant qui repoussait ses cheveux en arri?re. Ses grimaces lui donnaient l’air d’?tre pr?t ? conqu?rir la terre enti?re. Il arriva droit sur le gar?on et le transper?a du regard. “SAUTE !” hurla Kolk. “Non !” r?pondit le gar?on. “Je ne peux pas ! Je ne le ferai pas ! Je ne sais pas nager ! Ramenez-moi chez moi !” Alors que le gar?on commen?ait ? s’?carter de la balustrade, Kolk l’attrapa par le dos de la chemise et le souleva haut au-dessus du pont. “Alors, il va falloir apprendre ? nager !” gronda Kolk et, au grand d?sarroi de Thor, il lan?a le pauvre gar?on par-dessus bord. Le gar?on vola dans les airs en hurlant et se retrouva dans l’eau ?cumeuse cinq m?tres plus bas. Il fit un gros plat, flotta ? la surface en se d?battant et en cherchant de l’air. “A L’AIDE !” hurla-t-il. “Quelle est la premi?re loi de la L?gion ?” hurla Kolk en se tournant vers les autres gar?ons qui ?taient encore ? bord du bateau sans tenir compte du gar?on qui se d?battait dans l’eau. Thor connaissait vaguement la bonne r?ponse mais il ?tait trop distrait par la vue du gar?on qui ?tait en train de se noyer sous ses yeux pour r?pondre. “Il faut aider un membre de la L?gion qui est dans le besoin !” cria Elden en retour. “Et est-il dans le besoin ?” cria Kolk en montrant le gar?on du doigt. Ce dernier levait les bras, ?mergeant de temps ? autre hors de l’eau tandis que le reste des gar?ons l’observait depuis le pont, trop effray?s pour plonger ? son secours. A cet instant, Thor ressentit quelque chose de bizarre. Quand il se concentra sur le gar?on qui ?tait en train de se noyer, soudain, plus rien n’eut d’importance. Thor cessa de penser ? sa propre personne. Le fait qu’il puisse mourir ne traversa pas son esprit. La mer, les monstres, les courants … tout disparut. Il ne pouvait plus penser qu'? secourir cette personne. Thor se mit debout sur la large balustrade de ch?ne, plia les genoux et, sans r?fl?chir, il plongea haut en l'air, fon?ant la t?te la premi?re vers les eaux rouges bouillonnantes. CHAPITRE CINQ Gareth ?tait assis sur le tr?ne de son p?re dans la grande salle du ch?teau. Il passait les mains sur les bras en bois lisse du tr?ne et regardait la sc?ne qui se d?roulait sous ses yeux. Des milliers de ses sujets s’?taient rassembl?s dans la salle. Les gens affluaient de tous les coins de l’Anneau pour ?tre t?moins de cet ?v?nement unique, pour voir s’il serait ? m?me de lever l’?p?e de la Dynastie. Pour voir s’il ?tait l’?lu. Le peuple n’avait pas eu l’occasion d’assister ? une c?r?monie de levage d’?p?e depuis celle de son p?re lorsqu’il ?tait jeune, et personne ne voulait rater cela. L’excitation ?tait palpable. Gareth ?tait lui-m?me engourdi d’impatience. En voyant la salle se remplir et de plus en plus de personnes s’amasser ? l’int?rieur, il commen?a ? se demander si les conseillers de son p?re avaient eu raison, si c'?tait effectivement une mauvaise id?e que le levage de l’?p?e se tienne dans la grande salle du ch?teau et soit ouvert au public. Ils lui avaient vivement conseill? qu'il ait lieu dans la petite Chambre de l’?p?e, une salle priv?e. Ils avaient avanc? qu’en cas d’?chec il y aurait alors peu de t?moins. Cependant, Gareth ne faisait pas confiance aux serviteurs de son p?re. Il avait plus confiance en son propre destin que la vieille garde de son p?re et il souhaitait que le royaume entier soit t?moin de sa r?ussite, que tout le monde voit de ses propres yeux que c’?tait lui l’?lu. Il voulait que ce moment soit inscrit dans l’histoire. Le moment o? son destin s’ouvrirait ? lui. Gareth p?n?tra dans la salle avec ?l?gance, se pavanant au milieu de ses conseillers, v?tu de sa couronne et de sa cape et brandissant son sceptre. Il voulait que chacun sache que le vrai Roi, le vrai MacGil, c'?tait lui, pas son p?re. Comme il s’y attendait, cela ne lui avait pas pris longtemps pour se sentir chez lui dans ce ch?teau, pour qu’il sente que les sujets lui appartenaient. Il voulait ? pr?sent que le peuple le ressente aussi, qu’il soit t?moin de cette d?monstration de pouvoir. Apr?s ce jour, ils sauraient tous qu’il ?tait leur seul et unique roi. Cependant, maintenant, Gareth se tenait assis seul sur le tr?ne en regardant les deux reposoirs en fer vides au centre de la salle, ?clair?s par un rayon de soleil descendant du plafond. L'?p?e y serait d?pos?e plus tard et Gareth n’?tait plus tr?s s?r de lui. L’importance de ce qu’il s’appr?tait ? faire l'accablait soudain. Ce serait une ?tape irr?versible, il n’y aurait pas de retour en arri?re possible et que se passerait-il s'il ?chouait effectivement ? Il s'effor?a de ne plus y penser. A l’extr?mit? de la salle, la lourde porte s’ouvrit avec un craquement et un silence enthousiaste s’abattit sur la salle impatiente. Douze des hommes les plus forts de la cour s’avanc?rent en pliant sous le poids de la lourde ?p?e qu’ils portaient. Six hommes se trouvaient de chaque c?t? et ils marchaient lentement, pas ? pas, vers le lieu o? reposerait l’?p?e. Le c?ur de Gareth battait plus vite au fur et ? mesure que l’?p?e se rapprochait. L’espace d’un court instant, sa confiance vacilla : si ces douze hommes, les plus forts qu’il ait jamais vus, pouvaient ? peine soutenir le poids de l’?p?e, alors, quelles ?taient ses chances ? N?anmoins, il tenta de repousser cette id?e. Apr?s tout, soulever l’?p?e ?tait une question de destin?e, pas de force. Il s'obligea ? se souvenir que son destin ?tait de se trouver ici en ce jour, qu’il ?tait l’a?n? des MacGil, qu’il devait ?tre Roi. Il rechercha Argon dans la foule car il ressentit soudainement le besoin de prendre conseil aupr?s de ce dernier. C’?tait vraiment le moment o? il aurait eu besoin de lui. Bizarrement, il n’arrivait pas penser ? personne d’autre. Argon resta ?videmment introuvable. Les douze hommes atteignirent finalement le centre de la salle. Portant l’?p?e dans les rayons de soleil, ils la plac?rent sur les reposoirs en fer. Elle retomba avec un bruit retentissant et le son se r?percuta dans toute la salle. Un silence total s’installa. La foule d?gagea instinctivement une voie pour que Gareth vienne soulever l'?p?e. Gareth se leva lentement de son tr?ne, savourant l’instant, aimant ?tre le centre de toute cette attention. Il sentait les regards se porter sur lui. Il savait qu’un moment comme celui-l?, un moment o? le royaume entier aurait le regard tourn? vers lui d’une fa?on aussi intense et profonde, ? d?tailler le moindre de ses gestes, ne se repr?senterait pas. Il s’?tait imagin? cet instant tellement souvent depuis sa plus tendre enfance, et voici qu’il ?tait enfin venu. Il voulait que les choses se d?roulent lentement. Il descendit les marches du tr?ne, une ? une, savourant chaque pas. Il marcha sur le tapis rouge, savourant le moelleux sous ses pieds, se rapprochant petit ? petit de la tache de lumi?re, de plus en plus pr?s de l’?p?e. En marchant ainsi, il eut l’impression d’?tre dans un r?ve. Il se sentit s?par? de son corps. Une partie de lui avait l’impression d’avoir march? sur ce tapis des millions de fois dans ses r?ves pour lever l’?p?e. Cela lui donna l’impression de n’avoir d’autre choix que de lever l’?p?e, qu’il ?tait en train de marcher vers sa destin?e. Il entrevit comment cela allait se d?rouler : il s’avancerait fi?rement, tendrait une main et ses sujets se courberaient lorsqu’il brandirait soudainement et de fa?on spectaculaire son ?p?e au-dessus de sa t?te. Cela leur couperait le souffle et ils tomberaient face contre terre en le reconnaissant comme l’?lu, le plus important des rois MacGil ayant jamais r?gn?, celui qui r?gnerait pour toujours. Tout le monde en pleurerait de joie. Ils trembleraient de peur devant lui. Ils remercieraient Dieu d’avoir eu la chance de vivre ? cette ?poque et d’avoir ?t? t?moins de cet ?v?nement. Ils le v?n?reraient comme un dieu. Gareth s’approcha de l’?p?e. Maintenant, il n’?tait plus qu’? quelques pas et se sentait frissonner int?rieurement. En p?n?trant dans le cercle de lumi?re et bien qu’ayant d?j? vu l’?p?e ? maintes reprises, il fut frapp? par sa beaut?. Il n’avait jamais ?t? autoris? ? s’en approcher aussi pr?s avant ce jour et il fut stup?fait. C'?tait un moment intense. Elle ?tait faite d’une longue lame ?tincelante et d’un mat?riau impossible ? identifier. Gareth n’avait jamais vu de poign?e aussi travaill?e. Incrust?e de joyaux de toutes sortes et portant le blason du faucon, elle ?tait prot?g?e par un tissu semblable ? de la soie. Il se rapprocha d’un pas et se pencha au-dessus. Il sentit la puissante ?nergie qui en ?manait. L’?p?e semblait vibrer. Il avait peine ?  respirer. Dans un instant, il la tiendrait dans la main. Bien haut au-dessus de sa t?te. ?tincelante dans la lumi?re du jour pour que le monde entier le voie. Lui, Gareth, Le Grand. Gareth s’approcha et pla?a la main droite sur la poign?e. Il referma lentement les doigts dessus, sentit le moindre joyau, le moindre relief lorsqu’il s’en saisit, ?lectrifi?. Une ?nergie intense lui irradia la paume, lui remonta dans le bras et lui parcourut le corps. C’?tait tellement diff?rent de ce qu’il s’?tait toujours imagin?. Son moment ?tait enfin venu. Le meilleur moment de sa vie. Gareth ne voulait courir aucun risque : il se baissa et referma ?galement son autre main sur la poign?e. Il ferma les yeux et respira profond?ment. Si les dieux le veulent, laissez-moi lever cette ?p?e. Envoyez-moi un signe. Montrez-moi que je suis le Roi. Montrez-moi que ma destin?e est de r?gner. Gareth pria en silence, attendant une r?ponse, un signe indiquant l’instant parfait, mais les secondes d?fil?rent, une bonne dizaine, pendant que le royaume entier l’observait, les yeux braqu?s sur lui. Puis, soudain, il vit le visage de son p?re qui le fixait lui aussi. Sous l’effet de la terreur, Gareth ouvrit les yeux, cherchant ? chasser cette image de son esprit. Son c?ur se mit ? battre plus vite et il interpr?ta cela comme un tr?s mauvais pr?sage. C’?tait maintenant ou jamais. Gareth se pencha et, de toute sa volont?, il tenta de soulever l’?p?e. Il lutta de toutes ses forces jusqu’? ce que son corps en tremble et se torde. Cependant, l’?p?e n’avait pas boug?. C’?tait comme tenter de faire bouger les fondements de la terre. Gareth s’acharna encore et encore. Finalement il se mit ? g?mir et ? crier. Puis, quelques instants plus tard, il se laissa tomber au sol. La lame n’avait pas boug? d’un pouce. Un sursaut parcourut l’assistance quand il heurta le sol. Quelques conseillers se pr?cipit?rent pour l’aider et voir s’il allait bien mais il les repoussa violemment. Extr?mement g?n?, il se redressa et se remit sur ses deux pieds. Gareth, humili?, regarda ses sujets, cherchant ? savoir comment ils allaient le consid?rer ? pr?sent. Ils avaient d?j? commenc? ? partir, se h?tant de quitter la salle. Gareth voyait la d?ception qui se lisait sur leur visage, voyait qu'il n'?tait qu'un spectacle d?cevant de plus pour eux. Maintenant, ils savaient tous qu’il n’?tait pas leur vrai roi. Ce n’?tait pas lui le MacGil cens? r?gner. Il n’?tait rien. Seulement un prince ordinaire qui avait usurp? le tr?ne. Gareth se sentit d?vor? par la honte. Il ne s’?tait jamais senti aussi seul de sa vie. Tout ce qu’il s’?tait imagin? depuis son enfance n’?tait qu’un tissu de mensonges. Une illusion. Il avait cru ? sa propre fable. Et cela l’avait bris?. CHAPITRE SIX Gareth faisait les cent pas dans sa chambre, l’esprit en ?bullition, encore sous le choc de son ?chec. Il n'avait pas r?ussi ? lever l’?p?e et essayait d’envisager quelles pourraient en ?tre les cons?quences. Il se sentait engourdi. Il n’en revenait pas d’avoir ?t? aussi b?te, d’avoir essay? de lever l’?p?e, l’?p?e de la Dynastie, qu’aucun MacGil n’avait ?t? capable de lever depuis sept g?n?rations. Pourquoi en ?tait-il venu ? penser qu’il serait meilleur que ses anc?tres ? Pourquoi avait-il pens? ?tre diff?rent ? Il aurait d? le savoir. Il aurait d? ?tre plus prudent et n’aurait jamais d? se surestimer. Il aurait simplement d? se satisfaire du tr?ne de son p?re. Pourquoi avait-il voulu en avoir plus ? A pr?sent, tous ses sujets savaient qu’il n’?tait pas l’?lu. Son r?gne serait d?sormais entach? par cela; maintenant, ils auraient peut-?tre m?me encore plus de raisons de le suspecter de la mort de son p?re. Il se rendait bien compte que les gens le regardaient d?j? d’une fa?on diff?rente, comme s’il n’?tait qu’un spectre, comme s’ils se pr?paraient d?j? ? la venue du prochain roi. Pire que ?a, pour la premi?re fois de sa vie, Gareth n’?tait pas s?r de lui. Toute sa vie, il avait toujours vu son destin de fa?on claire. Il ?tait persuad? que son r?le ?tait de prendre la place de son p?re, de r?gner et de lever l’?p?e. Sa confiance venait d’?tre ?branl?e jusqu’? la moelle. A pr?sent, il n’?tait plus s?r de rien. Et le pire de tout ?a, c’?tait qu’il ne pouvait oublier la vision du visage de son p?re qu'il avait eue juste avant d'essayer de lever l’?p?e. S’agissait-il de sa vengeance ? “Bravo !” dit lentement une voix sarcastique. Gareth se retourna, surpris de ne pas ?tre seul dans sa chambre. Il reconnut instantan?ment la voix, une voix qui ?tait devenue trop famili?re au fil des ans et qu’il avait fini par m?priser. Il s’agissait de la voix de sa femme. H?l?na. La voil? qui se tenait dans un coin de la pi?ce, qui l’observait tout en fumant sa pipe d’opium. Elle inspira profond?ment, retint son souffle et laissa lentement s’?chapper la fum?e. Ses yeux ?taient inject?s de sang et il se rendit compte qu’elle fumait depuis trop longtemps. “Que fais-tu l? ?” demanda-t-il. “C’est ma chambre nuptiale, apr?s tout !” r?pondit-elle. “Je peux faire tout ce que je veux, ici. Je suis ? la fois ta femme et ta reine. Ne l’oublie pas. Je r?gne sur ce royaume autant que toi. Et apr?s ta d?b?cle d’aujourd’hui, je pense qu'il faut utiliser le terme r?gner de fa?on tr?s large.” Le visage de Gareth s’empourpra. H?l?na avait le don de l’attaquer de la fa?on la plus basse possible et aux moments les plus inopportuns. Il la m?prisait plus que n’importe quelle autre femme qu’il ait jamais rencontr?e. Il avait peine ? concevoir qu’il avait un jour accept? de l’?pouser. “Vraiment ?” cracha Gareth en se retournant et en marchant droit vers elle, furieux. “Tu sembles oublier que je suis ton Roi, esp?ce de gueuse, et que je pourrais te faire jeter en prison tout comme n’importe qui d’autre dans mon royaume. Que tu sois ma femme n'y change rien.” Elle lui rit au nez, en reniflant de fa?on cynique. “Et alors ?” l?cha-t-elle. “Tes nouveaux sujets se posent-ils des questions sur ta sexualit? ? Non, j’en doute tr?s fortement. Pas dans le monde machiav?lique de Gareth. Pas dans l’esprit de l’homme qui se soucie plus que quiconque de la fa?on dont les gens le per?oivent.” Gareth s’arr?ta devant elle, comprenant qu’elle voyait en lui d’une fa?on qu’il n’aimait pas. Il prit conscience de la menace qu'elle repr?sentait et comprit que se battre avec elle n’arrangerait rien. Il resta donc ainsi, sans rien dire, les poings serr?s. “Que veux-tu ?” demanda-t-il lentement en essayant de se contr?ler pour ne rien faire d’irr?fl?chi. “Tu ne viens jamais me voir que quand tu as besoin de quelque chose.” Elle eut un rire moqueur et sec. “Je prendrai ce dont j’ai envie. Je ne suis pas venue te demander quoi que ce soit, mais plut?t pour te dire quelque chose : ton royaume entier vient d’?tre t?moin de ton ?chec ? lever l’?p?e. O? cela nous m?ne-t-il ?” “Qu’entends-tu par nous ?” questionna-t-il en se demandant o? elle voulait en venir. “Ton peuple sait d?sormais ce que j’ai toujours su : que tu es un rat?. Que tu n’es pas l’?lu. F?licitations. Au moins, c’est officiel, maintenant.” Il la fusilla du regard. “Mon p?re n’a pas non plus r?ussi ? lever l’?p?e. Cela ne l’a pas emp?ch? de r?gner efficacement en tant que Roi.” “Cependant, son r?gne en a ?t? affect?”, cracha-t-elle. “Tout du long.” “Si tu n’es pas contente de mes incapacit?s”, fulmina Gareth, “pourquoi ne pars-tu pas de cet endroit ? Laisse-moi ! Arr?te de te moquer de notre mariage. Je suis le Roi, d?sormais. Je n’ai plus besoin de toi.” “Je suis contente que tu abordes ce point”, dit-elle, “car il s’agit pr?cis?ment de la raison de ma venue. Je veux officiellement mettre fin ? notre mariage. Je veux divorcer. J’aime un autre homme. Un vrai homme. Un de tes chevaliers, pour tout dire. C’est un guerrier, lui. Nous nous aimons d'un amour vrai. A l’inverse de tout ce que j’ai pu conna?tre jusqu’? pr?sent. Divor?ons pour que je puisse arr?ter de me cacher. Je veux que notre amour soit rendu public et je veux l’?pouser.” Gareth la regarda, choqu?, vid?, comme si l’on venait de lui enfoncer un poignard dans la poitrine. Pourquoi fallait-il que H?l?na fasse ces r?v?lations ? Pourquoi maintenant plut?t qu’? un autre moment ? C’en ?tait trop pour lui. Il avait l'impression que le monde lui donnait des coups de pied pendant qu'il ?tait ? terre. Malgr? lui, Gareth fut surpris de r?aliser qu’il ?prouvait des sentiments profonds envers H?l?na car entendre ces mots, l’entendre demander le divorce lui porta un coup. Il en fut boulevers?. A contrec?ur, il comprit qu’il ne voulait pas divorcer. Si encore cela venait de lui, mais cela venait d’elle ! Il ne voulait pas qu’elle obtienne ce qu'elle voulait aussi facilement. Et par-dessus tout, il se demandait quelles cons?quences un divorce pourrait avoir sur son r?gne. Un Roi divorc?, cela soul?verait trop de questions. Et malgr? lui, il se sentait jaloux de ce chevalier. Qu'elle lui agite son manque de masculinit? sous le nez le rendait amer. Il voulait se venger. D'elle et de lui. “Tu ne l’obtiendras pas”, cracha-t-il. “Tu es li?e ? moi. Tu seras ma femme pour toujours. Tu ne seras jamais libre. Et si jamais je croise ce chevalier avec qui tu me trompes, je le ferai torturer et ex?cuter.” H?l?na lui adressa un grognement. “Je ne suis pas ta femme ! Tu n’es pas mon mari. Tu n’es m?me pas un homme. Notre union est un p?ch?. Et cela l’a toujours ?t? depuis le jour o? il en a ?t? d?cid? ainsi. Il ne s’agissait que d’un arrangement pour le pouvoir. Cette chose me d?go?te, m'a toujours d?go?t?e et a ruin? ma seule chance d’?tre un jour mari?e pour de vrai.” Elle inspira. Elle ?tait de plus en plus furieuse. “Tu m’accorderas le divorce ou je r?v?lerai au royaume entier le genre d’homme que tu es. A toi de voir.” Sur ce, H?l?na lui tourna le dos, traversa la pi?ce et sortit par la porte ouverte sans prendre la peine de la refermer derri?re elle. Gareth de retrouva seul dans la chambre. Il ?couta l’?cho de ses pas et sentit un frisson qu’il ne pouvait ma?triser envahir son corps. Y avait-il dans sa vie une seule chose de stable ? laquelle il puisse se raccrocher ? Gareth se tenait debout, en train de regarder la porte ouverte en tremblant, et il fut surpris de voir une autre personne p?n?trer dans la chambre. A peine avait-il eu le temps de prendre la mesure de sa conversation avec H?l?na, d’analyser toutes ses menaces, qu’un visage on ne peut plus familier se pr?sentait dans l’encadrement de la porte. Firth. Le bruit r?gulier de ses pas cessa lorsqu’il entra dans la pi?ce, un air coupable sur le visage. “Gareth ?” demanda-t-il d’une voix incertaine. Firth le regardait les yeux ?carquill?s et Gareth put voir ? quel point il se sentait mal ? l’aise. Il avait bien raison de se sentir mal ? l’aise, pensa Gareth. Apr?s tout, c’?tait Firth qui l’avait encourag? ? brandir l’?p?e, qui l’avait convaincu, qui l’avait amen? ? penser qu’il ?tait plus que ce qu’il ?tait vraiment. Sans les suggestions de Firth, qui sait ? Peut-?tre que Gareth n’aurait jamais tent? de lever l’?p?e. Gareth se tourna vers lui, bouillonnant. Il venait de trouver en la personne de Firth un exutoire ? toute sa col?re. Apr?s tout, c’?tait bien Firth qui avait tu? son p?re. Pour commencer, c’?tait Firth, ce stupide gar?on d’?curie, qui l’avait entra?n? dans ce p?trin. D?sormais, il n’?tait qu’un successeur rat? de plus dans la lign?e des MacGil. “Je te hais”, bouillonna Gareth. “O? en sont tes promesses, ? pr?sent ? Es-tu encore persuad? que je vais r?ussir ? lever l’?p?e ?” Firth d?glutit. Il avait l’air particuli?rement nerveux. Il ?tait sans voix. A l’?vidence, il n’avait rien ? dire. “Je suis d?sol?, Monseigneur !” dit-il. “J’avais tort.” “Tu t’es tromp? sur beaucoup de choses !” cracha Gareth. En effet, plus Gareth y pensait, plus il venait ? r?aliser ? quel point Firth avait pu se tromper. En fait, sans Firth, son p?re serait toujours en vie aujourd’hui et Gareth ne se serait pas retrouv? dans un tel p?trin. Le poids de la royaut? ne lui p?serait pas sur la t?te, toutes les choses ne partiraient pas ainsi de travers. Gareth souhaitait retrouver les jours plus simples de l'?poque o? il n’?tait pas encore Roi, lorsque son p?re ?tait encore en vie. Il eut brusquement envie de les faire tous revenir, de retrouver les choses telles qu’elles ?taient, mais il ne pouvait pas, et c'?tait la faute de Firth. “Que fais-tu ici ?” l’interrogea Gareth. Firth s’?claircit la gorge, visiblement tr?s nerveux. “J’ai entendu … des rumeurs … des serviteurs murmurer. Il est remont? jusqu’? moi que vos fr?res et s?urs se posent des questions. Ils ont ?t? vus dans les quartiers des serviteurs. Ils s’int?ressaient de pr?s au vide-ordures et recherchaient l’arme du meurtre. Le poignard que j’ai utilis? pour tuer votre p?re.” A ces mots Gareth se gla?a. Il ?tait fig? par la peur et sous le choc. Est-ce que ce jour pouvait encore empirer ? Il se racla la gorge. “Et qu’ont-ils trouv? ?” demanda-t-il la gorge s?che, les mots peinant ? sortir. Firth secoua la t?te. “Je ne sais pas, Monseigneur. Tout ce que je sais, c’est qu’ils suspectent quelque chose.” Gareth sentit sa haine envers Firth s’accro?tre, une haine dont il ne se pensait pas capable. Si Firth n’avait pas ?t? aussi b?te, s’il s’?tait proprement d?barrass? de l’arme, Gareth ne se serait pas retrouv? dans cette position. Firth le mettait dans une position vuln?rable. “Je ne le dirai qu’une fois”, dit Gareth en se rapprochant de Firth, se plantant devant lui avec le regard le plus mauvais dont il ?tait capable. “Je ne veux plus jamais revoir ta t?te. Tu m’entends ? Disparais et ne reviens jamais. Je vais t’envoyer loin d’ici. Et si jamais tu remets un jour les pieds entre les murs de ce ch?teau, sois s?r que je te ferai arr?ter. “A PR?SENT, VA-T’EN !” s’?poumona Gareth. Fondant en larmes, Firth tourna les talons et partit en courant, le bruit de ses pas r?sonnant longtemps apr?s qu’il eut disparu dans le couloir. Les pens?es de Gareth revinrent vers l’?p?e et son ?chec. Il ne pouvait se d?barrasser de l'impression qu'il avait d?clench? une terrible catastrophe ? son encontre. Il avait la sensation de s’?tre jet? depuis le haut d’une falaise et qu’? partir de cette journ?e le reste de sa vie ne serait qu’une longue descente. Il resta ainsi, ancr? au sol en pierre dans l’implacable silence de la chambre de son p?re, ? trembler et se demander ce qu’il avait bien pu d?clencher. Il ne s’?tait jamais senti aussi seul, il n’avait jamais autant dout? de lui-m?me. ?tait-ce donc cela ?tre roi ? * Gareth se h?ta dans l’escalier en colima?on en pierre, encha?nant les ?tages, se d?p?chant de rejoindre le parapet le plus ?lev? du ch?teau. Il avait besoin d’air. Il avait besoin de temps et d’espace pour r?fl?chir. Il avait besoin d’un point de vue sur son royaume, d'une chance d’apercevoir sa cour, son peuple et de se rappeler que tout cela lui appartenait. Malgr? les ?v?nements cauchemardesques de la journ?e, il ?tait encore roi. Gareth avait cong?di? tous ses domestiques et gravissait seul les escaliers en respirant fort. Il s’arr?ta ? un ?tage, se courba et chercha ? reprendre son souffle. Des larmes roulaient sur ses joues. A chaque ?tage, il avait l’impression de voir le visage de son p?re le fusiller du regard. “Je te d?teste !” cria-t-il dans le vide. Il aurait jur? entendre un rire moqueur en retour. Le rire de son p?re. Gareth avait besoin de s’?chapper de cet endroit. Il tourna les talons et continua sa course jusqu’? ce qu'il finisse par atteindre le sommet. Il jaillit par la porte et la brise fra?che estivale lui frappa le visage. Il inspira profond?ment tout en reprenant son souffle au soleil, savourant les chaudes brises. Il ?ta sa cape, celle de son p?re, et la jeta au sol. Il faisait trop chaud et il ne voulait plus avoir ? la porter. Il se pr?cipita au bord du parapet et s’agrippa au mur de pierre en respirant bruyamment tout en observant sa cour en contrebas. Il voyait la foule immense sortir du ch?teau. Tous quittaient la c?r?monie. Sa c?r?monie. Il pouvait presque lire leur d?ception, m?me d’ici. Ils ?taient tous si petits. Il ne cessait de s’?merveiller de tous les savoir sous son contr?le. Cependant, pour combien de temps encore ? “Les r?gnes sont de dr?les de choses”, d?clara une voix ?g?e. Gareth se retourna et, ? sa grande surprise, d?couvrit qu’Argon se tenait ? quelques pas de lui, v?tu d’une cape blanche ? capuche et appuy? sur son b?ton. Il le regardait un sourire au coin des l?vres, mais ses yeux n’?taient point rieurs. Ils brillaient, le transper?aient et cela aga?ait Gareth. Ses yeux en voyaient trop. Il y avait tant de choses que Gareth aurait souhait? dire et demander ? Argon. Cependant, ? pr?sent qu’il avait ?chou? avec l’?p?e, il n’arrivait plus ? se souvenir d’une seule de ses questions. “Pourquoi ne m’as-tu rien dit ?” implora Gareth d’une voix d?sesp?r?e. “Tu aurais pu me dire que je n’?tais pas destin? ? la soulever. Tu aurais pu m’?pargner toute cette honte.” “Et pourquoi l'aurais-je fait ?” demanda Argon. Gareth le fusilla du regard. “Tu n’es pas un bon conseiller pour le Roi”, dit-il. “Tu aurais fid?lement conseill? mon p?re. Cependant, pas moi.” “Peut-?tre m?ritait-il d’?tre justement conseill?”, r?pliqua Argon. La col?re de Gareth s’intensifia. Il d?testait cet homme et il lui en voulait. “Je ne veux plus de toi dans mon entourage”, dit Gareth. “Je ne sais pas pourquoi mon p?re t’a pris ? son service mais je ne veux plus de toi ? la Cour du Roi.” Argon se mit ? rire. Un son creux et effrayant sortit de sa gorge. “Ton p?re ne m’a pas pris ? son service, mon pauvre gar?on !” d?clara-t-il. “Pas plus que son p?re avant lui. Je suis cens? ?tre ici. Il en est ainsi. Ce serait m?me plut?t moi qui les aurais pris ? mon service.” Argon s’avan?a brusquement et le regarda comme s’il arrivait ? lire l’?me de Gareth. “Peux-tu en dire autant ?” demanda Argon. “Toi, es-tu cens? ?tre ici ?” Ses mots touch?rent une corde sensible chez Gareth et le firent frissonner. C’?tait exactement le sujet sur lequel Gareth en ?tait venu ? se poser des questions. Gareth se demanda si c'?tait une menace. “Celui qui r?gne par le sang gouvernera par le sang”, tonna Argon. Sur ces mots, il se retourna vivement et s’?loigna. “Attends !” s’?cria Gareth qui ne voulait soudain plus qu’il s’en aille tant il avait de questions. “Que veux-tu dire ?” Gareth ne pouvait s’emp?cher de penser qu’Argon essayait de lui faire passer un message, comme quoi son r?gne serait bref. Il avait d?sesp?r?ment besoin de savoir ce qu’il sous-entendait. Gareth s’?lan?a apr?s lui mais, alors qu’il le rattrapait, Argon se volatilisa sous ses yeux. Gareth se retourna, regarda autour de lui mais ne vit rien. Il entendit seulement un rire caverneux flotter dans l’air. “Argon !” hurla Gareth. Il se retourna de nouveau puis leva le regard vers les cieux, se laissa tomber ? genoux et pencha la t?te en arri?re. Il se mit ? hurler : “ARGON !” CHAPITRE SEPT Erec marchait aux c?t?s du Duc, de Brandt et d’une douzaine de membres de l’entourage du Duc dans les rues tortueuses de Savaria. La foule s’?paississait ? mesure qu’ils approchaient de la maison de la jeune domestique. Erec avait insist? pour la rencontrer dans les plus brefs d?lais et le Duc avait voulu les y mener personnellement. Et o? le Duc allait, les gens suivaient. Erec regarda la foule sans cesse grandissante qui les entourait et se sentit g?n? en comprenant qu’il se pr?senterait ? la demeure de la jeune fille avec des dizaines de personnes sur les talons. Depuis qu’il l’avait vue pour la premi?re fois, Erec n’avait gu?re pu penser ? autre chose. Qui ?tait cette fille, se demandait-il, qui semblait si noble mais travaillait comme domestique ? la cour du Duc ? Pourquoi l'avait-elle ?vit? aussi promptement ? Apr?s toutes ces ann?es de fr?quentation de femmes de sang royal, pourquoi ?tait-ce la seule femme qui ait r?ussi ? lui ravir son c?ur ? Ayant baign? dans la royaut? toute sa vie, ?tant lui-m?me fils de roi, Erec savait d?tecter la royaut? en un clin d’?il et, ? l’instant o? il l’avait aper?ue, il avait su qu’elle ?tait d’un rang bien plus ?lev? que le simple poste qu’elle occupait. Il ?tait d?vor? par la curiosit? de savoir qui elle ?tait, d’o? elle venait et ce qu’elle faisait ici. Il voulait une autre occasion de pouvoir poser les yeux sur elle, de voir si tout cela n’?tait que le fruit de son imagination ou s’il ressentirait de nouveau la m?me chose. “Mes domestiques m’ont dit qu’elle vivait ? la p?riph?rie de la ville”, expliqua le Duc tout en marchant. Alors qu’ils avan?aient, les gens ouvraient leurs volets le long des rues et quelle n’?tait pas leur surprise de d?couvrir le Duc et son entourage dans les rues du peuple. “Apparemment, il semblerait qu’elle soit la domestique d’un aubergiste. Personne ne conna?t ses origines ni d’o? elle vient. Tout ce qu’ils savent, c’est qu’elle est arriv?e dans notre ville un jour et qu’elle a sign? un contrat avec cet aubergiste. Son pass? semble ?tre un myst?re.” Ils tourn?rent dans une nouvelle rue. Les pav?s devinrent plus in?gaux sous leurs pas et les petits logements de plus en plus d?labr?s au fur et ? mesure qu’ils progressaient. Le Duc s’?claircit la gorge. “Je fais parfois appel ? elle en tant que domestique ? ma cour lors d’?v?nements sp?ciaux. Elle est discr?te et pos?e. On en sait peu ? son sujet. Erec”, dit finalement le Duc en se tournant vers lui et en lui posant une main sur le poignet, “es-tu s?r de ce que tu fais ? Qui qu’elle soit, cette femme n’est qu’une simple citoyenne. Tu pourrais avoir n’importe quelle femme du royaume.” Erec lui retourna le m?me regard. “Il faut que je la revoie. Peu m'importe qui elle est.” Le Duc secoua la t?te d'un air d?sapprobateur et ils poursuivirent leur marche, tournant dans les rues, traversant des all?es ?troites et tortueuses. Au fur et ? mesure de leur progression, ce quartier de Savaria devenait de plus en plus miteux. Les rues s’emplissaient d’hommes ivres et ?taient envahies par les ordures, les poules et les chiens errants. Ils pass?rent devant une s?rie de tavernes et les cris des clients retentirent dans les rues. Quelques ivrognes titub?rent devant eux. On alluma peu ? peu des torches dans les rues tandis que la nuit tombait. “Faites place au Duc !” s’?cria le domestique en t?te du cort?ge tout en ?cartant les ivrognes. Des types peu rago?tants s’?cartaient de part et d’autre des rues, stup?faits de voir passer le Duc aux c?t?s d’Erec. Ils arriv?rent enfin devant une humble petite auberge en stuc avec un toit en ardoise ? deux versants. La taverne du rez-de-chauss?e semblait pouvoir contenir une cinquantaine de clients et quelques chambres pour les clients se trouvaient ? l’?tage. La porte d’entr?e ?tait tordue, une fen?tre ?tait cass?e et la lampe de l’entr?e, qui pendait de travers, ne donnait qu'une lumi?re vacillante en raison du peu de cire qu'elle contenait. Les cris des ivrognes jaillissaient par les fen?tres lorsqu’ils s’arr?t?rent devant la porte. Comment une fille aussi raffin?e peut-elle travailler dans un endroit pareil ? se demanda Erec, horrifi?, en entendant les cris et les railleries qui provenaient de l’int?rieur. Il eut le c?ur bris? ? la pens?e du manque de respect dont elle devait souffrir dans un tel endroit. Ce n’est pas juste, pensa-t-il. Il n’en fut que plus d?termin? ? la sauver de cet environnement. “Pourquoi te rends-tu au pire endroit qu’il soit pour chercher ta fianc?e ?” demanda le Duc en se tournant vers Erec. Brandt se tourna ?galement vers lui. “Derni?re chance, mon ami”, dit Brandt. “Il y a un ch?teau plein de femmes de sang royal l?-bas, et elles n’attendent que toi.” Cependant, Erec secoua la t?te, d?termin?. “Ouvrez la porte”, ordonna-t-il. L’un des hommes du Duc se pr?cipita et l’ouvrit d’un coup. Une odeur de bi?re p?rim?e leur d?ferla dessus et les fit reculer. A l’int?rieur, des hommes ivres ?taient vautr?s sur le bar ou assis ? des tables en bois, criant trop fort, riant, raillant et se bousculant les uns les autres. D’un coup d’?il, en voyant leur gros ventre, leurs joues non ras?es et leurs v?tements sales, Erec se rendit compte qu’il s’agissait d’hommes plut?t rustres. Aucun guerrier ne se trouvait parmi eux. Erec fit quelques pas ? l’int?rieur ? la recherche de la fille. Il ne pouvait concevoir qu’une femme comme elle puisse travailler dans ce genre d’endroit. Il se demanda s’ils s’?taient pr?sent?s au mauvais endroit. “Excusez-moi, monsieur, je suis ? la recherche d’une femme”, demanda Erec ? un homme grand, large, mal ras? et au gros ventre qui se tenait debout devant lui. “Vraiment ?” s’?cria l’homme moqueur. “Et bien, tu es au mauvais endroit ! Ce n’est pas un bordel, ici. Cela dit, il y en a un de l’autre c?t? de la rue et j’ai entendu dire que les femmes y ?taient raffin?es et rondelettes !” L’homme se mit ? rire trop fort au nez d’Erec et quelques-uns de ses compagnons se joignirent ? lui. “Je ne cherche pas de bordel”, r?pondit Erec sans rire, “mais une femme particuli?re qui travaille ici.” “Tu parles s?rement de la domestique de l’aubergiste”, r?pondit une autre voix appartenant ? un autre ivrogne gros et large. “Elle est probablement quelque part derri?re en train de r?curer le sol. C’est dommage, je pr?f?rerais qu’elle soit sur mes genoux en ce moment !” Les hommes ?clat?rent de rire, satisfaits de leurs propres blagues et Erec en devint rouge rien que d'y penser. Il eut honte pour elle. Qu’elle en soit r?duite ? servir ce genre d’hommes ?tait un affront qu'il ne pouvait envisager. “Et tu t'appelles ?” demanda une autre voix. Un homme s’avan?a. Encore plus imposant que les autres, il avait une barbe et des yeux noirs, un air renfrogn?, une large m?choire et ?tait entour? d’une bande de minables. Il ?tait fait de muscles plus que de graisse et il s’approcha d’Erec d’une fa?on mena?ante et tr?s territoriale. “Essaies-tu de me voler ma domestique ?” demanda-t-il. “Dehors !” Il s’avan?a et tenta d’agripper Erec. Cependant, ce dernier, un des meilleurs chevaliers du royaume endurci par des ann?es d’entra?nement, avait des r?flexes d?passant de loin tout ce que cet homme pouvait imaginer. Au moment o? sa main toucha Erec, ce dernier passa ? l’action. Il lui attrapa le poignet, lui fit un crochet et, retournant l’homme ? la vitesse de la lumi?re, le saisit par le dos de sa chemise et l’envoya promener au travers de la pi?ce. L’homme imposant vola comme un boulet de canon et s’?crasa au sol en entra?nant quelques-uns des hommes comme un jeu de quilles. La salle enti?re se fit silencieuse. Tous les hommes s’arr?t?rent et regard?rent ce qui ?tait en train de se d?rouler. “BATS-TOI ! BATS-TOI !” scand?rent les hommes. Sonn?, l’aubergiste se remit p?niblement debout et chargea Erec en hurlant. Cette fois-ci, Erec n’attendit pas pour r?agir. Il s’avan?a ? la rencontre de son assaillant, leva un bras et abattit son coude directement sur le visage de l’homme en lui cassant ainsi le nez. L’aubergiste tituba puis s’effondra sur le sol. Erec revint vers lui et, malgr? sa taille imposante, le souleva haut au-dessus de sa t?te. Il fit quelques pas et jeta une fois de plus l’homme en l'air, ce qui eut pour r?sultat d’envoyer ? terre la moiti? de la salle avec lui. Tous les hommes pr?sents dans la salle se fig?rent et leurs cris d’encouragement cess?rent. Le silence s’installa alors qu’ils commen?aient ? comprendre qu’une personne sp?ciale se trouvait parmi eux. C’est alors que le serveur se jeta soudainement sur Erec arm? d’une bouteille en verre qu’il brandissait haut au-dessus de sa t?te. Erec le vit se jeter sur lui. Il portait d?j? la main ? son ?p?e mais, avant m?me qu’il ait eu le temps de la d?gainer, son ami Brandt s’?tait interpos?, avait sorti sa dague de sa ceinture et en pointait l’extr?mit? sous la gorge de l’assaillant. Ce dernier courut droit dessus et s’arr?ta juste ? temps, la pointe ac?r?e sur le point de transpercer sa peau. Il resta fig?, les yeux ?carquill?s de terreur, suant ? grosses gouttes, p?trifi? sur place avec sa bouteille encore en l’air. Le silence fut tel dans la salle qu’on aurait pu entendre une ?pingle tomber dans l’impasse. “L?che ?a”, ordonna Brandt. L’homme s’ex?cuta et la bouteille se brisa sur le sol. Erec d?gaina son ?p?e avec un fort bruit m?tallique, s’avan?a jusqu’? l’aubergiste qui gisait en g?missant sur le sol et il la pointa vers sa gorge. “Je ne le dirai qu’une seule et unique fois”, d?cr?ta Erec. “Fais dispara?tre toute cette racaille. Sur le champ. Je demande ? m’entretenir avec la dame. Seul.” “Le Duc !” s’?cria quelqu’un. La salle enti?re se retourna et reconnut enfin le Duc qui se tenait ? l’entr?e entour? de ses hommes. Tous s’empress?rent d’?ter leurs couvre-chefs et de baisser la t?te. “Si la salle n’est pas enti?rement vide d’ici la fin de ma phrase”, d?clara le Duc, “vous serez imm?diatement jet?s en prison.” Ce fut l’hyst?rie. Tous les hommes s’empress?rent de quitter les lieux, se bousculant devant le Duc et cherchant ? s’engouffrer par la porte, laissant derri?re eux leurs bouteilles de bi?res entam?es. “Et c’est valable pour toi aussi”, lan?a Brandt au serveur tout en abaissant sa dague et en l’attrapant par les cheveux pour le pousser vers la sortie. La pi?ce qui ?tait pleine d’agitation quelques instants auparavant se retrouva soudainement vide et silencieuse avec pour seule pr?sence celle d’Erec, Brandt, le Duc, la dizaine de ses hommes les plus fid?les et l’aubergiste. Ils referm?rent la porte derri?re eux dans un claquement retentissant. Erec se tourna vers l’aubergiste qui, assis sur le sol, ?tait en train d’essuyer le sang qui lui coulait du nez, encore sous le choc. Erec l’attrapa par la chemise, le souleva ? l’aide des deux mains et l’assit sur l’un des bancs vides. “Tu m'as ruin? la soir?e”, se plaignit l’aubergiste. “Il faudra payer pour ?a.” Le Duc s’avan?a en soutien. “Je pourrais te faire arr?ter pour avoir os? porter la main sur cet homme”, le r?primanda le Duc. “Sais-tu de qui il s’agit ? C’est Erec, le meilleur chevalier du roi, le champion de l'Argent. S’il le d?sire, il est autoris? ? te tuer sur le champ.” L’aubergiste leva les yeux vers Erec et, pour la premi?re fois, la terreur se lut sur son visage. Il en tremblait presque sur son si?ge. “Je ne pouvais pas le savoir. Vous ne vous ?tes pas pr?sent?.” “O? est-elle ?” demanda Erec avec impatience. “Elle est ? l’arri?re en train de r?curer la cuisine. Qu’est-ce que vous lui voulez ? Vous a-t-elle d?rob? quelque chose ? Ce n’est qu’une domestique en servage.” Erec s’empara de son ?p?e et l’agita sous la gorge de l’homme. “Appelle-la encore une fois ‘domestique’”, le pr?vint Erec, “et sois certain que je te trancherai la gorge. Compris ?” lui demanda-t-il d’un ton ferme en appuyant la lame sur la peau de l’homme. Ce dernier se mit ? pleurer tout en acquies?ant lentement. “Am?ne-la ici et en vitesse”, lui ordonna Erec en le remettant brutalement sur ses pieds et en le poussant, le propulsant ? travers la pi?ce vers la porte arri?re. Une fois que l’aubergiste fut sorti, ils entendirent un remue-m?nage de casseroles, des cris ?touff?s et quelques instants plus tard la porte s’ouvrit sur un petit groupe de femmes v?tues de blouses et de haillons, portant des bonnets et couvertes de graisse de cuisine. Le groupe ?tait constitu? de trois femmes ?g?es de la soixantaine et Erec se demanda l’espace d’un instant si l’aubergiste savait de qui il parlait. Puis elle apparut et le c?ur d’Erec cessa de battre dans sa poitrine. Il avait peine ? respirer. C’?tait elle. Elle portait un tablier couvert de taches de graisse et, n'osant pas lever les yeux, gardait la t?te baiss?e. Ses cheveux ?taient attach?s, couverts par du tissu, ses joues recouvertes de crasse et malgr? tout Erec ?tait compl?tement ?pris d’elle. Sa peau ?tait tellement jeune, tellement parfaite. Ses joues ?taient hautes et bien dessin?es, tout comme sa m?choire, son petit nez ?tait couvert de taches de rousseur et ses l?vres ?taient pleines. Elle arborait un front large et royal et ses cheveux blonds s’?chappaient de dessous son bonnet. L’espace d’un court instant, elle releva la t?te vers lui et ses grands et magnifiques yeux vert amande, qui tendaient vers un bleu cristallin ? la lumi?re, se clou?rent sur place. Il fut surpris de r?aliser qu’elle le fascinait encore plus ? pr?sent que la premi?re fois o? il l’avait rencontr?e. Derri?re elle r?apparut l’aubergiste ? l’air mauvais, qui continuait d’essuyer le sang qui lui coulait du nez. Entour?e des autres femmes plus ?g?es, la fille s’avan?a timidement vers Erec et fit une r?v?rence. Devant elle, Erec se redressa tout comme le firent certains membres de l’entourage du Duc. “Monseigneur”, dit-elle d’une voix l?g?re et douce qui remplit le c?ur ? Erec. “Veuillez s’il vous pla?t me dire ce que j’ai fait pour vous offenser. Je n’en ai aucune id?e et je m’excuse d’avance de ce que j’ai pu faire et qui justifie la pr?sence de la cour du Duc.” Erec sourit. Ses mots, sa fa?on de parler, le son de sa voix, tout l’apaisait. Il ne voulait pas qu’elle cesse de parler. Erec tendit la main et lui toucha le menton, relevant lentement son visage jusqu’? ce que leurs regards se croisent. Son c?ur s’acc?l?ra lorsqu’il plongea son regard dans le sien. C’?tait comme se perdre dans le bleu de l’oc?an. “Milady, vous n’avez rien fait qui m’ait offens?. Je ne pense pas que vous puissiez un jour faire une telle chose. Je viens ? vous sans col?re aucune, mais rempli d’amour. Depuis que je vous ai vue, je ne peux plus penser ? rien d’autre.” La fille rougit et baissa imm?diatement les yeux vers le sol en cillant un certain nombre de fois. Elle se tortillait les mains, nerveuse et boulevers?e. A l’?vidence, elle n’avait vraiment pas l’habitude de ce genre de compliments. “S’il vous pla?t, Milady, auriez-vous l’amabilit? de me dire votre nom ?” “Alistair”, r?pondit-elle humblement. “Alistair”, r?p?ta Erec, boulevers? ? son tour. C’?tait le plus beau pr?nom qu’il ait jamais entendu. “Cependant, je ne comprends pas en quoi cela peut vous ?tre utile”, ajouta-t-elle doucement, en continuant ? regarder le sol. “Vous ?tes un seigneur et je ne suis qu’une domestique.” “C’est ma domestique, pour ?tre exact”, dit m?chamment l’aubergiste en avan?ant d’un pas. “Elle est ? mon service. Elle a sign? un contrat il y a des ann?es de cela. Elle s’est engag?e pour sept ans et, en retour, je lui donne le g?te et le couvert. Cela fait trois ans, maintenant. Vous voyez, c’est une perte de temps. Elle m’appartient. Elle est ? moi. Vous ne me la prendrez pas. Elle m’appartient. Vous comprenez ?” Erec ressentit pour l’aubergiste une haine qui d?passait tout ce qu’il avait jamais ressenti pour un ?tre humain. Il ?tait ? deux doigts de d?gainer son ?p?e et de la lui planter dans le c?ur pour en finir avec lui mais, bien que l’homme m?rite grandement ce sort, Erec ne voulait pas enfreindre la loi du Roi. Apr?s tout, ses actes avaient des r?percussions pour le Roi. “La loi du Roi est la loi du Roi”, dit Erec ? l’homme d’un ton ferme. “Je n’ai pas l’intention de l’enfreindre. Cela ?tant dit, le tournoi d?bute demain et, comme tout homme, j’ai le droit de choisir ma promise. Et que cela soit dit haut et fort, je choisis Alistair.” Un sursaut traversa la salle. Tous se regard?rent les uns les autres, choqu?s. “Sous r?serve qu’elle y consente”, ajouta Erec. Le c?ur battant, Erec regarda Alistair qui gardait les yeux dirig?s vers le sol. Il voyait ? quel point elle rougissait. “Le souhaitez-vous, Milady ?” demanda-t-il. Le silence se fit dans la salle. “Monseigneur”, dit-elle doucement, “vous ne savez rien de moi, ni d’o? je viens, ni de pourquoi je me trouve ici. Je suis navr?e mais ce sont des choses que je ne peux vous r?v?ler.” Erec la regarda, abasourdi. “Pourquoi ne pouvez-vous pas me le dire ?” “Je n’en ai parl? ? personne depuis mon arriv?e. J’ai pr?t? serment.” “Mais pourquoi ?” insista-t-il, d?vor? par la curiosit?. Cependant, Alistair se contenta de garder la t?te baiss?e en silence. “C’est vrai,” rench?rit l’une des autres domestiques. “Elle ne nous a jamais rien dit sur elle. Ou pourquoi elle est venue ici. Elle refuse cat?goriquement. Cela fait des ann?es que nous insistons.” Elle le laissait profond?ment perplexe mais cela ne faisait qu’en rajouter ? son myst?re. “Si je ne peux pas savoir qui vous ?tes, alors, je ne le saurai pas”, d?clara Erec. “Je respecte votre serment, mais cela ne change rien aux sentiments que j'ai pour vous. Milady, qui que vous soyez, si je dois remporter ce tournoi, alors, je vous choisirai pour r?compense. Vous, parmi toutes les femmes du royaume. Je vous le redemande : le souhaitez-vous ?” Alistair continuait de fixer le sol et, en y regardant de plus pr?s, Erec vit des larmes couler sur ses joues. Soudain, elle se retourna, partit en courant et referma la porte derri?re elle. Erec resta sur place avec les autres dans un silence stup?fait. Il ne savait pas vraiment comment interpr?ter sa r?ponse. “Vous voyez bien que vous gaspillez votre temps et le mien”, dit l’aubergiste. “Elle a dit non. J’en ai fini avec vous, dans ce cas.” Erec fit la moue. “Elle n’a pas dit non”, intervint Brandt. “Elle n’a pas r?pondu.” “Elle a le droit de prendre son temps”, dit Erec, prenant sa d?fense. “Apr?s tout, c’est une d?cision importante. Elle ne me conna?t pas non plus.” Erec resta ainsi ? se demander quelle attitude adopter. “Je vais rester ici ce soir”, finit par d?clarer Erec. “Donnez-moi une chambre ici, dans le m?me couloir qu’elle. Au petit matin, avant que le tournoi ne commence, je lui repr?senterai ma demande. Si elle accepte et que je suis d?clar? vainqueur, alors, elle sera ma fianc?e. Si c’est le cas, je vous paierai sa servitude et elle pourra partir avec moi.” L’aubergiste n’avait ? l’?vidence aucune envie d’h?berger Erec sous son toit mais il s’abstint de dire quoi que ce soit. Il tourna les talons et quitta la pi?ce comme une tornade en claquant la porte derri?re lui. “Es-tu s?r de vouloir rester ici ?” demanda le Duc. “Rentre au ch?teau avec nous.” Erec secoua la t?te d’un air grave. “De toute ma vie, je n’ai jamais ?t? aussi s?r de moi.” CHAPITRE HUIT Thor fendit l’air, plongea et p?n?tra la t?te la premi?re dans les eaux agit?es de la Mer de Feu. Il coula instantan?ment et commen?a ? se rendre compte ? quel point l’eau ?tait chaude. Sous la surface, Thor ouvrit bri?vement les yeux et le regretta aussit?t. Il aper?ut un m?lange d’?tranges cr?atures effrayantes, petites et grandes, aux t?tes inhabituelles et grotesques. Cet oc?an grouillait de b?tes. Il pria pour qu'elles ne l'attaquent pas avant qu'il ait rejoint la s?curit? de la barque. Thor refit surface en haletant et se mit imm?diatement ? la recherche du gar?on qui se noyait. Il le rep?ra juste ? temps : il gesticulait, avait des difficult?s ? rester ? la surface et Thor ?tait certain que, d’ici quelques secondes, il coulerait. Thor s’approcha de lui, l’attrapa par la clavicule et commen?a ? nager avec lui en essayant tant bien que mal de garder leurs deux t?tes hors de l’eau. Thor entendit un plouf et un g?missement. Il se retourna et fut surpris de voir Krohn, qui avait d? sauter dans l’eau pour le rejoindre. Le l?opard le rejoignit en barbotant et en g?missant. Thor se sentit terriblement coupable que Krohn se mette ainsi en danger mais il ?tait trop occup? et ne pouvait en faire plus. Thor essaya de ne regarder ni l’eau bouillonnante et rouge qui l'entourait ni les ?tranges cr?atures faisaient surface et disparaissaient sans cesse. Une cr?ature ? quatre bras et deux t?tes, violette et hideuse, ?mergea pr?s de lui, lui siffla dessus et replongea en faisant sursauter Thor. Thor se tourna et vit que l’embarcation se trouvait ? une vingtaine de m?tres. Il nagea vers elle de fa?on fr?n?tique en se servant de son seul bras libre et de ses jambes tout en tra?nant le gar?on. Ce dernier gesticulait et hurlait tout en se d?battant. Thor eut peur qu’il ne l’entra?ne au fond avec lui. “Arr?te de bouger !” cria s?chement Thor en esp?rant que le gar?on ob?irait. Heureusement, c’est ce qu’il fit. Thor fut temporairement soulag?, jusqu’? ce qu’il entende un nouveau plouf et tourne sa t?te de l’autre c?t? : une autre cr?ature venait de faire surface juste ? c?t? de lui, petite, avec une t?te jaune et quatre tentacules. Elle avait une t?te carr?e et nageait vers lui en grondant et en tremblant. Elle ressemblait ? un serpent ? sonnette des mers mais sa t?te ?tait trop carr?e. Alors qu’elle s’approchait, pr?te ? mordre, Thor s’arc-bouta mais elle ouvrit soudainement sa gueule vide et lui cracha de l’eau de mer dessus. Thor cligna des yeux pour essayer d’y voir plus clair. La cr?ature se mit ? nager en rond autour d’eux, d?crivant des cercles et Thor redoubla d’efforts, nageant aussi vite que possible pour s’?chapper. Thor se rapprochait de plus en plus du bateau lorsque qu’une autre cr?ature ?mergea pr?s de lui de l’autre c?t?. Celle-ci ?tait longue, ?troite et orange avec deux griffes pr?s de la bouche et une douzaine de courtes pattes. Elle avait ?galement une longue queue qui fouettait dans toutes les directions. En se redressant, elle ressemblait ? un homard. Elle flottait ? la surface comme une punaise d’eau et se dirigea vers Thor en se mettant sur le c?t? et faisant claquer sa queue. La queue fouetta le bras de Thor qui hurla de douleur ? cause de la piq?re. La cr?ature faisait des allers et retours, piquant encore et encore. Thor aurait aim? pouvoir se saisir de son ?p?e et l’attaquer mais il n’avait qu’une main de libre et en avait besoin pour nager. Nageant ? ses c?t?s, Krohn se tourna vers la cr?ature et se mit ? gronder. Le grondement s’?leva dans les airs. Krohn se mit ? nager vers la b?te sans aucune crainte. Effray?e, elle disparut sous l’eau. Thor soupira de soulagement jusqu’? ce que la cr?ature r?apparaisse de l’autre c?t? et se remette ? piquer. Krohn fit demi-tour et se mit ? poursuivre la cr?ature en essayant de l’attraper et en faisant claquer ses m?choires qui se refermaient syst?matiquement sur du vide. Thor nageait pour survivre, comprenant que la seule fa?on de se sortir de cet enfer ?tait de sortir de l’eau. Apr?s un temps qui lui parut une ?ternit? et apr?s avoir nag? comme il ne l’avait jamais fait de sa vie, il atteignit enfin la barque qui tanguait violemment dans les vagues. Deux membres de la L?gion, des gar?ons plus ?g?s qui n’avaient jamais adress? la parole ni ? Thor ni ? ses compagnons, ?taient pr?ts ? lui porter assistance. Ils eurent le m?rite de se pencher par-dessus bord et de lui tendre la main. Thor aida d’abord le gar?on en essayant de s’agripper et de le hisser dans le bateau. Le plus ?g? des gar?ons l’attrapa par le bras et le tira ? bord. Toujours accroch? au bateau, Thor attrapa Krohn par la peau du ventre et le lan?a par-dessus bord. Krohn agita les pattes tout en retombant et griffa le bois du bateau, compl?tement mouill? et tout tremblant. Il glissa sur le fond mouill? du bateau et traversa la largeur du bateau puis, d?s qu’il se retrouva sur pattes, il se retourna et courut jusqu’au bord ? la recherche de Thor. Il resta l? ? regarder l’eau en glapissant. Thor tendit la main et se cramponna ? celle d’un des gar?ons. Il ?tait sur le point de sortir de l’eau lorsqu’il sentit une emprise puissante et muscl?e le saisir par la cheville et la cuisse. Il se retourna et regarda sous lui. Son c?ur s’arr?ta de battre quand il vit la cr?ature verd?tre qui ressemblait vaguement ? un calmar enrouler son tentacule autour de sa jambe. Thor hurla de douleur lorsqu’il sentit ses aiguillons transpercer sa chair. Thor comprit qu’il serait perdu s’il ne r?agissait pas rapidement. De sa main libre il attrapa sa courte dague sur sa ceinture et poignarda la b?te. Cependant, le tentacule ?tait tellement ?pais que la dague n’arrivait pas ? la transpercer. Cela mit la cr?ature en col?re. La t?te de la cr?ature sortit de l’eau d’un coup. Verte, sans yeux et arm?e de deux m?choires sur un long cou, l’une au-dessus de l’autre, elle montra brusquement une rang?e de dents ac?r?es comme des lames de rasoir et s’?lan?a vers Thor. Ce dernier eut l’impression que son sang cessa soudain de circuler dans sa jambe et sut qu’il fallait r?agir au plus vite. Malgr? les efforts du plus ?g? des gar?ons pour le retenir, Thor l?chait prise peu ? peu et redescendait lentement vers les eaux. Krohn glapit encore et encore, les poils dress?s sur le dos, se penchant par-dessus bord comme s’il ?tait pr?t ? se lancer ? l’eau, mais m?me Krohn devait savoir qu’attaquer cette chose ?tait peine perdue. L’un des deux gar?ons fit un pas en arri?re et cria : “PENCHE-TOI !” Thor baissa la t?te alors que le gar?on jetait une lance. Elle fila dans l’air mais rata sa cible, finissant dans l’eau sans faire aucun mal. La cr?ature ?tait trop petite et trop rapide. Soudain, Krohn bondit dans l’eau, atterrit m?choire ouverte sur l’arri?re du cou de la cr?ature et y enfon?a ses crocs ac?r?s. Krohn mordit violemment. Secou? de tous c?t?s, il refusa de l?cher prise. Cependant, cette bataille ?tait perdue d’avance : la peau de la cr?ature ?tait bien trop ?paisse et muscl?e. La cr?ature secoua Krohn de part et d’autre et l’envoya finalement promener dans les airs. Pendant ce temps, la cr?ature avait resserr? son emprise sur la jambe de Thor, qui commen?ait ? manquer d’oxyg?ne. Les tentacules le br?laient affreusement et il avait l’impression que sa jambe allait lui ?tre arrach?e ? tout moment. Dans une derni?re tentative d?sesp?r?e, Thor l?cha la main du gar?on pour se saisir de la petite ?p?e ? sa ceinture. Cependant, il ne r?ussit pas ? l’attraper ? temps; il glissa et tomba la t?te la premi?re dans l’eau. Thor se sentit emport? loin du bateau. La cr?ature le tira dans la mer. Entra?n? de plus en plus vite, il tendit d?sesp?r?ment les mains et vit le bateau dispara?tre. La derni?re chose dont il se souvint fut d’?tre entra?n? sous la surface de l’eau vers les profondeurs de la Mer de Feu. CHAPITRE NEUF Gwendolyn courait dans la prairie aux c?t?s de son p?re, le Roi MacGil. Elle ?tait jeune, avait environ dix ans et son p?re semblait bien jeune lui aussi. Il portait une courte barbe qui ne grisonnait pas encore comme cela serait le cas plus tard dans sa vie, sa peau ?tait jeune, sans ride aucune et brillait de sant?. Il ?tait heureux, insouciant et se laissait aller ? rire tout en lui tenant la main et en courant dans les champs. C’?tait le p?re dont elle se souvenait, le p?re qu’elle connaissait. Il la prit dans ses bras et la jeta sur son ?paule, la faisant tourner encore et encore, en riant de plus en plus fort alors qu’elle ricanait de fa?on hyst?rique. Elle se sentait en s?curit? dans ses bras. Elle aurait voulu que ce moment partag? dure pour toujours. Toutefois, lorsque son p?re la reposa ? terre, quelque chose d’?trange se produisit. Le bel apr?s-midi ensoleill? fit brusquement place au cr?puscule. Lorsque les pieds de Gwen touch?rent le sol, ils ne se trouvaient plus dans une prairie fleurie mais embourb?s jusqu’? la cheville dans de la boue. Son p?re gisait ? pr?sent sur le dos, dans la boue, ? quelques pas d’elle. Il ?tait plus ?g?, bien plus ?g?, trop ?g?, et il ?tait coinc?. Plus loin, sa couronne scintillante gisait elle aussi dans la boue. “Gwendolyn”, haleta-t-il. “Ma fille. Aide-moi.” D?sesp?r?, il r?ussit ? extraire une main de la boue et la tendit vers elle. Submerg?e par le sentiment de devoir lui venir en aide au plus vite, elle essaya de le rejoindre et d’attraper sa main mais ses pieds ne boug?rent pas d’un pouce. Elle baissa les yeux et vit que la boue avait durci tout autour d’elle et craquait en s’ass?chant. Elle remua le plus qu’elle put pour se lib?rer. Gwen cligna des yeux et se retrouva debout sur le parapet du ch?teau, regardant la Cour du Roi en contrebas. Quelque chose clochait : en baissant les yeux, elle ne voyait ni la splendeur ni les festivit?s habituelles mais plut?t un cimeti?re ? perte de vue. L? o?, jadis, la Cour du Roi avait affich? sa splendeur, il n'y avait maintenant plus que des tombes fra?ches o? que se posent ses yeux. Elle entendit des bruits de pas. Son c?ur s’arr?ta quand elle se retourna et d?couvrit un assassin en cape noire ? capuche qui s’approchait d’elle. Il se pr?cipita sur elle en relevant sa capuche et r?v?la son visage grotesque, auquel manquait un ?il et qui ?tait balafr? par une ?paisse cicatrice d?chiquet?e qui lui barrait l’orbite. Il se mit ? grogner, leva une main tenant une dague scintillante dont la poign?e avait un ?clat rouge. Il allait trop vite et elle ne put r?agir ? temps. Elle se recroquevilla sur elle-m?me en sachant qu’elle allait mourir transperc?e par la dague qui s’abattrait sur elle avec force. Cependant, l'assassin s’arr?ta brusquement ? quelques centim?tres de son visage. Elle rouvrit les yeux pour d?couvrir que son p?re mort s’?tait relev? pour intercepter le poignet de l’homme dans sa course. Il serra la main de l’homme jusqu’? ce qu’il l?che la dague puis souleva l’homme par-dessus son ?paule et le projeta par-dessus le parapet. Gwen entendit ses hurlements lorsqu’il passa par-dessus le rebord. Son p?re se retourna et la regarda. Il l’attrapa fermement par les ?paules de sa main en d?composition et la fixa avec une expression s?v?re. “Ce lieu n’est pas s?r pour toi”, la sermonna-t-il. “C’est dangereux !” se mit-il ? crier. Ses doigts se referm?rent de plus en plus fort sur son ?paule et lui arrach?rent un cri. Gwen se r?veilla en criant. Elle s’assit dans son lit, regardant la chambre autour d’elle, pr?te ? subir une attaque. Cependant, elle n’entendit que le silence, le silence lourd et tranquille qui pr?c?dait l’aube. Transpirante et haletante, elle bondit du lit en chemise de nuit et se mit ? arpenter la chambre. Elle se pr?cipita vers un petit bassin en pierre, s’aspergea encore et encore le visage d’eau puis s’appuya contre le mur en sentant la fra?cheur de la pierre sous ses pieds en ce doux matin d’?t?. Elle essaya de reprendre ses esprits. Ce r?ve semblait bien trop r?el. Elle sentait que c’?tait plus qu’un simple r?ve, que c'?tait un avertissement direct de son p?re, un message. Elle ressentit soudain le besoin imp?rieux de quitter la Cour du Roi sur le champ et de ne jamais y revenir. Cependant, elle savait que c’?tait une chose qu’elle ne pouvait faire. Il fallait qu'elle reprenne ses esprits pour recouvrer ses facult?s. Cependant, ? chaque fois qu’elle clignait des yeux, elle voyait le visage de son p?re, sentait son avertissement. Il fallait qu'elle fasse quelque chose pour faire dispara?tre ce r?ve. Gwen regarda dehors et vit que le premier soleil commen?ait tout juste ? se lever. Elle pensa au seul et unique endroit o? elle pourrait retrouver ses esprits : la Rivi?re du Roi. Oui, c’est l? qu’elle devait se rendre. * Gwendolyn plongea dans les sources glac?es de la Rivi?re du Roi, se pin?ant le nez et maintenant la t?te sous l’eau. Elle s’assit dans la petite piscine naturelle creus?e dans le rocher et cach?e dans les sources sup?rieures qu’elle avait d?couverte ?tant enfant et qu’elle fr?quentait depuis. Elle garda la t?te sous l’eau et resta ainsi en sentant les froids courants courir dans ses cheveux et sur son cuir chevelu, nettoyant son corps nu. Elle avait d?couvert ce lieu secret un jour, cach? au milieu d’un bosquet d’arbres, haut sur la montagne sur un petit plateau o? le courant de la rivi?re ?tait moins puissant et cr?ait une piscine calme et profonde. Au-dessus comme en-dessous d’elle, la rivi?re n’?tait que torrents, mais ici, sur ce plateau, la rivi?re ?tait tr?s calme. La piscine ?tait profonde, les rochers lisses et l’endroit si bien cach? qu’elle pouvait se laisser aller ? nager nue avec insouciance. L’?t?, au lever du soleil, elle venait ici presque tous les matins pour se vider la t?te, et plus particuli?rement les jours comme celui-ci o? ses r?ves la hantaient, ce qui ?tait souvent le cas. C’?tait l’endroit o? elle trouvait refuge. Il lui ?tait difficile de savoir s’il s’agissait juste d’un r?ve ou si c’?tait autre chose. Comment savoir si un r?ve ?tait un message, un pr?sage ? Comment savoir s’il s’agissait de son esprit qui se jouait d’elle ou d’une indication ? Gwendolyn ?mergea, respira l’air chaud du matin et ?couta les oiseaux gazouiller dans les arbres tout autour d’elle. Elle prit appui sur un rocher, son corps ?mergeant jusqu’au cou, s’assit sur un rebord naturel et se mit ? r?fl?chir. Elle s’aspergea le visage ? deux mains puis laissa courir ses mains dans sa longue chevelure blonde. Sur la surface bleut?e de l’eau, elle regarda les reflets du ciel, le second soleil qui avait commenc? ? se lever, les arbres courb?s au-dessus de l’eau et son propre visage. Ses yeux bleu brillant en amande capturaient son reflet ondulant dans l’eau. Ils lui rappelaient un peu ceux de son p?re. Elle d?tourna le regard, repensant ? son r?ve. Elle savait qu’il ?tait dangereux qu'elle reste ? la Cour du Roi, ? cause de l’assassinat de son p?re, des espions, des complots, et plus particuli?rement avec Gareth comme roi. Son fr?re ?tait impr?visible. Vindicatif. Parano?aque. Et tr?s, tr?s jaloux. Il voyait tout le monde comme une menace et elle encore plus que les autres. Tout pouvait arriver. Elle savait qu’elle n’?tait plus en s?curit? ici. Personne ne l’?tait. Cependant, elle n’?tait pas du genre ? prendre la fuite. Il fallait qu'elle sache avec certitude qui ?tait l’assassin de son p?re et s’il s’agissait de Gareth. Elle ne pouvait s’enfuir avant de l’avoir livr? ? la justice. Elle savait que, tant que le meurtrier de son p?re serait en libert?, l’esprit de son p?re ne reposerait pas en paix. La justice avait ?t? le cri de ralliement de son p?re toute sa vie, et m?me mort il m?ritait justice, plus que n’importe qui d’autre. Gwen repensa ? Godfrey et ? leur rencontre avec Steffen. Elle ?tait persuad?e que Steffen leur cachait quelque chose et elle se demandait ce dont il s’agissait. Une partie d’elle-m?me pensait qu’il leur parlerait avec le temps. Et pourtant, si ce n’?tait jamais le cas ? Elle ressentait le besoin urgent de retrouver le meurtrier de son p?re mais ne savait o? se tourner. Gwendolyn finit par se lever de son si?ge aquatique, sortit nue sur le bord, frissonnant dans l’air matinal, se cacha derri?re un gros arbre et leva la main pour attraper sa serviette sur une branche comme elle le faisait toujours. Cependant, alors qu’elle tendait la main, elle fut surprise de d?couvrir que sa serviette n’?tait plus l?. Elle resta l?, nue, mouill?e, sans comprendre. Elle ?tait certaine de l’avoir mise l?, comme elle le faisait toujours. Alors qu’elle se tenait l?, d?concert?e, en essayant de comprendre ce qui se passait, elle per?ut soudainement un mouvement derri?re elle. Cela se passa tr?s vite, comme une impression, et l’instant d’apr?s, son c?ur s’arr?ta lorsqu’elle comprit qu’un homme se tenait derri?re elle. Tout se passa tr?s vite. En quelques secondes, l’homme v?tu, comme dans son r?ve, d’une cape noire ? capuche l’attrapa d’une main osseuse qui se plaqua sur sa bouche, ?touffant ses cris alors qu’il l’immobilisait fermement. Il l’entoura avec son autre bras en l’attrapant par la taille, la maintenant contre lui et la soulevant du sol. Elle se d?battit dans les airs en essayant de crier jusqu’? ce qu’il la repose tout en continuant ? la serrer fermement. Elle essaya d’?chapper ? son emprise mais il ?tait trop fort. Il la ceintura de nouveau et Gwen vit une dague ? la poign?e luisante de rouge, la m?me que dans son r?ve. Cela ?tait donc bien un avertissement. Elle sentit la lame sur sa gorge et il appuyait si fort qu’il aurait suffi qu’elle bouge dans n’importe quelle direction pour avoir la gorge tranch?e. Des larmes se mirent ? rouler sur ses joues tandis qu’elle commen?ait ? avoir du mal ? respirer. Elle ?tait furieuse contre elle-m?me. Elle ?tait vraiment trop b?te. Elle aurait d? ?tre plus prudente. “Me reconnais-tu ?” demanda-t-il. Il se pencha en avant. Elle sentit son horrible haleine chaude sur sa joue et aper?ut son profil. Son c?ur cessa de battre : c’?tait le m?me visage que dans son r?ve, le borgne ? la cicatrice. “Oui”, r?pondit-elle d’une voix tremblante. Elle connaissait trop bien ce visage. Elle ne connaissait pas son nom mais elle savait que c'?tait un agent. Un personnage de basse classe, de ceux qui tra?naient autour de Gareth depuis l’enfance. C’?tait le messager de ce dernier. Gareth l’envoyait ? tous ceux qu’il souhaitait effrayer, torturer ou tuer. “Tu es le chien de mon fr?re”, lui siffla-t-elle sur un ton de d?fi. Il sourit, r?v?lant une dent manquante. “Je suis son messager”, dit-il. “Et mon message t’est envoy? avec une arme sp?ciale pour s’assurer que tu t’en souviennes bien. Aujourd’hui, son message pour toi, c’est qu'il faut que tu arr?tes de poser des questions. C’est une chose dont tu te souviendras parfaitement bien car lorsque j’en aurai fini avec toi, la cicatrice qui restera sur ton joli visage te le rappellera jusqu’? la fin de tes jours.” Il renifla puis leva la lame haut dans les airs et commen?a ? l’abaisser vers son visage. “NON !” hurla Gwen. Elle se d?battit pour ?viter cette blessure qui changerait irr?m?diablement sa vie. Cependant, alors que la lame ?tait en train de s’abattre, quelque chose se produisit. Un oiseau poussa soudain un cri per?ant et fondit sur l’homme. Elle leva les yeux et le reconnut au dernier moment. C'?tait Estopheles. Elle fondit sur l’homme toutes serres dehors et lac?ra le visage de l’homme au moment o? il abattait sa dague. La lame avait tout juste commenc? ? entailler la joue de Gwen, la transper?ant d’une vive douleur, lorsqu’elle changea brusquement de direction; l’homme hurla, laissa tomber son arme et leva les mains. Gwen vit un ?clair blanc dans le ciel, le soleil brillant derri?re les branches et, alors qu’Estopheles s’envolait, elle savait, elle en ?tait persuad?e, que c’?tait son p?re qui avait envoy? le faucon. Elle ne perdit pas de temps. Elle se retourna, prit son ?lan et assena un coup violent sur le plexus solaire de l’homme, visant parfaitement avec ses pieds nus, comme le lui avait appris son entra?neur. Il perdit l’?quilibre sous la force du coup. Depuis toute jeune, elle savait qu’elle n’avait pas besoin d’?tre extr?mement forte pour se d?fendre contre un assaillant. Il fallait simplement qu'elle sache se servir de ses muscles les plus puissants, ceux des cuisses, et qu'elle sache viser pr?cis?ment. Alors que l’homme restait l? ? chanceler, elle s’avan?a vers lui, l’attrapa par l’arri?re des cheveux et leva le genou. Elle visa encore avec une incroyable pr?cision et son genou vint parfaitement s’?craser sur le nez de l'homme. Elle entendit un craquement satisfaisant et sentit le sang chaud de l’homme se r?pandre sur sa jambe alors que l'homme se laissait tomber au sol. Elle savait qu’elle venait de lui casser le nez. Elle savait qu’il fallait qu'elle en finisse avec lui pour de bon, qu'elle s’empare de cette dague et qu'elle la lui plonge dans le c?ur. Cependant, elle ?tait debout, nue et son instinct lui dictait de se couvrir et de d?guerpir. Elle ne voulait pas avoir le sang d’un homme sur les mains, quand bien m?me il le m?ritait. Êîíåö îçíàêîìèòåëüíîãî ôðàãìåíòà. Òåêñò ïðåäîñòàâëåí ÎÎÎ «ËèòÐåñ». Ïðî÷èòàéòå ýòó êíèãó öåëèêîì, êóïèâ ïîëíóþ ëåãàëüíóþ âåðñèþ (https://www.litres.ru/pages/biblio_book/?art=43694903&lfrom=688855901) íà ËèòÐåñ. Áåçîïàñíî îïëàòèòü êíèãó ìîæíî áàíêîâñêîé êàðòîé Visa, MasterCard, Maestro, ñî ñ÷åòà ìîáèëüíîãî òåëåôîíà, ñ ïëàòåæíîãî òåðìèíàëà, â ñàëîíå ÌÒÑ èëè Ñâÿçíîé, ÷åðåç PayPal, WebMoney, ßíäåêñ.Äåíüãè, QIWI Êîøåëåê, áîíóñíûìè êàðòàìè èëè äðóãèì óäîáíûì Âàì ñïîñîáîì.
Íàø ëèòåðàòóðíûé æóðíàë Ëó÷øåå ìåñòî äëÿ ðàçìåùåíèÿ ñâîèõ ïðîèçâåäåíèé ìîëîäûìè àâòîðàìè, ïîýòàìè; äëÿ ðåàëèçàöèè ñâîèõ òâîð÷åñêèõ èäåé è äëÿ òîãî, ÷òîáû âàøè ïðîèçâåäåíèÿ ñòàëè ïîïóëÿðíûìè è ÷èòàåìûìè. Åñëè âû, íåèçâåñòíûé ñîâðåìåííûé ïîýò èëè çàèíòåðåñîâàííûé ÷èòàòåëü - Âàñ æä¸ò íàø ëèòåðàòóðíûé æóðíàë.