×òî æå åñòü ó ìåíÿ? Äûðû â äðàíûõ êàðìàíàõ, Òðè ìîðùèíû íà ëáó, Äà èñò¸ðòûé ïÿòàê... Íî íå æàëêî íè äíÿ- Ìíå ñóäüáîþ ïðèäàííûõ, Õîòü ïîðîé ÿ æèâó Ïîïîäàÿ â ïðîñàê. Âñ¸ ÷òî åñòü ó ìåíÿ: Ñîâåñòü, ÷åñòü è óìåíüå. ß îòäàì íå ñêóïÿñü- Ïðîñòî òàê çà ïóñòÿê. Çà ïîñòåëü ó îãíÿ, Äîáðîòó áåç ñòåñíåíüÿ. È çà òî, ÷òî ïðîñòÿñü, Íå çàáûòü ìíå íè êàê... Âñ¸ ÷

De Sac et de Corde

De Sac et de Corde Blake Pierce Une Enqu?te de Riley Paige #7 Un chef-d’?uvre de suspense et de myst?re. Pierce d?veloppe ? merveille la psychologie de ses personnages. On a l’impression d’?tre dans leur t?te, de conna?tre leurs peurs et de c?l?brer leurs victoires. L’intrigue est intelligente et vous tiendra en haleine tout au long du roman. Difficile de l?cher ce livre plein de rebondissements. Books and Movie Reviews, Roberto Mattos (? propos de SANS LAISSER DE TRACES) DE SAC ET DE CORDE est le 7?me tome de la populaire s?rie de thrillers RILEY PAIGE, qui commence avec SANS LAISSER DE TRACES – un roman pl?biscit? par les lecteurs ! Quand l’agent sp?cial Riley Paige prend enfin la d?cision de se reposer, elle re?oit aussit?t un appel au secours inattendu. Cette fois, c’est sa propre fille qui a besoin de son aide La meilleure amie d’April est boulevers?e par la mort de sa s?ur, une ?tudiante en premi?re ann?e ? l’universit? de Georgetown. Pire encore, elle est convaincue que son suicide est un meurtre d?guis? et que sa s?ur a ?t? assassin?e par un tueur en s?rie. De mauvaise gr?ce, Riley accepte de mener l’enqu?te. Puis elle d?couvre que deux autres filles en premi?re ann?e ? Georgetown se sont ?galement suicid?es de la m?me mani?re grotesque : elles se sont pendues. Soudain convaincue que l’affaire est louche, Riley d?cide d’impliquer le FBI. L’enqu?te l’am?ne ? fr?quenter les ?tudiants d’une des meilleures universit?s du pays et la plonge dans le monde ?tonnant de la soci?t? ais?e, o? des familles vouent un culte ? la r?ussite. Riley apprend ? ses d?pens que la situation est pire qu’elle ne l’imaginait. Elle est ? la poursuite d’un tueur psychotique – peut-?tre le pire de sa carri?re. Sombre thriller psychologique au suspense insoutenable, DE SAC ET DE CORDE est le septi?me tome de la s?rie. Vous vous attacherez au personnage principal et l’intrigue vous poussera ? lire jusqu’? tard dans la nuit. Le tome 8 sera bient?t disponible. D E S A C E T D E C O R D E (UNE ENQUETE DE RILEY PAIGE—TOME 7) B L A K E P I E R C E Blake Pierce Blake Pierce est l’auteur de la populaire s?rie de thrillers RILEY PAIGE. Il y a sept tomes, et ce n’est pas fini ! Blake Pierce ?crit ?galement les s?ries de thrillers MACKENZIE WHITE (cinq tomes, s?rie en cours), AVERY BLACK (quatre tomes, s?rie en cours) et depuis peu KERI LOCKE. Fan depuis toujours de polars et de thrillers, Blake adore recevoir de vos nouvelles. N'h?sitez pas ? visiter son site web www.blakepierceauthor.com (http://www.blakepierceauthor.com) pour en savoir plus et rester en contact ! Copyright © 2017 par Blake Pierce. Tous droits r?serv?s. Sauf d?rogations autoris?es par la Loi des ?tats-Unis sur le droit d'auteur de 1976, aucune partie de cette publication ne peut ?tre reproduite, distribu?e ou transmise sous quelque forme que ce soit ou par quelque moyen que ce soit, ou stock?e dans une base de donn?es ou syst?me de r?cup?ration, sans l'autorisation pr?alable de l'auteur. Ce livre ?lectronique est r?serv? sous licence ? votre seule jouissance personnelle. Ce livre ?lectronique ne saurait ?tre revendu ou offert ? d'autres personnes. Si vous voulez partager ce livre avec une tierce personne, veuillez en acheter un exemplaire suppl?mentaire par destinataire. Si vous lisez ce livre sans l'avoir achet? ou s'il n'a pas ?t? achet? pour votre seule utilisation personnelle, vous ?tes pri? de le renvoyer et d’acheter votre exemplaire personnel. Merci de respecter le difficile travail de cet auteur. Il s'agit d'une ?uvre de fiction. Les noms, les personnages, les entreprises, les organisations, les lieux, les ?v?nements et les incidents sont le fruit de l'imagination de l'auteur ou sont utilis?s dans un but fictionnel. Toute ressemblance avec des personnes r?elles, vivantes ou mortes, n'est que pure co?ncidence. Image de couverture : Copyright Pholon, utilis?e en vertu d'une licence accord?e par Shutterstock.com. DU M?ME AUTEUR LES ENQU?TES DE RILEY PAIGE SANS LAISSER DE TRACES (Tome 1) REACTION EN CHAINE (Tome 2) LA QUEUE ENTRE LES JAMBES (Tome 3) LES PENDULES ? L’HEURE (Tome 4) QUI VA A LA CHASSE (Tome 5) A VOTRE SANT? (Tome 6) DE SAC ET DE CORDE (Tome 7) UN PLAT QUI SE MANGE FROID (Tome 8) LES ENQU?TES DE MACKENZIE WHITE AVANT QU’IL NE TUE (Tome 1) AVANT QU’IL NE VOIE (Tome 2) AVANT QU’IL NE CONVOITE (Tome 3) LES ENQU?TES D’AVERY BLACK RAISON DE TUER (Tome 1) RAISON DE COURIR (Tome 2) RAISON DE SE CACHER (Tome 3) TABLE PROLOGUE (#uf1951bb2-37e3-507c-bf49-edaeb8ea51f4) CHAPITRE UN (#u2f1d51ef-e736-5f06-ab0f-50d5b30cc5b4) CHAPITRE DEUX (#u9fd6c1c1-2045-5b81-a323-6db316363dcd) CHAPITRE TROIS (#uccec17b8-8843-5191-a2ed-37967142a4bb) CHAPITRE QUATRE (#u38d63b92-d7b2-5514-97a2-fef8be6e4e31) CHAPITRE CINQ (#ua1d7f918-5ee8-5313-85d9-778b06b9c0f5) CHAPITRE SIX (#ub56c4172-4ba5-5150-927d-345504796c90) CHAPITRE SEPT (#u8aef7b42-3029-5632-806e-86942a8869ca) CHAPITRE HUIT (#uea761030-07e7-50ef-89e9-7c00073ee890) CHAPITRE NEUF (#litres_trial_promo) CHAPITRE DIX (#litres_trial_promo) CHAPITRE ONZE (#litres_trial_promo) CHAPITRE DOUZE (#litres_trial_promo) CHAPITRE TREIZE (#litres_trial_promo) CHAPITRE QUATORZE (#litres_trial_promo) CHAPITRE QUINZE (#litres_trial_promo) CHAPITRE SEIZE (#litres_trial_promo) CHAPITRE DIX-SEPT (#litres_trial_promo) CHAPITRE DIX-HUIT (#litres_trial_promo) CHAPITRE DIX-NEUF (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT ET UN (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT-DEUX (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT-TROIS (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT-QUATRE (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT-CINQ (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT-SIX (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT-SEPT (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT-HUIT (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT-NEUF (#litres_trial_promo) CHAPITRE TRENTE (#litres_trial_promo) CHAPITRE TRENTE ET UN (#litres_trial_promo) CHAPITRE TRENTE-DEUX (#litres_trial_promo) CHAPITRE TRENTE-TROIS (#litres_trial_promo) CHAPITRE TRENTE-QUATRE (#litres_trial_promo) CHAPITRE TRENTE-CINQ (#litres_trial_promo) CHAPITRE TRENTE-SIX (#litres_trial_promo) CHAPITRE TRENTE-SEPT (#litres_trial_promo) CHAPITRE TRENTE-HUIT (#litres_trial_promo) CHAPITRE TRENTE-NEUF (#litres_trial_promo) CHAPITRE QUARANTE (#litres_trial_promo) PROLOGUE Tiffany ?tait d?j? habill?e quand sa m?re l’appela du rez-de-chauss?e. — Tiffany ! Tu es pr?te pour aller ? la messe ? — J’arrive, Maman, lui cria Tiffany. Encore quelques minutes. — Eh bien, d?p?che-toi. On doit partir dans cinq minutes. — D’accord. En v?rit?, Tiffany s’?tait habill?e juste apr?s avoir englouti une gaufre pour le petit d?jeuner, avec Maman et Papa. C’?tait juste qu’elle n’avait pas envie de descendre. Elle regardait des vid?os marrantes avec des animaux sur son t?l?phone portable. Elle avait vu un p?kinois faire du skateboard, un bulldog monter une ?chelle, un chat essayer de jouer de la guitare, un gros chien qui courait apr?s sa queue d?s que quelqu’un chantait « Pop Goes the Weasel » et une garenne de lapins partir en galopant. Celle qu’elle regardait maintenant la faisait beaucoup rire. C’?tait un ?cureuil qui essayait de se servir dans une mangeoire ? oiseaux justement con?ue pour que les animaux de son esp?ce ne puissent pas s’y accrocher. Chaque fois qu’il sautait dessus, la mangeoire tournait sur elle-m?me comme une toupie et l’?cureuil d?gringolait. Il semblait pourtant bien d?cid? ? ne pas se laisser abattre. Elle gloussait encore quand sa m?re l’appela ? nouveau. — Tiffany ! Ta s?ur vient avec nous ? — Je ne pense pas, Maman. — Va lui demander, s’il te plait. Tiffany soupira. Elle avait bien envie de r?pondre : « Vas-y toi-m?me ! ». Au lieu de cela, elle cria : — D’accord. Lois, sa s?ur de dix-neuf ans, n’?tait pas descendue pour le petit d?jeuner. Tiffany ?tait presque s?re qu’elle n’avait pas l’intention d’aller ? la messe. Elle avait dit ? Tiffany la veille qu’elle ne voulait pas. On voyait Lois de moins en moins depuis qu’elle avait commenc? les cours ? l’universit? en automne. Elle revenait ? la maison le week-end et pour les vacances, mais elle passait beaucoup de temps avec ses amis et dormait tard le matin. Tiffany ne lui reprochait rien, bien au contraire. Pour une adolescente, la famille Pennington ?tait ? mourir d’ennui, surtout quand il fallait aller ? la messe. En soupirant, elle arr?ta la vid?o et sortit de sa chambre. Celle de Lois ?tait ? l’?tage. C’?tait une chambre immense am?nag?e dans le grenier. Elle avait m?me une salle de bain et une penderie. Tiffany ?tait coinc?e dans sa petite chambre du premier ?tage depuis aussi loin que remontaient ses souvenirs. Ce n’?tait pas juste. Tiffany avait esp?r? qu’elle h?riterait de la chambre de sa s?ur quand elle partirait ? l’universit?. Lois n’avait pas besoin de tout cet espace : apr?s tout, elle n’?tait l? que le week-end. Pourquoi ne pouvaient-elles pas ?changer ? Elle s’en plaignait souvent, mais personne ne faisait attention. Au pied des escaliers menant au grenier, Tiffany appela : — Eh, Lois ! Tu viens avec nous ? Pas de r?ponse. Tiffany roula les yeux au ciel. Cela arrivait souvent quand elle venait chercher Lois. Elle monta les marches et frappa ? la porte. — Eh, Lois ! hurla-t-elle ? nouveau. On va ? la messe. Tu veux venir ? Encore une fois, pas de r?ponse. Tiffany se dandina avec impatience. Elle frappa ? nouveau. — Tu es r?veill?e ? demanda-t-elle. Toujours pas de r?ponse. Tiffany poussa un grognement. Lois ?tait peut-?tre en train de dormir, ou alors elle avait ses ?couteurs dans les oreilles, mais il ?tait plus probable qu’elle ignorait sa s?ur, tout simplement. — Bon, d’accord, dit-elle. Je vais dire ? Maman que tu ne viens pas. En redescendant les marches, Tiffany ne put s’emp?cher de ressentir un peu d’inqui?tude. Lois avait l’air d?prim? ces derniers temps. Pas d?pressive, mais pas aussi heureuse que d’habitude. Elle avait m?me dit ? Tiffany que l’universit?, c’?tait plus difficile qu’elle ne le pensait. Elle ressentait la pression. En bas des escaliers, Papa regardait sa montre d’un air impatient. Il ?tait pr?t ? partir, bien emmitoufl? dans son manteau, son ?charpe, ses gants et sa casquette fourr?e. Maman mettait son manteau. — Lois vient ? demanda Papa. — Elle a dit non, r?pondit Tiffany. Ce n’?tait qu’un petit mensonge. Papa se mettrait en col?re si Tiffany lui disait que Lois n’avait m?me pas pris la peine de r?pondre. — Ce n’est pas surprenant, dit Maman en enfilant ses gants. Je l’ai entendue se garer tr?s tard, la nuit derni?re. Je ne sais m?me pas quelle heure il ?tait. Tiffany ressentit une autre pointe d’envie en pensant ? la voiture de sa s?ur. Lois ?tait tellement libre depuis qu’elle ?tait ? l’universit? ! Et personne ne faisait attention ? l’heure ? laquelle elle rentrait. Tiffany ne l’avait m?me pas entendue monter. Je devais dormir…, pensa-t-elle. Pendant que Tiffany enfilait son manteau, Papa grommela : — Vous tra?nez. On va ?tre en retard ? la messe. — On sera ? l’heure, r?pondit calmement Maman. — Je vais d?marrer la voiture. Il ouvrit la porte et sortit en tapant des pieds. Tiffany et sa m?re termin?rent rapidement de se pr?parer, avant de le suivre. L’air frais fouetta le visage de Tiffany. Il restait de la neige par terre. Tiffany aurait pr?f?r? rester dans son lit douillet. Il faisait trop mauvais pour aller o? que ce soit. Soudain, sa m?re poussa un hoquet de surprise. — Lester, qu’est-ce que tu as ? s’?cria-t-elle. Tiffany vit que Papa s’?tait arr?t? devant la porte ouverte du garage. Il avait le regard fixe, choqu? et horrifi?. — Que se passe-t-il ? s’exclama ? nouveau Maman. Papa se tourna vers elle. Il semblait avoir du mal ? parler. Enfin, il l?cha : — Appelle le 911. — Pourquoi ? r?pondit Maman. Papa ne r?pondit pas. Il entra dans le garage. Maman se pr?cipita ? sa suite. Quand elle atteignit la porte, elle poussa un cri qui p?trifia Tiffany d’effroi. Maman se pr?cipita dans le garage. Pendant un long moment, Tiffany resta immobile, incapable de faire un geste. — Qu’est-ce qu’il y a ? appela-t-elle. La voix de sa m?re lui r?pondit, charg?e de sanglots : — Retourne ? l’int?rieur, Tiffany. — Pourquoi ? s’?cria Tiffany. Maman sortit du garage en courant. Elle attrapa Tiffany par le bras et l’entraina de force vers la maison. — Ne regarde pas, dit-elle. Retourne dans la maison. Tiffany se d?battit, se d?gagea et courut vers le garage. Elle eut besoin de quelques secondes pour comprendre ce qu’elle voyait. Il y avait les trois voitures gar?es ? l’int?rieur. Au fond, ? gauche, Papa se d?battait avec une ?chelle. Quelque chose ?tait pendu par une corde au plafond. C’?tait une personne. C’?tait sa s?ur. CHAPITRE UN Riley Paige venait de se mettre ? table pour d?ner, quand sa fille dit soudain quelque chose qui la fit sursauter : — On n’est pas beaux, tous ensemble ? La petite famille parfaite ! Riley fixa du regard April, qui rougit d’embarras. — J’ai dit ?a ? voix haute ? bredouilla-t-elle. C’?tait un peu b?te ou quoi ? Riley ?clata de rire et balaya l’assembl?e du regard. Son ex-mari, Ryan, ?tait assis en bout de table. A sa gauche, sa fille de quinze ans, April, ?tait assise ? c?t? de leur bonne, Gabriela. A sa droite, il y avait Jilly, nouvelle venue dans la famille. Elle ?tait ?g?e de treize ans. April et Jilly avaient pr?par? des hamburgers pour le repas du dimanche soir, offrant ? Gabriela un repos bien m?rit?. Ryan mordit dans le sien, en disant : — On est une famille, apr?s tout. Regardez-nous. Riley ne r?pondit pas. Une famille, pensa-t-elle. C’est vraiment ce qu’on est ? Cette id?e la prenait au d?pourvu. Apr?s tout, elle et Ryan s’?taient s?par?s pendant presque deux ans et ils ?taient divorc?s depuis six mois. M?me s’ils passaient ? nouveau du temps ensemble, Riley ?vitait de trop r?fl?chir ? leur relation. Elle avait mis de c?t? des ann?es de trahison et d’incompr?hension pour se focaliser sur la paix retrouv?e. Bien s?r, il y avait April, dont l’adolescence n’avait pas ?t? facile. Son d?sir de construire une famille tous ensemble allait-il durer ? Riley savait encore moins ce qui se passait dans la t?te de Jilly. La gamine avait essay? de vendre son corps dans un relais routier de Phoenix. C’?tait l? que Riley l’avait trouv?e. Elle l’avait sauv?e de cette triste vie et d’un p?re violent. Maintenant, elle esp?rait pouvoir l’adopter, mais Jilly ?tait une fille perturb?e. Avec elle, il fallait vivre au jour le jour. La personne sur laquelle Riley ?tait certaine de pouvoir compter, c’?tait Gabriela. La bonne guat?malt?que travaillait dans la famille depuis longtemps, bien avant le divorce. Gabriela ?tait une femme responsable, solide et aimante. — Qu’en pensez-vous, Gabriela ? demanda Riley. Gabriela sourit. — On peut choisir sa famille au lieu d’en h?riter, dit-elle. Le sang ne fait pas tout. L’amour, c’est tout ce qui compte. Sa d?claration r?chauffa imm?diatement Riley. Elle pouvait toujours compter sur Gabriela pour dire ce qu’il fallait. Elle balaya ? nouveau l’assembl?e du regard avec un nouveau sentiment de satisfaction. En cong? depuis un mois, elle ?tait contente de passer du temps dans sa maison. Et de profiter de ma famille, pensa-t-elle. Puis April dit autre chose qui la fit sursauter, une fois encore : — Papa, quand est-ce que tu reviens t’installer avec nous ? Ryan resta bouche b?e. Comme souvent, Riley se demanda si ses efforts allaient durer ou si c’?tait trop beau pour ?tre vrai. — Ce n’est pas une question qui va se r?gler comme ?a, dit Ryan. — Ah bon ? s’?tonna April. Tu ferais mieux de vivre ici. Je veux dire, toi et Maman, vous couchez ensemble et tu es l? presque tous les jours. Riley sentit qu’elle devenait ?carlate. Choqu?e, Gabriela donna ? April un coup de coude dans les c?tes. — ?Chica! ?Silencio! dit-elle. Jilly eut un large sourire. — Eh, c’est une super id?e. Comme ?a, je suis s?re d’avoir des bonnes notes. C’?tait vrai : Ryan avait aid? Jilly ? rattraper son retard dans sa nouvelle ?cole, surtout en sciences sociales. Il ?tait tr?s pr?sent pour tout le monde, ces derniers mois. Riley croisa son regard. Il ?tait rouge, lui aussi. Elle ne savait que dire. L’id?e n’?tait pas d?plaisante. Elle s’?tait habitu?e ? passer la nuit avec Ryan. La routine s’?tait mise en place facilement et rapidement – peut-?tre un peu trop. Ce qui rendait les choses si faciles, c’?tait peut-?tre qu’elle n’avait justement pas pris le temps d’y r?fl?chir et de prendre une d?cision claire et d?finitive. Elle pensa ? ce qu’April venait de dire : « La petite famille parfaite. » C’?tait l’image qu’ils renvoyait aujourd’hui, mais Riley n’?tait pas tr?s ? l’aise. Et si cette perfection n’?tait qu’une illusion ? Comme lire un bon roman ou regarder un bon film ? Elle ne savait que trop bien combien le monde pouvait ?tre cruel. Elle avait consacr? sa vie ? traquer les monstres. Depuis un mois, elle avait presque r?ussi ? l’oublier. Un sourire fendit le visage de Ryan. — Pourquoi on ne s’installerait pas tous chez moi ? dit-il. Il y a de la place pour tout le monde. Riley ravala un hoquet. Elle ne comptait pas retourner vivre dans la grande maison de banlieue qu’elle avait partag?e avec Ryan pendant des ann?es. Elle y avait trop de souvenirs d?plaisants. — Je ne pourrais jamais partir d’ici, dit-elle. J’y suis vraiment bien. April regardait son p?re avec un m?lange d’impatience et d’enthousiasme. — C’est ? toi de d?cider, Papa, dit-elle. Tu viens ou pas ? Riley se tourna vers lui d’un air interrogateur. Elle savait pourquoi il avait du mal ? prendre sa d?cision. Il travaillait pour un cabinet d’avocats bas? ? Washington, mais il passait beaucoup de temps chez lui. Ici, il n’aurait pas de place pour travailler. Enfin, Ryan dit : — Il faudrait que je garde la maison. Ce serait mon bureau. April faillit bondir d’excitation. — Alors, tu dis oui ? demanda-t-elle. Ryan sourit silencieusement pendant un instant. — Je suppose que oui, r?pondit-il enfin. April poussa un couinement de joie. Jilly applaudit des deux mains en gloussant. — Super ! dit Jilly. Passe-moi le ketchup, s’il te plait… Papa. Ryan, April, Gabriela et Jilly se lanc?rent dans des conversations anim?es. Riley t?cherait de profiter de leur bonne humeur tant qu’elle durerait. Un jour ou l’autre, on l’appellerait pour qu’elle se lance ? la poursuite d’un monstre – encore un autre. Cette pens?e la fit fr?mir. Etait-il d?j? l?, dans l’ombre, pr?t ? frapper ? * Le lendemain, April n’avait pas ?cole toute la journ?e : des cours avaient ?t? supprim?s pour organiser des rencontres entre les parents et les enseignants. Devant les suppliques de sa fille, Riley avait c?d? et lui avait permis de ne pas y aller. Elles avaient d?cid? d’aller faire du shopping pendant que Jilly ?tait en classe. Le rayons paraissaient interminables et toutes les boutiques se ressemblaient. Des mannequins tr?s minces v?tus de v?tements tendance prenaient des poses physiquement improbables dans les vitrines. Ils se ressemblaient d’autant plus qu’ils n’avaient pas de t?te. Cependant, April savait d?s le premier coup d’?il ce qu’il y avait dans telle ou telle boutique et ce qui lui plaisait. Elle voyait apparemment beaucoup de diversit? l? o? Riley ne voyait qu’une triste uniformit?. Un truc d’adolescente, je suppose…, pensa Riley. Au moins, il n’y avait pas foule aujourd’hui dans le centre commercial. April pointa du doigt une boutique appel?e Towne Shoppe. — Regarde ! dit-elle. C’est marqu? : « Le luxe pour toutes les bourses ». Allons voir ! Dans la boutique, April se pr?cipita vers un rayon de jeans et de vestes. Elle choisit plusieurs v?tements pour les essayer. — J’ai bien besoin de nouveaux jeans, moi aussi, dit Riley. April leva les yeux au ciel. — Ah non, Maman, pas tes jeans de vieille ! — Je ne risque pas de choisir le m?me que toi Je dois pouvoir me d?placer sans m’inqui?ter de faire craquer les coutures. Pas d’accident de garde-robe, merci bien. April ?clata de rire. — Ce qu’il te faut, ce sont des pantalons. Et t’en trouveras pas ici. Riley passa en revue les jeans sur le pr?sentoir. Il n’y avait que des jeans slim taille basse d?chir?s ? des endroits strat?giques. Elle soupira. Elle connaissait quelques boutiques dans le centre commercial o? elle trouverait quelque chose de plus ? son go?t mais, si elle y allait, April n’h?siterait pas ? se moquer. — Je reviendrai un autre jour, dit-elle. April s’enferma dans une cabine avec un tas de jeans. Quand elle sortit pour se montrer, elle portait exactement les pantalons que Riley d?testait : tr?s serr?s, d?chir?s ? certains endroits, le nombril ? l’air. Riley secoua la t?te. — Tu devrais peut-?tre essayer mes jeans de vieille, dit-elle. C’est beaucoup plus confortable. Mais tu n’aimes pas le confort, je crois. — Non, r?pondit April en tournant devant le miroir. Je les prends. Je vais essayer les autres. April fit plusieurs allers-retours dans la cabine. Riley d?testa tout ce qu’elle lui montra, mais elle n’en dit rien. Cela ne valait pas le coup de se disputer. Et puis, Riley n’en sortirait pas gagnante. En voyant sa fille poser devant le miroir, Riley r?alisa soudain qu’elle ?tait aussi grande qu’elle et que son tee-shirt r?v?lait une silhouette bien d?velopp?e. Avec ses cheveux bruns et ses yeux noisette, la ressemblance entre la m?re et la fille ?tait frappante. Bien s?r, April n’avait pas encore les cheveux gris qui commen?aient ? appara?tre sur la t?te de Riley. Mais tout de m?me… Elle est en train de devenir une femme, pensa Riley. L’id?e la mettait mal ? l’aise. April grandissait-elle trop vite ? Elle avait travers? des moments difficiles l’ann?e derni?re. Elle avait ?t? enlev?e deux fois. La premi?re fois, elle avait ?t? enferm?e dans le noir par un sadique arm? d’un chalumeau. Elle avait aussi affront? un tueur dans leur propre maison. Et un petit copain violent l’avait drogu?e pour essayer de vendre son corps. Riley savait que c’?tait beaucoup trop pour une adolescente de quinze ans. Elle savait ?galement que c’?tait son travail qui mettait sa famille en danger. Elle culpabilisait. Pourtant, April ?tait remarquablement mature, m?me si elle faisait tout pour ressembler ? une adolescente comme une autre. Elle semblait avoir surmont? le stress post-traumatique et ses sympt?mes, mais quelles peurs lui demeuraient au fond d’elle ? S’en d?barrasserait-elle un jour ? Riley paya les nouveaux v?tements d’April et sortit du magasin. L’assurance d’April balaya quelques doutes. Tout allait mieux, maintenant. Ryan ?tait en train de d?m?nager ses affaires. April et Jilly avaient de bonnes notes ? l’?cole. Riley ?tait sur le point de proposer ? sa fille d’aller manger quand le t?l?phone d’April sonna. Elle s’?loigna pour prendre l’appel, au grand ?tonnement de Riley. C’?tait comme si le t?l?phone ?tait un ?tre vivant qui exigeait de recevoir toute l’attention de sa propri?taire. — Eh, qu’est-ce qu’il y a ? demanda April. Puis les jambes d’April flageol?rent et elle fut oblig?e de s’asseoir sur le banc. Son visage p?lit et se tordit de douleur. Des larmes se mirent ? rouler sur ses joues. Inqui?te, Riley se pr?cipita pour s’asseoir ? c?t? d’elle. — Oh l? l? ! s’exclama April. Mais comment… pourquoi… je peux pas… Un frisson de panique parcourut le corps de Riley. Que s’?tait-il pass? ? Quelqu’un ?tait-il bless? ou en danger ? S’agissait-il de Jilly, Ryan, Gabriela ? Si c’?tait le cas, Riley aurait re?u ce coup de fil, pas April. — Je suis vraiment d?sol?e, vraiment d?sol?e…, r?p?tait April. Enfin, elle raccrocha. — C’?tait qui ? demanda Riley avec angoisse. — C’?tait Tiffany, dit April d’une toute petite voix. Riley connaissait ce nom. Tiffany Pennington ?tait la meilleure amie d’April en ce moment. Riley l’avait rencontr?e deux ou trois fois. — Qu’est-ce qui s’est pass? ? demanda Riley. April la regarda avec un m?lange de chagrin et d’horreur. — La s?ur de Tiffany est morte, dit-elle enfin. Elle le disait comme si elle n’en croyait pas ses oreilles. D’une voix ?trangl?e, elle ajouta : — Ils disent que c’est un suicide. CHAPITRE DEUX Au diner, April essaya d’expliquer ? sa famille le peu qu’elle savait sur la mort de Lois. Sa propre voix lui semblait ?trange, comme si c’?tait une autre personne qui parlait. C’est comme si ce n’?tait pas vrai…, ne cessait-elle de se r?p?ter. April avait rencontr? Lois plusieurs fois en rendant visite ? Tiffany. Elle se souvenait tr?s bien de la derni?re fois qu’elle l’avait vue. Elle avait trouv? Lois souriante et pleine de vie. La jeune fille lui avait racont? des anecdotes sur son quotidien ? l’universit?. C’?tait impossible qu’elle soit morte. La mort n’?tait pas une inconnue dans la vie d’April. Sa m?re affrontait la mort tous les jours. Elle avait m?me tu? au cours de sa carri?re, mais uniquement des monstres qui devaient ?tre arr?t?s. April l’avait m?me aid?e ? se d?barrasser d’un sadique qui les avait enlev?es toutes les deux. Elle savait aussi que son grand-p?re ?tait mort depuis quatre mois, mais elle ne l’avait jamais bien connu. Le d?c?s de Lois la touchait de plus pr?s. C’?tait une mort qui paraissait ? la fois plus r?elle et d?nu?e de sens. C’?tait impossible… Sa famille partageait son incompr?hension et son ?motion. Sa m?re lui prit la main. Gabriela se signa et murmura une pri?re en espagnol. Jilly ?tait bouche b?e d’horreur et d’effroi. April essaya de se rappeler tout ce que Tiffany lui avait dit quand elles en avaient reparl? dans l’apr?s-midi. Elle lui avait expliqu? qu’hier matin, Tiffany, sa m?re et son p?re avaient trouv? le corps de Lois pendu dans le garage. La police avait conclu au suicide. En fait, tout le monde disait que c’en ?tait un. Comme si c’?tait r?gl?. Tout le monde, sauf Tiffany. Tiffany pensait que ce n’?tait pas un suicide. Quand elle termina son r?cit, le p?re d’April frissonna. — Je connais les Pennington, dit-il. Lester est le directeur financier d’une entreprise de construction. Ils ne sont pas n?cessairement tr?s riches, mais ils vivent bien. Je pensais que c’?tait une famille heureuse et stable. Pourquoi Lois ferait une chose pareille ? April s’?tait pos? la m?me question toute la journ?e. — Tiffany dit que personne ne sait. Lois ?tait en premi?re ann?e ? l’universit? Byars. Elle ?tait un peu stress?e par ses cours, mais quand m?me… Papa secoua la t?te avec compassion. — C’est peut-?tre l’explication, dit-il. Byars, c’est une ?cole difficile. C’est m?me plus difficile que Georgetown. Et tr?s cher. Je suis surpris que les Pennington aient les moyens. April soupira et ne r?pondit pas. Elle pensait que Lois avait eu une bourse, mais ? quoi servait-il de le dire ? Elle n’avait plus envie d’en parler. Elle n’avait plus envie de manger non plus. Gabriela avait fait une de ses sp?cialit?s : une soupe de poisson appel?e tapado qu’April adorait. Pourtant, elle n’avait mang? qu’une bouch?e. Pendant quelques instants, tout fut silencieux autour de la table. Puis Jilly dit : — Elle ne s’est pas suicid?e. April la d?visagea avec stup?faction, comme tous les autres. Jilly croisa les bras sur sa poitrine. Elle avait l’air tr?s s?rieux. — Quoi ? fit April. — Lois ne s’est pas suicid?e, r?p?ta Jilly. — Comment tu le sais ? — Je l’ai rencontr?e, tu te souviens ? Je le saurais. Ce n’?tait le genre de fille ? faire ?a. Elle ne voulait pas mourir. Jilly se tut. Puis elle reprit : — Je sais ce que ?a fait quand on veut mourir. Elle ne voulait pas mourir. J’en suis s?re. Le c?ur d’April lui remonta dans la gorge. Elle savait que Jilly avait v?cu l’enfer. Jilly lui avait dit qu’une fois, son p?re l’avait enferm?e dehors toute la nuit. Jilly avait dormi dans un tuyau d’?vacuation. Le lendemain, elle s’?tait rendue dans un relais routier avec l’intention de se prostituer. C’?tait l? que Maman l’avait trouv?e. Si quelqu’un savait ce que ?a faisait d’avoir envie de mourir, ce devait ?tre Jilly. Une bouff?e de chagrin et d’horreur serra la poitrine d’April. Et si Jilly avait tort ? Lois ?tait-elle si malheureuse ? — Excusez-moi, dit-elle. Je n’ai plus faim. April se leva de table et se pr?cipita dans sa chambre. Elle ferma la porte et se jeta sur le lit en sanglotant. Elle n’aurait su dire combien de temps passa. Au bout d’un long moment, on frappa ? la porte. — April, je peux entrer ? demanda sa m?re. — Oui, r?pondit-elle d’une voix ?trangl?e. April se redressa. Maman entra dans la pi?ce avec un sandwich au fromage pos? dans une assiette, un sourire compatissant aux l?vres. — Gabriela s’est dit que ce serait plus facile ? dig?rer qu’une soupe de poisson, dit Maman. Elle ?tait inqui?te : elle ne veut pas que tu te rendes malade en sautant un repas. Je m’inqui?te aussi. April sourit entre ses larmes. C’?tait vraiment gentil de la part de Gabriela et de Maman. — Merci, dit-elle. Elle s’essuya les yeux et mordit dans son sandwich. Maman s’assit au bord du lit, ? c?t? d’elle, et lui prit la main. — Tu veux qu’on en parle ? demanda-t-elle. April ravala un sanglot. Elle pensa soudain ? sa meilleure amie, Crystal, qui avait d?m?nag?. Son p?re, Blaine, s’?tait fait tabasser ici-m?me, dans la maison. Et m?me si Maman et lui se plaisaient beaucoup, il avait ?t? tellement secou? par les ?v?nements qu’il avait d?cid? de partir. — J’ai une dr?le d’impression, dit April. Comme si c’?tait de ma faute. Il se passe toujours des choses terribles chez nous. C’est comme si c’?tait contagieux. Je sais que ?a n’a pas de sens mais… — Je comprends ce que tu ressens, dit Maman. April s’?tonna : — Ah bon ? Maman avait l’air triste. — Je ressens souvent la m?me chose, dit-elle. Mon travail est dangereux. Je mets en danger tous ceux que j’aime. Je me sens coupable, vraiment coupable. — Mais ce n’est pas de ta faute, dit April. — Alors, pourquoi penses-tu que ce serait de la tienne ? April ne sut que dire. — Qu’est-ce qui te tracasse ? demanda Maman. April prit le temps de r?fl?chir avant de r?pondre. — Maman, Jilly a raison. Je ne pense pas que Lois se serait suicid?e. Et Tiffany non plus. Je connaissais Lois. Elle ?tait heureuse et une des personnes les plus solides que je connaissais. Tiffany l’admirait beaucoup. C’?tait un peu son h?ro?ne. Je ne comprends pas. April comprit ? l’expression sur le visage de sa m?re que celle-ci ne la croyait pas. Elle pense que je suis hyst?rique, pensa April. — April, si la police a conclu au suicide et si ses parents… — Eh bien, ils se trompent, insista April, surprise par la s?cheresse de sa propre voix. Maman, tu devrais v?rifier. Tu connais tout ?a mieux qu’eux. M?me mieux que la police. Maman secoua la t?te tristement. — April, je ne peux pas faire ?a. Je ne peux pas m’imposer sur une enqu?te, surtout si le dossier est referm?. Pense ? ce que ressentiraient ses proches. April se retint d’?clater en sanglots. — Maman, je t’en supplie. Si Tiffany n’apprend jamais la v?rit?, ?a va lui g?cher la vie. Elle ne s’en remettra jamais. S’il te plait, tu dois faire quelque chose. April demandait une tr?s grande faveur ? sa m?re. Elle en avait bien conscience. Maman ne r?pondit pas tout de suite. Elle se leva et se pencha ? la fen?tre, visiblement plong?e dans ses pens?es. Sans d?tourner le regard, Maman dit enfin : — Je vais parler aux parents de Tiffany demain. S’ils acceptent, bien s?r. C’est ce que je vais faire. — Je peux venir avec toi ? demanda April. — Tu as ?cole demain, dit Maman. — On peut y aller apr?s l’?cole. Maman se tut, avant de r?pondre simplement : — D’accord. April se leva et la prit dans ses bras. Elle aurait voulu lui dire merci, mais elle ?tait tellement boulevers?e que le mot ne voulait pas sortir. Si quelqu’un peut d?couvrir la v?rit?, c’est Maman, pensa April. CHAPITRE TROIS L’apr?s-midi suivant, Riley conduisit April chez les Pennington. Malgr? ses doutes, elle savait que c’?tait la meilleure chose ? faire. Je le dois ? April, pensa-t-elle en roulant. Apr?s tout, elle savait ce que ?a faisait d’?tre s?r d’une chose que tous les autres refusaient de croire. Et April ?tait certaine que Lois avait ?t? assassin?e. Quant ? Riley, elle attendait d’avoir une intuition. En s’engageant dans le quartier de la classe ais?e de Fredericksburg, elle se rappela que les monstres se cachaient parfois derri?re les fa?ades les plus tranquilles. Il y avait peut-?tre de noirs secrets dans ces charmants pavillons. Riley avait affront? trop souvent la mort pour ne pas s’en douter. Que la mort de Lois soit ou non un suicide, un monstre ?tait bel et bien entr? dans la famille Pennington. Riley se gara devant la maison. Il y avait deux ?tages, sans compter le rez-de-chauss?e. Riley pensa ? ce qu’avait dit Ryan ? propos des Pennington. « Ils ne sont pas n?cessairement tr?s riches, mais ils vivent bien. » La maison le confirmait. C’?tait un bon quartier. La seule chose qui sortait de l’ordinaire, c’?tait la rubalise de la police autour du garage o? la famille avait retrouv? leur fille pendue. Une brise fraiche fouetta le visage de Riley quand elle descendit de son v?hicule et se dirigea vers la maison. Plusieurs voitures ?taient gar?es dans l’all?e. Elles sonn?rent. Tiffany vint ouvrir et April se jeta dans ses bras. Les deux filles se mirent ? sangloter. — Oh, Tiffany, je suis tellement d?sol?e, dit April. — Merci. Merci d’?tre venue, r?pondit Tiffany. Leur douleur serra la gorge de Riley. Les deux filles ?taient si jeunes, ? peine sorties de l’enfance. Il semblait injuste qu’elles soient confront?es ? une telle ?preuve. Pourtant, elle ne put s’emp?cher d’?tre fi?re d’April et de sa compassion. Je ne me d?brouille peut-?tre pas si mal dans mon r?le de m?re, pensa Riley. Tiffany ?tait un peu plus petite qu’April et un peu plus d?gingand?e comme pouvait l’?tre une adolescente. Elle avait des cheveux blond v?nitien et la peau constell?e de taches de son, ce qui faisait ressortir ses yeux rouges. Tiffany conduisit Riley et April dans le salon. Les parents de Tiffany ?taient assis sur le canap?, s?par?s l’un de l’autre par quelques centim?tres. Leur langage corporel r?v?lait-il des informations ? Riley n’en ?tait pas certaine. On faisait son deuil de bien des mani?res diff?rentes. D’autres personnes ?taient debout, en retrait, et se parlaient ? voix basse. Ce devait ?tre de la famille et des amis. Ils ?taient venus voir s’ils pouvaient ?tre d’aucune aide. On s’agitait dans la cuisine. Quelqu’un devait pr?parer ? manger. A travers une arche menant sur la salle ? manger, elle vit deux couples disposer des photos et des souvenirs sur la table. Il y avait ?galement des photos de Lois et de sa famille ? diff?rentes p?riodes de leur vie dans le salon. Seulement deux jours plut?t, la fille sur les photos ?tait encore en vie. Riley fr?mit en y pensant. Que ferait-elle si elle perdait April de mani?re si brutale ? C’?tait une pens?e gla?ante, d’autant plus que ce n’?tait pas pass? loin ? plusieurs reprises. Qui viendrait chez elle pour la r?conforter ? Et voudrait-elle vraiment qu’on la r?conforte ? Riley chassa ses id?es noires quand Tiffany la pr?senta ? ses parents, Lester et Eunice. — Je vous en prie, ne vous levez pas, dit Riley quand ils firent mine de bouger. Riley et April s’assirent ? c?t? d’eux. Eunice avait les m?mes taches de son que sa fille et le m?me couleur de cheveux. Lester avait le teint plus mat, et le visage long et fin. — Toutes mes condol?ances, dit Riley. Le couple la remercia. Lester parvint m?me ? esquisser un sourire. — On ne s’?tait jamais rencontr?s, mais je connais un peu Ryan, dit-il. Comment va-t-il ? Tiffany tapa sur l’?paule de son p?re et lui souffla : — Ils ont divorc?, Papa. Lester s’empourpra. — Oh, je suis vraiment d?sol?, dit-il. Riley rougit ? son tour. — Ne le soyez pas. Comme disent les jeunes, c’est compliqu?. Lester hocha la t?te, un sourire triste aux l?vres. Pendant de longues minutes, personne ne dit rien. Les gens continuaient de s’agiter autour d’eux en faisant le moins de bruit possible. Puis Tiffany dit : — Maman, Papa… La m?re d’April est un agent du FBI. Lester et Eunice rest?rent bouche b?e, ne sachant visiblement que dire. Embarrass?e, Riley chercha ses mots. Elle savait qu’April avait t?l?phon? ? Tiffany la veille pour leur dire qu’elles passeraient. Apparemment, Tiffany n’avait pas expliqu? ? ses parents ce que Riley faisait dans la vie. Tiffany regarda tour ? tour son p?re et sa m?re. Puis elle dit : — Je me suis dit qu’elle pourrait nous aider ? savoir… ce qui s’est vraiment pass?. Lester poussa un hoquet et Eunice un soupir amer. — Tiffany, on en a d?j? parl?, dit-elle. On sait ce qui s’est pass?. La police en est s?re. On n’a aucune raison de penser le contraire. Lester se leva sur des jambes flageolantes. — Je ne veux pas entendre ?a, dit-il. Je ne… je ne peux pas. Il d?ambula en direction du salon. Riley vit deux couples se pr?cipiter pour le r?conforter. — Tiffany, tu devrais avoir honte, dit Eunice. Les yeux de la jeune fille se mouill?rent de larmes. — Mais je veux seulement connaitre la v?rit?, Maman. Lois ne s’est pas suicid?e. Elle n’aurait jamais fait ?a. J’en suis s?re. Eunice se tourna vers Riley. — Je suis d?sol?e que vous soyez oblig?e d’assister ? ?a, dit-elle. Tiffany a du mal ? accepter la v?rit?. — C’est toi et Papa qui avez du mal ? accepter la v?rit?, r?torqua Tiffany. — Chut, souffla sa m?re. Eunice tendit un mouchoir ? sa fille. — Tiffany, il y a des choses que tu ne savais pas ? propos de Lois, dit-elle d’une voix prudente. Elle ?tait plus malheureuse qu’elle ne le laissait entendre. Elle adorait l’universit?, mais ce n’?tait pas facile pour elle. Il fallait qu’elle ait de tr?s bonnes notes pour garder sa bourse, et c’?tait difficile pour elle de quitter la maison. Elle commen?ait ? prendre des antid?presseurs et elle voyait un psy ? Byars. Ton p?re et moi, on pensait qu’elle allait mieux, mais on avait tort. Tiffany essayait de se calmer, mais elle ?tait encore tr?s en col?re. — Je d?teste cette ?cole, dit-elle. Je n’irai jamais l?-bas. — C’est un endroit tr?s bien, dit Eunice. Une tr?s bonne ?cole. C’est tr?s difficile, c’est tout. — Je parie que les autres filles la trouvaient pas si bien que ?a, dit Tiffany. April ?coutait son amie avec attention. — Quelles autres filles ? demanda-t-elle. — Deanna et Cory, r?pondit Tiffany. Elles sont mortes aussi. Eunice secoua la t?te tristement et dit ? Riley. — Ces deux filles se sont suicid?es ? Byars le semestre dernier. C’est une ann?e funeste l?-bas. Tiffany regarda sa m?re fixement. — C’?taient pas des suicides, dit-elle. Lois n’y croyait pas. Elle disait toujours qu’il y avait quelque chose de pas normal. Elle ne savait pas ce que c’?tait, mais elle m’a dit que ?a devait ?tre horrible. — Tiffany, elles se sont suicid?es, insista Eunice d’un air las. Tout le monde le dit. Ces choses-l? arrivent. Tiffany se leva, en tremblant de rage et de frustration. — Lois n’est pas morte comme ?a, dit-elle. Eunice dit : — Quand tu seras plus ?g?e, tu comprendras que la vie est plus dure que tu ne l’imagines. Maintenant, rassied-toi, s’il te plait. Tiffany s’assit en silence. Le regard d’Eunice se perdit dans le vide. Riley se sentit soudain tr?s mal ? l’aise. — On ne voulait pas vous d?ranger comme ?a, dit Riley. Je vous pr?sente mes excuses. Il vaut mieux qu’on y aille. Eunice hocha la t?te en silence. Riley et April quitt?rent la maison. — On aurait d? rester, dit April d’une voix maussade une fois dehors. On aurait d? poser plus de questions. — Non, on ne faisait que leur causer du chagrin, dit Riley. C’?tait une tr?s mauvaise id?e. April partit en courant vers le garage. — Qu’est-ce que tu fais ? s’exclama Riley. April s’arr?ta devant la barri?re de rubalise install?e par la police. — April, ne t’approche pas ! April ignora les scell?s et sa m?re : elle tourna la poign?e. La porte tourna sur ses gonds. April se glissa sous la rubalise et entra dans le garage. Riley la suivit, avec la ferme intention de la gronder. Mais sa curiosit? prit le dessus et elle jeta un ?il dans le garage. Il n’y avait pas de voiture ? l’int?rieur, ce qui rendait le grand espace vide ?trangement caverneux. Des rais de lumi?re se faufilaient par les fen?tres. April lui montra du doigt un coin de la pi?ce. — Tiffany m’a dit que Lois a ?t? retrouv?e l?, dit-elle. Il y avait du ruban adh?sif au sol et de grosses poutres au-dessus de leurs t?tes, ainsi qu’une ?chelle pos?e contre le mur. — Viens, dit Riley. On ne devrait pas ?tre ici. Elle traina sa fille vers la sortie et referma la porte. En marchant vers la voiture, Riley visualisa la sc?ne. Il ?tait facile d’imaginer la jeune fille monter ? l’?chelle et se pendre toute seule l?-haut. Mais est-ce vraiment ce qui s’est pass? ? se demanda-t-elle. Elle n’avait aucune raison de penser le contraire. Pourtant, elle commen?ait ? avoir un petit doute. * Peu apr?s, de retour ? la maison, Riley appela le m?decin l?giste, Danica Selves. Elle s’entendait tr?s bien avec Danica depuis des ann?es. Quand Riley ?voqua le d?c?s de Lois Pennington, Danica eut l’air surpris : — Pourquoi tu t’int?resses ? ce dossier ? demanda-t-il ? C’est pour le FBI ? — Non, c’est personnel. — Personnel ? Riley h?sita avant de r?pondre : — Ma fille est tr?s proche de la s?ur de Lois. Elle connaissait aussi un peu Lois. Ma fille et son amie ont toutes les deux du mal ? croire ? la th?se du suicide. — Je vois, dit Danica. Eh bien, la police n’a trouv? aucun signe de lutte. Et j’ai effectu? moi-m?me les tests et l’autopsie. D’apr?s les r?sultats sanguins, elle a ingurgit? une forte dose d’alprazolam avant de mourir. Je pense qu’elle voulait ?tre s?re de ne rien sentir. Quand elle s’est pendue, elle ne se rendait peut-?tre m?me plus compte de ce qu’elle faisait. Elle s’est rendu la t?che plus facile. — Ce serait une ?vidence, dit Riley. — Pour moi, oui, r?pondit Danica. Riley la remercia et raccrocha. Ce fut alors qu’April monta l’escalier avec une calculette et du papier. — Maman, je crois que j’ai trouv? ! dit-elle avec excitation. C’est forc?ment un meurtre. Elle s’assit ? c?t? de Riley et lui montra les nombres qu’elle venait d’?crire. — J’ai fait des recherches sur Internet, dit-elle. J’ai lu que sur cent mille ?tudiants, sept virgule cinq se suicidaient. ?a correspond ? z?ro virgule z?ro z?ro soixante-quinze pour cent. Il n’y a que sept cents ?tudiants ? Byars et trois d’entre eux se seraient suicid?s ces derniers mois. ?a fait plus de z?ro virgule quarante-trois pour cent, c’est-?-dire cinquante-sept fois plus que la moyenne ! C’est impossible ! Le c?ur de Riley se serra. April avait beaucoup r?fl?chi au sujet et c’?tait appr?ciable. Elle faisait m?me preuve d’une grande maturit?. — April, je suis s?re que ton calcul est logique, mais… — Mais quoi ? Riley secoua la t?te. — ?a ne prouve rien du tout. April ?carquilla les yeux. — Comment ?a ? Pourquoi ?a ne prouve rien ? — Quand on fait des statistiques, on tombe parfois sur ce qu’on appelle des aberrations. Ce sont des exceptions qui ne suivent pas la moyenne. Par exemple, ma derni?re affaire… L’empoisonneuse, tu te souviens ? La plupart des tueurs en s?rie sont des hommes. Cette fois, c’?tait une femme. Et la plupart des tueurs aiment voir leurs victimes mourir, mais celle-ci n’en ressentait pas le besoin. C’est la m?me chose. Dans certaines universit?s, le taux de suicide est beaucoup plus ?lev? que la moyenne. April la regarda fixement. — April, je viens de parler au m?decin l?giste qui a proc?d? ? l’autopsie. Elle est certaine que la mort de Lois ?tait un suicide. Et elle connait son boulot. C’est une experte. Nous devons faire confiance ? son jugement. Le visage d’April se tordit de col?re. — Pourquoi ce n’est pas ? mon jugement que tu ferais confiance pour une fois !? Elle sortit en trombe de la pi?ce et descendit les marches au pas de course. Au moins, elle est s?re de savoir ce qui s’est pass?, pensa Riley. Riley ne pouvait pas en dire autant. Son intuition ne lui disait encore rien. CHAPITRE QUATRE ?a ne s’arr?tait jamais. Le monstre qui s’appelait Peterson retenait April prisonni?re, quelque part, au-dessus de sa t?te. Riley se d?battait pour trouver la sortie dans le noir. Chaque pas ?tait difficile, mais elle savait que le temps pressait. Son fusil en bandouli?re sur l’?paule, Riley tituba et d?gringola une pente boueuse. Elle atterrit dans une rivi?re. Soudain, ils ?taient l?. Peterson ?tait debout. Il avait de l’eau jusqu’aux chevilles. A quelques pas, April ?tait allong?e dans la rivi?re, ? moiti? immerg?e, les mains et les pieds entrav?s. Riley tendit la main vers son fusil, mais Peterson leva son pistolet et pointa le canon sur April. — N’y pense m?me pas, hurla-t-il. Un geste et c’est fini. Riley resta paralys?e d’horreur. Si elle levait son fusil, Peterson tuerait April avant m?me qu’elle ait eu le temps de tirer. Elle posa lentement son fusil par terre. La terreur dans le regard de sa fille la hanterait pour toujours… Riley s’arr?ta de courir et se pencha, les mains sur les cuisses, pour reprendre son souffle. Il ?tait encore tr?s t?t. Elle ?tait sortie faire son jogging, mais l’horrible souvenir l’avait stopp?e dans son ?lan. L’oublierait-elle jamais ? Arr?terait-elle un jour de se sentir coupable d’avoir mis April en danger de mort ? Non, pensa-t-elle, et c’est normal. Je ne dois pas oublier. Elle inspira ? pleins poumons l’air glac?, jusqu’? ce qu’elle se sente mieux. Puis elle se remit en marche sur le sentier familier. De p?les rayons du soleil passaient entre les branches des arbres. Le parc n’?tait pas loin de la maison. Il ?tait facile de s’y rendre. Riley venait souvent courir dans la matin?e. L’exercice l’aidait ? chasser les fant?mes et les d?mons. Aujourd’hui, cependant, son jogging avait eu l’effet inverse. Ce qui s’?tait pass? la veille – la visite chez les Pennington, puis dans le garage et la col?re d’April – avait raviv? un torrent de mauvais souvenirs. Et c’est ? cause de moi, pensa Riley en pressant le pas pour retrouver une petite foul?e. Elle pensa alors ? ce qui s’?tait pass? ensuite, dans la rivi?re. Le pistolet de Peterson s’?tait enray?. Riley planta son couteau entre ses c?tes, avant de tituber et tomber dans la rivi?re glac?e. Bless?, Peterson parvenait pourtant ? la maintenir sous l’eau. Du coin de l’?il, elle vit April lever dans ses mains ligot?es le fusil que Riley avait elle-m?me laiss? tomber. La crosse s’?crasa sur la nuque de Peterson. Le monstre se tourna vers April et lui plongea la t?te sous l’eau. Sa fille allait se noyer. Riley saisit un caillou pointu. Elle se jeta sur Peterson et le frappa ? la t?te. Il tomba ? la renverse. Elle bondit sur lui. Encore et encore, elle jeta sa pierre sur le visage de Peterson. L’eau de la rivi?re se chargea de sang. Riley acc?l?ra l’allure, r?veill?e par le souvenir. Elle ?tait fi?re de sa fille. April avait fait preuve de courage et de d?brouillardise cette terrible nuit. Elle avait fait preuve des m?mes qualit?s en d’autres circonstances dangereuses. Et maintenant, April ?tait en col?re contre Riley. Et Riley ne pouvait pas s’emp?cher de penser qu’elle avait de bonnes raisons. * Riley ne se sentait pas ? sa place aux fun?railles de Lois Pennington. Elle allait rarement ? l’?glise. Son p?re ?tait un ancien Marine endurci qui ne croyait en personne d’autre que lui-m?me. Riley avait v?cu une partie de son enfance et de son adolescence chez un oncle et une tante qui avaient bien essay? de l’emmener ? l’?glise, mais Riley avait refus? par esprit de r?bellion. Et Riley d?testait les fun?railles. Elle avait vu trop souvent la mort de pr?s dans tout ce qu’elle avait de brutal, au cours de sa carri?re dans le maintien de l’ordre public. Les fun?railles avaient un c?t? artificiel. Elles maquillaient la mort pour en faire quelque chose de paisible et de propre. C’est trompeur, ne cessait-elle de penser. Cette fille ?tait d?c?d?e d’une mort violente, que ce soit un suicide ou un meurtre. Mais April avait insist? pour y aller et Riley n’avait pas voulu la laisser seule. C’?tait assez ironique : maintenant, c’?tait Riley qui se sentait seule. Elle ?tait assise au dernier rang dans le sanctuaire surpeupl?. April ?tait devant, assise juste derri?re la famille, aussi pr?s de Tiffany que possible. Riley ?tait contente de savoir qu’elle ?tait avec son amie et cela ne la d?rangeait pas d’?tre toute seule. Le soleil traversait les vitraux. Le cercueil ?tait d?cor? de bouquets de fleurs et de couronnes. C’?tait un service tr?s digne et le ch?ur chantait bien. Le pr?cheur parlait d’un ton monocorde de la foi et du salut, assurant ? tous que Lois avait trouv? la paix. Riley ne faisait pas attention ? ce qu’il disait. Elle cherchait des indices. Pourquoi Lois Pennington ?tait-elle d?c?d?e ? La veille, elle avait remarqu? que les parents de Lois s’?taient assis sur le canap? de mani?re ? ne pas se toucher. Elle n’avait pas su interpr?ter leur langage corporel. A pr?sent, Lester Pennington tenait contre lui sa femme Eunice pour la r?conforter. Ils avaient l’air de parents ordinaires pleurant la mort de leur enfant. Rien ne faisait tiquer Riley. Et c’?tait cela qui la mettait mal ? l’aise. Elle se consid?rait comme un observateur averti de la nature humaine. Si Lois s’?tait r?ellement suicid?e, sa vie de famille avait d? ?tre perturb?e. Mais rien ne le laissait penser… Ils ?taient en deuil. Le pr?cheur termina son sermon, sans mentionner une seule fois la cause suppos?e du d?c?s de Lois. Des amis et des parents se succ?d?rent pour parler avec ?motion de Lois. Ils ?voqu?rent de bons souvenirs, notamment des histoires dr?les qui provoqu?rent des rires tristes et ?touff?s dans l’assembl?e. Rien qui parle du suicide, pensa Riley. Quelque chose n’allait pas. Un proche de Lois allait-il finir par reconnaitre qu’elle ne se sentait pas bien, qu’elle se battait contre la d?pression et contre des d?mons int?rieurs, ou qu’elle avait appel? au secours ? Quelqu’un allait-il proposer de tirer les le?ons de cette mort tragique en se soutenant les uns les autres ? Mais personne ne pronon?a un mot ? ce sujet. Personne ne voulait en parler. Comme s’ils avaient honte ou qu’ils ?taient surpris. Ou les deux. Peut-?tre qu’ils n’y croyaient pas tout ? fait. Apr?s les t?moignages, on invita les personnes pr?sentes ? s’approcher du corps. Riley resta bien assise. Elle ?tait certaine que le croque-mort avait fait du bon travail. Ce qui restait de la pauvre Lois ne ressemblait plus ? ce que ses parents avaient trouv? dans le garage. Et Riley savait d?j? reconnaitre un corps mort par strangulation. Enfin, le pr?cheur donna sa b?n?diction et on emporta le cercueil. La famille sortit la premi?re, puis tout le monde suivit. En sortant, Riley vit Tiffany et April ?changer une ?treinte larmoyante. Quand Tiffany l’aper?ut, elle se pr?cipita vers elle. — Vous pouvez faire quelque chose ? demanda-t-elle d’une voix ?trangl?e. Secou?e, Riley parvint ? lui r?pondre : — Non, je suis d?sol?e. Avant que Tiffany n’ait eu le temps d’insister, son p?re l’appela. La famille monta dans une limousine noire. Tiffany les rejoignit et le v?hicule d?marra. Riley se tourna vers April, qui refusa de croiser son regard. — Je vais prendre le bus pour rentrer, dit-elle. Elle tourna les talons et Riley n’essaya pas de l’en emp?cher. Le c?ur serr?, elle se dirigea vers sa voiture dans le parking. * Ce soir-l?, le diner fut beaucoup moins joyeux qu’il ne l’avait ?t? deux jours plus t?t. April ne parlait toujours pas ? Riley, ou ? qui que ce soit. Son chagrin ?tait contagieux. Ryan et Gabriela avaient la mine sombre. Au milieu du repas, Jilly s’exclama soudain : — Je me suis fait une copine ? l’?cole aujourd’hui. Elle s’appelle Jane. Elle a ?t? adopt?e, comme moi. Le visage d’April s’?claira. — C’est g?nial, Jilly ! — Ouais, on a beaucoup de choses en commun. On parle beaucoup. Le moral de Riley remonta un peu. C’?tait bien que Jilly commence ? se faire des amis. Et Riley savait qu’April s’inqui?tait pour elle. Les deux filles discut?rent un peu, puis le silence s’installa ? nouveau, aussi sombre qu’auparavant. Riley savait que Jilly essayait de remonter le moral d’April, mais la jeune fille avait l’air inquiet ? pr?sent. La tension au sein de sa nouvelle famille devait la mettre mal ? l’aise. Jilly avait peur de perdre ce qu’elle venait tout juste de trouver. J’esp?re qu’elle se trompe, pensa Riley. Apr?s le diner, les filles mont?rent dans leurs chambres et Gabriela nettoya la cuisine. Ryan versa ? Riley un verre de bourbon, puis un autre pour lui, et tous deux s’assirent dans le salon. Ni l’un ni l’autre ne parla pendant un long moment. — Je vais ? l’?tage parler ? April, dit enfin Ryan. — Pourquoi ? — Elle est injuste et elle te manque de respect. On ne devrait pas la laisser s’en tirer comme ?a. Riley soupira. — Elle n’est pas injuste, dit-elle. — Comment tu appelles ?a, toi ? Riley r?fl?chit quelques instants. — Elle est tr?s investie, dit-elle. Elle s’inqui?te pour son amie Tiffany et elle se sent impuissante. Elle a peur que quelque chose de terrible soit arriv? ? Lois. On devrait ?tre contents qu’elle pense aux autres. ?a veut dire qu’elle grandit. Ils se turent ? nouveau. — Alors, ? ton avis, que s’est-il pass? ? demanda enfin Ryan. Tu penses que Lois s’est suicid?e ou qu’elle a ?t? assassin?e ? Riley secoua la t?te d’un air las. — Si seulement je le savais. J’ai appris ? suivre mon instinct, mais mon instinct ne me dit rien du tout. Je n’ai aucune intuition. Ryan lui tapota la main. — Peu importe ce qui s’est pass?. Dans tous les cas, ce n’est pas ta responsabilit?, dit-il. — Tu as raison. Ryan b?illa. — Je suis fatigu?, dit-il. Je crois que je vais me coucher de bonne heure. — Je vais rester un peu l?, dit Riley. Je n’ai pas encore envie de dormir. Ryan monta ? l’?tage et Riley se versa un autre grand verre. La maison ?tait silencieuse et Riley se sentit seule et ?trangement impuissante – comme April, probablement. Apr?s un autre verre, elle se d?tendit. Elle retira ses chaussures et s’allongea sur le canap?. Peu apr?s, quand elle se r?veilla, elle se rendit compte que quelqu’un avait d?pos? une couverture sur elle. Ryan avait d? descendre pour voir ce qu’elle faisait et il s’?tait assur? qu’elle ait chaud. Riley sourit, un peu moins seule. Puis elle s’endormit ? nouveau. * Riley eut une impression de d?j?-vu quand April se pr?cipita dans le garage des Pennington. Comme elle l’avait fait la premi?re fois, Riley l’appela : — April, n’y va pas ! Cette fois, April tira sur la rubalise de la police avant d’ouvrir la porte. Elle disparut dans le garage. Riley lui courut apr?s. Le garage est beaucoup plus grand et sombre, comme un hangar abandonn?. Riley ne voyait April nulle part. — April, o? es-tu ? appela-t-elle. La voix d’April r?sonna : — Je suis l?, Maman. Riley n’aurait su dire d’o? venait la voix. Elle tourna lentement sur elle-m?me en fouillant les t?n?bres du regard. Enfin, un plafonnier s’alluma. Riley resta p?trifi? d’horreur. Une fille ? peine plus ?g?e qu’April ?tait pendue ? une poutre. Elle ?tait morte, mais ses yeux ?taient ouverts. Elle fixait Riley du regard. Autour de la fille, par terre et sur des ?tag?res, il y avait des centaines de photos encadr?es la repr?sentant avec sa famille ? diff?rents moments de sa vie. — April ! cria Riley. Personne ne r?pondit. Riley se r?veilla en sursaut et se redressa sur le lit. Elle hyperventilait. Elle se retint de hurler ? pleins poumons, comme dans son cauchemar : « April ! ». Elle savait qu’April ?tait endormie dans son lit. Toute la famille dormait, sauf elle. Pourquoi ai-je fait ce r?ve ? se demanda-t-elle. Elle n’eut besoin que d’un instant pour comprendre. C’?tait enfin son instinct. April avait raison. Quelque chose n’allait pas dans la mort de Lois. Et Riley devait d?couvrir ce que c’?tait. CHAPITRE CINQ En sortant de sa voiture, gar?e devant l’universit? Byars, Riley sentit un frisson la parcourir. Ce n’?tait pas seulement la temp?rature. Il y avait de mauvaises ondes dans cette ?cole. Elle fr?mit en balayant le campus du regard. Des ?tudiants allaient et venaient, emmitoufl?s pour se prot?ger du froid, sans se parler, press?s d’arriver. Aucun n’avait l’air particuli?rement heureux d’?tre l?. Pas ?tonnant que les ?tudiants aient envie de se tuer, pensa Riley. L’?cole semblait appartenir au pass?. Riley avait l’impression de faire un voyage dans le temps. Les vieux b?timents de brique ?taient en parfait ?tat, tout comme les colonnes blanches, reliques d’une ?poque o? l’on copiait les monuments antiques. Le parc ?tait immense – d’autant plus impressionnant qu’il ?tait plant? au milieu d la capitale. Bien s?r, la ville de Washington avait grandi autour de l’universit? depuis sa fondation. La petite ?cole ?litiste avait prosp?r?, formant des ?tudiants qui int?graient ensuite avec succ?s les programmes de master et de doctorat les plus r?put?s du pays, puis le monde des affaires et de la politique. Les ?tudiants qui fr?quentaient des ?coles comme celle-ci se construisaient un r?seau qui leur servait toute la vie. Naturellement, c’?tait beaucoup trop cher pour la famille de Riley, m?me avec une bourse que l’?cole accordait occasionnellement aux tr?s bons ?l?ves. Cela n’avait pas d’importance : Riley n’aurait jamais eu l’id?e d’envoyer April ?tudier ici. Ou Jilly. Riley entra dans le bureau r?serv? ? l’administration et trouva le bureau du doyen, o? elle fut accueillie par une secr?taire ? l’air rev?che. Riley lui montra son badge. — Je suis l’agent sp?cial Riley Paige, FBI. Je vous ai appel?e aujourd’hui. La femme hocha la t?te. — M. Autrey va vous recevoir, dit-elle. La femme fit entrer Riley dans un bureau grand et sinistre, aux boiseries sombres. Un homme ?l?gant, d’?ge m?r, se leva de son si?ge pour l’accueillir. Il ?tait grand, il avait les cheveux argent?s et il portait un costume trois pi?ces visiblement hors de prix, avec un n?ud papillon. — Agent Paige, je suppose, dit-il avec un sourire froid. Je suis le doyen, Willis Autrey. Je vous en prie, asseyez-vous. Riley s’assit devant son bureau. Autrey fit de m?me et pivota sur son si?ge. — Je ne suis pas s?r de comprendre le but de votre visite, dit-il. Il s’agit du d?c?s tragique de Lois Pennington, c’est bien ?a ? — Son suicide, vous voulez dire. Autrey hocha la t?te et joignit les mains. — Rien qui n?cessite l’intervention du FBI, il me semble, dit-il. J’ai appel? les parents de la jeune fille et je leur ai transmis nos plus sinc?res condol?ances. Ils ?taient boulevers?s, bien entendu. C’est f?cheux, mais ils ne semblaient pas avoir de doutes ou d’inqui?tudes. Riley comprit qu’elle allait devoir choisir ses mots avec attention. Elle n’?tait pas l? pour son travail – en fait, ses sup?rieurs ? Quantico n’auraient pas approuv? sa d?marche. Mais peut-?tre qu’elle pouvait se d?brouiller pour le cacher ? Autrey. — Un autre membre de la famille a exprim? des doutes, dit-elle. Il ?tait inutile de lui dire qu’il s’agissait de la s?ur de Lois, une adolescente. — Comme c’est f?cheux, dit-il. Il utilise beaucoup ce mot – f?cheux, pensa Riley. — Que pouvez-vous me dire sur Lois Pennington ? demanda Riley. Autrey commen?ait visiblement ? s’ennuyer, comme si son esprit ?tait ailleurs. — Eh bien, rien de plus que la famille, j’imagine, dit-il. Je ne la connaissais pas personnellement, mais… Il se tourna vers son ordinateur et tapa une commande. — Il me semble que c’?tait une ?tudiante en premi?re ann?e parfaitement ordinaire, dit-il en regardant son ?cran. Des notes assez bonnes. Pas de commentaire sur son comportement. M?me si je vois qu’elle consultait pour d?pression. — Elle n’est pas la seule ? s’?tre suicid?e dans l’?cole cette ann?e, dit Riley. Autrey s’assombrit. Il ne r?pondit pas. Avant de partir, Riley avait fait quelques recherches sur les suicides dont Tiffany lui avait parl?. — Deanna Webber et Cory Linz se seraient tu?es le semestre dernier, dit Riley. Cory est morte ici-m?me, sur le campus. — Se seraient tu?es ? r?p?ta Autrey. Un emploi tr?s f?cheux du conditionnel. Rien ne prouve le contraire. Il se d?tourna l?g?rement de Riley, comme si elle n’?tait d?j? plus l?. — Mme Paige…, commen?a-t-il. — Agent Paige, corrigea Riley. — Agent Paige… Je suis certain qu’une professionnelle telle que vous sait que le taux de suicide chez les ?tudiants ? l’universit? a augment? au cours des derni?res d?cennies. C’est la troisi?me cause de d?c?s dans cette tranche d’?ge. Il y a plus de mille suicides sur les campus chaque ann?e. Il se tut, comme pour la laisser r?fl?chir ? tous ces chiffres. — Et bien s?r, dit-il, ces ?v?nements tragiques sont plus susceptibles d’arriver dans certains ?tablissements. Byars est une ?cole difficile. Il est f?cheux mais in?vitable que nous soyons confront?s ? de nombreux suicides. Riley r?prima un sourire. Les statistiques qu’April avait cherch?es sur Internet allaient lui ?tre utiles. ?a lui ferait plaisir de le savoir, pensa-t-elle. Elle dit : — Dans les universit?s am?ricaines, la moyenne est de sept virgule cinq suicides pour cent mille ?tudiants. Mais, seulement cette ann?e, trois ?tudiants sur les sept cents inscrits chez vous se sont suicid?s, c’est-?-dire cinquante-sept fois la moyenne nationale. Autrey haussa les sourcils. — Comme vous le savez certainement, il y a toujours… — Des aberrations, dit Riley en s’obligeant ? ne pas sourire. Oui, je sais ce que c’est qu’une aberration. Malgr? tout, le taux de suicide dans votre ?cole est exceptionnellement… f?cheux. Autrey ne broncha pas. — M. Autrey, j’ai l’impression que vous n’?tes pas content qu’un agent du FBI s’int?resse ? l’universit?, dit-elle. — Vous avez raison, dit-il. Pourquoi serais-je content ? C’est une perte de temps, le v?tre et le mien, et une perte d’argent pour le contribuable. Et votre pr?sence pourrait laisser penser que quelque chose ne va pas. Tout va bien ? l’universit? Byars, je vous assure. Il se pencha par-dessus son bureau vers Riley. — Agent Paige, ? quelle branche du FBI appartenez-vous ? — L’Unit? d’Analyse Comportementale. — Ah oui, ? Quantico. Ce n’est pas loin. Eh bien, vous devriez peut-?tre savoir que de nombreux ?tudiants viennent de familles politiques. Certains parents ont une influence consid?rable au sein du gouvernement, notamment sur le FBI, j’imagine. Nous n’aimerions pas qu’ils entendent parler de votre visite. — De ma visite ? r?p?ta Riley. Autrey pivota sur sa chaise. — Certaines personnes n’h?siteraient pas ? se plaindre aupr?s de vos sup?rieurs, dit-il avec un regard entendu. Un frisson de g?ne chatouilla la nuque de Riley. Elle sentit qu’il avait devin? que ce n’?tait pas une visite officielle. — Il vaut mieux ne pas cr?er des probl?mes l? o? il n’y en a pas, poursuivit Autrey. Je dis cela pour vous. Je n’aimerais que vous ayez des ennuis avec vos sup?rieurs. Riley faillit ?clater de rire. Elle avait l’habitude d’avoir des « ennuis » avec ses sup?rieurs. Tout comme elle avait l’habitude de se faire virer puis r?int?grer. Cela ne lui faisait pas peur. — Je vois, dit-elle. Il ne faudrait pas salir la r?putation de l’?cole. — Je suis content que nous nous comprenions, dit Autrey. Il se leva, comme pour raccompagner Riley. Mais Riley n’avait pas encore envie de partir. Pas encore. — Je vous remercie de m’avoir re?ue, dit-elle. Je partirai d?s que vous m’aurez donn? les coordonn?es des familles des autres ?tudiants qui se sont suicid?s. Autrey la foudroya du regard. Riley ne broncha pas. Autrey baissa les yeux vers sa montre. — J’ai un autre rendez-vous. Je dois y aller. Riley sourit. — Je suis un peu press?e, moi aussi, dit-elle en baissant elle aussi les yeux vers sa montre. Plus vite vous me donnerez ces coordonn?es, plus vite nous pourrons vaquer ? nos occupations. Je vais attendre. Autrey fron?a les sourcils, puis il se rassit devant son ordinateur. Il tapa une commande et son imprimante se mit ? ronronner. Il tendit ? Riley un document. — J’ai bien peur de devoir d?poser une plainte aupr?s de vos sup?rieurs, dit-il. Riley ne bougea pas. Il piquait sa curiosit?. — M. Autrey, vous venez de dire qu’il y avait de nombreux suicides ? Byars. Quels sont les chiffres exacts ? Autrey ne r?pondit pas. Le visage rouge de col?re, il r?pondit d’une voix plate : — Vos sup?rieurs ? Quantico vont entendre parler de moi, dit-il. — Bien s?r, r?pondit Riley avec une politesse mesur?e. Merci de m’avoir re?ue. Riley quitta le bureau et le b?timent r?serv? ? l’administration. Cette fois, elle trouva l’air frais revigorant. L’attitude fuyante et ?vasive d’Autrey l’avait convaincue qu’il se passait quelque chose. Elle avait trouv? des probl?mes. Les probl?mes, c’?tait toute la vie de Riley. CHAPITRE SIX Sit?t dans la voiture, Riley passa en revue les informations que lui avait donn?es le doyen. Des d?tails sur la mort de Deanna Webber lui revinrent en m?moire. Bien s?r, se rappela-t-elle en cherchant des articles sur son t?l?phone. La fille du membre du Congr?s. La repr?sentante Hazel Webber ?tait une femme politique en pleine ascension, mari?e ? un grand avocat du Maryland. La mort de leur fille avait fait les gros titres en automne dernier. Riley n’avait pas suivi le fait divers, qui ressemblait plus ? un ragot sordide qu’? une v?ritable info – le genre de chose qui ne regarde que la famille et personne d’autre, selon Riley. Elle avait chang? d’avis. Elle trouva le num?ro de t?l?phone du bureau de la repr?sentante Hazel Webber ? Washington. Quand elle le composa, une r?ceptionniste lui r?pondit d’un ton comp?tent. — C’est l’agent sp?cial Riley Paige, de l’Unit? d’Analyse Comportementale du FBI, dit Riley. J’aimerais rencontrer Mme Webber. — Puis-je vous demander pourquoi ? — J’ai besoin de lui parler de la mort de sa fille en automne. Un silence passa. Riley dit : — Je suis navr?e de d?ranger Mme Webber et sa famille pour lui parler de cette terrible trag?die. Mais j’ai besoin d’?claircir certaines choses. Un autre silence. — Je suis d?sol?e, dit lentement la r?ceptionniste. Mais la repr?sentante Webber n’est pas ? Washington en ce moment. Vous allez devoir attendre qu’elle rentre du Maryland. — A quelle date ? demanda Riley. — Je ne saurais pas vous le dire. Il faudra que vous rappeliez. La r?ceptionniste raccrocha sans ajouter un mot. Elle est dans le Maryland, pensa Riley. En faisant une recherche, elle d?couvrit rapidement o? vivait Hazel Webber. ?a ne devrait pas ?tre difficile ? trouver. Mais avant que Riley n’ait eu le temps de d?marrer sa voiture, son t?l?phone vibra. — Ici Hazel Webber, dit la personne au bout du fil. Riley sursauta. La r?ceptionniste avait d? contacter la repr?sentante tout de suite apr?s avoir raccroch?. Riley ne s’attendait pas ? recevoir un appel de Webber elle-m?me, et certainement pas si vite. — En quoi puis-je vous aider ? demanda Webber. Riley lui expliqua qu’elle voulait ?claircir certains points sur la mort de sa fille. — Pourriez-vous ?tre plus pr?cise ? demanda Webber. — Je pr?f?rerais vous voir, dit Riley. Webber ne r?pondit pas tout de suite. — J’ai bien peur que ce ne soit impossible, dit-elle enfin. Et je vous serais reconnaissante de ne pas nous d?ranger, moi ou ma famille. Nous sommes en train de nous remettre de cette terrible perte. Je suis s?re que vous comprenez. Le ton cassant de la femme prenait Riley au d?pourvu. Il n’y avait pas une seule trace de chagrin dans cette voix. — Mme Webber, si vous vouliez bien m’accorder un peu de votre temps… — J’ai dit non. Webber raccrocha. Riley resta bouche b?e. Comment interpr?ter cet ?trange ?change t?l?phonique ? Tout ce qu’elle savait, c’?tait qu’elle avait touch? un point sensible. Et elle devait aller dans le Maryland. * La route ?tait agr?able. Comme il faisait beau temps, Riley passa par le pont de Chesapeake pour avoir le plaisir de rouler au-dessus de l’eau. Elle se retrouva bient?t dans la campagne du Maryland, entre les pr?s cl?tur?s et les belles demeures ou les granges cach?es derri?re les all?es d’arbres. Riley se gara devant le portail du domaine des Webber. Un homme en uniforme sortit de sa cahute pour venir lui parler. Riley montra son badge et se pr?senta : — Je viens voir la repr?sentante Hazel Webber, dit-elle. Le garde parla dans son micro, puis il s’approcha ? nouveau de Riley. — Mme Webber dit qu’il doit y avoir une erreur, dit-il. Elle ne vous attend pas. Riley lui adressa un large sourire. — Oh, elle est occup?e en ce moment ? Ce n’est pas grave : je ne suis pas press?e. J’attendrai qu’elle ait le temps. Le garde fron?a les sourcils, sans doute pour l’intimider. — J’ai bien peur de devoir vous demander de partir, madame, dit-il. Riley haussa les ?paules et fit comme si elle n’avait pas compris : — Vraiment, ?a ne me d?range pas du tout. Je peux l’attendre. Le garde s’?loigna et parla ? nouveau dans son micro. Apr?s avoir foudroy? Riley du regard, il retourna dans sa cahute et ouvrit le portail. Au volant de sa voiture, Riley entra dans le domaine. Elle passa devant un pr? couvert de neige, o? deux chevaux trottaient. C’?tait un spectacle tr?s apaisant. La maison au bout de l’all?e ?tait plus grande qu’elle ne s’y attendait – un manoir contemporain. Il y avait d’autres b?timents bien entretenus de l’autre c?t? d’une colline. Un homme asiatique l’accueillit sans un mot ? la porte. Il ?tait assez grand et fort pour ?tre un sumo. Son costume de majordome lui donnait l’air presque grotesque tant il semblait inappropri?. Il conduisit Riley dans un couloir dont le parquet ?tait d’un riche bois brun-rouge. Une petite femme morne prit le relais et fit entrer Riley dans un bureau sinistrement propre et bien tenu. — Attendez ici, dit-elle. Elle sortit, en fermant la porte derri?re elle. Riley s’assit devant le bureau. Les minutes pass?rent. Riley fut tent?e plusieurs fois de jeter un coup d’?il aux documents qui se trouvaient sur le bureau ou dans l’ordinateur. Mais il y avait tr?s probablement des cam?ras de s?curit?. Enfin, la repr?sentante Hazel Webber entra dans le bureau. C’?tait une femme grande, mince mais intimidante. Elle ne semblait pas assez ?g?e pour si?ger au Congr?s aussi longtemps que Riley ne l’avait suppos? – et certaine pas assez ?g?e pour avoir une fille ? l’universit?. La raideur de ses traits tenait peut-?tre de l’habitude ou trahissait l’usage du Botox – ou les deux. Riley se rappela l’avoir vue ? la t?l?vision. Quand elle rencontrait quelqu’un qu’elle avait d?j? vu dans une ?mission de t?l?, elle ?tait souvent frapp?e par les diff?rences. Etonnamment, Hazel Webber semblait exactement la m?me, comme si elle ?tait r?ellement une personne en deux dimensions – anormalement creuse. Sa tenue ?tonna Riley. Pourquoi portait-elle une veste par-dessus son pull ? Il faisait assez chaud. ?a fait partie de son style, je suppose, pensa Riley. La veste lui donnait l’air plus formel et plus professionnel qu’un pull et un pantalon. C’?tait une sorte d’armure, une protection contre le contact humain. Riley se leva pour se pr?senter, mais Webber parla la premi?re. — Agent sp?cial Riley Paige de Quantico, dit-elle. Je sais. Sans ajouter un mot, elle s’assit ? son bureau. — Que venez-vous me dire ? demanda Webber. Une bouff?e d’inqui?tude remonta dans la poitrine de Riley. Bien s?r, elle n’avait rien ? dire ? la repr?sentante. Toute cette visite n’?tait qu’un coup de poker, et Riley comprit soudain que Webber n’?tait pas le genre de femme ? se laisser manipuler. Riley allait devoir marcher sur des ?ufs. — En fait, je suis l? pour vous demander des informations, dit Riley. Vous mari est ? la maison ? — Oui, dit la femme. — Serait-il possible de vous parler ? tous les deux ? — Il sait que vous ?tes l?. Sa r?ponse d?stabilisa Riley, mais elle prit soin de ne pas le montrer. La femme l’?pinglait de son regard bleu et froid. Riley ne broncha pas. Elle se contenta de lui renvoyer son regard fixe, en se pr?parant ? r?pondre coup pour coup. Elle dit : — L’Unit? d’Analyse Comportementale enqu?te sur une recrudescence inhabituelle de suicides pr?sum?s ? Byars. — De suicides pr?sum?s ? r?p?ta Webber en haussant un sourcil. Je ne parlerais pas en ces termes du suicide de Deanna. Mon mari et moi, nous ne pr?sumons de rien. La mort de notre fille est bien r?elle. Riley eut l’impression que la temp?rature dans la pi?ce chutait de quelques degr?s. Webber n’avait pas trahi la moindre ?motion en ?voquant le suicide de sa propre fille. Elle a de la glace dans les veines, pensa Riley. — J’aimerais savoir ce qui s’est pass?, dit-elle. — Pourquoi ? Je suis s?re que vous avez lu le rapport. Bien s?r, ce n’?tait pas le cas, mais Riley devait continuer de bluffer. — J’aimerais l’entendre de votre bouche, dit-elle. Webber ne r?pondit pas pendant quelques secondes. Son regard fixe ne quittait pas celui de Riley. — Deanna a eu un accident en faisant de l’?quitation l’?t? dernier, dit Webber. Sa hanche ?tait tr?s abim?e. Il aurait fallu la remplacer. Pour elle, l’?quitation et la comp?tition, c’?tait termin?. Elle ?tait boulevers?e. Webber se tut. — Elle prenait de l’oxycodone pour la douleur. Elle a fait une overdose, d?lib?r?ment. C’?tait intentionnel. Il n’y a rien ? dire de plus. Riley sentit que Webber lui cachait volontairement quelque chose. — O? ?a s’est pass? ? — Dans sa chambre, dit Webber. Elle ?tait dans son lit. Le m?decin l?giste dit qu’elle est morte d’un arr?t respiratoire. Elle avait l’air endormi quand la bonne l’a trouv?e. Et puis, Webber cligna des yeux. Elle cligna des yeux. Dans la bataille des volont?s qui l’opposait ? Riley, elle venait de perdre du terrain. Elle ment ! comprit Riley. Son pouls s’acc?l?ra. Maintenant, Riley devait presser son avantage, en posant exactement les bonnes questions. Mais avant que Riley n’ait eu le temps de reprendre la parole, la porte du bureau s’ouvrit. La femme qui avait conduit Riley dans la pi?ce entra. — Mme la repr?sentante, j’aimerais vous dire un mot, dit-elle. Webber eut l’air soulag?. Elle se leva et suivit son assistante dans le couloir. Riley prit de longues inspirations. Si seulement elle n’avait pas ?t? interrompue… Son avantage s’?tait envol?. Quand Webber reviendrait, Riley devrait tout recommencer. Au bout de moins d’une minute, Webber revint. Elle semblait avoir retrouv? son assurance. Debout pr?s de la porte ouverte, elle dit : — Agent Paige, si c’est bien vous, j’ai bien peur de devoir vous demander de partir. Riley avala sa salive. — Je ne comprends pas. — Mon assistante vient d’appeler Quantico. Ils n’ont aucune enqu?te en cours concernant des suicides ? Byars. Alors qui que vous soyez… Riley sortit son badge. — Je suis l’agent sp?cial Riley Paige, dit-elle avec d?termination. Et je vais faire tout mon possible pour que le FBI ouvre cette enqu?te. Elle sortit du bureau en passant devant Hazel Webber. En traversant la maison, elle sut qu’elle venait de se faire un ennemi – et un ennemi dangereux. Hazel Webber n’?tait pas un psychopathe avec un penchant pour les cha?nes, les couteaux, les pistolets ou les chalumeaux. C’?tait une femme qui n’avait pas de conscience. Ses armes, c’?taient l’argent et le pouvoir. Riley pr?f?rait un ennemi qu’elle pouvait frapper ou blesser d’un coup de pistolet. Pourtant, elle ?tait pr?te ? affronter Webber et ses menaces. Elle m’a menti sur sa fille, se r?p?tait Riley. Et maintenant, Riley ?tait bien d?cid?e ? d?couvrir la v?rit?. La maison semblait vide, ? pr?sent. Riley fut surprise de ne croiser pas ?me qui vive. A croire qu’elle aurait pu cambrioler le manoir. Elle sortit, rentra dans sa voiture et d?marra. En s’approchant du portail, elle vit qu’il ?tait ferm?. Le garde qui l’avait laiss?e entrer et l’impressionnant majordome se tenaient juste devant. Les bras crois?s, ils ?taient visiblement en train de l’attendre. CHAPITRE SEPT Les deux hommes avaient l’air mena?ant, mais aussi un peu ridicule. C’?tait le plus petit qui portait un uniforme de gardien, tandis que son coll?gue, beaucoup impressionnant par la taille, ?tait engonc? dans un costume de majordome. Deux clowns dans un cirque, pensa Riley. Elle savait pourtant qu’ils n’essayaient pas d’?tre dr?les. Elle se gara ? c?t? d’eux et fit descendre sa fen?tre pour les interpeller : — Il y a un probl?me, messieurs ? Le garde s’approcha de sa porti?re. Le majordome se pencha ? la fen?tre, c?t? passager. Il lui parla d’une voix de basse grondante : — Mme Webber souhaiterait dissiper un malentendu. — Quel malentendu ? — Elle aimerait vous faire comprendre que les fouineurs ne sont pas les bienvenus chez elle. C’?tait plus clair. Webber et son assistante ?taient arriv?es ? la conclusion que Riley ?tait un imposteur, pas un agent de FBI. Ils la soup?onnaient d’?tre une journaliste en train d’?crire un dossier sur la repr?sentante. Et ces deux types devaient avoir l’habitude de chasser les journalistes indiscrets. Riley sortit ? nouveau son badge. — En effet, il y a un malentendu, dit-elle. Je suis vraiment un agent sp?cial du FBI. Le grand type esquissa un sourire narquois. Il croyait visiblement que le badge ?tait faux. — Sortez du v?hicule, s’il vous plait, dit-il. — Non merci, r?pondit Riley. Je vous prie d’ouvrir ce portail. Riley n’avait pas ferm? sa porti?re ? cl?. Le grand type l’ouvrit. — Sortez du v?hicule, r?p?ta-t-il. Riley ?touffa un grognement. ?a va mal finir, pensa-t-elle. Riley sortit de sa voiture et ferma la porti?re. Les deux hommes s’arr?t?rent ? quelques pas d’elle, chacun de son c?t?. Riley se demanda lequel d’entre eux ferait le premier geste. Puis le grand type fit craquer ses doigts et s’approcha. Riley fit la moiti? du chemin. Elle l’attrapa par le col et par sa manche gauche, puis le fit basculer. Elle pivota sur son pied gauche et se pencha en avant. Elle sentit ? peine l’?norme poids du majordome voler par-dessus son dos. Il s’?crasa bruyamment sur la porti?re de sa voiture, puis face contre terre. C’est la voiture qui a tout pris, pensa-t-elle avec incr?dulit?. L’autre venait en renfort. Elle se tourna vers lui. Elle lui envoya un coup de pied entre les jambes. Quand il se plia en deux avec un grognement, Riley sut que l’altercation ?tait termin?e. Elle d?gaina le pistolet que le garde avait ? la ceinture. Puis elle balaya du regard son travail. Le majordome gisait au pied de la voiture, le costume tout froiss?, et la d?visageait avec un m?lange de terreur et d’incr?dulit?. La porti?re ?tait ab?m?e, mais ce n’?tait pas trop grave. Le garde en uniforme ?tait ? quatre pattes, le souffle court. Elle lui tendit son arme en lui pr?sentant la crosse. — Vous avez ?gar? ceci, dit-elle d’un ton aimable. D’une main tremblante, il tendit la main pour prendre son pistolet. Riley ne le laissa pas faire. — Non, non, dit-elle. Pas avant que vous n’ouvriez le portail. Elle l’aida ? se relever. Il tituba vers sa cahute et poussa le bouton actionnant le portail. Riley marcha vers sa voiture. — Excusez-moi, dit-elle au majordome. L’air terrifi?, l’homme rampa sur le c?t?, comme un crabe g?ant, pour laisser passer Riley. Elle rentra dans sa voiture et passa le portail, non sans jeter le pistolet par la fen?tre. Ils savent que je ne suis pas journaliste, maintenant, pensa-t-elle. Et ils ne manqueraient pas d’en informer la repr?sentante. * Environ deux heures plus tard, Riley se garait sur le parking de l’Unit? d’Analyse Comportementale. Elle resta assise quelques minutes derri?re son volant. Elle n’?tait pas revenue depuis le d?but de son cong?… Et elle ne pensait pas revenir aussi vite. C’?tait une sensation ?trange. Elle coupa le moteur, r?cup?ra ses cl?s, sortit de la voiture et rentra dans le b?timent. Sur le chemin de son bureau, des amis et des coll?gues la salu?rent avec un m?lange de surprise, d’amabilit? et de retenue. Elle s’arr?ta devant le bureau de son partenaire habituel, Bill Jeffreys, mais il n’?tait pas l?. Il devait travailler sur une affaire avec quelqu’un d’autre. En y pensant, elle ressentit une pointe de tristesse – et m?me de jalousie. A bien des ?gards, Bill ?tait le meilleur ami qu’elle avait dans ce monde. Mais c’?tait peut-?tre aussi bien qu’il ne soit pas l?. Bill ne savait pas qu’elle ?tait de nouveau avec Ryan. ?a ne lui plairait pas. Il lui avait trop souvent tenu la main pendant la s?paration et le divorce. Il aurait du mal ? croire que Ryan avait chang?. En poussant la porte de son bureau, elle se sentit oblig?e de v?rifier qu’elle ?tait au bon endroit. Tout ?tait trop propre et bien organis?. Avaient-ils donn? son bureau ? un autre agent ? Quelqu’un travaillait-il ici en son absence ? Riley ouvrit un tiroir. C’?taient bien ses dossiers, mais tout ?tait mieux class?. Qui aurait pris le temps de ranger ? Sans doute pas Bill. Bill aurait su qu’il ne fallait toucher ? rien. Lucy Vargas, peut-?tre. Lucy ?tait un jeune agent qui avait travaill? avec elle et Bill. Si c’?tait bien elle la coupable, elle l’avait fait avec de bonnes intentions. Riley s’assit ? son bureau quelques minutes. Des images remont?rent ? la surface – le cercueil de la fille, ses parents boulevers?s et le cauchemar de ce corps pendu entour? de souvenirs. Elle se rappela ?galement la mani?re dont le doyen de Byars avait ?vit? ses questions et les mensonges de Hazel Webber. Elle avait promis ? Hazel Webber qu’on ouvrirait une enqu?te. C’?tait le moment de tenir cette promesse. Elle d?crocha le combin? du t?l?phone sur son bureau et appela son patron, Brent Meredith. Quand le chef d’?quipe d?crocha, elle dit : — Monsieur, c’est Riley Paige, j’aimerais savoir si… Elle ?tait sur le point de lui demander une entrevue, quand la voix de tonnerre r?pondit : — Agent Paige, dans mon bureau, je vous prie. Riley frissonna. Meredith lui en voulait. CHAPITRE HUIT En se pr?cipitant dans le bureau de Brent Meredith, Riley le trouva debout devant la porte. — Fermez derri?re vous, dit-il. Asseyez-vous. Riley fit ce qu’on lui demandait. Toujours debout, Meredith ne parla pas pendant quelques minutes. Il se contenta de fusiller Riley du regard. C’?tait un homme grand, au visage sombre et anguleux. M?me quand il ?tait de meilleure humeur, il ?tait intimidant. Et il n’?tait pas de bonne humeur. — Il y a quelque chose que vous aimeriez me dire, Agent Paige ? demanda-t-il. Riley avala sa salive. Il avait d? entendre parler de ses investigations. — Vous devriez peut-?tre commencer, monsieur, dit-elle faiblement. Il s’approcha. — Je viens de recevoir deux plaintes venues d’en-haut, dit-il. La gorge de Riley se serra. D’en-haut ? Cela signifiait que les plaintes venaient de l’agent sp?cial charg? d’enqu?te Carl Walder lui-m?me – un m?prisable petit homme qui avait d?j? suspendu Riley plusieurs fois pour insubordination. Meredith grogna : — Walder a re?u un coup de t?l?phone du doyen d’une petite universit?. — Oui, Byars. Mais si vous me laissiez vous expliquer… Meredith l’interrompit. — Le doyen dit que vous ?tes entr?e dans son bureau et que vous avez fait d’absurdes all?gations. — Ce n’est pas exactement ce qui s’est pass?, monsieur, supplia Riley. Mais Meredith encha?na : — Walder a aussi re?u un coup de t?l?phone de la repr?sentante Hazel Webber. Elle dit que vous ?tes venue chez elle pour la harceler, en lui racontant que vous ?tiez sur une affaire qui n’existe pas. Et vous avez agress? deux membres de son personnel. Vous les avez menac?s avec une arme ? feu. Riley se raidit. — Ce n’est vraiment pas ce qui s’est pass?, monsieur. — Alors que s’est-il pass? ? — C’?tait l’arme du gardien, l?cha-t-elle maladroitement. D?s que les mots eurent quitt? sa bouche, Riley r?alisa ce qu’elle venait de dire… C’est sorti de travers. — J’essayais de lui rendre ! dit-elle. Encore une fois, elle sut… ?a ne va pas m’aider. Un long silence passa. Meredith prit une grande inspiration. Enfin, il dit : — J’esp?re que vous avez une bonne explication, Agent Paige. Riley prit une grande inspiration. — Monsieur, il y a eu trois morts suspectes ? Byars, pendant l’ann?e universitaire. Ce sont officiellement des suicides, mais je n’y crois pas. — C’est la premi?re fois que j’entends parler de ?a, dit Meredith. — Je comprends, monsieur. Et je suis justement venue vous en parler. Meredith ne r?pondit pas. Il attendait visiblement de plus amples explications. — Une amie de ma fille avait une s?ur ? Byars : Lois Pennington, en premi?re ann?e. Sa famille l’a trouv?e pendue dans le garage dimanche dernier. Sa s?ur ne croit pas au suicide. J’ai interrog? ses parents et… Meredith hurla si fort qu’on l’entendit certainement dans le couloir : — Vous avez interrog? ses parents ? — Oui, monsieur, r?pondit Riley ? voix basse. — Ai-je besoin de vous rappeler que ce n’est pas une affaire pour le FBI ? — Non, monsieur, dit Riley. — En fait, pour ce que j’en sais, ce n’est une affaire pour personne. Riley ne sut que dire. — Que vous ont dit les parents ? demanda Meredith. Ils croient au suicide ? — Oui, dit Riley d’une voix ?touff?e. Cette fois, c’?tait Meredith que ne savait visiblement plus que dire. Il secoua la t?te avec incr?dulit?. — Monsieur, je sais ce que vous pensez, mais le doyen de Byars cache quelque chose. Et Hazel Webber m’a menti sur la mort de sa propre fille. — Comment le savez-vous ? — Je le sais, c’est tout ! Riley adressa ? Meredith un regard implorant. — Monsieur, apr?s toutes ces ann?es, vous savez que j’ai de bonnes intuitions. Quand je le sens, j’ai presque toujours raison. Il faut me faire confiance. Il y a quelque chose qui cloche dans cette histoire de suicides. — Riley, vous savez que ce n’est pas comme ?a que ?a marche. Riley sursauta. Meredith l’appelait tr?s rarement par son pr?nom – uniquement quand il s’inqui?tait pour elle. Elle savait qu’il l’appr?ciait et la respectait beaucoup, et c’?tait r?ciproque. Il se pencha par-dessus son bureau et haussa les ?paules d’un air agac?. — Vous avez peut-?tre raison ou vous avez peut-?tre tort, dit-il en soupirant. Dans un cas comme dans l’autre, je ne peux pas ouvrir une enqu?te parce que vous avez une intuition. Il me faut beaucoup plus que ?a. Meredith la couva d’un regard inquiet. — Agent Paige, vous avez travers? beaucoup d’?preuves r?cemment. Vous avez travaill? sur des affaires dangereuses. Et votre partenaire a failli mourir d’un empoisonnement la derni?re fois. Et votre famille vient de s’agrandir. Et… — Et quoi ? demanda Riley. Meredith se tut, avant de r?pondre : — Je vous ai donn? un cong? il y a un mois. Vous aviez l’air de penser que c’?tait une bonne id?e. La derni?re fois que nous avons parl?, vous m’avez m?me demand? de lever le pied. Je crois que c’est le mieux. Prenez tout le temps dont vous avez besoin. Il vous faut du repos. Riley ?tait abattue et d?courag?e, mais elle savait aussi qu’il ne servait ? rien d’insister. En v?rit?, Meredith avait raison. Il ne pouvait tout simplement pas ouvrir une enqu?te sur la base de ce qu’elle lui avait dit, encore moins s’il devait r?pondre ? un ?c?urant bureaucrate comme Walder. — Je suis d?sol?e, monsieur, dit-elle. Je vais rentrer chez moi. Elle se sentit terriblement seule en quittant le bureau de Meredith et en sortant du b?timent. Mais elle n’?tait pas pr?te ? oublier ses soup?ons. Son intuition ?tait bien trop forte. Elle savait qu’elle devait faire quelque chose. Commen?ons par le commencement, pensa-t-elle. Il devait obtenir des informations. Elle devait prouver que quelque chose n’allait pas. Mais comment allait-elle faire ?a toute seule ? * Riley rentra ? la maison une demi-heure avant le diner. Elle trouva Gabriela dans la cuisine, en train de pr?parer une de ses d?licieuses sp?cialit?s guat?malt?ques – gallo en perro, un ragout ?pic?. — Les filles sont ? la maison ? demanda-t-elle. — S?. Elles sont en train de faire leurs devoirs ensemble dans la chambre d’April. Riley en fut soulag?e. A la maison, au moins, elle ne se d?brouillait pas si mal. — Et Ryan ? demanda-t-elle. — Il a appel?. Il rentre tard. Riley fut soudain plus mal ? l’aise. Cette r?ponse lui rappelait des mauvais moments pass?s avec Ryan. Elle se dit qu’elle n’avait pas ? s’inqui?ter. Ryan avait un travail tr?s prenant. Et puis, le m?tier de Riley l’obligeait souvent ? rester loin de sa famille. Elle monta ? l’?tage et alluma son ordinateur. Elle fit une recherche sur la mort de Deanna Webber, mais elle ne trouva rien qu’elle ne savait d?j?. Puis elle chercha des informations sur Cory Linz, l’autre fille qui ?tait morte. Une fois encore, il n’y avait pas grand-chose. Elle fit une recherche sur les avis de d?c?s qui mentionnaient Byars. Elle en trouva six. Une personne ?tait morte ? l’h?pital des suites d’un cancer. Sur trois autres, elle reconnut les photos de Deanna Webber, Lois Pennington et Cory Linz. Mais elle ne reconnut pas le jeune homme et la jeune femme des deux derniers avis de d?c?s. Ils s’appelaient Kirk Farrell et Constance Yoh. Ils ?taient en deuxi?me ann?e au moment du d?c?s. Bien s?r, aucun avis ne pr?cisait que c’?tait un suicide. La plupart ?taient tr?s vagues sur la cause de la mort. Riley s’appuya sur son dossier et soupira. Êîíåö îçíàêîìèòåëüíîãî ôðàãìåíòà. Òåêñò ïðåäîñòàâëåí ÎÎÎ «ËèòÐåñ». Ïðî÷èòàéòå ýòó êíèãó öåëèêîì, êóïèâ ïîëíóþ ëåãàëüíóþ âåðñèþ (https://www.litres.ru/pages/biblio_book/?art=43692615&lfrom=688855901) íà ËèòÐåñ. Áåçîïàñíî îïëàòèòü êíèãó ìîæíî áàíêîâñêîé êàðòîé Visa, MasterCard, Maestro, ñî ñ÷åòà ìîáèëüíîãî òåëåôîíà, ñ ïëàòåæíîãî òåðìèíàëà, â ñàëîíå ÌÒÑ èëè Ñâÿçíîé, ÷åðåç PayPal, WebMoney, ßíäåêñ.Äåíüãè, QIWI Êîøåëåê, áîíóñíûìè êàðòàìè èëè äðóãèì óäîáíûì Âàì ñïîñîáîì.
Íàø ëèòåðàòóðíûé æóðíàë Ëó÷øåå ìåñòî äëÿ ðàçìåùåíèÿ ñâîèõ ïðîèçâåäåíèé ìîëîäûìè àâòîðàìè, ïîýòàìè; äëÿ ðåàëèçàöèè ñâîèõ òâîð÷åñêèõ èäåé è äëÿ òîãî, ÷òîáû âàøè ïðîèçâåäåíèÿ ñòàëè ïîïóëÿðíûìè è ÷èòàåìûìè. Åñëè âû, íåèçâåñòíûé ñîâðåìåííûé ïîýò èëè çàèíòåðåñîâàííûé ÷èòàòåëü - Âàñ æä¸ò íàø ëèòåðàòóðíûé æóðíàë.