×òî æå åñòü ó ìåíÿ? Äûðû â äðàíûõ êàðìàíàõ, Òðè ìîðùèíû íà ëáó, Äà èñò¸ðòûé ïÿòàê... Íî íå æàëêî íè äíÿ- Ìíå ñóäüáîþ ïðèäàííûõ, Õîòü ïîðîé ÿ æèâó Ïîïîäàÿ â ïðîñàê. Âñ¸ ÷òî åñòü ó ìåíÿ: Ñîâåñòü, ÷åñòü è óìåíüå. ß îòäàì íå ñêóïÿñü- Ïðîñòî òàê çà ïóñòÿê. Çà ïîñòåëü ó îãíÿ, Äîáðîòó áåç ñòåñíåíüÿ. È çà òî, ÷òî ïðîñòÿñü, Íå çàáûòü ìíå íè êàê... Âñ¸ ÷

Les Pendules ? l’heure

Les Pendules ? l’heure Blake Pierce Une Enqu?te de Riley Paige #4 Un chef-d’?uvre de suspense et de myst?re. Pierce d?veloppe ? merveille la psychologie de ses personnages. On a l’impression d’?tre dans leur t?te, de conna?tre leurs peurs et de c?l?brer leurs victoires. L’intrigue est intelligente et vous tiendra en haleine tout le long du roman. Difficile de l?cher ce livre plein de rebondissements. Books and Movie Reviews, Roberto Mattos (? propos de SANS LAISSER DE TRACES) LES PENDULES A L’HEURE est le quatri?me tome de la populaire s?rie de thrillers RILEY PAIGE, qui commence avec SANS LAISSER DE TRACES (tome 1) ! On retrouve des cadavres de femmes le long d’une autoroute du Delaware. Certaines disparaissent pendant des jours. D’autres sont abandonn?es, mortes, le cou bris?, les bras pointant vers le haut ou vers le bas. Pour le FBI, il devient ?vident que ces meurtres sont l’?uvre d’un tueur en s?rie dangereux et insondable. Il ne s’arr?tera jamais de tuer. Voulant ? tout prix r?soudre cette affaire ?nigmatique, le FBI exhorte Riley Paige ? retourner sur le terrain. La brillante Riley, quoique hant?e par ses souvenirs, a le sentiment d’avoir enfin trouv? la paix. Elle est bien d?cid?e ? aider sa fille, April, ? surmonter son traumatisme. Pourtant, quand les meurtres s’encha?nent, de plus en plus choquants – et quand son ancien partenaire, Bill, la supplie de l’aider –, Riley comprend qu’elle ne peut plus refuser. Son enqu?te la lance sur les traces des auto-stoppeuses, des fugueuses et de gamines d?laiss?es. Quand elle d?couvre que le tueur retient prisonni?re d’autres femmes, et qu’il est encore possible de les sauver, plus rien ne l’arr?te. Encore une fois, son enqu?te la rapproche d’un ab?me familier… Le fragile ?quilibre de sa vie de famille s’effondre, et sa propre sant? mentale est mise ? rude ?preuve. Dans une course effr?n?e contre le temps, elle devra plonger dans l’esprit du tueur pour sauver ces femmes – et elle-m?me – d’une terrible fin. Sombre thriller psychologique au suspense insoutenable, LES PENDULES A L’HEURE est le quatri?me tome de la s?rie. Son intrigue et son personnage principal attachant vous pousseront ? lire jusqu'? tard dans la nuit. Le tome 5 des enqu?tes de Riley Paige sera bient?t disponible. L E S P E N D U L E S A L’ H E U R E (UNE ENQUETE de RILEY PAIGE—TOME 4) B L A K E P I E R C E Blake Pierce Blake Pierce est l’auteur de la populaire s?rie de thrillers RILEY PAIGE : SANS LAISSER DE TRACES (tome 1), REACTION EN CHAINE (tome 2), LA QUEUE ENTRE LES JAMBES (tome 3) et LES PENDULES A L’HEURE (tome 4). Elle ?crit ?galement les s?ries de thrillers MACKENZIE WHITE et AVERY BLACK. Fan depuis toujours de polars et de thrillers, Blake adore recevoir de vos nouvelles. N'h?sitez pas ? visiter son site web www.blakepierceauthor.com (http://www.blakepierceauthor.com) pour en savoir plus et rester en contact ! Copyright © 2016 par Blake Pierce. Tous droits r?serv?s. Sauf d?rogations autoris?es par la Loi des ?tats-Unis sur le droit d'auteur de 1976, aucune partie de cette publication ne peut ?tre reproduite, distribu?e ou transmise sous quelque forme que ce soit ou par quelque moyen que ce soit, ou stock?e dans une base de donn?es ou syst?me de r?cup?ration, sans l'autorisation pr?alable de l'auteur. Ce livre ?lectronique est r?serv? sous licence ? votre seule jouissance personnelle. Ce livre ?lectronique ne saurait ?tre revendu ou offert ? d'autres personnes. Si vous voulez partager ce livre avec une tierce personne, veuillez en acheter un exemplaire suppl?mentaire par destinataire. Si vous lisez ce livre sans l'avoir achet? ou s'il n'a pas ?t? achet? pour votre seule utilisation personnelle, vous ?tes pri? de le renvoyer et d’acheter votre exemplaire personnel. Merci de respecter le difficile travail de cet auteur. Il s'agit d'une ?uvre de fiction. Les noms, les personnages, les entreprises, les organisations, les lieux, les ?v?nements et les incidents sont le fruit de l'imagination de l'auteur ou sont utilis?s dans un but fictionnel. Toute ressemblance avec des personnes r?elles, vivantes ou mortes, n'est que pure co?ncidence. Image de couverture : Copyright GoingTo, utilis?e en vertu d'une licence accord?e par Shutterstock.com. DU M?ME AUTEUR LES ENQU?TES DE RILEY PAIGE SANS LAISSER DE TRACES (Tome 1) REACTION EN CHAINE (Tome 2) LA QUEUE ENTRE LES JAMBES (Tome 3) LES PENDULES ? L’HEURE (Tome 4) : LES ENQU?TES DE MACKENZIE WHITE AVANT QU'IL NE TUE (Tome 1) TABLE DES MATI?RES PROLOGUE (#u3041796d-48c6-5599-bab1-b3109f4022e0) CHAPITRE UN (#u484aa85e-72d6-548d-aeb9-7562e0fa2569) CHAPITRE DEUX (#u987e2274-c13c-5c55-915a-f18e8806ef2f) CHAPITRE TROIS (#u31ef19d1-88cc-5bd2-a818-dc5b5bb111b7) CHAPITRE QUATRE (#u1edde665-86fd-54e8-8c73-443359b919ca) CHAPITRE CINQ (#u824c460d-6b09-5a63-9839-f385a249fcd5) CHAPITRE SIX (#u9c0071d0-74d3-50ab-be6d-b55b25f83292) CHAPITRE SEPT (#u0e21d936-01fe-50f3-92b9-9c92dc7cbe79) CHAPITRE HUIT (#u47a10290-642a-593f-bd90-104505e476a6) CHAPITRE NEUF (#litres_trial_promo) CHAPITRE DIX (#litres_trial_promo) CHAPITRE ONZE (#litres_trial_promo) CHAPITRE DOUZE (#litres_trial_promo) CHAPITRE TREIZE (#litres_trial_promo) CHAPITRE QUATORZE (#litres_trial_promo) CHAPITRE QUINZE (#litres_trial_promo) CHAPITRE SEIZE (#litres_trial_promo) CHAPITRE DIX-SEPT (#litres_trial_promo) CHAPITRE DIX-HUIT (#litres_trial_promo) CHAPITRE DIX-NEUF (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT-ET-UN (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT-DEUX (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT-TROIS (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT-QUATRE (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT-CINQ (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT-SIX (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT-SEPT (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT-HUIT (#litres_trial_promo) CHAPITRE VINGT-NEUF (#litres_trial_promo) CHAPITRE TRENTE (#litres_trial_promo) CHAPITRE TRENTE-ET-UN (#litres_trial_promo) CHAPITRE TRENTE-DEUX (#litres_trial_promo) CHAPITRE TRENTE-TROIS (#litres_trial_promo) CHAPITRE TRENTE-QUATRE (#litres_trial_promo) CHAPITRE TRENTE-CINQ (#litres_trial_promo) CHAPITRE TRENTE-SIX (#litres_trial_promo) CHAPITRE TRENTE-SEPT (#litres_trial_promo) CHAPITRE TRENTE-HUIT (#litres_trial_promo) CHAPITRE TRENTE-NEUF (#litres_trial_promo) CHAPITRE QUARANTE (#litres_trial_promo) CHAPITRE QUARANTE ET UN (#litres_trial_promo) CHAPITRE QUARANTE-DEUX (#litres_trial_promo) CHAPITRE QUARANTE-TROIS (#litres_trial_promo) CHAPITRE QUARANTE-QUATRE (#litres_trial_promo) CHAPITRE QUARANTE-CINQ (#litres_trial_promo) CHAPITRE QUARANTE-SIX (#litres_trial_promo) CHAPITRE QUARANTE-SEPT (#litres_trial_promo) CHAPITRE QUARANTE-HUIT (#litres_trial_promo) PROLOGUE Assis dans sa voiture arr?t?e, l’homme s’inqui?tait. Ce soir, il ?tait particuli?rement important que tout se passe comme pr?vu. La femme passerait-elle bien par ici, et ? l’heure habituelle ? Il ?tait onze heures. La voix qu’il avait entendue avant de partir, celle de son grand-p?re, r?sonna dans sa t?te : « J’esp?re que tu t’es pas tromp?, Scratch. » Scratch. L’homme n’aimait pas ce nom. Ce n’?tait pas son vrai nom. C’?tait un nom qu’on donnait parfois au Diable. Son grand-p?re pensait qu’il ?tait « de la mauvaise graine ». Grand-p?re l’avait toujours appel? comme ?a. M?me si tous les autres l’appelaient par son vrai nom, c’?tait ce surnom cruel qui lui restait en t?te. Il ha?ssait son grand-p?re, mais il n’arrivait pas ? le chasser de son esprit. Scratch se frappa la t?te plusieurs fois pour faire taire la voix. ?a lui fit mal et, l’espace d’un instant, il se sentit mieux. Ce fut alors que le rire mou de Grand-p?re r?sonna ? nouveau. Un peu plus faiblement. Il jeta un coup d’?il inquiet ? sa montre. Un peu plus de onze heures. Elle ?tait en retard ? Et si elle allait ailleurs, cette fois ? Non, ce n’?tait pas son genre. Il la suivait depuis des jours. Elle ?tait toujours ? l’heure. Toujours la m?me routine. Si seulement elle connaissait les enjeux… Grand-p?re le punirait s’il foirait. Non, c’?tait plus que ?a. Le monde entier commen?ait ? manquer de temps. Il avait une grande responsabilit?. ?a lui pesait terriblement. Des phares apparurent au loin. Il poussa un soupir de soulagement. Ce devait ?tre elle. La route de campagne conduisait ? un p?t? de maisons. A cette heure-ci, elle ?tait d?serte. Seule cette femme passait par l? en rentrant du travail. Scratch avait gar? sa voiture en travers de la route, face ? elle. Il sortit, ses mains tremblantes, arm? d’une lampe ?lectrique. Son c?ur battait la chamade. Stop ! la supplia-t-il en pens?e. S’il te plait, arr?te-toi ! Le v?hicule s’arr?ta non loin. Il retint un sourire. C’?tait bien son petit tacot, comme il l’avait esp?r?. Maintenant, il n’avait plus qu’? l’attirer vers lui. Elle baissa la vitre de sa voiture. Il lui adressa son plus charmant sourire. — Je suis bloqu?, lan?a-t-il. Il tourna bri?vement le faisceau de sa lampe vers son visage. Oui, c’?tait bien elle. Elle avait l’air charmant et tr?s ouvert. Et, surtout, elle ?tait tr?s mince. C’?tait ce qui comptait. C’?tait vraiment dommage de lui faire ?a. Comme Grand-p?re disait toujours, c’?tait « pour le mieux ». Scratch le savait. Si seulement la femme pouvait comprendre, peut-?tre qu’elle accepterait de se sacrifier. Apr?s tout, le sacrifice est une grande qualit? humaine. Elle serait contente de se rendre utile. Non, c’?tait un doux r?ve... Comme la derni?re fois, ce serait violent et d?sagr?able. — Quel est le probl?me ? demanda-t-elle. Sa voix avait quelque chose d’agr?able et de s?duisant. Il n’?tait pas s?r de savoir pourquoi. — Je ne sais pas, dit-il. Ma voiture ne d?marre plus. La femme passa la t?te par la fen?tre. Ses bouclettes rousses et ses taches de rousseur bordaient un sourire charmant. Elle n’avait pas l’air agac?. Descendrait-elle de la voiture ? Sans doute, comme les autres avant elle. Grand-p?re lui r?p?tait qu’il ?tait laid, mais il savait que certaines femmes lui trouvaient du charme. Il fit un geste en direction de son capot ouvert. — Je n’y connais rien en m?canique, dit-il. — Moi non plus. — A nous deux, on finira peut-?tre par r?gler le probl?me ? Vous voulez essayer ? — Bien s?r, mais ne vous attendez ? rien. Elle ouvrit la porti?re et descendit. Oui, tout se d?roulait comme pr?vu. — Jetons un coup d’?il, dit-il en se penchant sur le capot ouvert. Il finit par comprendre ce que sa voix avait de diff?rent. — Vous avez un accent charmant, dit-il. Vous ?tes ?cossaise ? — Non, irlandaise. Je suis arriv?e il y a deux mois. J’ai eu ma green card pour travailler. Il sourit. — Bienvenue en Am?rique ! — Merci, je suis tr?s contente. Il pointa du doigt la m?canique. — Attendez, dit-il, c’est quoi, ce machin ? Comme elle se penchait pour y regarder de plus pr?s, il fit tomber le capot sur elle, avant de le relever aussit?t. Il l’avait assomm?e. Son corps s’?tait effondr? sur la voiture. Il regarda de tous c?t?s. Personne en vue. Pas de t?moin. Il s’en frotta les mains. Il la ramassa entre ses bras. Son visage et sa robe ?taient couverts de graisse. Elle ?tait l?g?re comme une plume. Il la chargea ? l’arri?re de sa voiture. Elle allait lui ?tre tr?s utile. * Quand Meara reprit conscience, un brouhaha assourdissant la fit sursauter. Un gong, ou des cloches, des carillons, des chants d’oiseaux… Quelque chose de bruyant et d’hostile. Elle ouvrit les yeux, mais elle ne put rien distinguer. Sa t?te lui faisait mal. O? suis-je ? A Dublin ? Non, elle ?tait partie il y a deux mois. Elle avait d?j? commenc? ? travailler dans le Delaware. Elle finit par se rappeler du type avec sa voiture. Quelque chose lui ?tait arriv?. Quelque chose de terrible. Mais quel ?tait ce bruit ? On la portait comme un enfant. La voix de l’homme lui parlait : — Ne t’inqui?te pas. Nous sommes arriv?s ? temps. Ses yeux s’ajust?rent ? l’obscurit?. Elle ?tait entour?e d’horloges de diff?rentes tailles, formes et styles. De grandes comtoises, des coucous, des automates… Et m?me des petits r?veils dispos?s sur des ?tag?res. Elles sonnent l’heure, comprit-elle. Elle fut incapable de compter le nombre de coups. Elle leva la t?te vers l’homme qui la portait. Il baissa les yeux vers elle. Oui, c’?tait lui. L’homme qui lui avait demand? de l’aider. Elle avait ?t? stupide de s’arr?ter. Elle ?tait tomb?e dans son pi?ge. Qu’allait-il faire d’elle ? Le bruit des horloges s’arr?ta. Ses yeux se ferm?rent. Elle n’arrivait plus ? les garder ouverts. Je dois rester ?veill?e, pensa-t-elle. Elle entendit un bruit m?tallique, puis sentit qu’on la posait sur un sol froid et dur. Ensuite, des bruits de pas. Une porte qui s’ouvre et se referme. Les horloges tiquaient. Des voix de femmes se firent entendre : — Elle est vivante. — Dommage pour elle. Les voix ?taient rauques et parlaient bas. Meara parvint ? ouvrir les yeux. Elle ?tait allong?e sur du b?ton gris. Trois formes humaines ?taient avec elle. Du moins avaient-elles l’air encore humain. On aurait dit trois adolescentes, aux visages ?maci?s. Presque des squelettes. L’une d’elle ?tait ? peine consciente et dodelinait de la t?te. ?a lui rappela les photos de prisonniers de camps de concentration. Etaient-elles vraiment vivantes ? Oui, sans doute. Meara les avait entendues parler. — On est o? ? demanda-t-elle. — Bienvenue en enfer, souffla l’une d’elles. CHAPITRE UN Riley Paige ne vit pas le coup venir, mais ses r?flexes la sauv?rent. Le temps parut ralentir. Elle ?vita le poing qui voulait la frapper au ventre. Un crochet du gauche fila vers sa m?choire. Elle fit un pas de c?t?. Enfin, ses gants de boxe amortirent le dernier coup. Cela avait dur? moins de deux secondes. — Bien, dit Rudy. Riley sourit. Rudy ?tait pr?t ? esquiver sa contre-attaque. Elle feinta plusieurs fois, souple sur les genoux. — Inutile de se d?p?cher, dit Rudy. R?fl?chis bien. C’est une partie d’?checs. Sa remarque l’aga?a. Il n’y allait pas ? fond. Pourquoi ? C’?tait peut-?tre mieux ainsi. C’?tait la premi?re fois qu’elle montait sur le ring contre un v?ritable adversaire. Elle avait jusque l? test? ses combinaisons contre un sac de frappe. Elle d?butait. Mieux valait y aller doucement. C’?tait une id?e de Mike Nevins. Ce psychiatre, qui travaillait avec le FBI, ?tait un bon ami de Riley. Il l’avait aid?e ? traverser des moments difficiles. Elle lui avait confi? qu’elle avait du mal ? g?rer son agressivit?. Elle perdait facilement son sang-froid. — Essaye la boxe, avait dit Mike. C’est un bon moyen d’?vacuer la pression. Mike avait raison. C’?tait agr?able de combattre un v?ritable adversaire, de prendre des coups au corps, plut?t que des coups ? l’?me. Et c’?tait agr?able de combattre sans ?tre r?ellement en danger. ?a lui permettait ?galement de sortir des locaux du FBI. Elle passait trop de temps l?-bas. Non, elle n’avait pas r?agi assez vite. Rudy pr?parait une nouvelle attaque. Elle le voyait dans ses yeux. Elle choisit mentalement sa prochaine combinaison. Direct du gauche, contr? par un crochet qui effleura son casque. Puis, direct du droit. Elle ne trouva que son gant. Elle conclut sa combinaison par un crochet du gauche, qu’il ?vita adroitement. — Bien, dit encore Rudy. Non, ce n’?tait pas bien. Elle ne l’avait pas touch? une seule fois. Lui, il l’avait effleur?e, alors qu’il ?tait en d?fense. ?a commen?ait ? l’agacer. Elle t?cha de se rappeler ce que lui avait dit Rudy d?s le d?but : « N’esp?re pas me toucher. Ce n’est pas comme ?a que ?a marche. Pas ? l’entra?nement, en tout cas. » Elle regardait ses gants, ? pr?sent. Il allait passer ? l’attaque. Ce fut alors qu’une image s’imposa dans son esprit. Les gants se chang?rent en flamme. Une seule flamme blanche. Celle d’un chalumeau au propane. Elle ?tait ? nouveau plong?e dans les t?n?bres, prisonni?re d’un tueur sadique nomm? Peterson. Il jouait avec elle et l’obligeait ? se tourner de tous c?t?s pour ?viter la flamme. Elle en avait marre d’?tre humili?e. Il ?tait temps de contre-attaquer. Quand la flamme plongea vers elle, elle se baissa et lan?a un f?roce direct qui ne trouva que le vide. La flamme l’?vita. Elle para le coup avec un crochet, qui ne trouva ?galement que le vide. Avant que Peterson n’ait eu le temps d’encha?ner, elle le frappa au menton avec un uppercut. — Eh ! s’?cria Rudy. Sa voix ramena Riley au moment pr?sent. Rudy ?tait au tapis. Comment est-il arriv? l? ? se demanda Riley. Elle comprit alors qu’elle l’avait frapp?. Fort. — Oh merde ! s’?cria-t-elle. Rudy, je suis d?sol?e ! Rudy ?tait hilare. — Mais non, dit-il, c’?tait super. Ils se repositionn?rent. Le reste de l’entra?nement se d?roula sans incident. Aucun d’eux ne toucha l’autre. Oui, Mike Nevins avait raison. C’?tait tout ce dont elle avait besoin. Serait-elle jamais capable de se d?barrasser de ces souvenirs ? Sans doute pas, pensa-t-elle. * Riley attaqua son steak avec enthousiasme. Le chef de Blaine’s Grill avait un tr?s bon menu mais, apr?s son entra?nement de boxe, elle n’avait envie que d’une bonne pi?ce de viande et d’une salade. Sa fille, April, et son amie, Crystal, avaient command? des hamburgers. Blaine Hildreth, le p?re de Crystal, ?tait en cuisine, mais il reviendrait d’une minute ? l’autre pour finir son mahi mahi. Riley balaya la salle du regard avec un profond sentiment de satisfaction. Elle s’?tait rendue compte qu’elle ne consacrait pas assez de temps aux loisirs, aux amis et ? la famille. Elle se laissait trop souvent submerger par l’horreur de son travail. Dans quelques jours, elle t?moignerait ? l’audience de lib?ration d’un tueur d’enfants qui voulait sortir plus t?t de prison. Elle devait s’assurer que ce ne serait pas le cas. Quelques semaines plus t?t, elle avait boucl? une affaire particuli?rement troublante ? Phoenix. Avec l’aide de son partenaire, Bill Jeffreys, elle avait arr?t? un tueur qui s’attaquait aux prostitu?es. Riley n’?tait toujours pas certaine d’avoir vraiment aid? ces femmes de la rue. Elle avait entraper?u un monde terrible, peupl? de femmes et de gamines exploit?es… Non, elle ne laisserait pas ses pens?es lui g?cher la soir?e. Elle se d?tendait peu ? peu. Manger aux restaurant avec un ami et deux ados lui rappelait ce que c’?tait qu’avoir une vie normale. Elle avait une jolie maison, dans un quartier sympathique. Blaine revint et s’assit ? nouveau. Riley ne put s’emp?cher de penser qu’il ?tait, d?cid?ment, tr?s attirant. Il perdait un peu ses cheveux, mais ?a lui donnait un air de maturit? tr?s agr?able. De plus, il ?tait mince et muscl?. — D?sol?, dit-il. Le restaurant tourne tr?s bien quand je ne suis pas l? mais, d?s que j’arrive, tout le monde a besoin de moi… — Je sais ce que c’est, dit Riley. Si je reste loin assez longtemps, le FBI finira peut-?tre par m’oublier. April intervint : — Aucune chance ! Ils vont bient?t t’appeler. Tu vas encore partir ? l’autre bout du pays. Riley soupira. — Un peu de d?tente, ?a ne me fait pourtant pas de mal… Blaine engloutit une bouch?e de mahi mahi. — Tu pourrais changer de carri?re ? demanda-t-il. Riley haussa les ?paules. — Et pour faire quoi ? J’ai ?t? agent toute ma vie. — Oh, je suis s?r que tu trouverais…, dit Blaine. Tu as de la ressource. Tu pourrais faire un travail moins dangereux. Il parut r?fl?chir. — Je t’imagine bien professeur, ajouta-t-il. Riley ?touffa un rire. — Moins dangereux, on a dit… — ?a d?pend o?, dit Blaine. A l’universit?, par exemple ? — Ouais, bonne id?e, Maman, intervint April. Tu serais pas oblig?e de voyager tout le temps. Et tu aiderais quand m?me des gens. Riley ne r?pondit pas. Enseigner ? l’universit? ne serait pas tr?s diff?rent de ce qu’elle avait fait pour les ?tudiants du FBI. ?a lui avait plu. ?a lui avait donn? le temps de recharger les batteries. Mais professeur ? temps plein ? Pourrait-elle vraiment passer ses journ?es dans un b?timent, sans r?elle activit? ? Elle piqua un champignon avec sa fourchette. Voil? ce que je deviendrais, pensa-t-elle. — Et d?tective priv? ? proposa Blaine. — Non, je ne pense pas, dit Riley. Les secrets inavouables des couples qui divorcent, non merci. — Ce n’est la seule fonction des d?tectives priv?s. Et les fraudes ? l’assurance ? Par exemple, j’ai un cuisinier qui touche une assurance invalidit?. Il dit qu’il a mal au dos. Je suis s?r que ce n’est pas vrai, mais je ne peux pas le prouver. Tu pourrais commencer par lui. Riley ?clata de rire. Bien s?r, Blaine plaisantait. — Ou vous pourriez chercher des personnes disparues, ajouta Crystal. Ou des animaux disparus. Riley ?clata de rire une nouvelle fois. — Ah, je serais certaine d’aider l’humanit? ! April se d?tourna de la conversation. Riley vit qu’elle ?tait en train d’envoyer des textos en gloussant. Crystal se pencha par-dessus la table et expliqua ? voix basse : — April a un nouveau copain. Puis elle articula sans prononcer les mots : — Je l’aime pas. Riley s’aga?a : April ?tait en train d’ignorer tout le monde ? table. — Arr?te ?a, je te prie. C’est malpoli. — Pourquoi c’est malpoli ? r?pliqua April. — On en a d?j? parl?, dit Riley. April l’ignora et se remit ? taper. — Range ?a, s’il te plait. — J’arrive, Maman. Riley retint un grognement d’impatience. Elle savait que « j’arrive » signifiait surtout « jamais » chez les ados. Ce fut alors que son propre t?l?phone vibra. Elle se morig?na de ne pas l’avoir mis en silencieux. C’?tait un message de son partenaire, Bill. Elle songea ? l’ignorer, mais elle ne pouvait pas faire ?a. Alors qu’elle faisait appara?tre le message sur son ?cran, April lui d?cocha un sourire moqueur. Tout en grognant int?rieurement, Riley lut le message de Bill : Meredith a une nouvelle affaire. Il veut nous parler. L’agent sp?cial charg? d’enqu?te Brent Meredith ?tait le chef de Riley et de Bill. Riley lui devait beaucoup. Il ?tait toujours tr?s juste avec elle. Il l’avait m?me sortie du p?trin plus d’une fois. ?a ne changeait rien : Riley ne le laisserait pas la d?raciner une nouvelle fois. Je ne peux pas voyager en ce moment, ?crit-elle. Bill r?pondit : C’est dans les environs. Riley secoua la t?te. ?a n’allait pas ?tre facile. Je te recontacte. Pas de r?ponse. Riley rangea son t?l?phone dans son sac. — Je croyais que c’?tait malpoli, marmonna April. Elle ?tait toujours sur son t?l?phone. — Moi, j’ai fini, lui signala Riley. April l’ignora. Le t?l?phone de Riley vibra ? nouveau. Elle fit la grimace. Cette fois, c’?tait un message de Meredith. Soyez ? l’UAC demain ? 9h. Riley se creusait la t?te pour trouver une excuse, quand un autre texto arriva : C’est un ordre. CHAPITRE DEUX L’humeur de Riley s’assombrit imm?diatement quand les deux photos apparurent sur l’?cran, dans la salle de conf?rence. D’un c?t?, une jeune fille aux yeux brillants et au sourire ravageur. De l’autre, son cadavre, terriblement ?maci?, les bras dispos?s de fa?on ?trange. Depuis qu’on lui avait ordonn? de venir, Riley savait ? quoi s’attendre. Sam Flores, le technicien fut? aux lunettes cercl?es de noir, faisait d?filer les images devant les quatre agents. — Il s’agit de Metta Lunoe, dix-sept ans, expliqua-t-il. Sa famille vit ? Collierville, dans le New Jersey. Ses parents ont signal? sa disparition en mars. Une fugue, apparemment. Il fit appara?tre une grande carte du Delaware. — Son corps a ?t? retrouv? dans un champ, pr?s de Mowbray, dans le Delaware, le seize mai. Elle est morte d’un traumatisme cr?nien. Flores fit d?filer de nouvelles images : d’un c?t?, une fille vivante et, de l’autre, son cadavre, dispos? de la m?me mani?re. — L?, c’est Valerie Bruner, dix-sept ans ?galement, une fugueuse de Norbury, dans l’?tat de Virginie. Elle a disparu en avril. Flores montra l’emplacement du cadavre sur la carte. — Elle a ?t? retrouv?e morte sur une route de terre, non loin de Redditch, dans le Delaware, le douze juin. M?me mode op?ratoire. A l’?poque, nous avions confi? l’enqu?te ? l’agent Jeffreys. Riley sursauta. Bill avait travaill? sur une affaire sans elle ? Ah oui. En juin, elle avait ?t? hospitalis?e, apr?s son s?jour dans la cage de Peterson. Bill lui avait souvent rendu visite. Il n’avait jamais parl? de cette affaire. Elle se tourna vers lui. — Pourquoi tu ne m’as rien dit ? Bill avait la mine sombre. — Ce n’est pas le bon moment, r?pondit-il. Tu avais des probl?mes. — Tu as fait ?quipe avec qui ? — L’agent Remsen. Riley connaissait ce nom. Mais Bruce Remsen avait ?t? mut? avant son retour au FBI. Au bout d’un moment, Bill avoua : — Je n’ai pas trouv?. Riley connaissait cette expression. Apr?s des ann?es d’amiti? et de travail en ?quipe, elle comprenait Bill mieux que quiconque. Il ?tait tr?s d??u de lui-m?me. Flores fit appara?tre les photos des autopsies. Les corps ?taient si ab?m?s qu’ils ne paraissaient pas r?els. Les dos portaient des traces de coups, certaines cicatris?es, d’autres plus fra?ches. Riley en eut la naus?e, ce que la surprit. Depuis quand avait-elle envie de vomir devant des photos de cadavres ? Flores dit : — Elles ont ?t? affam?es avant d’?tre tu?es. Elles ont ?t? battues, sans doute pendant une longue p?riode. Leurs corps ont ensuite ?t? d?plac?s sur les lieux de leurs d?couvertes. Nous ne savons pas o? elles ont ?t? tu?es. En t?chant d’ignorer sa naus?e, Riley compara en pens?e cette affaire avec celles qu’elle avait r?solues avec Bill quelques mois plus t?t. Le « tueur de poup?es » abandonnait ses victimes o? elles seraient facilement d?couvertes, nues, dans des positions grotesques. Le « tueur aux cha?nes » suspendait ses victimes au-dessus du sol. Flores fit appara?tre la photo d’une jeune femme – une rouquine au visage jovial. A c?t?, l’image d’une Toyota vide. — Cette voiture appartient ? une immigr?e irlandaise de vingt-quatre ans r?pondant au nom de Meara Keagan, expliqua Flores. Sa disparition nous a ?t? signal?e hier matin. Sa voiture a ?t? abandonn?e devant un immeuble de Westree, dans le Delaware. Elle travaillait comme bonne et nounou pour une famille. Ce fut au tour de l’agent Brent Meredith de prendre la parole. C’?tait un afro-am?ricain intimidant au visage anguleux. — Elle a quitt? son service ? onze heures, avant-hier, dit Meredith. La voiture a ?t? retrouv?e le lendemain matin. L’agent sp?cial charg? d’enqu?te Carl Walder se pencha en avant. C’?tait le sup?rieur de Brent Meredith – un homme aux cheveux cuivr?s et au visage poupin constell? de taches de rousseur. Riley ne l’aimait pas. Elle ne le trouvait pas comp?tent. Et puis, il l’avait vir?e, une fois. — Qu’est-ce qui nous dit que sa disparition est li?e aux meurtres pr?c?dents ? demanda Walder. Meara Keagan est plus ?g?e. Lucy Vargas intervint. C’?tait une jeune agente brillante, aux cheveux noirs, aux yeux noirs et ? la peau mate. — ?a se voit sur la carte. Keagan a disparu ? peu pr?s dans la zone o? les deux autres corps ont ?t? retrouv?s. C’est peut-?tre une co?ncidence, mais c’est peu probable. Pas sur une p?riode de cinq mois. Malgr? sa naus?e, Riley vit avec satisfaction Walder grimacer. Sans le vouloir, Lucy l’avait mouch?. Riley esp?rait seulement qu’elle n’en ferait pas les frais plus tard. Walder ?tait du genre mesquin. — C’est exact, Agent Vargas, dit Meredith. Nous pensons que les deux jeunes filles ont ?t? enlev?es quand elles faisaient du stop. Sans doute le long de l’autoroute qui traverse la r?gion. Lucy demanda : — Ce n’est pas interdit de faire du stop dans le Delaware ? Bien s?r, c’est difficile d’?tre partout. — Vous avez raison, dit Meredith. Et ce n’est pas l’autoroute principale. Il y a s?rement des auto-stoppeurs. Apparemment, le tueur le sait. Un des corps a ?t? retrouv? pas loin de la route et l’autre ? dix miles. Keagan a ?t? enlev?e ? soixante miles, au nord. Il a chang? de m?thode. Mais s’il suit le m?me mode op?ratoire, il va l’affamer. Ensuite, il va lui briser le cou et laisser son corps quelque part. — ?a n’arrivera pas, dit Bill d’une voix serr?e. — Agents Paige et Jeffreys, il faut s’y mettre tout de suite. Il leur tendit un dossier de photos et de rapports ?crits. — Agent Paige, voil? tout ce dont vous aurez besoin pour rattraper votre retard. Riley tendit la main, mais elle fut prise soudain d’un spasme d’anxi?t?. Qu’est-ce qui se passe ? Sa t?te lui tournait. Des images floues prenaient forme dans son esprit. Peterson ? Non, c’?tait diff?rent. Quelque chose de nouveau. Riley bondit de sa chaise et s’enfuit de la salle de conf?rence. Elle se pr?cipita dans son bureau. Des visages. Des femmes et des jeunes filles. Mitzi, Koreen et Tantre – des jeunes escorts dont les habits soign?s camouflaient la d?gradation. Justine, une pute vieillissante pench?e au-dessus de son verre, fatigu?e et am?re, pr?te ? mourir d’une mort violente. Chrissy, emprisonn?e dans un bordel par son mari qui la battait. Et, pire que tout, Trinda, une gamine de quinze ans qui vivait d?j? le cauchemar de l’exploitation sexuelle et qui n’imaginait pas une autre vie. Riley s’effondra sur sa chaise. Voil? pourquoi elle avait eu la naus?e. Les images avaient ?t? le d?clencheur d’un probl?me plus enfoui. Elles avaient ramen? ? la surface l’affaire de Phoenix. Elle avait peut-?tre arr?t? le tueur, mais elle n’avait pas rendu service aux femmes qu’elle avait rencontr?es. Tout un monde d’exploitation qu’elle avait abandonn?. Ce monde la hantait. C’?tait peut-?tre pire que son stress post-traumatique. Apr?s tout, elle pouvait passer ses nerfs sur un sac de frappe. Mais comment se d?barrasser de son sentiment d’impuissance ? Pouvait-elle travailler sur une nouvelle affaire ? La voix de Bill retentit ? la porte. — Riley. Elle leva les yeux. Il avait l’air triste. Il lui amenait le dossier. — J’ai besoin de toi, dit Bill. C’est personnel pour moi. ?a me rend fou de n’avoir pas pu r?soudre l’enqu?te. Je n’arr?te pas de penser que mon divorce a rendu les choses difficiles. J’ai rencontr? la famille de Valerie Bruner. Ce sont des gens bien, mais j’ai perdu le contact parce que… Je les ai laiss?s tomber. Il faut que j’arrange les choses. Il d?posa le dossier sur le bureau de Riley. — Jette un coup d’?il, je te prie. Il s’en alla. Elle fixa du regard le dossier, ind?cise. Non, ce n’?tait pas son genre. Elle passa en revue tout ce qui s’?tait pass? ? Phoenix. Elle avait tout de m?me sauv? une fille. Jilly. Du moins, elle avait essay?. Elle sortit son t?l?phone et composa le num?ro du centre d’h?bergement. Une voix famili?re lui r?pondit. — Brenda Fitch ? l’appareil. Riley fut soulag?e. Elle avait rencontr? Brenda pendant son s?jour en Arizona. — Bonjour, Brenda. C’est Riley. J’appelle pour prendre des nouvelles de Jilly. Jilly ?tait une gamine de treize ans, au corps maigre et ? la peau noire, que Riley avait sauv?e des r?seaux de prostitution. Elle n’avait pas de famille, ? part un p?re violent. Riley l’appelait de temps en temps pour prendre de ses nouvelles. Brenda poussa un soupir. — C’est bien que vous l’appeliez, dit-elle. J’aimerais bien que plus de gens s’inqui?tent de son sort. Jilly est toujours avec nous. Le c?ur de Riley se serra. Elle avait esp?r? que Jilly aurait trouv? une famille d’accueil. Ce n’?tait pas encore pour aujourd’hui. — La derni?re fois, vous pensiez que vous seriez oblig?e de la renvoyer chez son p?re, dit Riley. — Oh non, on s’est arrang? avec la justice. Il n’a plus le droit de la voir. Riley poussa un soupir de soulagement. — Jilly parle de vous tout le temps, dit Brenda. Vous voulez lui parler ? — Oui, s’il vous plait. Brenda la mit en attente. Soudain, Riley se demanda si c’?tait une bonne id?e. Quand elle parlait ? Jilly, elle ne pouvait s’emp?cher de se sentir coupable. Mais pourquoi ? Apr?s tout, elle l’avait arrach?e ? la prostitution ? Oui, mais pour faire quoi ? Quelle vie Jilly pouvait-elle esp?rer ? La voix de Jilly retentit. — Salut, Agent Paige. — Combien de fois t’ai-je demand? de m’appeler Riley ? — Pardon… Salut, Riley. Riley ?touffa un rire. — Salut, toi-m?me. Comment vas-tu ? — Oui, ?a va. Un silence. Une adolescente comme tout le monde, pensa Riley. Il ?tait toujours difficile de pousser Jilly ? parler. — Alors, qu’est-ce que tu fais ? demanda Riley. — Je viens de me lever, dit Jilly un peu groggy. On va manger le petit d?j’. Riley se rappela soudain du d?calage horaire. — Je n’aurais pas d? appeler si t?t, dit-elle. J’oublie tout le temps qu’il y a trois heures de diff?rence. — Non, c’est sympa ! Riley l’entendit b?iller. — Alors, tu vas ? l’?cole aujourd’hui ? demanda Riley. — Ouais, on a le droit de quitter la taule pour y aller. C’?tait la blague habituelle de Jilly. Elle disait « la taule » pour parler du centre d’h?bergement, comme si c’?tait une prison. Riley ne trouvait pas ?a tr?s dr?le. — Bon, je vais te laisser manger et te pr?parer. — Non, attendez ! Un deuxi?me silence. Riley entendit Jilly ?touffer un sanglot. — Personne ne veut de moi, Riley, dit Jilly. Maintenant, les larmes coulaient librement. — Les familles d’accueil ne veulent pas de moi, ? cause de mon pass?. Riley s’?trangla. Son pass? ? pensa-t-elle. Putain, une fille de treize ans a un pass? ? Qu’est-ce qui ne tourne pas rond chez ces gens ? — Je suis d?sol?e, dit Riley. Jilly se mit ? bafouiller : — Je me disais… Ben, vous voyez… Riley, c’est comme si, vous, vous ?tiez la seule ? s’int?resser ? moi. Les yeux de Riley se mirent ? piquer. Elle ne r?pondit pas. — Est-ce que je pourrais pas venir vivre avec vous ? Je ferais pas d’histoire. Vous avez une fille, hein ? Ce serait comme ma s?ur. On s’entendrait bien. Vous me manquez. Riley lutta pour reprendre la parole. — Je ne pense pas que ce soit possible, Jilly. — Pourquoi pas ? La question frappa Riley comme une balle de revolver. — C’est juste… pas possible. Jilly pleurait. — D’accord, dit Jilly. Je dois aller manger. Salut. — Salut, dit Riley. Je t’appellerai bient?t. Jilly raccrocha. Riley s’?croula sur son bureau, en larmes. La question de Jilly r?sonna dans sa t?te. « Pourquoi pas ? » Il y a avait beaucoup de raisons. Riley avait d?j? du mal avec April. Son travail ?tait trop contraignant. Et ?tait-elle seulement pr?par?e ? g?rer l’?tat psychologique de Jilly ? Bien s?r que non. Riley essuya ses larmes et se redressa. ?a ne servait ? rien de pleurer. Il fallait retourner au travail. Des filles ?taient en danger. Elles avaient besoin d’elle. Riley ramassa le dossier et l’ouvrit. Il ?tait temps de retourner dans l’ar?ne. CHAPITRE TROIS Assis sur le porche de sa maison, Scratch regardait les enfants aller et venir dans leurs costumes de Halloween. Il avait toujours aim? cette p?riode de l’ann?e. Aujourd’hui, la f?te lui laissait un go?t amer. Combien de ces enfants seront vivants dans quelques semaines ? se demanda-t-il. Il soupira. Probablement aucun. La date approchait et personne n’?coutait ses messages. La balancelle sur laquelle il ?tait assis craquait. Une pluie ti?de tombait. Scratch esp?ra que les enfants ne prendraient pas froid. Il avait un gros sac de bonbons sur les genoux. Il commen?ait ? ?tre tard. Bient?t, les enfants rentreraient chez eux. Grand-p?re n’en finissait pas de se plaindre dans la t?te de Scratch, m?me s’il ?tait mort depuis des ann?es. Scratch ?tait peut-?tre adulte, mais ?a ne l’emp?chait pas de penser, encore et encore, au vieillard. — Regarde celui-l?, avec une cape et un masque en plastique, disait-il. T’appelles ?a un costume ? Scratch aurait pr?f?r? qu’il se taise. Ils allaient encore se disputer. — Il est d?guis? en Dark Vador, Grand-p?re. — Je m’en fiche bien ! C’est un costume de supermarch?. Quand je t’emmenais faire du porte ? porte pour Halloween, on fabriquait ton costume. Scratch s’en souvenait. Une fois, pour l’habiller en momie, Grand-p?re l’avait enroul? dans des draps d?chir?s. Pour un costume de chevalier, il lui avait bricol? une armure avec du carton et du papier d’alu, puis il lui avait donn? un balai en guise de lance. Grand-p?re ?tait tr?s cr?atif. Pourtant, ce n’?taient pas de bons souvenirs. Grand-p?re passait son temps ? r?ler en fabriquant ces costumes. Et quand Scratch rentrait… L’espace d’un instant, il se remit dans la peau de ce petit gar?on. Grand-p?re avait toujours raison. Scratch ne savait pas pourquoi, mais ?a n’avait pas d’importance. Grand-p?re avait raison et il avait tort. C’?tait comme ?a. Scratch avait ?t? soulag? d’atteindre l’?ge adulte. Maintenant, il restait sur le porche, pour distribuer des bonbons aux enfants. Il ?tait content pour eux. Au moins, ils avaient une enfance heureuse. Trois gamins surgirent. Un gar?on ?tait habill? en Spiderman, une fille en Catwoman. Ils devaient avoir neuf ans. Le troisi?me costume fit sourire Scratch. La petite fille d’environ sept ?tait d?guis?e en abeille. — Farce ou bonbon ! s’?cri?rent-ils. Scratch ?touffa un rire et fouilla dans son sac de bonbons. Il les distribua aux enfants qui s’en all?rent. — Arr?te de leur filer des bonbons ! grogna Grand-p?re. Pourquoi tu encourages encore ces petits cons ? Scratch d?fiait les ordres de son Grand-p?re depuis deux heures d?j?. Il serait oblig? de payer plus tard. Grand-p?re marmonnait toujours. — N’oublie pas : nous avons du travail ? faire demain soir. Scratch ne r?pondit pas. Il se contenta d’?couter la balancelle craquer. Non, il n’oublierait pas ce qu’il avait ? faire. C’?tait un travail d?testable. Mais il fallait que ?a se fasse. * Libby Clark suivait son fr?re et sa cousine dans les bois, derri?re chez elle. Elle n’avait pas envie de les accompagner. Elle aurait pr?f?r? ?tre dans son lit. Son fr?re, Gary, menait le groupe, arm? d’une lampe ?lectrique. Il avait l’air bizarre dans son costume de Spiderman. Sa cousine le suivait, dans son costume de Catwoman. Libby trottinait derri?re eux. — Allez, vous deux, les encourageait Gary. Il se faufila entre deux buissons. Denise fit de m?me. Mais le costume de Libby ?tait trop rembourr?. Elle s’accrocha dans les branchages. ?a lui fit encore plus peur. Si son costume d’abeille ?tait ab?m?, Maman se mettrait tr?s en col?re. Libby se d?gagea vivement et les rattrapa. — Je veux rentrer, souffla-t-elle. — Ben, vas-y, fit Gary. Non, Libby avait trop peur de rentrer toute seule. Elle ?tait all?e beaucoup trop loin. — On devrait peut-?tre rentrer, dit Denise. Libby a la trouille. Gary s’arr?ta et se retourna vers elles. Libby ne voyait pas son visage, ? cause du masque. — Qu’est-ce que t’as, Denise ? T’as la trouille, toi aussi ? Denise ?clata d’un rire nerveux. — Non, dit-elle. Libby comprit qu’elle mentait. — Allez, venez, poursuivit Gary. Le petit groupe se remit en marche. Le sol est mou et glissant. Libby avait des mauvaises herbes jusqu’aux genoux. Au moins, il ne pleuvait plus. La lune se montrait entre les nuages. Il faisait de plus en plus froid et Libby ?tait toute mouill?e. ?a la faisait frissonner. Elle avait vraiment tr?s peur. Enfin, les buissons s’ouvrirent sur une clairi?re. Il y avait du brouillard. Gary s’arr?ta. — C’est l?, dit-il. Regardez. C’est tout carr?, comme s’il devait y avoir une maison. Mais y a pas de maison. Y a rien. M?me les arbres ne poussent pas. Y a que des mauvaises herbes. C’est parce que c’est hant?. Y a des fant?mes. Libby pensa tr?s fort ? ce que disait Papa : « Les fant?mes, ?a n’existe pas. » Mais ?a n’emp?chait pas ses genoux de s’entrechoquer. Elle allait se faire pipi dessus. Maman ne serait pas contente. — Et ?a, c’est quoi ? demanda Denise. Elle montra du doigt des formes sur le sol. On aurait dit des tuyaux recouverts de feuillage. — Je sais pas, dit Gary. ?a ressemble aux trucs de sous-marins, pour voir ce qui se passe ? la surface. Peut-?tre que les fant?mes s’en servent pour nous regarder. Va voir, Denise. Denise poussa un rire effray?. — Non, toi, vas-y ! — C’est bon, j’y vais. Gary s’avan?a d’un pas prudent dans la clairi?re et s’approcha. Il s’arr?ta ? quelques pas, puis il se retourna vers sa cousine et sa s?ur. — Je sais pas ce que c’est, dit-il. Denise ?clata de rire. — Tu regardes pas d’assez pr?s ! — Mais si ! — Mais non ! T’es trop loin. — Mais si, je suis assez pr?s. T’as qu’? y aller, si t’es si maligne. Denise ne r?pondit pas. Elle finit par s’avancer ? son tour. Elle s’approcha un tout petit peu plus pr?s que Gary, puis fit demi-tour. — Moi non plus, je sais pas, dit-elle. — C’est ton tour, Libby, dit Gary. La peur de Libby lui remontait dans la gorge. — Non, elle est trop petite, protesta Denise. Gary poussa Libby dans le dos. Elle se retrouva dans la clairi?re. Elle essaya de faire demi-tour, mais Gary l’en emp?cha. — Non, non, dit-il. Denise et moi, on est all?s. T’y vas aussi. Libby avala sa salive. Elle se retourna vers les formes ?tranges, au milieu de la clairi?re. Elle avait l’impression que ces trucs la regardaient. Elle pensa ? nouveau ? ce que disait Papa. « Les fant?mes, ?a n’existe pas. » Papa ne mentirait pas sur un sujet aussi important. Alors pourquoi avait-elle peur ? Et puis, Gary l’avait ?nerv?e. Elle ?tait plus en col?re qu’effray?e. Je vais lui faire voir, pensa-t-elle. Sur des jambes flageolantes, elle s’avan?a courageusement vers le truc m?tallique. Elle s’approcha. Le plus pr?s possible. Plus pr?s que Gary ou Denise. Elle en ?tait tr?s fi?re, mais elle ne savait toujours pas ce que c’?tait que ce truc. Elle tendit la main pour le toucher. Ses doigts ?cart?rent les feuilles, en esp?rant qu’elle ne se ferait pas d?vorer la main. Puis elle effleura le m?tal froid. C’est quoi ? se demanda-t-elle. Un bruit sortait de ce tuyau. Elle approcha son oreille. C’?tait un bruit tr?s faible, mais ce n’?tait pas son imagination. C’?tait r?el. On aurait dit une femme qui pleurait. Libby s’?carta vivement. L’espace de quelques secondes, la terreur la p?trifia sur place. C’?tait comme quand elle ?tait tomb?e d’un arbre, une fois, sur le dos, et qu’elle en avait eu le souffle coup?. Elle devait s’en aller, mais elle restait fig?e comme une statue. Non, elle allait ordonner ? son corps de s’en aller. Tourne-toi et cours, pensa-t-elle. Elle en fut incapable pendant de longues secondes. Enfin, ses jambes se mirent ? courir toutes seules. Elle se pr?cipita dans les bois, sans s’arr?ter, effray?e ? l’id?e que quelque chose la poursuive et l’attrape par-derri?re. Quand elle arriva enfin ? l’or?e de la for?t, elle reprit son souffle. — Qu’est-ce qui se passe ? s’exclama Denise. — Un fant?me ! hoqueta Libby. J’ai entendu un fant?me. Elle n’attendit pas de r?ponse. Elle se remit ? courir aussi vite que possible. Sa cousine et son fr?re s’?lanc?rent derri?re elle. — Eh, Libby, attends nous ! cria Gary. Ah non, pas question ! Libby ne s’arr?terait qu’? la maison. CHAPITRE QUATRE Riley frappa ? la porte d’April. Il ?tait midi et grand temps pour sa fille de se lever. Elle n’eut pas la r?ponse qu’elle esp?rait : — Qu’est-ce que tu veux ? grogna April. — Tu vas dormir toute la journ?e ? — C’est bon, je suis lev?e. Je descends dans une minute. Riley redescendit les escaliers en soupirant. Si seulement Gabriela ?tait l? ! Mais elle avait toujours un cong? le dimanche. Riley se laissa tomber sur le canap?. April ?tait tr?s distante, ces derniers jours. Riley ne savait pas comment faire pour briser la glace. Elle avait presque ?t? soulag?e de voir sa fille partir faire la f?te pour Halloween la nuit derni?re. Riley ne s’?tait pas inqui?t?e : la f?te avait eu lieu ? quelques p?t?s de maisons… Et puis, April n’?tait toujours pas rentr?e ? une heure du matin. Alors que Riley se demandait si elle devait appeler la police, sa fille avait fini par revenir. Elle ?tait mont?e dans sa chambre sans dire un mot. Elle n’avait pas l’air beaucoup plus pr?te ? communiquer ce matin. Heureusement, Riley ?tait ? la maison pour la surveiller. Elle n’avait pas encore accept? son nouveau dossier. Bill ne cessait de lui envoyer des messages. Il ?tait parti en reconnaissance avec Lucy Vargas pour enqu?ter sur la disparition de Meara Keagan. Ils avaient interrog? ses employeurs et ses voisins, mais n’avaient trouv? aucune piste. Lucy prenait en charge les recherches. Elle faisait distribuer des prospectus avec une photo de Meara. Pendant ce temps, Bill attendait avec impatience que Riley prenne sa d?cision. Mais elle n’?tait pas oblig?e de d?cider tout de suite. Tout le FBI savait qu’elle ne serait de toute fa?on pas disponible demain. L’un des premiers tueurs qu’elle avait arr?t?s avait r?clam? une audience. Elle ne pouvait pas rater ?a. April descendit les escaliers, toute habill?e. Elle se pr?cipita dans la cuisine sans accorder un seul regard ? sa m?re, qui la suivit. — On mange quoi ? demanda April en ouvrant le frigo. — Je peux te pr?parer un petit d?jeuner, dit Riley. — C’est bon, je vais me d?brouiller. April sortit un morceau de fromage et referma le frigo. Elle s’en coupa un morceau et se versa une tasse de caf?, qu’elle allongea de sucre et de cr?me. Puis, elle s’assit ? table. Riley la rejoignit. — C’?tait comment, la f?te ? — C’?tait bien. — Tu es rentr?e tr?s tard. — Mais non… Riley d?cida de ne pas la contredire. Apr?s tout, une heure du matin, ce n’?tait peut-?tre pas si tard aux yeux des ados. — Crystal m’a dit que tu avais un nouveau copain ? — Ouais, r?pondit April en sirotant son caf?. — Comment il s’appelle ? — Joel. Au bout d’un court silence, Riley demanda : — Il a quel ?ge ? — Je sais pas. Une boule d’anxi?t? se referma sur la gorge de Riley. — Il a quel ?ge ? r?p?ta-t-elle. — Quinze ans, d’accord ? Comme moi. Non, April mentait. — J’aimerais bien le rencontrer. April leva les yeux au ciel. — Mais Maman, t’as grandi o? ? Dans les ann?es cinquante ou quoi ? Riley eut l’impression de prendre un coup. — Je ne trouve pas ?a bizarre, dit-elle. Dis-lui de passer. Tu me le pr?senteras. April reposa son caf? si brutalement qu’elle en renversa une partie sur la table. — Mais pourquoi t’essayes tout le temps de contr?ler ma vie ? — Je n’essaye pas de contr?ler ta vie, je veux juste rencontrer ton copain. Pendant quelques minutes, April se contenta de fixer son caf? du regard. Puis elle se leva brusquement de table et partit en trombe. — April ! Riley la suivit ? travers la maison. April ramassa son sac ? l’entr?e. — O? tu vas ? demanda Riley. April ne r?pondit pas. Elle ouvrit la porte et la fit claquer derri?re elle. Riley resta bouche b?e quelques secondes. April allait forc?ment revenir pour s’excuser. Elle attendit une minute enti?re, avant d’ouvrir la porte et de jeter un coup d’?il dans la rue. Aucun signe d’April. L’incident laissa un go?t amer dans la bouche de Riley. Comment les choses en ?taient-elles arriv?es l? ? Bien s?r, elles avaient v?cu des moments difficiles, toutes les deux, mais, depuis leur d?m?nagement, April ?tait heureuse. Elle avait sympathis? avec la voisine, Crystal. Quand l’?cole avait commenc? en septembre, tout allait bien. Et, deux mois plus tard, April retombait dans ses travers d’adolescente rebelle et boudeuse. Fallait-il y voir des effets du syndrome post-traumatique ? April avait d?j? fait une attaque de panique, mais elle avait consult? un bon th?rapeute… Toujours ? la porte, Riley sortit son t?l?phone et lui envoya un texto : Reviens tout de suite. Puis elle attendit. April ne r?pondit pas. Avait-elle laiss? son t?l?phone ? la maison ? Non, impossible. April avait pris son sac. Elle n’allait nulle part sans t?l?phone. April l’ignorait-elle ? Riley eut soudain une assez bonne id?e de l’endroit o? April avait pu aller. Elle referma la porte derri?re elle et se dirigea vers la maison des voisins, o? vivaient Crystal et Blaine. Tout en fixant du regard son t?l?phone, elle sonna. Quand Blaine ouvrit la porte, il lui adressa un grand sourire. — Eh bien, dit-il, quelle belle surprise ! Qu’est-ce qui t’am?ne ? Riley se dandina nerveusement. — Je me demandais… April est l? ? Avec Crystal ? — Non, r?pondit-il. Crystal n’est pas l? non plus, d’ailleurs. Elle est au caf?. Tu sais, pas loin d’ici. Blaine fron?a les sourcils. — Qu’est-ce qu’il y a ? Un probl?me ? — On s’est disput?es, grommela Riley. Elle est partie comme une furie. J’esp?rais qu’elle serait l?. Elle ignore mon texto. — Entre, dit Blaine. Riley le suivit dans son salon. Ils s’assirent sur le canap?. — Je ne comprends pas ce qu’elle a, dit Riley. Je ne sais pas ce qui se passe. Blaine lui adressa un sourire entendu. — Je sais ce que c’est. Son aveu surprit Riley. — Vraiment ? demanda-t-elle. On dirait que vous vous entendez ? merveille, Crystal et toi. — La plupart du temps, oui. Depuis que c’est une ado, c’est un peu plus rock ‘n roll. Blaine laissa passer un court silence, avant de poursuivre : — Ne dis rien. C’est ? propos de son nouveau copain. — Visiblement, dit Riley. Elle ne veut rien me dire. Et elle refuse de me le pr?senter. Blaine secoua la t?te. — Elles sont toutes les deux ? cet ?ge-l?, dit-il. C’est comme si c’?tait une question de vie ou de mort, d’avoir un copain. Crystal n’en a pas, ce qui me convient tr?s bien, mais pas elle. Elle est presque d?sesp?r?e. — J’?tais sans doute pareille au m?me ?ge, avoua Riley. Blaine ?touffa un rire. — Crois-moi, quand j’avais quinze ans, je ne pensais qu’aux filles. Tu veux du caf? ? — Oui, merci. Noir, s’il te plait. Blaine disparut dans la cuisine. Riley en profita pour jeter un coup d’?il dans le salon. Tout ?tait d?cor? avec go?t. Blaine ramena deux tasses. Riley but une gorg?e de son caf?. Il ?tait d?licieux. — Je ne savais pas ce que je faisais quand j’ai eu un enfant, dit-elle. J’?tais sans doute un peu jeune. — Tu avais quel ?ge ? — Vingt-quatre. Blaine ?clata de rire. — J’?tais encore plus jeune. Je me suis mari? ? vingt-et-un ans. Je suis tomb? amoureux d’une fille super belle, Phoebe. Super sexy. Bien s?r, je n’avais peut-?tre pas remarqu? qu’elle ?tait bipolaire et qu’elle buvait beaucoup. Riley tendit l’oreille. Elle savait que Blaine avait divorc?, mais c’?tait tout. Visiblement, ils avaient tous les deux fait des erreurs de jeunesse. Ils s’?taient laiss?s berner par une attraction physique. — Ton mariage a dur? combien de temps ? demanda Riley. — Neuf ans et c’est trop long. J’aurais d? demander le divorce bien plus t?t. Je me disais que je pourrais aider Phoebe. C’?tait stupide de ma part. Crystal est n?e quand Phoebe avait vingt-et-un an. Elle ?tait encore ?tudiante en ?cole de cuisine. On ?tait pauvres et immatures. Ensuite, elle a accouch? d’un b?b? mort-n?. Elle ne s’en est jamais remise. Elle est devenue alcoolique. Et violente. Le regard de Blaine se voila. Riley comprit qu’il n’avait pas envie de tout dire. — Quand April est n?e, j’?tais en formation au FBI, dit-elle. Ryan voulait que j’avorte, mais pas moi. Il voulait absolument r?ussir sa carri?re d’avocat. On a tous les deux r?ussi, mais on n’avait rien en commun. On n’a pas construit notre mariage. Riley se tut sous le regard compatissant de Blaine. C’?tait agr?able d’en parler ? un autre adulte. Il ?tait presque impossible d’?tre mal ? l’aise en pr?sence de Blaine. Elle avait l’impression qu’elle pouvait tout lui dire. — Blaine, je ne sais plus quoi faire, dit-elle. Je suis demand?e sur une affaire tr?s importante, mais ?a ne va pas ? la maison. Je crois que je ne passe pas assez de temps avec April. Blaine sourit. — Ah oui. Le vieux dilemme. La famille ou le travail. Je connais. Crois-moi, tenir un restaurant, ?a prend du temps. C’est dur pour Crystal. Riley croisa le regard bleu et tranquille de Blaine. — Comment tu fais ? Il haussa les ?paules. — Tu sais… On n’a jamais assez de temps pour tout, mais ce n’est pas la peine de s’en vouloir. Abandonner ta carri?re n’est pas la solution. Phoebe a essay? de rester ? la maison. C’est aussi ?a qui l’a rendue folle. Tu dois trouver le moyen de te pardonner. Riley sourit. C’?tait une excellente id?e. Se pardonner de n’avoir pas le temps. ?a semblait presque possible. Elle tendit la main et toucha la main de Blaine. Il la prit dans la sienne. Une d?licieuse tension s’installa entre eux. L’espace d’une seconde, Riley eut envie de rester chez lui, comme leurs deux enfants ?taient partis. Peut-?tre qu’elle… Cette pens?e lui avait ? peine travers? l’esprit que Riley s’?loigna de lui. Elle n’?tait pas pr?te. Elle d?gagea sa main. — Merci, dit-elle. Je vais rentrer. Si ?a se trouve, April est d?j? ? la maison. Elle le salua et sortit de chez lui. Son t?l?phone vibra. C’?tait un message d’April. Je viens d’avoir ton texto. D?sol?e d’?tre partie comme ?a. Je suis au caf?. Je reviens vite. Riley soupira. Que r?pondre ? ?a ? Mieux valait ne pas r?pondre du tout. Elle aurait une conversation s?rieuse avec April. Riley rentrait chez elle quand son t?l?phone vibra ? nouveau. Cette fois, c’?tait Ryan qui l’appelait. Elle n’avait pas du tout envie de lui parler, mais elle savait qu’il laisserait des messages jusqu’? ce qu’elle r?ponde. Elle d?crocha. — Qu’est-ce que tu veux, Ryan ? — Je te d?range ? Riley aurait voulu lui dire qu’il la d?rageait toujours, mais elle se retint. — Non, c’est bon, dit-elle. — Je pourrais passer vous voir, toi et April ? dit-il. On pourrait discuter. Riley ravala un grognement. — Je ne pr?f?re pas. — Tu as dit que je ne d?rangeais pas. Riley ne r?pondit pas. C’?tait Ryan tout crach?. Il essayait de la manipuler. — Comment va April ? Riley faillit s’?touffer. Ryan essayait seulement de faire la conversation. — Oh, comme c’est gentil de demander…, r?pondit-elle d’un ton sarcastique. Elle va bien. C’?tait un mensonge, mais elle n’avait pas envie de se confier ? Ryan. — Ecoute, Riley…, reprit Ryan d’une voix tra?nante. J’ai fait beaucoup d’erreurs. Sans d?conner…, pensa Riley. Il poursuivit : — ?a ne va pas fort, ces derniers temps. Riley ne r?pondit pas. — Je voulais juste prendre de vos nouvelles. Riley n’en crut pas ses oreilles. — On va bien. Pourquoi tu demandes ? Tu t’es fait plaquer, Ryan ? Ou ?a ne se passe pas bien, au boulot ? — Tu es dure avec moi, Riley. Oh non, elle se trouvait m?me plut?t gentille… Elle comprenait sa situation. Ryan se sentait seul. La fille qu’il avait rencontr?e apr?s le divorce avait d? partir. Ryan ne supportait pas la solitude. Riley et April ?taient toujours son dernier recours pour ne pas ?tre seul. Si elle le laissait revenir, il resterait le temps de trouver une nouvelle copine. Elle r?pondit : — Rabiboche-toi avec ta derni?re copine. Ou celle d’avant. Je ne sais m?me pas combien tu en as eu depuis le divorce. Combien, Ryan ? Ryan poussa un hoquet ? l’autre bout du fil. Riley avait vu juste. — Ryan, la v?rit?, c’est que tu me d?ranges, oui. C’?tait vrai, apr?s tout. Elle venait de rendre visite ? un homme qui lui plaisait. Pourquoi devait-il tout g?cher ? — Quand est-ce que je peux te rappeler, alors ? — Je ne sais pas, dit Riley. Je te tiens au courant. Salut. Elle raccrocha. Elle s’assit sur le canap? et prit de longues inspirations pour se calmer. Puis elle envoya un texto ? April. Reviens tout de suite. Elle n’attendit que quelques secondes avant de recevoir une r?ponse. OK. J’arrive. D?sol?e, Maman. Riley soupira. La crise semblait ?tre pass?e. Mais quelque chose n’allait pas. Qu’est-ce qui se passait ? CHAPITRE CINQ Dans sa tani?re faiblement ?clair?e, Scratch allait et venait d’une horloge ? l’autre, pour tout pr?parer. Il ?tait bient?t minuit. — R?pare celle avec le cheval ! hurla Grand-p?re. Elle est en retard ! — J’y vais. Scratch savait qu’il serait puni quoi qu’il arrive, mais ce serait pire si tout n’?tait pas en place. Il remit ? l’heure la pendule avec les fleurs, qui avait cinq minutes de retard, puis il ouvrit une vieille comtoise et poussa tout doucement l’aiguille des minutes. Il v?rifia que la grosse horloge avec les bois de cerf ?tait ? l’heure. Ce n’?tait pas toujours le cas mais, pour une fois, oui. Enfin, il remit ? l’heure celle avec les chevaux. Heureusement : elle avait sept minutes de retard. — Va falloir que ?a aille, maugr?a Grand-p?re. Tu sais quoi faire ensuite. Scratch ob?it et s’empara du fouet. C’?tait ce qu’on appelait un chat ? neuf queues. Grand-p?re s’en servait pour le punir quand il ?tait plus jeune. Il s’aventura jusqu’au fond de sa tani?re, derri?re la barri?re. Ces quatre captives se trouvaient l?, sur des matelas. Elles avaient une armoire pour faire leurs besoins. ?a puait, mais Scratch s’?tait habitu? ? l’odeur. L’Irlandaise le regardait avec attention. A la di?te depuis plus longtemps, les autres ?taient tr?s faibles. Deux d’entre elles ne faisaient plus que g?mir. La quatri?me ?tait allong?e ? c?t? de la barri?re. Elle ne faisait plus de bruit. Scratch ouvrit la cage. L’Irlandaise se jeta en avant pour essayer de s’?chapper. Scratch la gifla d’un coup de fouet. Elle serra les dents et recula. Il la fouetta, encore et encore. Il savait d’exp?rience combien ?a faisait mal. A minuit, toutes les horloges se mirent ? sonner l’heure. Scratch savait ce qu’il lui restait ? faire. Il s’accroupit ? c?t? de la plus faible, celle qui paraissait ? peine vivante. Elle lui adressa un ?trange regard. C’?tait la seule qui ?tait rest?e l? assez longtemps pour savoir ce qu’il allait faire. C’?tait comme si elle ?tait pr?te. Comme si elle ?tait soulag?e. Scratch n’avait pas le choix. Il s’agenouilla pr?s d’elle et lui brisa le cou. Comme la vie quittait son corps, Scratch leva les yeux vers la vieille horloge de l’autre c?t? de la barri?re. La Mort allait et venait devant les aiguilles, v?tue de sa robe noire. On apercevait ? peine son cr?ne souriant sous sa capuche. Elle poursuivait des chevaliers, des rois, des reines et des paysans, sans distinction. C’?tait l’horloge pr?f?r?e de Scratch. Le bruit mourut peu ? peu. Bient?t, on n’entendit plus que le tic-tac des aiguilles et les sanglots des autres filles. Scratch chargea le cadavre sur son ?paule. Elle ne pesait rien du tout. Il ouvrit la cage, sortit et referma derri?re lui. L’heure ?tait venue. CHAPITRE SIX Une belle com?die, pensa Riley. La voix de Larry Mullins tremblait. Alors qu’il terminait son allocution aux familles des victimes, il semblait au bord des larmes. — J’ai eu quinze ans pour y r?fl?chir, dit Mullins. Pas un jour ne passe sans que je regrette. Je ne peux pas revenir en arri?re. Je ne peux pas ramener Nathan Betts et Ian Harter ? la vie. Mais j’ai encore le temps de me racheter aux yeux de la soci?t?. Je vous supplie de me laisser une chance de le faire… Mullins s’assit. Son avocat lui tendit un mouchoir et il s’essuya les yeux, bien que Riley ne vit aucune larme. Les officiels ?chang?rent des murmures. Ce serait bient?t au tour de Riley de t?moigner. Elle d?visagea Mullins. Elle se rappelait bien de lui. Il n’avait pas beaucoup chang?. Quand elle l’avait arr?t?, elle l’avait trouv? propre sur lui et ?loquent. La prison l’avait endurci, mais il se cachait derri?re les sanglots. Il avait travaill? comme nounou. Il avait si peu vieilli ! Il avait ?t? arr?t? ? vingt-cinq ans, mais il avait toujours le m?me visage poupin. Les parents des victimes, eux, avaient vieilli, bris?s pr?matur?ment. Le c?ur de Riley se serra. Si seulement elle avait mieux g?r? cette affaire… Jake Crivaro, son premier partenaire, partageait ses regrets. C’?tait un des premiers dossiers de Riley. Jake l’avait bien instruite. Larry Mullins avait ?t? arr?t? pour le meurtre d’un petit gar?on dans un terrain de jeu. En investiguant, Riley et Jake avaient d?couvert qu’un autre enfant ?tait mort dans des circonstances similaires. Quand Riley avait arr?t? Mullins et lui avait lu ses droits avant de le menotter, il avait presque admis sa culpabilit? en lui adressant un sourire triomphal. « Bonne chance. », lui avait-il gliss?. En effet, la chance avait tourn? tr?s vite. Mullins avait ni? avec force. Malgr? tous les efforts de Riley et de Jake, les preuves ?taient dangereusement minces. Il avait ?t? impossible de d?terminer comment les enfants avaient ?t? ?touff?s. On n’avait d?couvert aucune arme du crime. Mullins admettait les avoir perdus de vue, mais pas de les avoir tu?s. Riley se souvenait encore de ce que lui avait dit le procureur. — Il va falloir jouer serr?. On ne peut pas prouver que Mullins ?tait le seul ? avoir acc?s aux gamins quand ils ont ?t? tu?s. ?a s’?tait termin? sur une n?gociation de peine. Riley d?testait les n?gociations de peine depuis ce jour. L’avocat de Mullins avait propos? un accord. Mullins plaiderait coupable, mais sans pr?m?ditation, et les sentences pour les deux meurtres d?fileraient en m?me temps. Un accord minable. Cela n’avait m?me pas de sens. Si Mullins avait bien tu? les deux enfants, comment aurait-il pu ?tre aussi n?gligent ? C’?tait contradictoire, mais le procureur n’avait pas eu le choix et il avait accept?. Mullins s’en ?tait tir? avec trente ans de prison et la possibilit? de sortir plus t?t pour bon comportement. Les familles avaient ?t? horrifi?es. Elles avaient accus? Riley et Jake de ne pas avoir fait leur travail. Jake avait rapidement pris sa retraire apr?s ?a. Il ?tait devenu amer. Riley avait promis aux parents des deux gar?ons qu’elle ferait tout pour garder Mullins derri?re les barreaux. Quelques jours plus t?t, les parents de Nathan Betts l’avaient appel?e pour lui rappeler sa promesse. Les murmures se turent. Le conseiller-auditeur Julie Simmons se tourna vers Riley. — L’agent sp?cial Riley Paige aimerait parler, dit-elle. Riley avala sa salive. Voil? le moment qu’elle pr?parait depuis quinze ans. Elle savait que tout le monde dans la salle connaissait le dossier, m?me s’il ?tait incomplet. Inutile de revenir dessus. Elle allait faire un discours plus personnel. Elle se leva et prit la parole. — C’est le « comportement exemplaire » de Larry Mullins qui lui vaut cette audience, je ne me trompe pas ? Elle ajouta avec une pointe d’ironie. — Monsieur Mullins, je vous f?licite. Mullins hocha la t?te, le visage d?nu? d’expression. Riley poursuivit. — « Comportement exemplaire », qu’est-ce que cela signifie, concr?tement ? Cela n’a rien ? voir avec ce qu’il a fait, mais plut?t avec ce qu’il n’a pas fait. Il n’a pas enfreint les r?gles de la prison. Il a surveill? son comportement. C’est tout. Elle fit une pause pour reprendre le contr?le de sa voix. — Sinc?rement, je ne suis pas surprise. En prison, il n’y a pas beaucoup d’enfants ? tuer. Des hoquets et des murmures se firent entendre. Le sourire de Mullins se crispa. — Excusez-moi, dit Riley. Je sais bien que Mullins n’a jamais admis qu’il avait pr?m?dit? les meurtres. Le procureur n’a pas choisi cette voie. Mais Mullins a bel et bien plaid? coupable. Il a tu? deux enfants. Il me parait impossible qu’il ait pu le faire sans avoir eu de mauvaises intentions. Elle se tut, le temps de choisir ses mots. Elle voulait pousser Mullins a montr? sa col?re. Bien s?r, Mullins savait qu’il n’avait pas le droit ? l’erreur. La meilleure strat?gie ? adopter, c’?tait de convaincre les membres de la commission de l’?normit? de ses crimes. — J’ai vu le corps de Ian Harter, quatre ans, le jour de sa mort. Il avait l’air de dormir les yeux ouverts. La vie avait effac? l’expression de son visage, mais pas celle de ses yeux. Il a v?cu ses derniers moments dans une terreur sans nom. La m?me chose est arriv?e ? Nathan Betts. Les deux m?res s’?taient mises ? pleurer. Riley n’avait pas le choix. Elle ?tait oblig?e de remuer les terribles souvenirs. — Nous ne devons pas oublier cette terreur, dit Riley. Et nous ne devons pas oublier que Mullins n’a montr? aucune ?motion lors de son proc?s. Pas un geste de remords. Ses remords sont apparus beaucoup, beaucoup plus tard… En admettant que ce ne soit pas une com?die. Riley prit une grande inspiration. — Combien d’ann?es a-t-il pris ? ces gar?ons, si on les additionne ? Combien d’ann?es de vie a-t-il vol?es ? Plus de cent, il me semble. Il a ?t? condamn? ? trente ans. Il n’est rest? que quinze ans en prison. Ce n’est pas suffisant. Il ne vivra jamais assez longtemps pour purger la peine qui devrait ?tre la sienne. Maintenant, la voix de Riley tremblait. Il fallait qu’elle se reprenne. Elle ne pouvait pas exploser de rage, ni ?clater en sanglots. — L’heure est-elle venue de pardonner Larry Mullins ? C’est aux familles des gar?ons de le dire. Mais le pardon n’est pas le sujet de cette audience. Le plus important, c’est le danger qu’il repr?sente. Nous ne pouvons pas mettre en danger des enfants. Quelques membres de la commission regardaient leurs montres. Riley paniqua. Ils avaient d?j? assist? ? deux audiences ce matin. Quatre autres suivraient. Ils s’impatientaient. Riley devait terminer. Elle les regarda droit dans les yeux, un ? un. — Mesdames et messieurs de la commission, je vous supplie de ne pas lui accorder sa lib?ration. Elle ajouta : — Quelqu’un veut peut-?tre ajouter quelque chose au nom du prisonnier. Riley s’assit. Elle ?tait satisfaite de sa conclusion. Elle savait pertinemment que personne ici ne parlerait en faveur de Mullins. Il n’avait aucun ami et il n’en m?ritait aucun. — Quelqu’un souhaite ajouter quelque chose ? demanda le conseiller-auditeur. — J’aimerais ajouter quelques mots, lan?a une voix du fond de la pi?ce. Riley sursauta. Elle connaissait cette voix. Elle se retourna brusquement. Oui, il ?tait l?, l’homme aux larges ?paules. Jake Crivaro. Riley n’aurait pas cru le voir aujourd’hui. Jake s’approcha et se pr?senta aux membres de la commission. Puis il prit la parole : — Je ne vous dirai qu’une chose : cet homme est un manipulateur de g?nie. Ne croyez pas un mot de ce qu’il dit. Il ment. Il n’a montr? aucun remords quand nous l’avons arr?t?. Ce qu’il vous sert, aujourd’hui, c’est une com?die. Jake se tourna vers Mullins. — Tu ne t’attendais pas ? me voir aujourd’hui ? lan?a-t-il d’une voix m?prisante. Je n’aurais rat? ?a pour rien au monde, esp?ce de connard tueur d’enfants. Le conseiller-auditeur donna du marteau. — De l’ordre, je vous prie ! — Oh, je suis navr?, dit Jake. Je ne voulais pas insulter votre prisonnier mod?le. Apr?s tout, il s’est repenti. C’est un connard tueur d’enfants repenti. Jake toisa Mullins. Riley comprit qu’il essayait de provoquer un coup de col?re, mais le prisonnier gardait son calme. — Monsieur Crivaro, retournez ? votre place, di le conseiller-auditeur. La commission va rendre sa d?cision. Les membres se rassembl?rent en ?changeant des murmures et des notes. Riley attendit. Donald et Melanie Betts sanglotaient. Darla Harter pleurait, mais son mari, Ross, lui tenait la main. Il regardait Riley. Son regard ?tait tranchant. Qu’avait-il pens? de son ?locution ? Pensait-il qu’elle s’?tait enfin rachet?e ? Il faisait chaud. Riley se mit ? transpirer. Son c?ur battait la chamade. Cela ne prit que quelques minutes. Un membre de la commission chuchota leur d?cision ? l’oreille du conseiller-auditeur. Elle se tourna vers le public et le prisonnier. — Lib?ration refus?e, dit-elle. Passons ? l’audience suivante. La brusquerie de cette femme fit sursauter Riley, comme si cette affaire n’?tait rien de plus qu’un ticket de parking. La commission ?tait en retard, bien s?r. Riley se leva. Les deux couples se pr?cipit?rent vers elle. Melanie Betts se jeta dans ses bras. — Oh merci, merci, merci…, bredouilla-t-elle. Les trois autres la remerci?rent entre leurs larmes. Jake se tenait ? l’?cart. D?s qu’elle quitta les parents, Riley le rejoignit. — Jake ! dit-elle. ?a fait longtemps. — Trop longtemps, dit-il en lui adressant un sourire de travers. Vous, les jeunes, vous ne donnez jamais de nouvelles… Riley soupira. Jake l’avait toujours trait?e comme sa fille. Il avait un peu raison : elle aurait d? rester en contact. — Alors, comment vas-tu ? — J’ai soixante-quinze ans. On m’a chang? les deux genoux et la hanche. Ma vue baisse. J’ai un appareil pour entendre et un pacemaker. Et tous mes amis sont morts, ? part toi. Qu’est-ce que tu dis de ?a ? Riley sourit. Il avait beaucoup vieilli, mais il n’?tait pas en si mauvais ?tat qu’il semblait le croire. Il pourrait revenir au FBI s’il en avait envie. — Je suis contente que tu aies pris la parole. — ?a te surprend ? dit Jake. Je parle au moins aussi bien que ce b?tard de Mullins. — Tu as vraiment aid?. Jake haussa les ?paules. — J’aurais bien aim? qu’il p?te les plombs devant la commission, mais il est plus malin que dans mes souvenirs. La prison lui aura appris au moins ?a. Mais bon, on a eu ce qu’on voulait. Il va rester derri?re les barreaux. Riley ne dit rien. Jake lui adressa un regard curieux. — Tu me caches quelque chose ? demanda-t-il. — Ce n’est pas si simple, dit Riley. Si Mullins continue de bien se comporter, il aura le droit de demander audience l’ann?e prochaine. Cette fois, on ne pourra rien y faire. — Merde…, dit Jake Il avait l’air presque aussi amer qu’? la fin du proc?s, tant d’ann?es auparavant. Riley savait ce qu’il ressentait. Il ?tait terrifiant d’imaginer Mullins dehors. Cette petite victoire ne valait pas grand-chose. — Bon, je dois y aller, dit Jake. Sympa de te voir… Riley regarda son vieux partenaire s’?loigner. Il n’avait pas envie de tra?ner ici, ? s’apitoyer sur son sort. Ce n’?tait pas son genre. Elle prit mentalement la d?cision de l’appeler plus souvent. Il fallait qu’elle positive. Les Betts et les Harter lui avaient enfin pardonn?. Riley n’?tait pas s?re de le m?riter. Pas plus que Larry Mullins. Ce fut alors que Larry Mullins passa devant elle, avec ses menottes. Il lui adressa un sourire machiav?lique, tout en articulant les mots : — A l’ann?e prochaine. CHAPITRE SEPT Au volant de sa voiture, Riley rentrait ? la maison, quand elle re?ut un appel de Bill. Elle mit son t?l?phone en mode haut-parleur. — Qu’est-ce qui se passe ? demanda-t-elle. — On a trouv? un autre corps, dit-il. Dans le Delaware. — Meara Keagan ? — Non. Elle n’a pas encore ?t? identifi?e. Elle est dans le m?me ?tat que les deux autres. Pire, peut-?tre. On pouvait en conclure plusieurs choses. Meara Keagan ?tait encore prisonni?re. Le tueur devait retenir plusieurs filles en m?me temps. Les meurtres allaient continuer. Combien ? Riley ne pouvait que deviner. Bill avait l’air agit? : — Riley, je p?te les plombs, dit-il. Je n’arrive plus ? r?fl?chir. Lucy est super, mais elle n’a pas d’exp?rience. Riley comprenait ce qu’il ressentait. En fait, c’?tait assez ironique. L’affaire Larry Mullins continuait de la hanter. Pendant ce temps-l?, dans le Delaware, Bill pensait que son ?chec avait co?t? la vie d’une femme. En voiture, ?a lui prendrait environ trois heures pour rejoindre Bill. — Tu as fini ? demanda Bill. Riley l’avait pr?venu qu’elle serait dans le Maryland pour l’audience. — Ouais, dit-elle. — Bien, dit Bill. J’envoie un h?lico te chercher. — Quoi ? s’?cria Riley. — Il y a un a?roport pas loin. Je t’envoie les coordonn?es GPS. Ils t’attendent d?j?. Quelqu’un va ramener ta voiture. Sans un mot de plus, Bill raccrocha. Riley conduisit en silence pendant un long moment. L’issue de l’audience l’avait soulag?e. Elle voulait maintenant rentrer ? la maison, pour retrouver sa fille ? la sortie de l’?cole. Elles ne s’?taient pas disput?es hier, mais April n’avait pas dit grand-chose. Ce matin, Riley ?tait partie avant de la voir. Mais on ne lui demandait visiblement pas son avis. Pr?te ou non, elle retournait sur le terrain. Il faudrait qu’elle parle ? April. Elle suivit les indications que Bill venait de lui envoyer. Apr?s tout, c’?tait mieux ainsi. Elle allait soigner son sentiment d’?chec en amenant un tueur devant la justice. La vraie justice. Il ?tait temps. * Riley fixait du regard la fille ?tendue sur le sol du kiosque ? musique. C’?tait une matin?e fra?che. Le kiosque se trouvait au milieu d’un belv?d?re, sur la place principale de la ville, dans un environnement plant? d’arbres. La victime ressemblait aux victimes pr?c?dentes. Elle gisait face contre terre. Elle ?tait si ?maci?e qu’elle avait l’air momifi?. Ses v?tements sales et d?chir?s semblaient anormalement larges. Elle avait des cicatrices, plus ou moins r?centes, t?moignant de coups de fouet. Elle devait avoir dix-sept ans, l’?ge des deux autres victimes. Ou peut-?tre pas… Apr?s tout, Meara Keagan avait vingt-quatre ans. Le tueur changeait peut-?tre son mode op?ratoire. Cette fille ?tait trop amaigrie pour savoir. Riley se tenait entre Bill et Lucy. — On dirait qu’elle a encore plus souffert que les deux autres, remarqua Bill. Il a d? la garder plus longtemps. La voix de Bill ?tait charg?e d’amertume. Riley lui adressa un regard en coin. Elle savait ce qui lui passait par la t?te. Au moment o? il avait enqu?t?, la fille devait ?tre d?j? prisonni?re. Il se sentait responsable de sa mort. Personne n’?tait responsable, mais Riley ne savait que dire pour le r?conforter. Elle tra?nait, elle aussi, des ?checs qui lui laissaient un go?t amer dans la bouche. Riley balaya du regard les environs. On n’apercevait que le palais de justice – un grand b?timent en briques avec une horloge. Redditch ?tait une charmante petite bourgade ? l’architecture coloniale. Riley n’?tait pas surprise que le tueur ait pu d?poser le corps ici, au milieu de la nuit, sans que personne s’en aper?oive. Tout le monde devait dormir, ? ces heures-l?. Bien s?r, le tueur n’avait laiss? aucune empreinte sur les trottoirs en b?ton. La police avait d?limit? la zone et gardait les badauds ? l’?cart. Cependant, la presse locale commen?ait ? s’agglutiner. ?a l’inqui?ta. La presse n’avait pas encore fait le rapprochement entre les deux pr?c?dents meurtres et la disparition de Meara Keagan, mais ils finiraient par comprendre. Les gens sauraient. Et l’enqu?te deviendrait difficile. Le chef de la police de Redditch, Aaron Pomeroy, se tenait non loin. — Quand et comment le corps a-t-il ?t? d?couvert ? demanda Riley. — Un balayeur nettoie le matin. C’est lui qui l’a trouv?e. Pomeroy avait l’air tr?s affect?. C’?tait un homme vieillissant et en surpoids. M?me dans une petite ville comme ?a, un policier de cet ?ge avait d? enqu?ter sur un meurtre ou deux, mais jamais rien d’aussi troublant. L’agent Lucy Vargas s’approcha du corps. — Notre tueur a beaucoup d’assurance, dit-elle. — Pourquoi ? — Il d?pose les corps ? la vue de tous, dit-elle. Metta Lunoe a ?t? retrouv?e dans un champ. Valerie Bruner au bord d’une route. Seulement la moiti? des tueurs en s?rie d?placent les corps apr?s leur mort. Et ceux que le font les cachent ou les jettent. Celui-l? doit ?tre du genre arrogant. Lucy avait bien retenu ses le?ons…. Cependant, Riley n’?tait pas certaine de la suivre dans son raisonnement. Le tueur n’essayait pas de flamber. Il avait un objectif. Riley n’arrivait pas ? mettre le doigt dessus. Ce devait ?tre li? ? la mani?re dont le corps ?tait dispos?. D’une mani?re ? la fois maladroite et d?lib?r?e. Le bras gauche de la fille ?tait lev? au-dessus de sa t?te, tout droit. Son bras droit, ?galement tr?s raide, descendait le long de son corps. M?me la t?te, dont la nuque avait ?t? bris?e, avait ?t? align?e avec le reste du corps. Lucy avait une tablette ? la main. — Lucy, tu peux me montrer les photos des deux autres corps ? Elle les fit appara?tre sur son ?cran. Riley et Bill se rapproch?rent. Bill pointa le doigt vers l’image. — Celui de Metta Lunoe est positionn? exactement pareil. Celui de Valerie Bruner, c’est le contraire : c’est le bras droit qui est lev? et le bras gauche qui descend le long de son corps. Riley s’approcha et souleva le poignet du cadavre pour essayer de le bouger. Le corps ?tait d?j? trop raide. Il faudrait envoyer le corps ? la m?decine l?gale pour savoir ? quelle heure elle ?tait morte. Sans doute neuf heures plus t?t, d’apr?s l’estimation de Riley. Comme les autres, elle avait ?t? d?plac?e peu de temps apr?s sa mort. Une id?e commen?ait ? chatouiller Riley… Le tueur avait dispos? le corps avec beaucoup de soin. Il l’avait port? jusque l?, en montant une vol?e de marches, puis l’avait soigneusement arrang? sur le sol. La position n’avait rien de logique. Le corps n’?tait pas parall?le aux murs du belv?d?re. Il n’?tait pas orient? en direction de l’entr?e du kiosque ou du palais de justice. On aurait dit que c’?tait le hasard. Non, il ne fait rien par hasard, pensa-t-elle. Le tueur essayait de dire quelque chose, mais quoi ? — Que penses-tu de la position ? demanda-t-elle ? Lucy. — Je ne sais pas. Ce n’est pas courant chez les tueurs en s?rie. C’est bizarre. Elle d?bute, se rappela Riley. Lucy n’avait peut-?tre pas remarqu? que les affaires « bizarres » ?taient justement la sp?cialit? de Riley et du FBI en g?n?ral. Pour des agents exp?riment?s comme Riley et Bill, ce qui ?tait bizarre ?tait devenu la routine. — Lucy, fais voir la carte. Lucy fit appara?tre la carte sur son ?cran. Les points indiquaient les endroits o? avaient ?t? d?couverts les deux corps pr?c?dents. — Ce n’est pas loin, dit Lucy. C’est dans un mouchoir de poche de moins de dix miles. Oui, Lucy avait raison. En revanche, Meara Keagan avait disparu ? quelques miles au nord, ? Westree. — Quelqu’un voit quelque chose ? demanda Riley ? Lucy et ? Bill. — Pas vraiment, dit Lucy. Le corps de Metta Lunoe ?tait dans un champ, en bordure de Mowbray. Valerie Bruner ?tait le long de l’autoroute. Et maintenant, celle-ci, sur la place d’une petite ville. On dirait que le tueur cherche surtout des endroits qui n’ont rien en commun. Ce fut alors qu’un cri retentit parmi les badauds. — Je sais qui c’est ! Je sais qui l’a tu?e ! Riley, Bill et Lucy se retourn?rent. Un jeune homme gesticulait derri?re la rubalise de la police. — Je sais qui a fait le coup ! s’?cria-t-il encore. CHAPITRE HUIT Riley d?tailla du regard l’homme qui criait. Plusieurs personnes autour de lui hochaient la t?te et murmuraient, comme pour confirmer. — Je sais qui a fait ?a ! On le sait tous ! — Josh a raison, rench?rit une femme non loin de lui. C’est s?rement Dennis. — C’est un tar?, dit un autre. Une bombe ? retardement depuis le d?but. Bill et Lucy s’approch?rent, mais Riley resta ? sa place. Elle appela un policier. — Faites-le venir, dit-elle. Il ?tait important de le s?parer du groupe. Si tout le monde y allait de sa petite histoire, il serait difficile de d?m?ler le vrai du faux. Dans l’hypoth?se o? il y avait effectivement du vrai ? d?m?ler… Les journalistes s’agglutinaient d?j? autour de l’homme. Riley ne pouvait tout simplement pas l’interroger devant eux. Le policier leva la barri?re de rubalise et fit signe ? l’homme. Il continuait de hurler : — On sait tous ! On sait qui a fait ?a ! — Calmez-vous, dit Riley en le prenant par le bras pour l’?loigner de la foule. — Demandez ? n’importe qui, r?p?ta l’homme d’une voix agit?e. C’est un tar?. Tout le temps tout seul. Il fait peur aux filles. Il emmerde les femmes. Riley sortit son calepin, tout comme Bill. Son partenaire avait un regard particuli?rement concentr?, mais elle savait qu’il ne fallait pas s’emballer. Ils ne savaient encore rien. Et puis, l’homme ?tait si nerveux que Riley n’?tait pas certaine de faire confiance ? son jugement. Elle voulait entendre quelqu’un d’un peu plus neutre. — Quel est son nom complet ? demanda Riley. — Dennis Vaughn, dit l’homme. — Continue, souffla Riley ? Bill. Bill hocha la t?te, sans cesser de prendre des notes. Riley s’avan?a vers le belv?d?re, o? le chef de la police, Aaron Pomeroy, se tenait toujours pr?s du corps. — Chef Pomeroy, que pouvez-vous me dire sur Dennis Vaughn ? A l’expression qui traversa le visage du policier, Riley comprit que ce nom n’?tait que trop familier. — Qu’est-ce que vous voulez savoir ? — Vous pensez que c’est un suspect potentiel ? Pomeroy se gratta les cheveux. — Maintenant que vous le dites, peut-?tre. ?a vaut le coup de l’interroger. — Pourquoi cela ? — Eh bien, il nous cause des probl?mes depuis des ann?es. Exhibitionnisme, comportement obsc?ne, ce genre de trucs. Il y a quelques ann?es, il observait aux fen?tres. Il a pass? quelques temps dans le centre psychiatrique du Delaware. L’ann?e derni?re, il s’est pris de passion pour une pom-pom girl du lyc?e. Il lui ?crivait des lettres d’amour, il la suivait partout. La famille de la fille s’est d?brouill?e pour obtenir une injonction du tribunal, mais il l’a ignor?e. Du coup, il a fait six mois de prison. — Il a ?t? rel?ch? ? demanda-t-elle. — En f?vrier. Cette conversation devenait de plus en plus int?ressante. Dennis Vaughn ?tait sorti de prison juste avant les premiers meurtres. Etait-ce une co?ncidence ? — Les filles du coin n’arr?tent pas de se plaindre, dit Pomeroy. Apparemment, il prend des photos d’elles. Ce n’est pas un motif pour l’arr?ter. Pas encore, du moins. — Qu’avez-vous d’autre ? demanda Riley. Pomeroy haussa les ?paules. — C’est un glandeur, si je puis me permettre. Il a trente ans et il n’a jamais travaill?. Il survit gr?ce ? la famille – des tantes, des oncles, des grands-parents… Il est plut?t grincheux, ces derniers temps. Il en veut ? tout le monde en ville, parce qu’il a fait six mois de taule. Il n’arr?te pas de r?p?ter : « un de ces jours… ». — Un de ces jours… quoi ? demanda Riley. — Personne ne le sait. Les gens disent que c’est une bombe ? retardement. Ils ne savent pas ce qu’il a l’intention de faire. Mais il n’a jamais ?t? vraiment violent. Les pens?es de Riley d?filaient ? toute allure. Etait-ce une piste fiable ? Pendant ce temps, Bill et Lucy avaient termin? leur interrogatoire. Ils rejoignaient Riley et le chef de la police. Bill avait l’air anormalement confiant – un changement d’attitude brutal. — Dennis Vaughn, c’est notre homme, dit-il. Il correspond parfaitement au profil. Riley ne r?pondit pas. C’?tait vrai, mais elle pr?f?rait ne pas tirer de conclusions h?tives. De plus, la certitude dans la voix de Bill la mit mal ? l’aise. Depuis qu’elle ?tait arriv?e, le comportement de Bill ?tait instable. C’?tait une affaire tr?s personnelle : il culpabilisait de n’avoir pas su la r?soudre plus t?t. Mais son ?motion pourrait devenir un probl?me. Elle avait besoin de s’appuyer sur lui. Elle se tourna vers Pomeroy. — Vous pouvez nous dire o? le trouver ? — Bien s?r, dit Pomeroy en pointant le doigt. Remontez la rue principale jusqu’? Brattleboro. Tournez ? gauche. Sa maison est la troisi?me sur la droite. Riley se tourna vers Lucy : — Reste l? et attends l’?quipe des m?decins. Ils peuvent emporter le corps. On a assez de photos. Lucy hocha la t?te. Bill et Riley s’?loign?rent de la sc?ne de crime. Aussit?t, des journalistes s’approch?rent, avec cam?ras et micros. — Le FBI a-t-il un commentaire ? demanda l’un d’eux. — Pas encore, dit Riley. Elle se pencha pour passer en dessous de la rubalise, puis se faufila entre les badauds. Un autre journaliste hurla : — Ce meurtre a-t-il un rapport avec ceux de Metta Lunoe et de Valerie Bruner ? — Ou avec la disparition de Meara Keagan ? Riley se crispa. La rumeur n’allait pas tarder ? courir qu’un tueur en s?rie s?vissait dans le Delaware. — Pas de commentaire, dit-elle s?chement. Elle ajouta : — Si vous nous suivez, je vous fais arr?ter pour obstruction ? la justice. Les journalistes recul?rent. Riley et Bill s’?loign?rent. L’affaire attirerait bient?t des journalistes et des ?quipes de t?l? plus agressives et aux m?thodes douteuses. Ils allaient devoir g?rer l’attention m?diatique, en plus du reste. La maison de Dennis Vaughn n’?tait pas loin. Ils atteignirent Brattleboro et tourn?rent ? gauche. Sa maison ?tait en mauvais ?tat. Le toit penchait et avait ?t? endommag? par la gr?le. La peinture s’?caillait. L’herbe du jardin montait jusqu’aux genoux. Une vieille voiture ?tait gar?e dans l’all?e. Elle ?tait sans doute assez large pour transporter un corps. Bill et Riley frapp?rent ? la porte. — Vous voulez quoi ? lan?a une voix. — Vous ?tes Dennis Vaughn ? r?pondit Bill. — Oui, peut-?tre, pourquoi ? Riley dit : — Nous sommes du FBI. Nous aimerions vous parler. La porte s’ouvrit. Dennis Vaughn apparut de l’autre c?t? de la moustiquaire, qui ?tait toujours ferm?e. C’?tait un homme assez jeune, mais en surpoids et ? l’allure n?glig?e. Des poils se laissaient entrevoir sous son tee-shirt tach? de nourriture. — Qu’est-ce qu’il y a ? demanda Vaughn d’une voix agac?e. Vous allez m’arr?ter ? — Nous voulons seulement vous poser quelques questions, dit Riley en lui montrant son badge. On peut entrer ? — Pourquoi je vous ferais rentrer ? demanda Vaughn. — Pourquoi vous ne nous feriez pas entrer ? r?torqua Riley. Vous avez quelque chose ? cacher ? — On pourrait revenir avec un mandat, ajouta Bill. Vaughn secoua la t?te. Il ouvrit le verrou et laissa les deux agents rentrer. La maison ?tait dans un d?sordre inou?. Le papier peint pendait. Le plancher ?tait trou?, ?a et l?. Il y avait tr?s peu de mobilier, ? part une paire de chaises et un canap? ?ventr?. De la vaisselle sale tra?nait partout. ?a sentait mauvais. Riley remarqua imm?diatement les photographies punais?es sur les murs. Elles repr?sentaient toutes des femmes ou des filles, qui ne savaient visiblement pas qu’on les prenait en photo. Vaughn suivit le regard de Riley. — C’est un passe-temps, dit-il. C’est grave ? Riley ne r?pondit pas. Bill non plus. Il n’y avait sans doute rien d’ill?gal dans le fait de prendre des passantes en photo, mais Riley en eut des frissons. Vaughn s’assit sur une chaise paill?e qui craqua sous son poids. — Vous ?tes venus pour m’accuser de quelque chose, dit-il. Alors, allons-y. Riley s’assit en face de lui. Bill resta debout. — A votre avis, de quoi va-t-on vous accuser ? demanda-t-elle. C’?tait une astuce qui marchait bien. Parfois, il ?tait utile d’aborder le sujet indirectement et de laisser un suspect potentiel s’emm?ler les pinceaux avec sa propre histoire. Vaughn haussa les ?paules. — Un truc ou un autre, dit-il. Y a toujours quelque chose. Personne comprend rien. — Personne ne comprend quoi ? demanda Riley. — J’aime les filles, d’accord ? dit-il. Comme tous les mecs de mon ?ge. Pourquoi c’est mal ? Juste parce que c’est moi ? Il jeta un coup d’?il aux photos, comme dans l’espoir qu’elles le d?fendent. Riley attendit qu’il reprenne la parole. Elle esp?ra que Bill ferait de m?me, mais l’impatience de son partenaire ?tait palpable. — J’essaye d’?tre sympa avec les filles, dit-il. C’est de ma faute, si elles comprennent pas ? Il parlait d’une voix tra?nante. Riley comprit qu’il avait bu ou pris des substances. Peut-?tre qu’il avait un retard mental ou un probl?me neurologique. — Pourquoi pensez-vous que les gens vous traitent diff?remment ? demanda Riley d’un ton compatissant. — Qu’est-ce que j’en sais ? D’un filet de voix ? peine audible, il ajouta… — Un de ces jours… — Un de ces jours, quoi ? demanda Riley. Vaughn haussa les ?paules. — Rien. J’en sais rien. Mais un de ces jours… C’est tout ce que je dis. Il commen?ait ? dire n’importe quoi. C’?tait ? ce moment-l? qu’un suspect pouvait se trahir. Mais, avant que Vaughn n’ait eu le temps de reprendre la parole, Bill le toisa d’un air mena?ant : — Que savez-vous sur les meurtres de Metta Lunoe et de Valerie Bruner ? — Jamais entendu parler, dit Vaughn. Bill s’approcha tout pr?s et Riley s’inqui?ta. Elle aurait voulu lui dire d’arr?ter, mais elle ne pouvait pas interf?rer avec sa strat?gie. — Et Meara Keagan ? — Jamais entendu parler, non plus. Bill parlait plus fort. — O? ?tiez-vous jeudi soir ? — Je sais pas. — Vous voulez dire que vous n’?tiez pas chez vous ? Vaughn transpirait ? grosses gouttes. Il ouvrait de grands yeux paniqu?s. — Peut-?tre pas. Je fais pas attention. Parfois, je sors. — O? allez-vous ? — Je roule. Je quitte la ville. Je d?teste cette ville. Je voudrais vivre ailleurs. Bill cracha presque la question suivante : — Et o? ?tes-vous all? jeudi ? — Je sais pas. Je sais m?me pas si je suis sorti. — Vous mentez, s’?cria Bill. Vous ?tes all? ? Westree, je me trompe ? Vous avez rencontr? une gentille fille, l?-bas, je me trompe ? Riley bondit de sa chaise. Bill ?tait en train de perdre le contr?le. Elle devait l’arr?ter. — Bill, dit-elle doucement en l’attrapant par l’?paule. Bill repoussa sa main. Il poussa Vaughn. La chaise sur laquelle ce dernier ?tait assis cassa. Le suspect s’?tala. Bill l’attrapa par le col et le poussa ? travers la pi?ce, avant de le plaquer contre le mur. — Bill, arr?te ! cria Riley. Bill pouvait sortir son pistolet d’une seconde ? l’autre. — Prouve-le ! grogna Bill. Riley glissa un bras entre eux et repoussa Bill. Êîíåö îçíàêîìèòåëüíîãî ôðàãìåíòà. Òåêñò ïðåäîñòàâëåí ÎÎÎ «ËèòÐåñ». Ïðî÷èòàéòå ýòó êíèãó öåëèêîì, êóïèâ ïîëíóþ ëåãàëüíóþ âåðñèþ (https://www.litres.ru/pages/biblio_book/?art=43692591&lfrom=688855901) íà ËèòÐåñ. Áåçîïàñíî îïëàòèòü êíèãó ìîæíî áàíêîâñêîé êàðòîé Visa, MasterCard, Maestro, ñî ñ÷åòà ìîáèëüíîãî òåëåôîíà, ñ ïëàòåæíîãî òåðìèíàëà, â ñàëîíå ÌÒÑ èëè Ñâÿçíîé, ÷åðåç PayPal, WebMoney, ßíäåêñ.Äåíüãè, QIWI Êîøåëåê, áîíóñíûìè êàðòàìè èëè äðóãèì óäîáíûì Âàì ñïîñîáîì.
Íàø ëèòåðàòóðíûé æóðíàë Ëó÷øåå ìåñòî äëÿ ðàçìåùåíèÿ ñâîèõ ïðîèçâåäåíèé ìîëîäûìè àâòîðàìè, ïîýòàìè; äëÿ ðåàëèçàöèè ñâîèõ òâîð÷åñêèõ èäåé è äëÿ òîãî, ÷òîáû âàøè ïðîèçâåäåíèÿ ñòàëè ïîïóëÿðíûìè è ÷èòàåìûìè. Åñëè âû, íåèçâåñòíûé ñîâðåìåííûé ïîýò èëè çàèíòåðåñîâàííûé ÷èòàòåëü - Âàñ æä¸ò íàø ëèòåðàòóðíûé æóðíàë.